Sérénade (Biber)

La Sérénade composée par Heinrich Biber pour quatre instruments à cordes et basse continue est une suite de six pièces dansées ou pièces de caractère. Cette suite, présentant diverses innovations de jeu pour les cordes, caractéristiques de leur auteur, a été intégrée dans le catalogue de ses œuvres établi par le musicologue américain Eric Thomas Chafe sous la référence C.75.

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Sérénade
 Serenada a 5 mit dem Nachtwächterlied »'
Genre Sérénade
Nb. de mouvements 6
Musique Heinrich Biber
Effectif Quatuor à cordes
et basse continue
Durée approximative 10 minutes
Dates de composition ca. 1670
Partition autographe Salzbourg, Autriche

Les musicologues s'accordent sur la composition de cette Sérénade, à la cour d'Olmutz ou de Kroměříž, dès 1670[1].

Structure

La Sérénade est composée de six mouvements, toujours en do majeur :

  1. Serenada & Adagio
  2. Allamanda
  3. Aria — noté , correspondant à un mouvement à
  4. Ciacona — noté , correspondant à un mouvement à
  5. Gavotte
  6. Retirada

Présentation

Instrumentation

L'œuvre, composée pour instruments à cordes et basse continue, présente un ensemble différent du quatuor à cordes moderne, qui n'est pas encore fixé dans les années 1670 : on trouve donc deux violons, notés en clef de sol et deux altos, notés en clef d'ut 3e et en clef d'ut 4e — ce dernier instrument pouvant être un violoncelle, mais dont la tessiture ne descend jamais plus bas que la 4e corde de l'alto[2]. La basse continue est traditionnellement confiée au clavecin.

Caractéristiques

La Sérénade porte parfois, en sous-titre, l'indication « Der Nachtwächter » (le veilleur de nuit). En effet, la Ciacona renonce à la basse continue, et propose une ligne de chant pour voix de basse sur un air de ronde très ancien, présent dans un recueil de musique de Bohême dès 1531[1]. Le veilleur de nuit intervient à deux reprises, annonçant la neuvième puis la dixième heure de la nuit :

Premières mesures du chant du Veilleur de nuit.

« Lost Ihr Herrn und lasst euch sagn
Der Hammer der hat neyne gschlagn,
Hüets Feyer, hüets wohl,
Undt lobet Gott den Herrn,
Undt unsre liebe Frau.
 »

Oyez tous en vos demeures,
la cloche a sonné neuf heures.
Tenez-vous blottis près du feu,
Et louez notre Seigneur
Et notre Dame bien-aimée.

Cette évocation, où ne manque pas une allusion à la vierge Marie dans un royaume catholique en pleine Contre-Réforme, anticipe sur des scènes d'opéra, à l'acte II des Meistersinger von Nürnberg (1868) de Wagner  où l'intervention du veilleur de nuit relève de la comédie  et à l'acte III du Doktor Faust (1924) de Busoni, dans une ambiance de tragédie.

La pièce est également remarquable par l'emploi du pizzicato : longtemps avant le Scherzettino de Sylvia de Delibes (1876) ou le 4e mouvement, Allegretto pizzicato, du 4e Quatuor à cordes de Bartók (1928), cette Ciacona est entièrement interprétée en pizzicato. Or, le terme italien n'étant pas encore établi, Biber note « ohne Bogen » (sans l'archet) et « Testudini » (avec les doigts) sur la partition[3]. Le compositeur lui-même décrit la scène ainsi[4] :

« Dans la chaconne, le veilleur de nuit arrive, comme c'est la coutume partout ici de nos jours, pour dire l'heure à haute voix. Et les autres instruments sont tous joués sans archet, comme on fait pour le luth. »

Premières mesures de la mélodie « Der Nachtwächter ».
Ciacona « Der Nachtwächter »
noicon

La Gavotte qui suit alterne encore des sections où les mêmes notes sont jouées « mit dem Bogen » et « ohne Bogen »[5], avec « un résultat du plus bel effet[4] ».

Bibliographie

Édition moderne

  • (de) Paul Nettl, Serenada für fünf Streichinstrumente (Nachtwächter-Bass) und Cembalo, Cassel, Schott, coll. « Nagels-Musik Archiv » (no 112), , 12 p.

Ouvrages spécialisés

Notes discographiques

  • (fr) Philippe Pierlot, Ricercar consort, « Imitatio : musique représentative et stylus phantasticus », p. 7, Mirare MIR 302, 2016 (Lire en ligne).

Discographie

  • A Gala dinner concert at the court of Vienna - Laerte Malaguti, basse ; Mainz Chamber Orchestra, dir. Günter Kehr (1970, LP Turnabout TV-S 34324) (OCLC 3634048)
  • Sinfonia mit Dudelsack und Drehleier : Leopold Mozart - Kurt Moll, basse ; Munich Chamber Orchestra, dir. Hans Stadlmair (1982, Orfeo C033821A) (OCLC 658260883 et 257096394)
  • Scherzi musicali - Musica Antiqua Köln, dir. Reinhard Goebel (, Archiv) (OCLC 30362215)
  • Requiem en fa mineur, trumpet music, Battalia, sonatas - Simon Grass, basse ; New London Consort, dir. Philip Pickett (14-, 2CD L'Oiseau-Lyre/Decca) (OCLC 277005074)
  • Sacro-profanum - Richard Wistreich, Peter Harvey, basse ; Purcell Quartet (11-, Chandos) (OCLC 38300445)
  • Soldiers, gypsies, farmers, and a night watchman - Combattimento Consort Amsterdam, dir. Jan Willem de Vriend (4-, SACD Challenge Classics SACC 72132)[6] (OCLC 64196693)
  • Imitatio - Ricercar Consort et Sophie Gent, Maude Gratton, Philippe Pierlot (, SACD Mirare MIR 302) (OCLC 950032610)

Références

  1. Paul Nettl 1934, p. 2
  2. Paul Nettl 1934, p. 3
  3. Paul Nettl 1934, p. 7
  4. cité par Philippe Pierlot 2016, p. 7
  5. Paul Nettl 1934, p. 10
  6. Ce disque a été distingué d'un « 10 » par Serge Gregory dans le magazine Classica-Répertoire no 71.

Liens externes

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