Qastina

Qastina (en arabe : قسطينة) est un ancien village palestinien situé à 38 kilomètres au nord-est de la ville de Gaza. Il a été vidé de ses habitants au cours de la guerre israélo-arabe de 1948[1].

Situation

Qastina était situé sur une éminence dans la zone généralement plate de la plaine côtière palestinienne, sur la route reliant al-Majdal (Ashkelon) à l'axe Jérusalem - Jaffa. Un camp militaire britannique, Beer Tuvia, se trouvait à 3 km sud-ouest du village[1].

Histoire

Qastina a été intégrée à l'Empire ottoman en 1517 comme le reste du Levant. Selon les registres fiscaux ottomans de 1596, il s'agissait d'un village du nahiya (sous-district) de Gaza situé dans le liwa' (district) de Gaza et comptant 55 ménages et 15 célibataires, soit environ 385 personnes. Tous les villageois étaient musulmans. Ils payaient une taxe d'imposition à taux fixe de 33,3% sur un certain nombre de produits agricoles, notamment le blé, l'orge et le sésame, ainsi que sur les fruits, les chèvres, les ruches d'abeilles et le vignoble ; un total de 13 100 akçe. Les 5/6 de ce revenu allaient à un waqf[2].

En 1838, Edward Robinson voit el-Kustineh au nord-ouest de Tell es-Safi, où il séjourne[3] et indique qu'il s'agit d'un village musulman du district de Gaza[4].

En 1863, l'explorateur français Victor Guérin visite le village, qu'il désigne sous le nom de Kasthineh. Il indique que la localité compte quatre cents habitants. Près de l'ouverture d'un puits se trouvent les restes d'une colonne de marbre ancienne de teinte gris-blanc, tandis que deux palmiers et trois acacia mimosas ombragent le cimetière[5].

Une liste de villages ottomans datant d’environ 1870 indique que Qastina compte 152 maisons et 469 hommes[6],[7]. En 1882, une étude du Palestine Exploration Fund décrit Qastina comme un village aménagé sur un axe nord-ouest - sud-est sur un terrain plat. Le bâti est en briques d'adobe, il y a un puits et des jardins[8].

Période du mandat britannique

Le recensement de Palestine de 1922 effectué par les autorités britanniques indique que le village compte 406 habitants, tous musulmans[9]. Ce chiffre monte à 593 habitants, tous musulmans, et 147 maisons d'après le recensement de 1931[10].

Les villageois disposent d'une mosquée et, en 1936, une école primaire est construite, elles est partagée avec le village voisin de Tall al-Turmus. Au milieu des années 1940, l'école compte 161 élèves[1].

En 1939, le moshav Kfar Warburg s’établit sur d'anciennes terres du village, à 3 km au sud-ouest du bourg[11].

Selon les statistiques de 1945, le village compte 890 habitants, tous musulmans, qui disposent d'un total de 12 019 dounams de terres. Les villageois vivent principalement de l'agriculture. Certains élèvent du bétail et des volailles, d'autres travaillent dans le camp militaire britannique de Beer Tuvia situé à proximité[1]. En 1944/45, 235 dounams sont alloués à la culture des agrumes et de la banane, 7 317 dounams sont consacrés à la céréaliculture, 770 dounams sont irrigués ou plantés de vergers[12] tandis que les zones bâties occupent 37 dounams[13].

Guerre de 1948 et suites

Qastina se situe sur le territoire attribué à l'État arabe dans le cadre du Plan de partage de la Palestine présenté par l'ONU en 1947[14]. Après la déclaration d'indépendance de l'État d'Israël, le , les armées des États arabes voisins portent la guerre contre le nouvel État, entraînant le départ de civils craignant d’être pris au piège entre les belligérants. Les femmes et les enfants de Qastina sont mis en sécurité à Tell es-Safi par les hommes du village, mais ils rebroussent chemin après avoir découvert qu'il n'y a pas suffisamment d'eau dans le village hôte pour répondre à leurs besoins[15].

Un ordre visant à la conquête de Qastina et des autres villages voisins (Masmiya al Kabira, Masmiya al Saghira, Al Tina et Tall al Turmus) est émis par le 51e bataillon de la brigade Guivati et devient exécutif le . Selon Benny Morris, le document recommande « la "liquidation" (hisul) des deux villages de Masmiya et l'"incendie"(bi'ur) du reste »[16].

Le , les forces israéliennes détruisent entièrement le village et ses 147 maisons, après que les habitants eurent fui l'assaut donné par la brigade Givati dans le cadre de l'opération An-Far. Qastina est ensuite utilisée comme point de ralliement par le septième bataillon de la 8e brigade blindée de Tsahal après l'attaque manquée contre Irak al-Manshiyya dans le cadre de la tentative israélienne d'ouvrir une route vers le Néguev pendant l'opération Yoav[17].

Après la guerre, la région est intégrée à l'État d'Israël et quatre villages sont établis sur les terres de Qastina ; Arugot et Kfar Ahim sont fondés en 1949. Puis c'est au tour d'Avigdor en 1950 et Kiryat Malakhi en 1951[11]. Beer Tuvia, également connu sous le nom de Qastina après sa fondation en 1887, est à proximité immédiate.

En 1992, Walid Khalidi note que : « Il ne reste que des restes de maisons éparpillés sur le site. L'équipe de recherche chargée d'enquêter sur l'état actuel des villages dépeuplés s'est rendue sur le site et a constaté qu'il était envahi par les arbustes et des herbes folles d'environ 2 m de haut[1]. » De nos jours, Qastina est le nom courant du carrefour Malakhi.

Références

  1. Khalidi, 1992, pp. 130-131
  2. Hütteroth and Abdulfattah, 1977, p. 149; cited in Khalidi, 1992, p. 130
  3. Robinson and Smith, 1841, vol 2, p. 364
  4. Robinson and Smith, vol 3, 2nd appendix, p. 118
  5. Guérin, 1869, pp. 87 -88
  6. Socin, 1879, p. 156 Also noted it in the Gaza district
  7. Hartmann, 1883, p. 133, noted 157 houses
  8. Conder and Kitchener, 1882, SWP II, p. 410; cited in Khalidi, 1992, p.130
  9. Barron, 1923, Table V, Sub-district of Gaza, p. 9
  10. Mills, 1932, p. 5
  11. Khalidi, 1992, p. 131
  12. Government of Palestine, Department of Statistics. Village Statistics, April, 1945. Quoted in Hadawi, 1970, p. 88
  13. Government of Palestine, Department of Statistics. Village Statistics, April, 1945. Quoted in Hadawi, 1970, p. 138
  14. « Map of UN Partition Plan » [archive du ], United Nations (consulté le )
  15. Morris, 2004, p. 176
  16. Morris, 2004, p. 436
  17. Shapira, 2008, p. 243

Bibliographie

  • Palestine: Report and General Abstracts of the Census of 1922, Government of Palestine, (lire en ligne)
  • C.R. Conder et H. H. Kitchener, The Survey of Western Palestine : Memoirs of the Topography, Orography, Hydrography, and Archaeology, vol. 2, Londres, Committee of the Palestine Exploration Fund, (lire en ligne)
  • Department of Statistics, Village Statistics, April, 1945, Government of Palestine, (lire en ligne)
  • V. Guérin, Description Géographique Historique et Archéologique de la Palestine, vol. 1: Judee, pt. 2, Paris, L'Imprimerie Nationale, (lire en ligne)
  • S. Hadawi, Village Statistics of 1945 : A Classification of Land and Area ownership in Palestine, Palestine Liberation Organization Research Centre, (lire en ligne)
  • M. Hartmann, « Die Ortschaftenliste des Liwa Jerusalem in dem türkischen Staatskalender für Syrien auf das Jahr 1288 der Flucht (1871) », Zeitschrift des Deutschen Palästina-Vereins, vol. 6, , p. 102–149 (lire en ligne)
  • (en) Wolf-Dieter Hütteroth et Kamal Abdulfattah, Historical Geography of Palestine, Transjordan and Southern Syria in the Late 16th Century, Erlangue, Erlanger Geographische Arbeiten, Sonderband 5. Erlangen, Germany: Vorstand der Fränkischen Geographischen Gesellschaft, , 225 p. (ISBN 3-920405-41-2, lire en ligne)
  • (en) W. Khalidi, All that remains : the Palestinian villages occupied and depopulated by Israel in 1948, Washington, Institute for Palestine Studies, , 636 p. (ISBN 0-88728-224-5, lire en ligne)
  • Census of Palestine 1931. Population of Villages, Towns and Administrative Areas, Jerusalem, Government of Palestine, (lire en ligne)
  • B. Morris, The Birth of the Palestinian Refugee Problem Revisited, Cambridge University Press, , 640 p. (ISBN 978-0-521-00967-6, lire en ligne)
  • E. H. Palmer, The Survey of Western Palestine : Arabic and English Name Lists Collected During the Survey by Lieutenants Conder and Kitchener, R. E. Transliterated and Explained by E.H. Palmer, Committee of the Palestine Exploration Fund, (lire en ligne)
  • E. Robinson et E. Smith, Biblical Researches in Palestine, Mount Sinai and Arabia Petraea : A Journal of Travels in the year 1838, vol. 2, Boston, Crocker & Brewster, (lire en ligne)
  • E. Robinson et E. Smith, Biblical Researches in Palestine, Mount Sinai and Arabia Petraea : A Journal of Travels in the year 1838, vol. 3, Boston, Crocker & Brewster, (lire en ligne)
  • A. Shapira (trad. Evelyn Abel), Yigal Allon; Native Son; A Biography, University of Pennsylvania Press, , 384 p. (ISBN 978-0-8122-4028-3, lire en ligne)
  • A. Socin, « Alphabetisches Verzeichniss von Ortschaften des Paschalik Jerusalem », Zeitschrift des Deutschen Palästina-Vereins, vol. 2, , p. 135–163 (lire en ligne)

Liens externes

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