Méthanier
Un méthanier est un navire servant à transporter du gaz naturel liquéfié dans ses citernes. On appelle ces navires aussi LNG (en anglais : Liquefied natural gas) tankers. Il est livré dans des unités portuaires spécialisées dites « port méthanier ».
Le gaz naturel
Le gaz naturel est présent dans des gisements souterrains, où il côtoie généralement des gisements de pétrole. Il est composé de méthane pour 60 à 95 % (typiquement 95 %), ainsi que d'éthane, de propane, de butane et d'azote. Il a longtemps été négligé car présentant beaucoup moins d'intérêt que le pétrole : il est deux fois plus énergétique par gramme en moyenne que celui-ci mais il est difficile à stocker et à transporter jusqu'au consommateur et son utilisation en chimie organique est limitée. Mais l'envolée des prix du pétrole a favorisé ces dernières années son exploitation à des fins commerciales ; sa production, qui croît régulièrement d'environ 3 % par an, s'établissait en 2005 entre 2 500 et 3 000 milliards de m³.
Le transport du gaz naturel
Le gaz naturel a longtemps été transporté uniquement par voie de terre via des gazoducs. Différents facteurs ont favorisé ces dernières années le développement du mode de transport maritime qui croît plus vite que le transport par gazoduc : l'éloignement des champs de production par rapport aux zones de consommation, la souplesse apportée par ce mode de transport. Aujourd'hui le transport par méthanier a une part modale un peu inférieure à 10 % du volume de gaz transporté. Les principales routes fréquentées par les méthaniers relient les champs de production de l'Indonésie au Japon, ceux du Proche-Orient aux pays développés (Japon, Europe, États-Unis), ceux du Nigeria et de l'Algérie à l'Europe.
Traitement du gaz brut
Tous les gisements sont équipés d’installations de séchage. On peut alors décomposer le processus en deux étapes :
- Désulfuration du gaz c’est-à-dire élimination du sulfate d'hydrogène.
- Fractionnement par distillation du gaz désulfuré : on obtient de l’éthane, du propane, du butane, des essences et le gaz épuré, qui est constitué de méthane pratiquement pur.
Mode de transport
À température et pression ambiante, le gaz naturel possède une masse volumique très faible. Ainsi, pour le transporter dans des conditions économiquement viables, il est nécessaire d'augmenter sa masse volumique.
Il y a deux méthodes permettant d'augmenter la masse volumique et la densité du gaz naturel :
- en le liquéfiant : pour le conserver à l'état liquide, sa température est maintenue à environ −162 °C ;
- en augmentant la pression.
Pour le transport du gaz naturel liquéfié (GNL), c'est la première méthode qui est retenue. Le GNL est ainsi transporté à pression atmosphérique à la température de −162 °C. Cette température est maintenue en confinant le gaz liquéfié dans des citernes comportant un isolant thermique. L'isolation ne peut empêcher une partie de la cargaison de se réchauffer et de repasser à l'état gazeux durant le transport à raison, en moyenne, de 0,15 % du volume total par jour. Le gaz qui s'échappe est selon le type de méthanier et la quantité évaporée, soit brûlé pour la propulsion du méthanier, soit libéré dans l'atmosphère au moyen de cheminées coiffant les cuves, ou sur certains modèles récents reliquéfié.
Le méthane a une densité particulièrement faible de 442 kg/m3. Pour un même tonnage, ses citernes occupent un volume beaucoup plus important que sur un pétrolier.
Le méthanier : un navire aux caractéristiques typées
Un méthanier présente de nombreuses particularités découlant des caractéristiques physiques du GNL, de la dangerosité de ce type de cargaison et de sa température de stockage.
Du fait de la faible densité du GNL qui nécessite de grands volumes, le méthanier est un navire haut sur l'eau. Sa cargaison est transportée généralement dans 4 à 5 cuves. En 2006 le plus grand méthanier du monde, le Provalys livré à Gaz de France, avait une capacité de 154 500 m3 pour une longueur de 290 m, une largeur de 43 m, un tirant d'eau de 12 m et un tirant d'air de 40 m. Les méthaniers se déplacent généralement à une vitesse moyenne de 19 nœuds.
Le GNL s'il arrive à s'échapper, à la suite d'une rupture de la coque, s'évapore et peut, à la moindre étincelle, s'enflammer si le mélange air-gaz se trouve dans les limites de combustion (proportion de GNL comprise entre 5 et 15 %). Le navire lui-même ne peut pas exploser, car le GNL qui reste à l'intérieur du navire privé de comburant ne peut pas s'enflammer.
Pour réduire ce risque, le méthanier est pourvu d'une double coque qui permet, en cas d'accident (échouement, collision), de limiter la probabilité qu'une cuve soit éventrée. La cuve elle-même comporte une double barrière remplie d'azote gazeux destiné à empêcher toute réaction avec l'oxygène atmosphérique. Un tel accident n'est jamais arrivé, et les dispositifs de détection de fuite de gaz et de lutte contre l'incendie sont si fiables que le personnel est autorisé à fumer dans les espaces dédiés à l'habitation. Pour limiter l'impact d'une explosion, dans de nombreux pays, dès qu'un méthanier s'est engagé dans un chenal, l'accès au chenal est interdit à tout autre navire (dans le cas où les bateaux se croiseraient). Un bateau peut suivre un méthanier mais en aucun cas le croiser.
Une autre particularité des méthaniers est qu'ils sont le plus souvent propulsés par une installation à vapeur, bien que ce mode de propulsion tende aujourd'hui à être remplacé par un diesel admettant aussi bien des carburants classiques que du GNL. En effet, le gaz naturel liquéfié s'évapore naturellement malgré l'isolation des cuves (il existe d'ailleurs des mâts de décharge obturables afin d'évacuer ce gaz à l'atmosphère en toute sécurité). Dans la mesure du possible, ces pertes sont récupérées afin d'alimenter les chaudières en remplacement du carburant ou en complément. De ce fait, ce type de navire est probablement le plus économique en pétrole, et peu polluant étant donné la qualité de la combustion du gaz. Il existe aujourd'hui de nouveaux types de méthaniers propulsés par un système diesel-électrique, ces installations ayant un rendement supérieur.
Typologie
En 2010, on compte environ 360 méthaniers en service à travers le monde.
Il y a actuellement trois types de méthaniers correspondant chacun à une technique de fabrication des cuves : les méthaniers à membrane, à sphères et les Prismatic IHI.
Pour le premier système, les cuves sont intégrées à la coque du navire. Dans les deux premiers cas, il existe une membrane dite secondaire qui retient le gaz liquide en cas de rupture de la membrane primaire.
Deux types de systèmes d'isolation (membrane, caisson d'isolation et seconde barrière) ont été développés par une société française, Gaztransport & Technigaz (GTT) : NO96 et MarkIII. Un troisième système (CS1) a été récemment mis en service (2006), et il existe actuellement trois navires de ce type en service.
Méthaniers à membrane (type « membrane », et non type « A »)
- Membrane inox (système Technigaz) : les cuves (en général au nombre de quatre) sont isolées par des blocs de mousse polyuréthane renforcée recouverte par une membrane en inox de 1,2 mm gaufrée. La forme ondulée de la membrane permettant d’absorber les efforts dus à la contraction thermique de l’inox pendant le transport du gaz à l’état liquide (−163 °C). Exemple de méthanier de ce type : Mark III.
- Membrane Invar (système Gaz Transport) : dans ce système, l’isolation est réalisée à l'aide de caissons de contreplaqué remplis de perlite (billes de roche volcanique) ou de laine de verre recouverte d’une membrane en Invar d'une épaisseur de 0,7 mm, le tout en deux couches. L'Invar est un alliage composé d'approximativement 36 % de nickel, ce qui réduit son coefficient d'expansion thermique (limite les forces de traction internes dues à la dilatation/rétraction du métal). L'aspect n'est donc plus gaufré étant donné qu'il y a moins de tensions mais s'approche plus d'un plancher à lattes parallèles. La déformation du métal n'a pas lieu, à la différence des membranes inox.
Il existe d'autres systèmes à membrane développés en interne, notamment par GTT ; c'est une combinaison des membranes Invar et de l'isolation polyuréthane. Isolation des cuves (Invar ou inox) : la citerne doit être vue comme une double succession d'une membrane (Invar ou inox) et d'un caisson de contreplaqué (épaisseur d'environ 20 cm). La première isolation (la plus proche de la cargaison) est appelée inter-barrier space, la seconde (plus proche de l'eau) insulation space. Ces deux épaisseurs sont « inertées » à l'azote (diminution de la concentration d'oxygène sous 2 %, en augmentant celle de l'azote, afin d'éviter tout risque d'ignition ou d'explosion).
Les navires à membranes constituent en 2009 plus de 60 % de la capacité de transport mondiale de GNL et plus de 85 % en termes de navires du carnet de commande. Cette technologie est la seule qui ait permis à ce jour la réalisation de navires de grande dimension de type QFLEX (210 000 m3) et QMAX (260 000 m3) qui desservent actuellement les consommateurs à partir de gaz extrait et liquéfié au Qatar.
Méthaniers à sphère (types B et C)
Les méthaniers à sphère se composent de quatre à cinq cuves sphériques en aluminium recouvertes d'une isolation. Les sphères ne sont pas intégrées à la coque et dépassent du pont du navire.
Les méthaniers à sphère sont également appréciés par les armateurs et sont moins sensibles au ballottement[1] que les navires à membrane. Toutefois, cette particularité ne constitue aucunement un avantage dans l'utilisation des cuves des navires à sphère avec des remplissages partiels, ces dernières étant (autant) sensibles (que les membranes) aux chocs thermiques résultant du balayage des parois de cuve par le liquide froid. Par ailleurs, à capacité de transport égale, les navires à cuves sphériques sont plus longs, plus larges et plus lourds que leurs concurrents à membrane, ce qui justifie en grande partie la préférence mondiale pour la technologie française à membrane. Par contre, les méthaniers en type B n'ont jamais eu aucun problème de ballottement, ce qui est assez fréquent sur les membranes, et peut conduire à la perte du navire.
- Sphérique type B : même principe que Prismatic, mis à part que ces citernes sont sphériques.
- Sphérique type C : ces citernes sont prévues et renforcées pour transporter le gaz liquéfié par compression.
Méthaniers prismatiques (type B)
Les méthaniers prismatiques (SPB) sont constitués de conteneurs en aluminium indépendants dans la coque. Ce principe est utilisé par le Japonais IHI sur le Polar Eagle et l’Artic Sun, et le coréen Samsung HI qui en construit trois pour Flex LNG (2009). Le transport s'effectue à −163 °C. Ces citernes ont été développées par études analytiques effectuées sur des maquettes. L'architecture de ces citernes est étudiée plus précisément que celle des type A, on a de meilleurs comptes rendus quant à la résistance à la fatigue, aux tensions et à la propagation de fissures éventuelles. Ainsi pour les citernes type B, une seule isolation est nécessaire : la citerne est posée sur la coque du navire, on ne place une seconde isolation qu'entre le fond de la citerne et la quille du navire, pour protéger l'armature de la coque d'un écoulement éventuel de gaz liquide qui pourrait, en gelant l'acier, causer un affaiblissement de la structure. Le coût des recherches au développement est donc compensé par la réduction de l'épaisseur d'isolation supplémentaire.
Constructions
La plupart des méthaniers sont fabriqués en Asie. La Corée du Sud est dans les années 2000 en tête des productions mondiales avec les chantiers navals de Daewoo, Samsung et Hyundai. Le Japon est le second producteur.
Au début des années 2000, les plus grands en service ont une capacité de 140 000 m3 mais les Chantiers de l'Atlantique à Saint-Nazaire ont livré deux navires plus grands : le Provalys livré le puis le Gaselys, sister-ship du Provalys le : (longueur de 290 m, largeur de 43,5 m et un tirant d'eau de 11,7 m pour une capacité de 154 000 m3).
En 2011, les capacités des navires ont considérablement augmenté. Le méthanier Rasheeda, un Q-max, mis en service en a une capacité de 266 000 m3 ce qui en fait un des plus grands au monde[2].
Notes et références
- Sloshing : phénomène occasionné par les mouvements d'un liquide à surface libre dans un réservoir, en particulier les chocs contre les parois. Voir Sloshing.
- ME-GI engine onboard Q-max Rasheeda commissioned
Voir aussi
Articles connexes
Liens externes
- Une page de la Société Chimique de France sur le Gaz Naturel
- Site Gaz de France sur le méthanier Provalys
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