Taharqa

Taharqa est un roi de Napata et un pharaon, de 690 à 665 av. notre ère. Il est le fils de Piânkhy et d'Abar, et le frère et successeur direct de Chabataka. Son nom d'Horus est Oaikhaou, son nom de roi Nefertemkhourê (Nefertoum protège Rê), et son nom de naissance Taharka, ou Taharqo, ou Taherouk (autres variantes infra, "dans la Bible"). Il est généralement représenté avec la calotte propre aux rois koushites, sur laquelle se dressent les deux uræus, insignes de la double royauté de la Nubie et de l'Égypte antique.

Taharqa

Détail d'une statuette en bronze du pharaon Taharqa - XXVe dynastie - Musée du Louvre.
Décès v. 665 av. notre ère
Période Basse époque
Dynastie XXVe dynastie
Fonction pharaon d'Égypte, et roi de Napata
Prédécesseur Chabataka
Dates de fonction v. 690 à 664 av. notre ère
Successeur Tanoutamon
Famille
Grand-père paternel Kachta
Grand-mère paternelle Pabatjma
Père Piânkhy
Mère Abar
Conjoint Takahatenamon
Enfant(s) Amenardis II (divine adoratrice d'Amon)
♂ Atlanarsa
Deuxième conjoint Naparaia, ou Naparayé
Troisième conjoint Tabekenamon
Quatrième conjoint Atakhebasken
Cinquième conjoint Asalka ?
Fratrie Chabataka
Chepenoupet II
♀ Naparayé
Takahatenamon
♂ Arty
♂ Har
♂ Khaliout
Sépulture
Type pyramide
Emplacement Nouri (N1)
Fouilles 1963
Objets ossements ;
restes d'un riche mobilier à son nom.

Règne

Valeureux militaire, il repousse, à l'âge de seize ans, les menaces assyriennes.

Portrait du pharaon Taharqa.
Ny Carlsberg Glyptotek

Dans la Bible, le Deuxième Livre des Rois, précisément, Taharqa ( / « Tirhaqa » / Tirhaka) est mentionné comme roi de K(o)ush, ou Éthiopie, et comme un allié, au moins objectif, du roi de Juda, Ézéchias (mort en -687), voire de son fils et successeur Manassé, contre l'avis des prophètes hébreux Isaïe et Ézéchiel, et bien sûr contre celui du roi d'Assyrie Sennachérib (ou Sanchérib) lui-même, qu'il entreprend d'ailleurs d'attaquer[1],[2].

La consolidation du pouvoir napatéen en Basse-Égypte aurait menacé, du point de vue assyrien, leurs possessions en Palestine, et aurait pu susciter des partis anti-assyriens jusque dans les ports phéniciens. En -673, une tentative d'invasion de l'Égypte a lieu. Le roi Assarhaddon, fils et successeur de Sennachérib supra, après le parricide assassinat de ce dernier, en -681, par d'autres de ses frères fugitifs[3], prend la ville stratégique d'Ashkelon, aux portes du delta du Nil. Taharqa dépêche une armée, qui repousse les Assyriens. Cette victoire apporte presque trois ans de paix au pays. Les Assyriens battus doivent se retirer en Palestine. En effet, l'année suivante, Assarhaddon doit faire face à une rébellion au nord de son empire.

En -671, l'Assyrie lance à nouveau toute son armée contre l'Égypte. Assarhaddon s’empare à nouveau du delta, de Memphis, et assied son autorité jusqu'à Assouan. Taharqa doit alors se réfugier dans le sud, d'où il garde apparemment le contrôle sur la Haute-Égypte. Les Assyriens, ayant besoin d'appuis locaux pour maintenir leur pouvoir sur ce nouveau territoire, favorisent des roitelets du nord, au premier rang desquels se trouvent les princes saïtes. Par cette opération militaire rapide, les Assyriens ne cherchent pas à créer une nouvelle province de leur empire, qui aurait été trop lointaine, mais, afin de rendre les royaumes égyptiens à leur impuissance[4], Assarhaddon place un roi, Tefnakht, originaire de Saïs, à Memphis, Nékao Ier, et le fils de celui-ci, Psammétique (futur pharaon à son tour, de la XXVIe dynastie), à la tête de l'ancien royaume d'Athribis. La position de Nékao Ier est fragile, à côté des autres roitelets du delta, et de Taharqa lui-même.

L'ennemi parti, Taharqa se lance dans une reconquête. La ville de Saïs est prise, Nékao se soumet. Assarhaddon repart en campagne. Mais la mort du roi assyrien, en -669, laisse un répit inespéré à Taharqa. Le fils et successeur de feu Assarhaddon, Assurbanipal arrive au pouvoir. Il lance à son tour, dès -669, son armée contre l'Égypte, et reconquiert sans grande difficulté Basse et Haute-Égypte. L'Assyrien reconnaît alors vingt et un « rois égyptiens », pour mieux les maintenir affaiblis. Taharqa, qui s'est retiré en Nubie, meurt en -665. Son neveu et successeur, Tanoutamon, réinvestit encore le territoire égyptien, dès les Assyriens partis. Mais Nékao Ier défend sa ville contre les Nubiens, et meurt en -664 au combat. Psammétique se réfugie à Ninive. C'est avec la dernière campagne menée par Assurbanipal, qu'en -664, les Assyriens pillent et saccagent Thèbes, les temples et sanctuaires de la ville d'Amon-Rê. Comme lors de la précédente invasion, les Assyriens laissent le pouvoir au roi de Saïs, puis quittent le pays. Le nouveau roi de Saïs est ainsi le fils de Nékao Ier, qui devient Psammétique Ier, inaugurant véritablement la XXVIe dynastie de pharaons d'Égypte[5], et cantonnant Tanoutamon, le successeur nubien de Taharqa et dernier pharaon de la XXVe dynastie, à son seul titre de roi de Napata, au sud, jusqu'en -656, marquant la fin de son règne par décès.

Portrait de Taharqa.
Nubian Museum, Aswan

Les Saïtes ont ainsi le pouvoir par la volonté et l'aide de voisins étrangers. Ceux-ci partis, cette XXVIe dynastie n'assume qu'une indépendance égyptienne en sursis. Les Assyriens, quant à eux, tomberont sous la puissance nouvelle des Perses Achéménides, à l'origine eux-mêmes des futures XXVIIe dynastie et suivante, les dernières officielles.

Taharqa, quant à lui, aura organisé la Nubie en provinces, les contrôlant militairement, administrativement et économiquement, assurant à l'Égypte et à la Nubie une période de paix et de prospérité.

Le programme de construction de Taharqa aura été important : restaurations et constructions de temples sur tout le territoire. Le plus célèbre reste celui dédié à Amon, au pied du Gebel Barkal, à l'image de l'enceinte d'Amon-Rê à Karnak. Il aura bâti à Kasr Ibrim, Semna, Bouhen, et rénové à Thèbes. À Karnak, il aura fait agrandir le lac sacré, et ériger un kiosque aux colonnes hautes de vingt mètres. L'art koushite a très largement intégré les formes et les pratiques culturelles égyptiennes.

Généalogie

Il aura épousé ses sœurs Takahatenamon, Tabekenamon et Naparayé. Il lui est aussi attribué Atakhebasken par quelques spécialistes (Aidan Mark Dodson, Dyan Hilton et Wolfram Grajetzki) et Asalka (ou [a]Salka), cette union étant contestée par certains spécialistes, qui voient plutôt en elle une épouse de Tanoutamon et la mère d'Atlanarsa.

Plusieurs enfants lui sont attestés : Amenardis II (divine adoratrice d'Amon), et son fils Atlanarsa, qui succède à Tanoutamon par la reine Takahatenamon, et quatre autres enfants dont nous ne savons pas qui sont les (ou la) mère(s) : deux fils, Nisuonuris et Nesshoutefnout, et deux filles, Ietourou qui épousa son frère (ou demi-frère) Atlanarsa, et Peltasen (ou Peltaseñ).

Titulature

Sépulture

Ouchebti du roi Taharqa, ankérite, issu de la pyramide N1 de Nouri.

Il se fera enterrer dans une énorme pyramide, non pas à El-Kourrou, site de la nécropole royale depuis le début de la dynastie, mais à Nouri, en face du Gebel Barkal, inaugurant ainsi une nouvelle nécropole qui verra la plupart des rois de Napata s'y faire inhumer. Une autre tombe surmontée d'une pyramide associée à des blocs au nom de Taharqa a été découverte dans les années 60 à Sedeinga, et on a longtemps pensé que le roi avait pu s'y faire enterrer. Mais ces blocs étaient en fait des remplois tardifs prélevés sur le temple voisin dédié à la reine Tiyi (l'épouse d'Amenhotep III), où Taharqa avait durant son règne ajouté une colonnade. Au début du XXe siècle, la fouille de la pyramide N1 à Nouri avait permis la découverte d'ossements et d'ouchebtis à son nom confirmant, s'il le fallait, que l'enterrement royal avait bien eu lieu sur place.

Représentations

Sphinx de Taharqa, Gneiss ;
h. = 40,6 cm, l. = 73 cm
(British Museum)

Parmi les nombreuses représentations de ce pharaon, le sphinx de Taharqa est l'un des « objets phares » du British Museum[6], à Londres, et fut sélectionné pour être le 22e objet, présenté dans la série radiophonique Une histoire du monde en cent objets, diffusée sur BBC Radio 4 en 2010, par le directeur dudit Museum, Neil MacGregor[7].

Notes et références

  1. 2R 19,9, passage sous lequel il est annoté comme pharaon de la XXVe dynastie égyptienne éthiopienne (sic, et non pas égyptienne), en commentaire de bas de page, dans la Bible de Jérusalem parue aux Éditions Desclée de Brouwer avant 1985.
  2. 2R 18,21 sqq, où ce point de vue hébreu utilise le terme plus générique de Pharaon, qui peut donc désigner tout aussi bien l'un des prédécesseurs de Taharqa sur son trône, ou même la seule fonction générique de pharaon, dont le roi conquérant Sennachérib d'Assyrie, d'abord par médiateurs interposés dont son « échanson », incite son homologue de Juda (dont Jérusalem), Ézéchias, à se méfier, du fait que selon eux, les Égyptiens sont des alliés peu fiables voire dangereux, car trop puissants envers leurs « protégés »... Mais il semblerait, au moins initialement, que les Hébreux fissent surtout part aux Assyriens, d'une « alliance » éventuelle avec les Égyptiens, de Taharqa voire de tout autre pharaon, parmi ses prédécesseurs voire successeur(s), pour détourner leurs attention et forces vers cet autre front (a priori plus impressionnant), et les dissuader de faire trop longtemps le siège de Juda, voire de vouloir à tout prix les conquérir eux-mêmes, puisque, notamment, même les prophètes judéens Isaïe et Ézéchiel stigmatisèrent toute alliance avec l'Égypte (cf. Es 30-31, & Ez 29-32).
  3. 2R 19,37
  4. D. Agut et J. C. Moreno-García, 2016, p. 570
  5. D. Agut et J. C. Moreno-García, 2016, p. 564-575
  6. « Sphinx of Taharqo », British Museum (consulté le )
  7. (en) Ben Hoyle, « British Museum and BBC reveal history of world in 100 objects », Times Online,

Voir aussi

Bibliographie

  • Joël Cornette (dir.), Damien Agut et Juan Carlos Moreno-García, L'Égypte des pharaons : de Narmer à Dioclétien 3150 av. J.-C. - 284 apr. J.-C., Paris, Belin, coll. « Mondes anciens », (réimpr. en 2018), 847 p., 24 cm (ISBN 978-2-7011-6491-5).

Liens externes

  • Portail de l’Égypte antique
  • Portail du Soudan
Cet article est issu de Wikipedia. Le texte est sous licence Creative Commons - Attribution - Partage dans les Mêmes. Des conditions supplémentaires peuvent s'appliquer aux fichiers multimédias.