Soldat de bronze

59° 25′ 52,21″ N, 24° 44′ 23,89″ E

Le soldat de bronze[1], est une statue d'un soldat en uniforme soviétique qui faisait office de monument à la mémoire des soldats soviétiques de la Seconde Guerre mondiale sur la colline de Tõnismäe (litt. colline de Saint-Antoine) dans le centre de Tallinn en Estonie depuis 1947.

Beaucoup d'Estoniens considèrent le soldat de bronze comme un symbole de l'occupation soviétique, alors que pour la minorité russophone vivant en Estonie, ce monument représente la victoire sur le fascisme durant la Seconde Guerre mondiale[2]. Les autorités estoniennes ont décidé du déplacement du monument en 2007 dans le Cimetière des Forces de Défense de Tallinn, décision qui a provoqué des émeutes de la minorité russe du pays et une vive réaction du gouvernement russe[3].

Conception


Le monument, avec sa représentation d'un soldat enchâssée dans un grand mur de pierre, fut érigé en 1947 en mémoire aux soldats soviétiques morts au combat durant la Seconde Guerre mondiale. Plus tard le thème fut changé comme l'indique l'inscription "Pour ceux qui sont tombés durant la Seconde Guerre mondiale". Le nombre exact et le nom des personnes enterrées sous le monument n'ont pas été déterminés avec certitude, bien que le ministère estonien des Affaires étrangères ait commandé une étude historique sur le sujet en 2006[4].

Tombe collective

Selon les registres du Commissariat militaire du département militaire de la Baltique, 13 soldats tombés durant la Seconde Guerre mondiale furent enterrés dans une fosse commune sur la colline de Tõnismägi en :

  • Lieutenant-colonel Mikhaïl Petrovitch Koulikov (Михаил Петрович Куликов) - commandant du 657e régiment
  • Capitaine Ivan Mikhaïlovitch Syssoïev (Иван Михайлович Сысоев) - commissaire politique du 657e régiment
  • Gefreiter Dmitri Belov - 125e division (tué au combat à 45 km de Tallinn)
  • Colonel Konstantin Pavlovitch Kolesnikov (Константин Павлович Колесников) - 125e division (tué dans la bataille à 45 km de Tallinn)
  • Capitaine Ivan Stepanovitch Serkov (Иван Степанович Серков) - 125e division (tué dans la bataille à 45 km de Tallinn)
  • Major Vasilii Ivanovitch Kouznetsov (Василий Иванович Кузнецов) - 125e division
  • Lieutenant Vasilii Iegorevitch Volkov (Василий Егорович Волков) - 125e division
  • Capitaine Alekseï Matveïevitch Bryantsev (Алексей Матвеевич Брянцев) - 125e division
  • Sergent Stepan Illarionovitch Khapikalo (Степан Илларионович Хапикало) - commandant du 26e régiment de blindés[5]
  • Médecin militaire Elena Mikhaïlovna Varchavskaïa (Елена Михайловна Варшавская) - 40e régiment des gardes motards (mort le 22 ou à Tallinn)
  • Sergent Aleksandr Grigorov - mort le
  • Lieutenant-colonel Kotelnikov - pas plus d'informations
  • Lieutenant I. Loukanov - pas plus d'informations

Enn Roos fut le sculpteur et Arnold Alas l'architecte du monument érigé en 1947[4]. En 1964, une flamme éternelle fut allumée devant le monument. Elle fut retirée quand l'indépendance de l'Estonie fut rétablie.

Controverse

Contexte

En 1991, la RSS estonienne, appelée par la suite la République d'Estonie, déclarait son indépendance de l'Union soviétique sous le mandat d'Edgar Savisaar et le président communiste Arnold Rüütel. À cette époque, plus d'un tiers de la population de l'Estonie était d'origine russe ou issue d'autres populations de migrants économiques de l'Union soviétique, qui avaient été attirés en Estonie par sa rapide industrialisation d'après-guerre.

En 1992, sous le premier ministre Mart Laar, une nouvelle loi sur la citoyenneté est passée, réservant la nationalité aux descendants de citoyens d'avant 1940. Les citoyens de l'ex-Union soviétique pouvaient prétendre à la citoyenneté après avoir passé un examen d'histoire et de langue estoniennes[6].

En 1992, 32 % des résidents estoniens n'avaient aucune nationalité. Parmi les populations non estoniennes près d'un tiers a reçu la nationalité estonienne, un tiers a choisi la nationalité russe et un tiers n'a aucune nationalité. En , le recensement du ministère de l'Intérieur estonien établit que 9 % des résidents estoniens n'ont pas de nationalité connue et 7,4 ont une nationalité étrangère[7].

S'il y a eu des appels pour tout non Estonien à retourner en Russie, la politique officielle du gouvernement a été l'"intégration", en demandant que tout russophone apprenne au moins les rudiments de la langue estonienne[6].

La question de l'histoire d'après la Seconde Guerre mondiale est le cœur du problème ethnique en Estonie[2]. Les Estoniens considèrent généralement la période de l'Estonie soviétique comme une occupation soviétique illégale des États baltes, un point de vue qui est la position officielle du gouvernement estonien tout comme celle des grandes puissances occidentales telles que les États-Unis.

La statue du soldat de bronze a une forte signification symbolique pour les russophones et pour la population apatride[8]. Pour eux c'est un symbole de leur droit de vivre en Estonie en tant que descendants des libérateurs, non en tant qu'occupants illégaux[8].

Pour les Estoniens, le soldat de bronze symbolise le début de l'occupation, quand le gouvernement estonien, réuni après que les Allemands eurent déserté Tallinn (la capitale de l'Estonie), fut renversé par les Soviétiques à leur arrivée à Tallinn, tout comme il symbolise la répression politique et les déportations massives qui suivirent.

Confrontation

À partir du rétablissement de l'indépendance estonienne, les anciens combattants de la Seconde Guerre mondiale et les représentants de la population russophone ont continué à se réunir au pied du monument à certaines dates, célébrant le 9 mai, le jour de la victoire, et le 22 septembre, date à laquelle l'armée soviétique entra dans Tallinn en 1944. L'étalage de drapeaux soviétiques et autres symboles lors de ces réunions agaçait les Estoniens et le gouvernement[9].

Déplacement du monument

Démantèlement du monument à l'abri des regards
Le monument à sa nouvelle place (Cimetière des Forces de Défenses de Tallinn)

Une rencontre non violente devant le monument eut lieu le quand des nationalistes estoniens menés par Jüri Liim se joignirent aux anciens combattants[10]. Les tensions montèrent encore d'un cran en septembre 2006 et une surveillance policière fut maintenue durant plusieurs mois[11]. La statue fut déplacée par le gouvernement le après que les manifestations devinrent violentes[12]. Elle est définitivement replacée en mai et juin 2007 dans le Cimetière des Forces de Défenses de Tallinn.

Loi sur la protection des cimetières militaires

Le , le Riigikogu, par 66 voix pour et 6 voix contre, a adopté une loi sur la protection des cimetières militaires[13], proposée par le parti de la réforme, le parti social-démocrate, et l'Union Pro Patria et Res Publica. Le préambule de la loi déclare: (texte en anglais à traduire)

Références

  1. (estonien: Pronkssõdur) anciennement appelé « Monument des libérateurs de Tallinn » (estonien:Tallinna vabastajate monument, russe: монумент освободителям Таллина)
  2. (fr) Filip Jurzyk (trad. Laurent Laget), Soldat de bronze et minorité russe à Tallinn : une histoire compliquée, babel.com, (lire en ligne)
  3. (fr) Soldat de bronze : la Russie soulèvera la question sur la situation en Estonie au Conseil de l'Europe, RIA Novosti, (lire en ligne)
  4. (ekk) Peter Kaasik, « Tallinnas Tõnismäel asuv punaarmeelaste ühishaud ja mälestusmärk », Tallinn, Ministère des Affaires étrangères d'Estonie, (consulté le )
  5. (selon les sources militaires il est mort de maladie, selon des sources non officielles il fut tué dans un accident de la route)
  6. General elections in Estonia, 4th march 2007
  7. (ekk) Estonia: Citizenship
  8. (ru) Alexander Daniel, « Russian Historian: The problem is how to live together if the two peoples have such a different memory », sur REGNUM News Agency,
  9. Pas de différence entre nazis et soviétiques, selon le président estonien, Le Monde, 18 septembre 2007
  10. Jüri Liim tahab 9. mail Tõnismäel miitingu korraldada.
  11. May 9 protesters call for removing Bronze Soldier statue
  12. Olivier Bot, Tallinn, détachée de Moscou, veut convertir ses russophones, Tallinn, Tamedia Publications romandes SA, (lire en ligne)
  13. Riigikogu

Liens externes

  • Portail de la sculpture
  • Portail de l’histoire militaire
  • Portail de Tallinn
Cet article est issu de Wikipedia. Le texte est sous licence Creative Commons - Attribution - Partage dans les Mêmes. Des conditions supplémentaires peuvent s'appliquer aux fichiers multimédias.