Mat de Legal
Le mat de Legal est un schéma de mat que l'on peut trouver dans plusieurs positions durant la phase d'ouverture d'une partie d'échecs. Il tire son nom d'une partie miniature qui aurait[1] été disputée entre Kermur de Legal et Saint-Brie en 1750 à Paris. Il consiste à sacrifier la Dame pour activer les deux cavaliers et un fou et exploiter la faiblesse de la case f7.
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Partie Legal – Saint-Brie, Paris, 1750
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La partie a été publiée pour la première fois en 1835[1],[2].
1. e4 e5
2. Fc4 d6
3. Cf3 Fg4?! (coup douteux)[note 1]
4. Cc3 g6?
5. Cxe5!! (excellent coup) Fxd1?? (coup perdant)[note 2]
6. Fxf7+ Re7
7. Cd5 mat
L'ordre des coups repris ici est celui donné par Xavier Tartakover[3] et Nicolas Giffard[4]. Mais on trouve aussi 1. e4 e5 2. Cf3 d6 3. Fc4 Fg4 4. Cc3 g6, ainsi que d'autres ordres de coups. Dans la partie présentée ci-dessus, le pseudo-sacrifice 5. Cxe5 est juste car les Blancs gagnent au minimum un pion et la paire de fous.
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Cependant, George Walker, premier éditeur de la partie indique que les coups joués furent : 1. e4 e5 2. Fc4 d6 3. Cf3 Cc6 4. Cc3 Fg4 5. Cxe5? Fxd1?? 6. Fxf7+ Re7 7. Cd5 mat[5]. Selon François Chevaldonnet qui présente cette position dans un recueil de combinaisons, « Le sacrifice 5. Cxe5?? s'avère simplement stupide si les Noirs évitent de se précipiter sur la Dame par 5... Fxd1?? et répondent par le solide 5... Cxe5!, défendant le fou g4. »[6]. Si les coups indiqués par George Walker sont ceux joués lors de la partie, le coup 5. Cxe5 de Legal serait un piège destiné à abuser un joueur débutant, dans le style des romantiques comme Greco.
Alexandre Kotov donne un autre ordre de coups où les Noirs ne sortent pas le cavalier en c6 : 1. e4 e5 2. Cf3 d6 3. Fc4 h6 4. Cc3 Fg4 5. Cxe5? Fxd1 6. Fxf7+ Re7 7. Cd5 mat. L'attaque est selon lui possible parce que les Blancs jouissent d'une avance de développement visible au quatrième coup (les blancs ont sorti trois pièces, les noirs une seule, et sa case est mauvaise). Il souligne par ailleurs que sur 5... dxe5 6. Dxg4 les blancs ont une bonne position avec un pion de plus, mais que cela reste la moins mauvaise solution pour les noirs[7].
Partie Chéron - Jeanloz, 1929
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C'est une partie miniature jouée par André Chéron avec les Blancs lors d'une séance de simultanée à Leysin en 1929[8],[9].
- 1. e4 e5
- 2. Cf3 Cc6
- 3. Fc4 d6
- 4. Cc3 Fg4
- 5. h3[note 3] (et non 5. Cxe5? comme on l'a vu précédemment.)
- 5... Fh5? (perd au minimum un pion. 5... Fxf3[8] ou 5... Fe6 sont jouables.)
- 6. Cxe5 Fxd1?? (6... Cxe5 7. Dxh5 Cxc4 8. Db5+ c6 9. Dxc4 ou 7... Cf6 8. De2[note 4] ne perdent qu'un pion)
- 7. Fxf7+ Re7
- 8. Cd5 mat
5. h3 a dévié le fou noir de g4, case sur laquelle il aurait été protégé par son cavalier après 6... Cxe5.
Le pseudo-sacrifice de Legal
La partie Legal contre Saint-Brie est à l'origine d'un thème tactique, le pseudo-sacrifice de Legal. Le déplacement du cavalier f3 (ou f6), qui est soumis à un clouage relatif de la part d'un fou adverse, laisse la dame d1 (ou e2, d7 et e8) en prise. Ce n'est pas un vrai sacrifice car en cas d'acceptation de la dame, le joueur ayant déplacé le cavalier cloué se retrouve avec un avantage matériel décisif, voire en position de faire mat, après la combinaison.
Voici une courte liste, non exhaustive, de parties comportant des combinaisons basées sur le pseudo-sacrifice de Legal :
- Bernhard Horwitz - Ludwig Bledow, Berlin, 1837[10].
- Joseph Henry Blackburne contre un amateur, exhibition simultanée, Manchester, 1885[11].
- Siegbert Tarrasch - Mikhaïl Tchigorine, Saint-Pétersbourg, 1893, cinquième partie du match[12].
- Jacques Mieses - Oehquist, Nuremberg, 1895[13].
- Alexandre Alekhine - Oscar Tenner, Cologne, 1911[14].
- Sergueï Smaguine - Dragutin Šahović, Bienne, 1990[15].
Postérité
La partie Legal contre Saint-Brie est présente dans de très nombreux manuels généraux en français sur les échecs à titre :
- d'exemple de partie miniature pour mettre en valeur les erreurs des débutants,
- d'illustration des nécessités d'un développement rapide,
- de tableau de mat,
- d'illustration du clouage relatif.
Dans les ouvrages sur l'histoire des échecs, cette partie sert à illustrer le passage du style des joueurs italiens du XVIIIe siècle, qui jouent des coups optimistes pour provoquer la faute de l'adversaire, à un style de jeu plus sain basé sur des coups justes (c'est le seul exemple conservé du jeu de celui qui fut le maître de Philidor).
Notes et références
Notes
- Il est dangereux de clouer ce cavalier tant que l'on n'a pas soi-même roqué, du fait de la séquence de coups Fc4xf7+, Cf3-g5+ (protégé par le Fc1 lorsque d2 a été joué) et Dd1xFg4
- Sur 5...dxe5, il suit 6. Dxg4, et les Blancs ont gagné un pion et la paire de fous
- La base de données Big Database 2010 indique que 5. h3 a été joué lors de 130 parties et pour la première fois en 1892. Cependant cette base ne contient pas la partie Chéron/Jeanloz.
- Variantes calculées par le programme d'échecs Fritz 12
Références
- Dominique Thimognier, « Héritage des échecs français »
- (en) Legal - Saint-Brie 1750 sur ChessGames.com
- Xavier Tartakover, Bréviaire des échecs, Stock, , p. 99-100
- Nicolas Giffard, Le Guide des échecs : traité complet, Paris, Robert Laffont, , p. 37-38 et 343
- George Walker, « A Selection of Games at Chess, actually played by Philidor and his Contemporaries », Londres, Sherwood, Gilbert and Piper, , p. 91
- François Chevaldonnet, L'Art de la combinaison, Paris, Payot et Rivages, , p. 108, exercice 452, solution p. 185
- Alexandre Kotov, L'École des échecs, vol. 2, Hatier, , 218 p. (ISBN 2-218-03519-7), p. 12
- Tartakover 1933, p. 105
- (en) Chéron-Jeanloz sur ChessGames.com
- (en) Horwitz-Bledow 1837 sur ChessGames.com
- (en) Blackburne-NN 1885 sur ChessGames.com
- (en) Tarrasch-Tchigorine 1893 sur ChessGames.com
- (en) Mieses-Oehquist 1895 sur ChessGames.com
- (en) Alekhine-Tenner 1911 sur ChessGames.com
- (en) Smagin-Sahovic 1990 sur ChessGames.com