Magistrat de Lille
Le Magistrat de Lille, également nommé la loy, désignait les membres de l’administration municipale (une quarantaine) avant 1790.
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Origine
Le fonctionnement et le mode de désignation de la municipalité fixés par une Charte de la comtesse Jeanne de 1235 ont peu varié jusqu'en 1789 sauf modifications mineures en 1346, 1347 et 1478[1].
Les historiens estiment que cette Charte de 1235 a codifié une institution communale préexistante. Le plus ancien document portant le sceau de la ville date de 1200 et figure sur le traité de Péronne entre Baudouin IX et Philippe-Auguste confirmé par les principales villes de Flandre.
D’après Victor Derode, les privilèges de Lille dateraient de l'origine de la ville[1].
Alexandre de Saint-Léger estime que la formation de la commune fut progressive. À l'origine, le châtelain, agent du comte de Flandre, aurait exercé la police et la justice et un mayeur héréditaire l'administration. De leur côté, les habitants auraient formé un pacte d'amitié pour maintenir la paix dans la ville avec un tribunal spécial veillant à son maintien. La suppression du mayeur héréditaire en 1185 serait à l'origine du gouvernement communal[2].
Mode de désignation
Des commissaires délégués du Prince, c’est-à-dire sous les dominations successives du Comte de Flandre, du Roi de France à plusieurs périodes, du Duc de Bourgogne, de l'Empereur du Saint-Empire, étaient chargés de choisir chaque année à la Toussaint 12 échevins après avoir pris l’avis des curés des 4 paroisses de Saint-Pierre, Saint-Maurice, Saint-Etienne et Saint-Sauveur. Les échevins étaient choisis parmi les bourgeois de la ville et n’étaient pas rééligibles pendant 3 ans[2].
La bourgeoisie de Lille était une société fermée composée de bourgeois de naissance et de bourgeois d'achat.
Les bourgeois de naissance, fils de bourgeois, étaient tenus de racheter leur titre à leur émancipation ou dans l'année suivant leur mariage. Le droit était fixé à 30 sols soit la moitié de celui versé par les bourgeois d'achat.
Le nouveau bourgeois inscrit dans un registre devait être propriétaire dans la ville, être d'un état assez élevé pour être agréé par l'échevinage, payer un droit de 60 sous et prêter serment dans la Halle échevinale en présence du Conseil de la ville[3]. La qualité de bourgeois était perdue en cas de crime de droit commun, d'insolvabilité et de violation du devoir d'assistance aux bourgeois[3].
4100 nouveaux bourgeois ont été inscrits dans le registre de la bourgeoisie de 1291 à 1356. Le nombre de bourgeois s'élevait à environ 600 familles au début du XVe siècle, soit de 12 à 15 % de la population, de 1000 familles en 1477 dont 750 résidents à Lille et 250 à l'extérieur[4]. La bourgeoisie ne comprenait donc qu’une minorité de la population de Lille sans être cependant limitée à une élite très restreinte. En effet, le registre comprend les noms d’artisans, de petits boutiquiers et de personnes modestes.
Le bourgeois n’était justiciable en personne et de ses biens que devant l’échevinage[3].
Le choix des échevins excluait, en outre, les célibataires, les avocats, les agents du roi, les clercs, les bâtards. Les échevins devait être mariés, bons catholiques, non parents entre eux ni avec ceux qui les ont précédés jusqu’au quatrième degré excluant donc les cousins germains.
A partir de 1344, les échevins devaient être natifs de Lille. Après le XVe siècle cette condition ne fut exigée que pour le Mayeur et le Rewart, les échevins n’ayant que l’obligation d’être résident depuis 1 an[3].
Le Mayeur chef de la justice qui présidait les assemblées des échevins et le Rewart chef de la police étaient également nommés par les commissaires du Prince dans une séance particulière[1].
Les échevins choisissaient huit prud’hommes chargés de la répartition des impôts, 8 jurés , 5 appaiseurs réglant les menus différends entre bourgeois, 4 Comtes de la Hanse, trésoriers rendant compte à l’échevinage de l’emploi des finances de la ville et 5 gardes-orphenes chargés de gérer les biens des orphelins mineurs[1],[2].
Dans les faits, les échevins étaient choisis, non dans l’ensemble de la bourgeoisie, mais dans un petit cercle de nobles et de riches bourgeois. Le nombre de nobles est passé de 19 parmi les 35 rewarts et mayeurs de la période 1560 à 1619 à 26 sur 28 pour la période de 1621 à 1667[4]. Le , le gouverneur de la ville demanda aux commissaires de choisir les échevins parmi les gentilshommes,rentiers et personnes qualifiées[2]. Un ou deux marchands au plus pouvaient en faire partie. A partir du XVIIe siècle la municipalité fut recrutée dans une caste de plus en plus étroite.
L’échevinage, le Mayeur et le Rewart étaient renouvelés en principe chaque année (exceptionnellement reconduits une deuxième année) mais ces fonctions étaient pratiquement monopolisées par un petit nombre de familles. Les mêmes personnes, non rééligibles immédiatement, exerçaient plusieurs fois les fonctions de Mayeur, de Rewart ou d’échevin[5],[6].
Les pouvoirs du magistrat
Les pouvoirs du magistrat étaient très étendus : justice civile et criminelle, haute, moyenne et basse, levée des impôts, police, administration , urbanisme. Le magistrat avait le droit de jugement en dernier ressort sans appel. Les souverains successifs ont accepté de maintenir les privilèges de la ville. Le Magistrat s’est constamment attaché à maintenir ses droits et à les défendre face au pouvoir royal qui avait une compétence judiciaire limitée aux cas royaux et à la châtellenie hors de la ville et face au Chapitre de Saint-Pierre[7].
Références
- Victor Derode, Histoire de Lille et de la Flandre Wallonne. Tome 2, Lille, De Vanackère, , p. 406, 408, 409, 413, 418, 420
- Alexandre de Saint-Léger, Histoire de Lille Tome 1 : des origines au XVIIe siècle, Cressé, Editions des régionalismes, 2011 (réédition d'un ouvrage paru en 1942) (ISBN 978-2-8240-0173-9), p. 15, 16, 36, 37
- Simone Poignant, Les bourgeois de Lille au XIVe siècle, Lille, Raoust, , p. 68
- Denis Clauzel, Lille pendant la période bourguignonne, Dunkerque, Edition des beffrois, , 285 p. (ISBN 2-903077-29-0), p. 257
- Alain Lottin, Lille d'Isla à Lille Métropole, Lille, La Vois du Nord, , 198 p. (ISBN 2-84393-072-3), p. 62
- Louis Trenard, « Notables de la région lilloise au seuil du XIXe siècle », Revue du Nord, 1981 volume 63, p. 171 (lire en ligne)
- Jacques Lorgnier, « La juridiction privilégiée du magistrat face aux officiers de justice du Prince à Lille, XIVe-XVIIe siècle », Revue du Nord, 1993 volume 75, p. 847 à 891 (lire en ligne)
Annexe : bibliographie
Lille, de 1667 à 1789. d'après le cours de M. de Saint-Léger Revue du Nord 1921 Volume 7 pages 290-303 http://www.persee.fr/doc/rnord_0035-2624_1921_num_7_28_1305
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