Médée (Cherubini)

Médée est un opéra-comique en trois actes composé par Luigi Cherubini sur un livret en français de François-Benoît Hoffman[2] et créé le par Luigi Cherubini au théâtre Feydeau[2] à Paris.

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Médée
Medea
Luigi Cherubini (1760-1842) par Ingres
Genre Opéra-comique
Nbre d'actes 3 actes
Musique Luigi Cherubini
Livret François-Benoît Hoffman
Langue
originale
Français
Sources
littéraires
Tragédies éponymes de Pierre Corneille et d'Euripide
Durée (approx.) 140 minutes
Création
Théâtre Feydeau

Personnages

  • Médée, épouse de Jason
  • Jason, chef des Argonautes
  • Dircé,[1] fille de Créonte
  • Néris, servante de Médée
  • Créon, roi de Corinthe
  • Un chef de la garde du roi, première servante, deuxième servante

Une version italienne, traduite d'une version allemande (avec les dialogues réécrits en récitatifs) de Franz Lachner par Carlo Zangarini, a été créée à la Scala de Milan en 1909 sous le titre de Medea.

Rare exemple de tragédie alternant numéros chantés et dialogues en alexandrins, le style musical réalise une fusion inédite entre la tragédie classique de l'école française et le modèle que représente l'école italienne[3].

Charpentier, Salomon, Benda et Naumann ont composé un Médée avant Cherubini.

Inspiration

Du mythe grec de Médée : Médée aide Jason à récupérer la Toison d'or, car elle en est amoureuse; elle trahit son père et, poursuivie par son frère, elle l'assassine. À la cour du roi Pélias, oncle de Jason, Médée procède à son élimination. Jason, avec qui elle aura deux enfants, devient roi.

Quelques années plus tard, Jason décide d'épouser la fille de Créon pour des raisons politiques (Médée, Euripide) ou sentimentales (Médée, Corneille). Médée, qui ne supporte pas d'être reniée par Jason, décide d'empoisonner la future épouse; son père Créon mourra en voulant la sauver. Rien ne pouvant satisfaire la vengeance de Médée envers Jason, elle décide de tuer les deux enfants qu'elle avait eus avec Jason.

Dans l'opéra, Créuse (ou Glauce) tient le rôle de la fille de Créon (ou Créonte, roi de Corynthe).

Historique

«  Medée, que nous autres musiciens reconnaissons comme le sommet de l'art lyrique » écrit Johannes Brahms. Parmi les admirateurs de cet opéra, on peut encore citer Beethoven qui l'écoute à Vienne en 1802, Schubert, Weber, Spohr et Wagner.

François-Benoît Hoffman rédige le livret, avant que Cherubini n'en compose la musique. Cette œuvre est inspirée des tragédies éponymes de Pierre Corneille, de Sénèque et d'Euripide. Conformément aux habitudes du théâtre Feydeau, elle est représentée avec des dialogues parlés. L'opéra connaît un franc succès mais c'est surtout grâce à Julie-Angélique Scio qui interprète le rôle-titre.

Médée remporte un véritable triomphe en Allemagne avec les récitatifs chantés composés par Franz Lachner pour une représentation à Francfort-sur-le-Main le . Ils sont ensuite intégrés dans les productions postérieures avec souvent un livret en italien par Carlo Zangarini. C'est cette version qui consacre l'œuvre lors de sa création à la Scala en 1909. Elle est redécouverte en 1953 par l'interprétation de Maria Callas, sous la direction de Leonard Bernstein, toujours à la Scala, après une prise de rôle au Maggio Musicale Fiorentino. À l'époque, le poète et critique italien Eugenio Montale, écrit dans le Corriere d'Informazione:

« En fait, ce Médée donne l'impression (ou l'illusion ?) d'être au seuil de ce que Gluck a apporté à l'expressionnisme moderne. Ici, Cherubini atteint réellement ce qu'il pense être l'essentiel de la musique, son essentiel, qui n'était pas la mélodie mais grâce à elle, une façon de lier étroitement son personnage, de le piéger et de l'amener sur le chemin de la vérité. »

Argument

Première édition de Médée, 1797.

À l'époque de ce récit, le trône de Minoens de Béotie est usurpé par Pélias, un oncle de Jason. Ce dernier est l'héritier légitime du trône en tant que fils du feu roi Eson. Jason se rend donc chez son oncle pour lui réclamer le pouvoir qui lui revient de droit.

Pélias, étant persuadé que son neveu périrait dans l'entreprise, lui promet de lui restituer le trône s'il parvient à rapporter dans sa patrie la Toison d'or du bélier qui a jadis sauvé Phéixos et qui est présentement gardée par un dragon dans la forêt d'Arcs en Colchides.

La Toison d'or est, pour les Argonautes, un talisman infaillible contre tous les maux dont souffre la patrie. Jason accepte le défi et embarque avec cinquante hommes sur le navire Argos.

Une fois qu'il arrive en Colchide, le roi Aétès tente de l'empêcher de s'emparer du talisman. Médée, la fille du roi, s'adonne aux arts occultes. Elle tombe amoureuse de Jason et lui vient en aide. Ils parviennent à endormir le terrible dragon. Jason s'enfuit avec son trophée et Médée. Ils sont poursuivis par les soldats d'Aétès. Médée tue son propre frère, Apsyrtos, dont elle parsème les membres sur la route afin que son père perde du temps à les recueillir pour leur donner une sépulture.

Revenu dans sa patrie, Jason recouvre le trône mais, las de la cruauté de Médée, il la répudie. Il se rend à Corinthe où il tombe amoureux de Glauce, la fille du roi Créon auquel il demande sa main…

Acte I

Glauce, la fille de Créon, roi de Corinthe, doit épouser Jason, le héros qui a récupéré la Toison d'or mais elle est très inquiète car elle craint la vengeance de Médée dont on sait qu'elle s'adonne aux arts occultes.

Cette dernière a deux enfants issus de sa liaison avec Jason qui l'a répudiée.

Créon rassure Jason: il protégera ses deux enfants afin qu'ils ne paient pas pour les fautes de leur mère.

Les Argonautes viennent présenter leurs hommages à la fiancée et étalent à ses pieds la Toison d'or enlevée en Colchide. Glauce est à nouveau troublée lorsqu'elle entend prononcer le nom du pays de Médée. Jason tente de la rassurer lorsqu'un garde annonce l'entrée d'une femme voilée: c'est Médée qui veut que Jason revienne auprès d'elle. Devant son refus, la magicienne menace de se venger. Laissée seule avec Jason, elle rappelle à celui-ci les jours heureux passés ensemble mais Jason ne veut plus avoir affaire à elle. Médée le menace : « Tu ne verras jamais le jour de ton mariage »[4]

Acte II

Neris, la servante de Médée, essaie en vain de consoler cette dernière et de la convaincre de quitter Corinthe pour échapper à la colère du peuple.

Créon et son escorte ordonnent à Médée de quitter la ville. Celle-ci accepte et demande seulement la permission de dire adieu à ses enfants; ce que le roi lui accorde. Neris console Médée mais la magicienne a déjà échafaudé un plan: ses enfants seront l'instrument de sa vengeance et le chagrin du traître Jason sera sans borne.

Lorsque notre héros arrive, Médée prétend être très triste de la séparation d'avec ses enfants. Elle ordonne à Neris de remettre à Glauce son cadeau de mariage: le diadème et le manteau qui lui a été donné par Apollon. Médée envisage toujours de se venger. Lorsque la cérémonie est terminée, elle se saisit d'un cierge de l'autel et part.

Acte III

Quelque part dans une région montagneuse, Médée prie les Dieux de lui donner le courage d'accomplir sa terrible vengeance. Neris, après avoir remis à Glauce le cadeau de la magicienne, retourne auprès des deux enfants. Médée lève son poignard pour les tuer mais est incapable d'accomplir son geste. Elle révèle alors à Neris son dessein: le diadème et le manteau sont empoisonnés et Glauce mourra. Horrifiée, Neris se sauve en direction du temple de Junon avec les enfants. Comme la magicienne l'a prévu, Glauce meurt et Jason, désespéré, veut arrêter Médée. Cette dernière court se réfugier dans le temple puis en ressort flanquée des trois Furies et brandissant le poignard ensanglanté avec lequel elle a tué ses deux enfants. Elle met le feu au temple. Médée promet au malheureux Jason abattu : « Je vais à la rivière sacrée ! Mon ombre t'y attendra ! »[5].

Distribution

Rôle Typologie vocale[6] Créateurs[7]
(, théâtre Feydeau)
Médée soprano Julie-Angélique Scio
Jason ténor Pierre Gaveaux
Créon, roi de Corinthe basse Alexis Dessaules
Dircé (Glauce), fille de Créon[1] soprano Mlle Rosine
Néris, esclave scythe soprano Mme Verteuil
Chef des gardes basse Le Grand
Confidantes de Dircé sopranos Émilie Gavaudan, Mlle Beck
Les deux fils de Jason et Médée rôles silencieux
Chœurs: femmes de Dircé, Argonautes, gardes de Créon, peuple de Corinthe, prêtres

Orchestration

2 Flûtes (2e aussi piccolo), 2 Hautbois, 2 Clarinettes, 2 Bassons - 4 cors, Timbales - Cordes
sur la scène (Acte II, no. 12, Marche) : 2 flûtes, 2 Hautbois, 2 Clarinettes, 2 Bassons, 2 Cors, 1 trombone

Discographie

  • 1953: Maria Callas (Medea), Gino Penno (Giasone), Maria Luisa Nache (Glauce), Fedora Barbieri (Neris), Giuseppe Modesti (Creonte); Orchestra e coro del Teatro alla Scala di Milano, Leonard Bernstein (Dir.); (EMI, version italienne)
  • 1957: Maria Callas (Medea), Mirto Picchi (Giasone), Renata Scotto (Glauce), Miriam Pirazzini (Neris), Giuseppe Modesti (Creonte); Orchestra e coro del Teatro alla Scala di Milano, Tullio Serafin (Dir.); (EMI, version italienne)
  • 1962: Rita Gorr (Médée), Guy Chauvet (Jason), Andrée Esposito (Dircé), René Bianco (Créon), Chœurs et Orchestre du Théâtre National de l'Opéra, Chef des chœurs René Duclos, Direction: Georges Prêtre. Enregistrement réalisé à Paris, Salle Wagram, les 2, 3, 5, 6, et . Directeur artistique: René Challan. Ingénieur du Son: Walter Ruhlmann. Enregistrement Pathé Marconi EMI Stéréo (Extraits) Version française
  • 1967: Gwyneth Jones (Medea), Bruno Prevedi (Giasone), Pilar Lorengar (Glauce), Fiorenza Cossotto (Neris), Justino Díaz (Creonte); Orchestra e coro dell'Accademia Nazionale di Santa Cecilia, Lamberto Gardelli (Dir.); (Decca, version italienne)
  • 1997: Phyllis Treigle (Médée), Carl Halvorson (Jason), Thaïs St Julien (Dircé), D'Anna Fortunato (Neris), David Arnold (Creonte); Opera Quotannis, Bart Folse (Dir.); (Newport Classic, version française)

Notes et références

  1. Le personnage de Glaucé fille de Créon (également appelée « Créuse » dans l'antiquité), est défini « Dircé » dans le livret français, tandis que dans les versions italiennes, le nom original est retrouvé (Glauce).
  2. François-René Tranchefort, L'Opéra, Paris, Éditions du Seuil, , 634 p. (ISBN 2-02-006574-6), p. 97
  3. Revue Diapason, no 585, novembre 2010
  4. « Giammai per te verrà il di nuzial ».
  5. « Al sacro fiume io vo! Colà t'aspetta l'ombra mia! »
  6. D'après Alberto Batisti, Médée, en Gelli, Piero & Poletti, Filippo (éd.), Dizionario dell'Opera 2008, Milan, Baldini Castoldi Dalai, 2007, pp. 289-290, ISBN 978-88-6073- 184-5 (reproduit en ligne dans le site Opera Manager).
  7. D'après le livret original: Médée, Tragédie en trois actes en vers, Paroles de Hoffmann, Musique de Chérubini, Représentée sur le Théâtre Feydeau, le 23 Ventôse, Paris, Huet, 1797 (accessible en ligne comme ebook Google).

Liens externes

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