Seymour Hersh

Seymour Hersh est un journaliste d'investigation américain, né le à Chicago, spécialisé dans les affaires militaires américaines et les services secrets. Il écrit notamment pour The New Yorker et le New York Times.

Pour les articles homonymes, voir Hersh.

Il est à l'origine de nombreuses révélations, comme d'actes de torture à Abou Ghraib ou encore le massacre de Mỹ Lai au Viêt Nam, révélation pour laquelle il obtient un prix Pulitzer.

Son travail sur la Syrie à partir de 2013 est néanmoins controversé.

Biographie

Origines et études

Seymour Hersh est né dans une famille juive parlant Yiddish et habitant Chicago. Il est diplômé en Histoire de l'université de Chicago.

En 1963, il est recruté à l'agence Associated Press et entre rapidement en conflit avec la direction car celle-ci souhaite censurer un article traitant du gouvernement américain et des armes bactériologiques. Il quitte rapidement l'Associated Press et fait ensuite ses premiers pas pour The New Republic.

Révélations et déclarations célèbres

Massacre de Mỹ Lai

En 1969, il révèle le massacre de Mỹ Lai au Viêt Nam qui choque le monde entier. Cela lui vaudra le prix Pulitzer en 1970.

Activités illégales de la CIA sur le sol américain

Révélation en 1974 des activités de la CIA sur le territoire américain contre les mouvements pacifiques et autres opposants sous le couvert de contre-espionnage, ce qui forcera à la démission James Angleton, le chef du contre-espionnage de la CIA.

Projet Jennifer

Il est à l'origine des révélations sur le projet Jennifer.

Révélations sur le département de la défense

Il est à l'origine de la révélation de l'Office of Special Plans ou OSP du département de la Défense américain dans l'article Selective Intelligence[2].

Mort de ben Laden

En , il affirme que le gouvernement américain a menti sur le raid qui a abouti à l’élimination d'Oussama ben Laden le [3]. En 2015, après enquête, il publie un long article à ce sujet dans la London Review of Books[4]. La version que présente Hersh des évènements est « violemment contestée de toutes parts »[5], ses détracteurs lui reprochant de ne pas s'appuyer sur des preuves et de ne pas avoir établi la fiabilité de ses deux uniques sources[5],[6].

L'assaut donné le ne se serait pas du tout déroulé comme le scénario officiel. Les forces spéciales américaines seraient entrées dans la villa occupée par ben Laden sans faire face à une résistance et ils auraient tué Ben Laden alors qu'il était très faible et désarmé. La dépouille de Ben Laden n'aurait ensuite pas été jetée en mer, comme l'affirme la version officielle[réf. nécessaire].

Accusation de financement d'Hillary Clinton par les Juifs

Lors d'une conférence il affirme que la position de Hillary Clinton sur le nucléaire iranien est explicable par le poids financier de la communauté juive :

« L'argent. L'argent juif vient de New York. Sérieusement, il faut dire la vérité. Une partie importante de l'argent juif et des leaders juifs américains soutiennent la position israélienne qui fait de l'Iran une menace existentielle. C'est aussi simple que ça. Quand vous venez de New York, vous prenez cette position politique et quand vous commencez votre campagne électorale vous devez suivre cette ligne. Il n'y a aucune autre explication possible, Hillary Clinton est assez intelligente pour ça. »

Autobiographie

Le quotidien The New York Times rapporte que la publication par Seymour Hersh de son autobiographie, en , fait suite à son abandon du projet de livre sur l'ancien vice-président Dick Cheney, qui a nécessité quatre ans de travail et pour lequel il a amassé beaucoup de matériau. Il y a cependant renoncé, estimant que sa publication pourrait mettre en danger ses sources, et a alors proposé à son éditeur, Knopf (filiale de Penguin Random House), d'hypothéquer son pied-à-terre de Manhattan pour rembourser l'avance qu'il avait perçue. L'éditeur lui a alors suggéré d'écrire ses mémoires, ce à quoi l'écrivain s'était jusqu'ici toujours refusé, mais qu'il a fini par accepter [7].

Controverses et critiques

Armes chimiques syriennes

Différentes affirmation de Seymour Hersh concernant la Syrie et notamment les armes chimiques ont par la suite été controversées et réfutées, y compris par l'OIAC[8],[9],[10].

Le journaliste Brian Whitaker lui reproche d'écrire ce que les « truthers » (douteurs) sur les réseaux sociaux, veulent entendre, de même que John Pilger et Robert Fisk. Il affirme que si Hersh a des difficultés à faire publier ses articles sur les attaques chimiques en Syrie, c'est parce que deux de ses articles étaient sérieusement défectueux[11]. Selon un article de L'Obs de 2015, Seymour Hersh a été accusé « ces dernières années » par une partie des médias américains de « dérive conspirationniste »[12].

Critiques concernant ses méthodes d'investigation en Syrie

Dans un article paru dans le journal israélien Haaretz[13], Emmanuel Sivan, professeur d’histoire islamique à l’université hébraïque de Jérusalem, conteste les méthodes d'investigations de Seymour Hersh, lui reprochant d'avoir écrit dans un article du New Yorker que les États-Unis finançaient indirectement au Liban des groupes proches d'Al-Qaïda, comme Fatah al-Islam via le premier ministre sunnite Fouad Siniora, sans avoir vérifié les informations de sa source.

En , il avance que Barack Obama a menti quand celui-ci a « accusé le président syrien Bachar el-Assad d'une attaque au gaz sarin qui a tué des centaines de civils syriens en août 2013 »[14]. Le , il publie un article où il affirme que le gouvernement syrien n'est pas responsable de l’attaque chimique de la Ghouta. Son article avait été commandé par le New Yorker qui l’a refusé car jugé insuffisamment sourcé, puis présenté au Washington Post, qui l’a refusé aussi, pour être finalement publié au Royaume-Uni par la London Review of Books[15].

Le , il publie dans le journal allemand Die Welt un article relatif à l'attaque au gaz de Khan Cheikhoun dans lequel il exonère le régime syrien de toute responsabilité dans l'affaire en expliquant que le bombardement syrien aurait visé un bâtiment de deux étages où se serait tenu une réunion de responsables de Daesh et dans les caves duquel se seraient trouvé un ensemble de substances chimiques dont la combustion aurait créé le nuage de gaz toxiques à l'origine du drame[16]. Cet article, qui était basé sur une unique source anonyme, est catégoriquement démenti par un rapport conjoint de l'OIAC et de l'ONU, qui imputent l'attaque chimique au régime syrien[15].

Selon l'analyste Eliot Higgins l'analyse de Hersh ne repose sur aucune source identifiable et va jusqu'à contredire les versions syriennes et russes de l'incident. En outre, alors que les analyses de l'organisation pour l'interdiction des armes chimiques concluent à l'utilisation de gaz sarin, il nie la présence de cette substance sur les lieux, attribuant le dégagement de gaz nocif à la présence d'un mélange de « produits chimiques, comprenant du chlore dans les organophosphates utilisés dans de nombreux engrais, qui peuvent provoquer des effets neurotoxiques comparables à ceux du gaz sarin » qui se seraient trouvés dans le bâtiment visé par la frappe aérienne syrienne[17].

Le journaliste britannique George Monbiot affirme que les arguments de Seymour Hersh ont été discrédités par l'OIAC et que celui-ci a été incapable de fournir la localisation du bâtiment pour vérification par géolocalisation, dans une tribune intitulée « Une leçon de la Syrie : il est crucial de ne pas alimenter les théories conspirationnistes d'extrême droite » [18],[19].

Critiques concernant son relai de désinformation russe et syrienne

Il est également reproché à Seymour Hersh de relayer lors d'une interview sur Russia Today, média d’État russe, de la désinformation diffusée sur les réseaux sociaux par des groupes de propagande conspirationniste sur la Syrie, notamment le « mythe de la petite syrienne sauvée plusieurs fois », bien que cette intox ait été réfutée depuis longtemps par l'AFP et plusieurs autres grands médias[20],[21].

Daniella Peled, demande pourquoi son déni des crimes de guerre de la Syrie n'a pas mis un terme à sa carrière et affirme que le fait que les médias décrivent les apologétiques honteuses de Hersh comme une idiosyncrasie stupide plutôt que ce qu’elle est vraiment - le pire des "fake news" - est tout simplement un signe de notre échec moral total en Syrie.[22]

Steve Bloomfield, rédacteur en chef adjoint du journal Prospect[23], écrit un article sur Hersh intitulé « L'étrange histoire de comment un légendaire journaliste d'investigation en est venu à se faire l'écho de la propagande d'Assad »[10].

Michael Massing (en) écrit dans The Nation que « pas une fois, dans [son livre] Reporter, Hersh ne prend note de la boucherie d’Assad et des centaines de milliers de morts dont son régime est responsable. Au lieu de cela, il observe que les affirmations factuelles d’Assad au cours de leurs entretiens sont «invariablement vérifiées». D’après la description de Hersh lui-même, on a l’impression qu’Assad a détecté la vanité du journaliste et en a joué intelligemment en lui montrant sollicitude et respect. L’attitude crédule de Hersh à l’égard du dirigeant syrien rappelle la déférence de ses anciens collègues envers Henry Kissinger. Après avoir si longuement écrit sur les dangers de l'accès [à un haut dirigeant tel que Bachar el-Assad], Hersh semble en avoir été la proie. »[24]

Distinctions

Livres

Ouvrages originaux en anglais

  • Chemical and Biological Warfare: America's Hidden Arsenal, New York, Bobbs-Merrill, 1968
  • My Lai 4: A Report on the Massacre and Its Aftermath, Random House, 1970, (ISBN 0-394-43737-3).
  • Cover-up: the Army's secret investigation of the massacre at My Lai 4, New York, Random House, 1972
  • (en) Seymour M. Hersh, The Price of Power : Kissinger in the Nixon White House, New York, N.Y., Summit Books, , 698 p. (ISBN 0-671-44760-2)
  • Seymour M. Hersh, “The Target Is Destroyed” : What Really Happened to Flight 007 and What America Knew About It, New York, Random House, , 282 p. (ISBN 0-394-54261-4 et 978-0-394-54261-4)
  • The Samson Option: Israel's Nuclear Arsenal and American Foreign Policy, Random House, 1991, (ISBN 0-394-57006-5)
  • The Dark Side of Camelot, Little, Brown & Company, 1997, (ISBN 0-316-36067-8)
  • Against All Enemies: Gulf War Syndrome: The War Between America's Ailing Veterans and Their Government, Ballantine Books, 1998
  • Chain of Command: The Road from 9/11 to Abu Ghraib, HarperCollins, 2004, (ISBN 0-06-019591-6)
  • (en) Seymour M. Hersh, Reporter : A Memoir, New York, Knopf, , 355-[24] p., 25 cm (ISBN 978-0-307-26395-7)

Ouvrages en français

  • Le massacre de Song My : La guerre du Vietnam et la conscience américaine [« My Lai 4: A Report on the Massacre and Its Aftermath »], Gallimard, coll. « Témoins », (ISBN 978-2-07-027090-3)
  • Opération Samson : comment Israël a acquis la bombe atomique [« The Samson Option: Israel's Nuclear Arsenal and American Foreign Policy »], Olivier Orban,
  • La Face cachée du clan Kennedy [« The Dark Side of Camelot »], L'Archipel, (ISBN 978-2-84187-141-4)
  • Permission de tuer : Les nouveaux services secrets, Les Empêcheurs de penser en rond, , 150 p. (ISBN 978-2-84671-106-7) Ce livre regroupe la traduction de trois articles de The New Yorker écrits par Hersh :
    • Manhunt : The Bush Administration's new strategy in the war against terrorism, sur les éliminations de membres d'Al-Qaïda (The New Yorker du 23 et );
    • Selective Intelligence : Donald Rumsfeld has his own special sources. Are they reliable? sur l'OSP ( [lire en ligne]); et
    • Moving Targets : Will the counter-insurgency plan in Iraq repeat the mistakes of Vietnam? sur les tentatives du renseignement US pour éliminer la résistance irakienne et le lancement de la Task Force 121 (
  • Dommages collatéraux : La face obscure de la « guerre contre le terrorisme » [« Chain of Command: The Road from 9/11 to Abu Ghraib »], Denoël, coll. « Impacts », , 624 p. (ISBN 978-2-207-25666-4)

Notes et références

  1. (en) Youssef El-Gingihy, « Legendary journalist Seymour Hersh on novichok, Russian links to Donald Trump and 9/11 », sur Independent.co.uk, (consulté le ).
    « Sy Hersh – as he is affectionately known by those close to him – was once described by the Financial Times as “the last great American reporter”. »
  2. Seymour Hersh, « Selective Intelligence »(ArchiveWikiwixArchive.isGoogle • Que faire ?)
  3. « Seymour Hersh : les médias américains sont "lamentables" », Courrier international, (lire en ligne, consulté le )
  4. (en) Seymour M. Hersh, « The Killing of Osama bin Laden », London Review of Books, no Vol.37 N.10, , p. 3-12 (lire en ligne)
  5. « Seymour Hersh et ben Laden : scoop explosif ou vrai complotisme ? », Rue89, 12 mai 2015.
  6. The many problems with Seymour Hersh's Osama bin Laden conspiracy theory, Max Fisher, Vox, 11 mai 2015
  7. (en) Michael M. Grynbaum, « I, Sy: Seymour Hersh’s Memoir of a Life Making the Mighty Sweat », sur nytimes.com, (consulté le ).
  8. (en) Eliot Higgins et Dan Kaszeta, « It's clear that Turkey was not involved in the chemical attack on Syria | Eliot Higgins and Dan Kaszeta », sur the Guardian, (consulté le )
  9. (en-US) « Will Get Fooled Again – Seymour Hersh, Die Welt et l’attaque chimique de Khan Cheikhoun - bellingcat », bellingcat, (lire en ligne, consulté le )
  10. « Whatever happened to Seymour Hersh », sur www.prospectmagazine.co.uk,
  11. (en) « Telling it like it isn't: John Pilger and the Syria truthers », sur al-bab.com (consulté le )
  12. « Mort de Ben Laden : Seymour Hersh livre une version controversée », sur L'Obs,
  13. « Comment on fabrique l'info sur le Moyen-Orient », Courrier international, (lire en ligne, consulté le )
  14. (en) President Obama accused of LYING about intelligence which he said proved Assad was behind sarin gas attacks in Syria, dailymail.co.uk, 9 décembre 2013
  15. « La désinformation d'une partie de la gauche sur la guerre en Syrie », sur Slate.fr, (consulté le )
  16. (de) Seymour M. Hersh, « Trump‘s Red Line », Die Welt, (lire en ligne, consulté le ).
  17. Eliot Higgins, « Seymour Hersh, Die Welt et l’attaque chimique de Khan Cheikhoun », Conspiracy Watch, (lire en ligne, consulté le ).
  18. (en-GB) George Monbiot, « A lesson from Syria: it’s crucial not to fuel far-right conspiracy theories | George Monbiot », The Guardian, (ISSN 0261-3077, lire en ligne, consulté le )
  19. « Conspiracy Theory Theories », dans The Philosophy of Conspiracy Theories, Palgrave Macmillan (ISBN 9781137363169, lire en ligne)
  20. « Seymour Hersh relaie l’intox de la petite Syrienne qui aurait été sauvée plusieurs fois | Conspiracy Watch », sur www.conspiracywatch.info (consulté le )
  21. « Non, cette fillette syrienne n’est ni une figurante mise en scène ni une rescapée de plusieurs attaques », Factuel, (lire en ligne, consulté le )
  22. (en) Daniella Peled, « Opinion Why Hasn't Seymour Hersh's Syria War Crimes Denial Ended His Career? », Haaretz, (lire en ligne, consulté le )
  23. (en) « Steve Bloomfield », sur the Guardian (consulté le )
  24. (en-US) Michael Massing, « The Odyssey of Seymour Hersh | The Nation », The Nation, (ISSN 0027-8378, lire en ligne, consulté le )
  25. « Mort de Ben Laden : Qui est Seymour Hersh, l'ancien journaliste star qui accuse Obama? », sur huffingtonpost.fr, (consulté le )

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