Signal Wow!

Le signal « Wow! » est un signal radio puissant, à bande étroite et centré sur la raie à 21 centimètres, capté le par le radiotélescope de l'université d'État de l'Ohio surnommé The Big Ear[1]. D’origine inexpliquée, ce signal, qui a été capté pendant 72 secondes et n'a plus été détecté depuis, a fait l'objet d'une attention significative de la part des médias.

Pour les articles homonymes, voir Wow.

Relevé des mesures effectuées par le radiotélescope, avec le signal Wow! tel qu'annoté par Jerry R. Ehman.

Le phénomène fut observé par l'astrophysicien Jerry R. Ehman alors qu'il travaillait avec le radiotélescope dans le cadre d'un projet SETI. Stupéfait de voir à quel point le signal observé correspondait à la signature attendue pour un signal interstellaire, Ehman a entouré au stylo rouge le passage correspondant sur le relevé des mesures effectuées par le radiotélescope, et a écrit dans la marge à côté le commentaire « Wow! », interjection de surprise ou d'admiration en anglais, proche de « Ouah ! » en français. Ce commentaire est devenu le nom du signal[1].

Ce signal n'a toujours pas d'explication faisant consensus.

Localisation du signal

Le signal Wow se situe dans la constellation du Sagittaire, juste au nord-ouest de l'amas globulaire M55. En raison de la conception de l'expérience, l'emplacement du signal peut se trouver dans l'une des deux bandes rouges, et il y a aussi une grande incertitude dans la déclinaison (axe vertical). Pour plus de clarté, les largeurs des bandes rouges ne sont pas tracées à l'échelle. Elles devraient en fait être plus étroites.

Déterminer un emplacement précis du signal dans le ciel est compliqué, du fait que le télescope Big Ear a utilisé deux cornets d'alimentation pour rechercher des signaux, chacun pointant vers une direction légèrement différente. Le signal n'a été détecté que dans un seul de ces deux cornets et les données ont été traitées de telle façon qu'il est impossible de déterminer dans lequel des deux cornets le signal est entré. Il y a donc deux valeurs d'ascension droite possibles.

Discussion

On ne connaît ni la nature ni l'origine du signal et, a fortiori, s'il codait quelque chose. Affirmer qu'il codait quelque chose équivaut à certifier qu'il avait pour origine une civilisation extraterrestre, ce qui n'est pas prouvé à ce jour.

Éléments objectifs[2] :

  • le signal était à bande étroite (environ 10 kHz). Aucun phénomène naturel connu n'émet sur un spectre étroit.
  • le signal a été émis précisément sur la raie à 21 centimètres.
    • C'est précisément la fréquence sur laquelle on s'attend à recevoir d'éventuels signaux de civilisations extraterrestres, car la poussière interstellaire est transparente à cette longueur d'onde et c'est la raie d'émission naturelle de l'élément le plus abondant de l'univers, l'hydrogène, de sorte que l'attention des êtres pensants est attirée sur cette bande, en émission comme en réception[3].
    • C'est d'ailleurs la fréquence choisie pour émettre le message d'Arecibo, un signal d'un projet SETI vers l'amas globulaire M13 en 1974.
    • Cette fréquence n'est utilisée par aucun émetteur artificiel. Un accord international existe pour bannir cette fréquence de tout usage civil ou militaire.
  • Il venait d'une direction très précise du ciel, la durée de 72 secondes correspondant au passage d'un « lobe » de sensibilité de l'antenne sur ce point ;
  • Lors du passage du second lobe de sensibilité de l'antenne quelques minutes plus tard, le signal avait disparu. Cela suggère une origine dans l'espace, en orbite ou plus loin.
  • Il n'y a aucun objet céleste notable connu dans les zones d'émission du signal (sauf deux petites comètes qui sont à la base de l'hypothèse cométaire).

Il est difficile de trouver une explication naturelle à l'ensemble de ces phénomènes, et notamment l'absence de signal au second lobe et le spectre étroit. Une réflexion d'émetteurs radios terrestres est a priori exclue, car la fréquence ne correspond pas à des émetteurs terrestres et ces réflexions ne pourraient pas renvoyer l'énergie mesurée.

L'hypothèse cométaire, développée dans les années 2010, n'est plus considérée comme plausible, et il n'y a toujours pas de consensus établi concernant l'interprétation de ce phénomène[4].

Durée du signal

Au moment de l'observation, le radiotélescope n'est réglable qu'en fonction de l'altitude (ou de la hauteur au-dessus de l'horizon), et utilise la rotation de la Terre pour balayer le ciel. Compte tenu de la vitesse de rotation de la Terre et de la largeur de la fenêtre d'observation du télescope, le radiotélescope ne peut observer n'importe quel point donné que pendant 72 secondes[5]. Un signal extraterrestre continu ne pouvait donc être enregistré que pendant exactement 72 secondes.

De plus, la sensibilité du radiotélescope est maximale au centre de sa fenêtre d'observation. Par conséquent, si le signal observé est extraterrestre, l'intensité mesurée devrait afficher une augmentation progressive pendant les 36 premières secondes, à mesure que la source entre dans la fenêtre d'observation, puis un pic au centre de la fenêtre d'observation, et enfin une diminution progressive pendant les 36 secondes suivantes, à mesure que la source en sort.

Toutes ces caractéristiques sont présentes dans le signal Wow, ce qui plaide pour une origine extraterrestre[6], car une interférence terrestre pourrait durer n'importe quelle durée, pas spécifiquement 72 secondes, et l'intensité mesurée ne présenterait pas nécessairement une courbe en cloche[7].

Hypothèse cométaire

Début , le Pr Antonio Paris de la Washington Academy of Sciences a publié un article[8] où il indique avoir trouvé deux comètes (266P/Christensen et 335P/Gibbs) découvertes dans la dernière décennie, pouvant se trouver en face du radiotélescope le . Les comètes, émettant beaucoup d'hydrogène, pourraient expliquer l'existence de ce signal. Pour vérifier son hypothèse, il propose de braquer les radiotélescopes vers une de ces comètes à leur prochain passage dans la même région d’émission du signal Wow pour comparer précisément les deux signaux. La campagne d'observation qu'il a menée entre et a effectivement relevé un signal similaire au signal Wow généré par 266P/Christensen[9]. Selon cette étude, la comète émet bel et bien à 1 420 MHz, avec un pic similaire à celui du signal Wow, cependant avec un rapport signal sur bruit de 4,76 sigma, alors que celui du signal de 1977 était de plus de 30 sigma. Les auteurs estiment que la différence tient au diamètre supérieur du Big Ear (52 m de diamètre contre 10 m pour les observations de 2017), et au fait que la comète a pu perdre de la masse depuis 1977[9].

Cette hypothèse et cette étude sont contestées par certains radioastronomes comme Jacques Crovisier, qui arguent que les nuages d'hydrogène entourant les comètes ne génèrent pas un signal assez fort à cette fréquence car la raie à 21 cm est une raie de transition interdite de l'atome d'hydrogène[10].

De plus, les comètes se déplaçant lentement dans le ciel, le second lobe de sensibilité aurait détecté le signal, ainsi que 24 heures plus tard ce qui n'a pas été le cas[11].

Enfin, la position supposée de 266P/Christensen lors de l'émission du signal Wow! est également remise en cause, et n'aurait pas été à l'emplacement de l'émission du signal en 1977[10].

Le code du radiotélescope

Intensité du signal au cours du temps.
Heat map correspondant au relevé des mesures effectuées par le radiotélescope, sur lequel le signal Wow a été repéré. Chaque chiffre ou lettre y est remplacé par un point dont la couleur est fonction de l'intensité. Le signal Wow apparaît sous la forme d'une zone claire en bas à gauche.

Chacune des 50 premières colonnes de la feuille montre les valeurs successives d'intensité reçue par le radiotélescope Big Ear, dans chaque canal (10 kHz), avec un intervalle de 12 secondes successives. Afin d'économiser l'espace sur la feuille, Bob Dixon et Jerry Ehman ont décidé d'utiliser une méthode codée qui ne donnerait des résultats qu'en caractères alphanumériques pour chaque intensité. Leur ordinateur était programmé pour garder une mise à jour constante pour chaque canal. L'intensité finale était alors divisée en valeur rms pour obtenir une échelle. Enfin, ils décidèrent de ne baser que la partie entière de cette intensité échelonnée. La valeur tronquée du 0 était représentée par un blanc (espace). Pour les échelles d'intensité de 10 à 35 inclus, ils utilisèrent les lettres capitales de l'alphabet. Ainsi, la valeur 10 était imprimée comme étant « A », 11 étant « B », etc. Si l'échelle d'intensité dépassait les 36,0, le programme reprenait simplement à zéro. La valeur « U » est la valeur la plus forte jamais vue par ce radio-télescope. Dixon et Ehman ne pensent pas que l'intensité du signal puisse être dépassée[12].

Sachant que tous les autres chiffres imprimés ne dépassaient pas la valeur d'intensité de 2, et en utilisant la méthode ci-dessus, on se rend compte alors que l'intensité du signal est exceptionnelle :

6gamme 6,0 - 6,999…
Egamme 14,0 - 14,999…
Qgamme 26,0 - 26,999…
Ugamme 30,0 - 30,999…
Jgamme 19,0 - 19,999…
5gamme 5,0 - 5,999…

Réponse

En 2012, pour le 35e anniversaire du signal Wow!, le radiotélescope d'Arecibo a envoyé une réponse de l'humanité, contenant 10 000 messages Twitter, dans la direction d'où provenait le signal[13],[14]. Pour cette réponse, les scientifiques d'Arecibo ont tenté d'augmenter les chances qu'une vie intelligente reçoive et décode les vidéos de célébrités et les tweets des gens en y attachant une séquence en en-tête, répétée pour chaque message, qui permettrait au destinataire de savoir que les messages sont intentionnels et proviennent d'une autre forme de vie intelligente, l'humanité[14].

Postérité

En 2012, dans le roman 172 heures sur la Lune de Johan Harstad, le signal aurait été émis par la Lune.

En 2017, dans le roman Signe de vie de José Rodrigues dos Santos, un signal est à nouveau détecté dans la même zone.

Le code 6EQUJ5 apparaît dans le jeu vidéo Grand Theft Auto V. Il est écrit sur le sol à Sandy Shores à l'endroit du monument hippie dédié aux extraterrestres.

Notes et références

  1. (en) Robert Krulwich (en), « Aliens Found In Ohio? The 'Wow!' Signal », Krulwich Wonders: Robert Krulwich On Science, NPR, (consulté le ).
  2. (en) Michael Brooks, 13 Things that Don't Make Sense, Doubleday, , « The Wow Signal », p. 98 et 101.
  3. Laurent Sacco, « La raie à 21 cm : une clé pour l'astrophysique, la cosmologie et Seti », sur Futura-Sciences, .
  4. Gary Dagorn, « L’énigme du signal potentiellement extraterrestre a 40 ans », Les Décodeurs, sur Le Monde, (consulté le ).
  5. (en) Brian Dunning, « Was the Wow! Signal Alien? », podcast no 342, sur Skeptoid, (consulté le ).
  6. (en) Suzanne Deffree, « Big Ear receives ‘Wow! Signal,’ August 15, 1977 », EDN Moments, sur EDN (en), (consulté le ).
  7. (en) Seth Shostak, « Interstellar Signal From the 70s Continues to Puzzle Researchers », sur Space.com, (consulté le ).
  8. (en) Antonio Paris et Evan Davies, « Hydrogen Clouds from Comets 266/P Christensen and P/2008 Y2 (Gibbs) are Candidates for the Source of the 1977 “WOW” Signal », Journal of the Washington Academy of Sciences, vol. 101, no 4, , p. 25–32 (JSTOR jwashacadscie.101.4.25, arXiv 1706.04642).
  9. (en) Antonio Paris, « Hydrogen line observations of cometary spectra at 1420 MHz », Journal of the Washington Academy of Science, vol. 103, no 2, (arXiv 1706.03259, lire en ligne, consulté le ).
  10. Laurent Sacco, « L’origine E.T. du célèbre signal Wow! est toujours crédible ! », sur Futura-Sciences, .
  11. (en) Jesse Emspak, « Famous Wow! signal might have been from comets, not aliens », New Scientist, .
  12. (en) Jerry Ehman, « Explanation of the Code "6EQUJ5" On the Wow! Computer Printout », sur Big Ear Radio Observatory and North American AstroPhysical Observatory, (consulté le ).
  13. (en) Natalie Wolchover, « Possible Alien Message to Get Reply from Humanity », sur Live Science, .
  14. (en) « Humanity Responds to 'Alien' Wow Signal, 35 Years Later », sur Space.com, .

Voir aussi

Bibliographie

  • (en) Jerry R. Ehman, « Wow! - A Tantalizing Candidate », dans H. Paul Shuch (en) (ed.), Searching for Extraterrestrial Intelligence: SETI Past, Present, and Future, Springer, , 538 p. (ISBN 978-3-642-13195-0, DOI 10.1007/978-3-642-13196-7_4), p. 47-64.

Articles connexes

Liens externes

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