Scramblase

Une scramblase est une protéine membranaire responsable de la translocation des phospholipides entre les deux feuillets de la bicouche lipidique d'une membrane cellulaire[1],[2],[3]. Le feuillet interne de la bicouche lipidique, qui fait face au cytoplasme, contient des amino-phospholipides chargés négativement et des phosphatidyléthanolamines ; le feuillet externe, qui fait face au milieu extracellulaire, contient des phosphatidylcholines et des sphingomyélines : les scramblases favorisent l'échange des phospholipides chargés négativement entre les deux feuillets de la bicouche lipidique. Leur activité dépend de la présence d'ions calcium Ca2+.

Chez l'homme, les scramblases de phospholipides (PLSCR) forment une famille de cinq protéines homologues appelées hPLSCR1 à hPLSCR5. Elles sont distinctes à la fois des flippases et des floppases, ces protéines formant, avec les scramblases, trois groupes différents d'enzymes de transport de phospholipides[4]. Les scramblases hPLSCR1, hPLSCR3 et hPLSCR4 sont exprimées dans une grande variété de tissus, tandis que la scramblase hPLSCR2 est limitée aux testicules. La scramblase hPLSCR4 n'est pas exprimée dans les lymphocytes du sang périphérique (en) (lymphocytes B, NK et T), et la scramblase hPLSCR3 n'a pas été détectée dans le cerveau[5]. L'importance fonctionnelle de cette expression différenciée n'est cependant pas encore comprise. La scramblase hPLSCR5 a été identifiée à travers son gène et son ARN messager, mais l'observation de la protéine correspondante n'a pas été publiée dans la littérature.

Structure et fonction physiologique

Les cramblases contiennent une région conservée présentant un tonneau β à 12 brins entourant une hélice α centrale[6]. Cette structure est semblable à celle de la protéine tubby (en). Toutes les scramblases contiennent un domaine de liaison à l'ion Ca2+ de type main EF qui joue probablement un rôle dans l'activation de l'enzyme par le calcium. En revanche, l'activité des scramblases ne requiert pas d'énergie, ce qui signifie qu'elle ne nécessite pas l'hydrolyse concomitante de molécules d'ATP.

L'activité enzymatique des scramblases dépend de la concentration en calcium à l'intérieur de la cellule. Dans les conditions normales, cette concentration est très faible, de sorte que les scramblases sont peu actives. La redistribution des phospholipides est déclenchée par l'augmentation du taux de calcium cytosolique et semble dépendre de l'activité des scramblases, aboutissant en une distribution symétrique des phospholipides chargés négativement entre les deux feuillets de la bicouche lipidique.

Les scramblases sont des protéines riches en proline ayant de surcroît de nombreux groupes fonctionnels sulfhydryle –SH de résidus de cystéine, lesquels sont enclins à être modifiés. L'oxydation, la nitrosylation et le blocage de ces groupes sulfhydryle augmentent l'activité enzymatique des scramblases. Les patients atteints de drépanocytose présentent un fraction de leurs érythrocytes avec une augmentation aberrante de l'exposition de phosphatidylsérines à leur surface. Dans la mesure où les érythrocytes de ces patients sont exposés à un stress oxydant accru, il est probable que l'activité accrue des scramblases joue un rôle dans l'étiologie de la maladie, du moins dans un modèle animal[7],[8].

De surcroît, il est bien connu que les dérivés réactifs de l'oxygène et les flux de Ca2+ intracellulaire altèrent les mitochondries au début de l'apoptose. Les modifications de groupes sulfhydryle sur les scramblases hPLSCR3 des mitochondries lors de l'apoptose pourraient être un mode de régulation déterminant pour déclencher les processus d'apoptose intrinsèques[9],[10].

Notes et références

  1. (en) Santosh Kumar Sahu, Sathyanarayana N. Gummadi, N. Manoj et Gopala Krishna Aradhyam, « Phospholipid scramblases: An overview », Archives of Biochemistry and Biophysics, vol. 462, no 1, , p. 103-114 (PMID 17481571, DOI 10.1016/j.abb.2007.04.002, lire en ligne)
  2. (en) R. F. A. Zwaal, P. Comfurius et E. M. Bevers, « Surface exposure of phosphatidylserine in pathological cells », Cellular and Molecular Life Sciences, vol. 62, no 9, , p. 971-988 (PMID 15761668, DOI 10.1007%2Fs00018-005-4527-3, lire en ligne)
  3. (en) Peter J. Sims et Therese Wiedmer, « Unraveling the Mysteries of Phospholipid Scrambling », Thrombosis and Haemostasis, vol. 86, no 1, , p. 266-275 (PMID 11487015, DOI 10.1055/s-0037-1616224, lire en ligne)
  4. (en) Philippe F. Devaux, Andreas Herrmann, Nina Ohlwein et Michael M. Kozlov, « How lipid flippases can modulate membrane structure », Biochimica et Biophysica Acta (BBA) - Biomembranes, vol. 1778, nos 7-8, , p. 1591-1600 (PMID 18439418, DOI 10.1016/j.bbamem.2008.03.007, lire en ligne)
  5. (en) Therese Wiedmer, Quansheng Zhou, Deborah Y. Kwoh et Peter J. Sims, « Identification of three new members of the phospholipid scramblase gene family », Biochimica et Biophysica Acta (BBA) - Biomembranes, vol. 1467, no 1, , p. 244-253 (PMID 10930526, DOI 10.1016/S0005-2736(00)00236-4, lire en ligne)
  6. (en) Alex Bateman, Robert D. Finn, Peter J. Sims, Therese Wiedmer, Andreas Biegert et Johannes Söding, « Phospholipid scramblases and Tubby-like proteins belong to a new superfamily of membrane tethered transcription factors », Bioinformatics, vol. 25, no 2, , p. 159-162 (PMID 19010806, PMCID 2639001, DOI 10.1093/bioinformatics/btn595, lire en ligne)
  7. (en) Leslie S. Kean, Laura E. Brown, J. Wylie Nichols, Narla Mohandas, David R. Archer et Lewis L. Hsu, « Comparison of mechanisms of anemia in mice with sickle cell disease and β-thalassemia: Peripheral destruction, ineffective erythropoiesis, and phospholipid scramblase-mediated phosphatidylserine exposure », Experimental Hematology, vol. 30, no 5, , p. 394-402 (PMID 12031645, DOI 10.1016/S0301-472X(02)00780-4, lire en ligne)
  8. (en) Kitty de Jong et Frans A. Kuypers, « Sulphydryl modifications alter scramblase activity in murine sickle cell disease », British Journal of Haematology, vol. 133, no 4, , p. 427-432 (PMID 16643451, DOI 10.1111/j.1365-2141.2006.06045.x, lire en ligne)
  9. (en) Jihua Liu, Qiang Dai, Jun Chen, David Durrant, Angela Freeman, Tong Liu, Douglas Grossman et Ray M. Lee, « Phospholipid Scramblase 3 Controls Mitochondrial Structure, Function, and Apoptotic Response », Molecular Cancer Research, vol. 1, no 12, , p. 892-902 (PMID 14573790, lire en ligne)
  10. (en) Jihua Liu, Jun Chen, Qiang Dai et Ray M. Lee, « Phospholipid Scramblase 3 Is the Mitochondrial Target of Protein Kinase C δ-induced Apoptosis », Cancer Research, vol. 63, no 6, , p. 1153-1156 (PMID 12649167, lire en ligne)
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