Procès de Ghazi Béji et Jabeur Mejri

Le procès de Ghazi Béji et Jabeur Mejri, deux civils tunisiens, conduit en 2012 à leur condamnation à sept ans et demi de prison pour « atteinte à la morale, diffamation et perturbation de l'ordre public » après leur publication de caricatures du prophète Mahomet sur Facebook.

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Mejri est gracié par le président de la République, Moncef Marzouki, le et libéré le 4 mars malgré l'attente de son jugement pour d'autres affaires de droit commun.

Procès

Jabeur Mejri est traduit devant la cour alors que Ghazi Béji est en fuite en Europe pour échapper à la persécution. Tous deux sont condamnés, le , à sept ans et demi de prison et une amende de 1 200 dinars chacun par le tribunal de première instance de Mahdia pour « atteinte à la morale, diffamation et perturbation de l'ordre public » après leur publication de caricatures du prophète Mahomet sur Facebook[1],[2].

La peine est confirmée par la cour d’appel de Monastir le [3] puis par la Cour de cassation de Tunis le [4]. L'avocat de Mejri objecte pour son client, le qualifiant d'« instable mentalement » et de chômeur durant les six années précédentes[5].

Réactions officielles

Le porte-parole de la présidence de la République, Adnen Manser, affirme que « les attaques contre les symboles sacrés de l'islam » ne peuvent être considérées comme relevant de la liberté d’expression et qualifie l'acte de Mejri de « forme d'extrémisme »[6].

Le , lors d'une conférence au Council on Foreign Relations, le président Marzouki déclare que Mejri ne peut être libéré pour le moment et justifie cette prise de position par la « présence de salafistes violents en Tunisie qui mettraient sa vie en danger »[7]. Il affirme par ailleurs dans une interview accordée à France Info le 6 novembre qu'il « va le faire libérer », qu'il attend une « accalmie politique » et qu'il « ne veut pas que cette libération soulève des débats »[8].

Réactions nationales et internationales

Initialement, quelques organisations s'expriment sur l'affaire, telles que la Ligue tunisienne des droits de l'homme et Reporters sans frontières, ainsi que des militants indépendants[9].

Amnesty International

Amnesty International qualifie Mejri et Béji de prisonniers d'opinion condamnés seulement pour leur point de vue pacifique. L'organisation décrit l'affaire comme une attaque montée par le gouvernement tunisien contre la liberté d'expression et appelle à l'annulation immédiate de la sentence[10].

International Freedom of Expression Exchange

International Freedom of Expression Exchange décrit l'affaire comme un événement extrêmement perturbant, l'une des attaques répétitives contre les journalistes, artistes et femmes qui ont « commis » le crime d'exprimer librement leurs opinions[11].

Médias

Reuters considère que le procès est une confirmation que les islamistes, au pouvoir en Tunisie après la révolution de 2011, tentent de supprimer la liberté d'expression[12].

Associated Press décrit quant à elle l'affaire comme choquante pour les Tunisiens et un signe de l'importance de l'islam en Tunisie.

Deutsche Welle cite la désillusion post-révolution pointée par les blogueurs tunisiens qui déclarent que « la révolution a échoué ». Un blogueur en fait un exemple de la condamnation « sélective » du gouvernement, les appels à la violence et au terrorisme sur Facebook n'étant jamais pris au sérieux.

Grâces et libérations

Le , une demande de grâce présidentielle est déposée par l'avocate Bochra Belhaj Hmida auprès du ministère de la Justice[13]. Cette dernière n'a pas de suite et Mejri reste en prison. La grâce est finalement accordée le [14],[15] et Jabeur Mejri libéré le 4 mars[16].

Il est à nouveau arrêté le 18 avril pour insulte à un greffier[17] et condamné le 29 avril à huit mois de prison ferme[18], avant d'être gracié le 14 octobre[19].

Notes et références

  1. « Tunisie : 7 ans de prison pour avoir posté des caricatures de Mahomet sur Facebook », L'Express, 5 avril 2012
  2. « Sept ans de prison pour avoir posté des caricatures du prophète sur Facebook », Le Monde, 5 avril 2012
  3. « Tunisie : sept ans et demi de prison pour des caricatures de Mahomet », Libération, 25 juin 2012
  4. « Pas d’examen en cassation pour Jabeur Mejri », Webdo, 26 avril 2013
  5. (en) « Jailed Tunisian loses appeal over Facebook Prophet Mohammad cartoons », Al-Arabiya, 25 juin 2013
  6. « Tunisie : 7 ans de prison pour les caricatures du Prophète », Mag14, 25 juin 2012
  7. « Moncef Marzouki justifie l’emprisonnement de Jabeur Mejri », Business News, 26 septembre 2013
  8. « Négociations en Tunisie : Moncef Marzouki « extrêmement optimiste » », France Info, 6 novembre 2013
  9. (en) « Tunisia: Two atheist friends convicted for blasphemy », UNCUT, 5 avril 2012
  10. (en) « Tunisia: Mounting attacks on freedom of expression », Amnesty International, 24 avril 2012
  11. « Le TMG de l'IFEX s'inquiète des attaques répétées qui ciblent les manifestants, les médias, les acteurs et les universitaires », IFEX, 10 avril 2012
  12. (en) « Tunisians jailed for Facebook cartoons of Prophet », Reuters, 6 avril 2012
  13. « Tunisie : #FreeJabeur, ou la campagne de soutien du premier prisonnier d'opinion post révolution », Tunisie Haut Débit, 27 août 2013
  14. « Caricatures de Mahomet sur Facebook : le Tunisien Jabeur Mejri gracié mais pas encore libre », Jeune Afrique, 19 février 2014
  15. « Jabeur Mejri gracié pour l’affaire des caricatures du Prophète », Webdo, 19 février 2014
  16. « Caricatures de Mahomet : le Tunisien Jabeur Mejri est sorti de prison », Radio France internationale, 5 mars 2014
  17. « Jabeur Mejri emprisonné (à nouveau) pour avoir insulté un greffier », Al Huffington Post, 18 avril 2014
  18. « Prison dans une autre affaire pour Jabeur Mejri, gracié après l'affaire des caricatures », Al Huffington Post, 29 avril 2014
  19. « Tunisie : gracié par la présidence, Jabeur Mejri a été libéré », Al Huffington Post, 15 octobre 2014

Articles connexes

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