Exposome

L'exposome est un concept correspondant à la totalité des expositions à des facteurs environnementaux (c'est-à-dire non génétiques) que subit un organisme humain de sa conception à sa fin de vie en passant par le développement in utero, complétant l'effet du génome.

Énoncé et histoire du principe

La notion d'exposome a d'abord été proposé par le Dr Christopher Wild, épidémiologiste du cancer britannique, dans un article intitulé « Complementing the Genome with an “Exposome”: The Outstanding Challenge of Environmental Exposure Measurement in Molecular Epidemiology » (Compléter le génome avec un « exposome » : le défi exceptionnel de la mesure de l'exposition environnementale en épidémiologie moléculaire) paru en 2005 dans la revue Cancer epidemiology, biomarkers & prevention[1]. Il peut être subdivisé en sous-catégories (ex : exposome, domestique, urbain, professionnel...) ou concerner un produit toxique en particulier, notamment s'il peut être bioaccumulé (plomb par exemple en tant que facteur de saturnisme)[2]

Le concept de l'exposome et les manières de l'évaluer ont donné lieu à des discussions animées entre différents points de vue[3].

Il n'est pas encore possible de mesurer ou de modéliser l'exposome complet (et il évoluera dans le temps et l'espace avec l'apparition et la dispersion de nouveaux polluants ou la disparition de certains altéragènes), mais certains projets européens récents, tels que HELIX[4], EXPOsOMICS[5],[6] et HEALS[7] et l'initiative américaine HERCULES[8] ont commencé à l'étudier.

Enjeux

Les enjeux sont principalement environnementaux, de biomonitoring[9] et sanitaires (santé publique, toxicologie globale, oncologie[10], médecine du travail, gériatrie), écologiques (écoépidémiologie...) et de connaissance scientifique (« environnement chimique intérieur »).

De nombreux altéragènes biologiques, physiques (radiations) et/ou chimiques pénètrent les organismes, à partir de sources exogènes (air, eau, alimentation, médicaments, radiation), mais aussi à partir de processus endogènes (inflammation, peroxydation lipidique, stress oxydant, maladies et infections du corps ou de la flore intestinale, notamment sources d'endotoxines...). Les facteurs non-génétiques semblent contribuer pour environ 90% aux risques de maladies chroniques, et la grande majorité des expositions cumulées susceptibles d'initier des processus pathologiques n'ont pas été explorés. L'exposome inclut les phénomènes cumulatifs et les effets synergiques, ainsi que l'effet des faibles doses, dans le cas des perturbateurs endocriniens par exemple pour représenter avec plus de justesse la totalité des expositions reçues par un organisme au cours de sa vie, englobant toutes les sources de substances toxiques.

L'exposome est pour les scientifiques un cadre nouveau pour l'étude des causes environnementales des maladies chroniques et de maladies encore mal comprises et pour des traitements et soins médicaux plus adaptés à ces maladies. Cependant, Stephen M Rappaport (de l'École de santé publique de l'Université de Californie) insiste sur la nécessité de considérer avec attention les molécules biologiquement actives dans l'« environnement chimique interne » des organismes (de l'homme en santé humaine) pour bien définir les niveaux d'exposition totale, ce qui implique d'avoir une approche top-down basée sur la biosurveillance (analyse de sang, d'urine, biopsies...) sans se contenter d'une approche bottom-up (expositions calculées par déduction à partir d'échantillons d'air, d'eau, de la nourriture, etc.). Selon lui, les échantillons sanguins archivés durant les études prospectives de cohortes faites pour mesurer les effets de produits chimiques toxiques (dont par exemple les électrophiles réactifs, les métaux, les produits métaboliques, des leurres hormonaux, et les composés organiques persistants peuvent donc également être utilisés rétrospectivement.

L'étude de l'exposome devrait favoriser la découverte des principales voies et sources expositions responsables de maladies chroniques encore mal comprises, la science de l'exposition peut jouer un rôle majeur dans la découverte et l'atténuation de ces risques[11].

Reconnaissance

En France, la notion d'exposome a été introduite dans le PNSE 3, puis dans le projet de loi de modernisation du système de santé, étudié au Parlement en 2015. Le principe d'exposome apparaît dans le texte en deuxième lecture au Sénat[12], qui l'adopte le 6 octobre ; le texte doit dès lors passer en Commission mixte paritaire le 27 octobre[13].

Notes et références

  1. Wild 2005
  2. Mielke, H. W., Gonzales, C. R., Powell, E. T., & Mielke, P. W. (2017). exposome dynamics of soil lead and children's blood lead pre-and ten years post-Hurricane Katrina: Lead and other metals on public and private properties in the city of New Orleans, Louisiana, USA. Environmental research, 155, 208-218.
  3. Rappaport et Smith 2010
  4. Vrijheid et al. 2014
  5. Callaway 2012
  6. Vineis, P., Chadeau-Hyam, M., Gmuender, H., Gulliver, J., Herceg, Z., Kleinjans, J., ... & Probst-Hensch, N. (2017). The exposome in practice: design of the EXPOsOMICS project. International journal of hygiene and environmental health, 220(2), 142-151.
  7. HEALS 2015
  8. Hercules 2015
  9. Dennis, K. K., Marder, E., Balshaw, D. M., Cui, Y., Lynes, M. A., Patti, G. J., ... & Barr, D. B. (2017). Biomonitoring in the era of the exposome. Environmental health perspectives, 125(4), 502
  10. Herceg, Z., Ghantous, A., Wild, C. P., Sklias, A., Casati, L., Duthie, S. J., ... & Kondo, Y. (2018). Roadmap for investigating epigenome deregulation and environmental origins of cancer. International journal of cancer, 142(5), 874-882.
  11. Rappaport 2011
  12. Laperche 2015
  13. Laperche 2015

Annexes

Articles connexes

  • Envirome

Bibliographie

 : document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.

  • (en) E. Callaway, « Daily dose of toxics to be tracked », Nature, vol. 491, (lire en ligne)
  • (en) S.M. Rappaport et M.T. Smith, « Epidemiology. Environment and disease risks », Science, vol. 330, no 6003, , p. 460-461 = (DOI 10.1126/science.1192603)
  • (en) Stephen M. Rappaport, « Implications of the exposome for exposure science », Journal of Exposure Science and Environmental Epidemiology, no 21, , p. 5–9 (DOI 10.1038/jes.2010.50, lire en ligne) ; mis en ligne le 17 novembre 2010
  • (en) M. Vrijheid, R. Slama, O. Robinson, L. Chatzi, M. Coen et al., « The Human Early-Life Exposome (HELIX): Project Rationale and Design », Environ Health Perspect, (DOI 10.1289/ehp.1307204, lire en ligne)
  • (en) C.P. Wild, « Complementing the genome with an "exposome": the outstanding challenge of environmental exposure measurement in molecular epidemiology », Cancer epidemiology, biomarkers & prevention, vol. 14, no 8, , p. 1847–1850 (PMID 16103423, DOI 10.1158/1055-9965.EPI-05-0456)
  • Warth, B., Spangler, S., Fang, M., Johnson, C. H., Forsberg, E. M., Granados, A., ... & Montenegro-Burke, J. R. (2017). Exposome-scale investigations guided by global metabolomics, pathway analysis, and cognitive computing. Analytical chemistry, 89(21), 11505-11513.

Liens externes

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