Lucie Primot

Lucie Primot, née le à Romilly-sur-Seine, est une résistante, membre du réseau de passeurs de Jœuf, en Meurthe-et-Moselle, zone interdite de à la Libération. Elle est décédée le [1] à Bitche.

Arrêtée le avec l'ensemble de ce réseau, désignée comme déportée Nacht und Nebel (NN)[2], elle fait partie des personnes jugées dans le cadre de la grande affaire de Metz ; elle passe de prison en prison avant d'être condamnée à mort en . Graciée en juin 1944, et à la suite d'une longue marche entre janvier et , elle est libérée de la prison d'Aichach, près de Munich, le par les Américains.

Biographie

Dès , les Allemands crée une frontière entre le département de la Moselle, annexée de fait et celui de Meurthe et Moselle, occupé et déclaré zone « réservée », interdite aux réfugiés.

Le long de cette ligne d’environ 150 kilomètres se constituent plusieurs filières d’évasion, dont celle de Jœuf, pour accueillir des prisonniers de guerre évadés et de jeunes Alsaciens Lorrains refusant la nazification de leur région et le travail obligatoire.

Lucie habite alors avec sa mère à Villeroy , son père, chef de gare à Valleroy , étant décédé en 1926. Elle est institutrice à l'école privée de Genibois ; comme trois de ses collègues, Marie Thérèse Cremmel, Andrée François et Yolande Melandri. Lucie accepte de conduire de jeunes évadés accueillis à Jœuf jusqu'à la gare d'Homécourt. Guide de France, elle porte une cape, véritable signe de ralliement des évadés. Avec la complicité des cheminots, elle leur prend des billets, monte avec eux jusqu'à Valleroy. Attendus à Jarny, la station suivante, ils sont pris en charge par d'autres cheminots et, mis en sécurité dans des wagons plombés, ils peuvent passer en zone libre.

Le , prévenue de son arrestation, elle a le temps de retourner chez elle pour supprimer certains papiers compromettants. Emmenée, avec d'autres membres du réseau, à la prison de Metz comme l'ensemble du réseau, à la suite d'une dénonciation : elle est confrontée, au siège de la Gestapo à Metz, au jeune Lorrain René S.[3], qui, évadé grâce aux passeurs de Jœuf dont Lucie, les a trahis après son arrestation par les nazis ; sa cape suspendue dans le local d'interrogatoire constitue la preuve de son appartenance au réseau.

Le 1er mai, elle est transférée avec 15 hommes et 15 femmes de son réseau à la prison de Trèves en Allemagne.Puis, le , à celle de Cologne dans l'attente d'un jugement. Après quelques mois au camp de Flußbach, elle revient à la prison de Cologne en , puis à celle d'Essen également bombardées.

Transférée en décembre 1943 à la prison de Breslau, elle est enfin jugée et condamnée à mort le , peine commuée le en travaux forcés. De à , considérée comme otage, elle est internée à Jauer, en Basse Silésie, d'où elle part du fait de l'avance russe avec plusieurs centaines de femmes. Une Longue Marche de 1 200 kilomètres, les mène, malgré froid, épuisement, alertes, à la prison de femmes de Aïchach d'où elle est libérée le par les Américains. Elle rejoint Valleroy le .

Le , elle épouse Jean Masconi, officier ayant participé à la constitution des premiers maquis de l'Allier, déporté à Peenemunde puis Dora et Buchenwald.

Ils auront trois enfants, dont Lucie s'occupera en tant que mère au foyer, tout en restant active dans plusieurs associations mémorielles.

Le réseau de Jœuf

Un réseau se constitue à Jœuf sous l’impulsion du chanoine Dellwal avec le soutien actif du maire M. Peltier, des sœurs de Peltre à l’hôpital de Jœuf-Génibois[4] et de plusieurs familles acceptant d’accueillir les fugitifs puis de les accompagner, munis de faux papiers, dans les gares les plus proches d’où, avec la complicité de cheminots, ils peuvent passer en zone non occupée, vers Bourg-en-Bresse ou Lyon.

Ce réseau fait passer entre et mars 1942 près de 3000 personnes. Ses membres sont tous arrêtés le à la suite d'une dénonciation. 31 d’entre eux, dont 15 femmes (*1) sont déportés dans des différents camps et prisons en Allemagne parmi les premiers NN (*2), condamnés aux travaux forcés ou condamnés à mort.16 en reviennent en avril- dont un meurt d’épuisement le .

Décorations

Hommages

  • Lucie a obtenu le grade de Lieutenant dans l'Armée française.
  • Une place porte le nom de Lucie Primot à Valleroy

Notes et références

  1. État civil sur le fichier des personnes décédées en France depuis 1970
  2. Le décret NN date du 24 décembre 1941. Il institue une méthode de répression visant à faire disparaître certains résistants sans laisser de trace " dans la nuit et le brouillard " (Nacht und Nebel);. Ce décret a pour but de semer la terreur parmi les familles concernées et les populations des pays occupés.
  3. René S. a été condamné à mort par le tribunal de Metz en mars 1947 et exécuté quelques jours plus tard
  4. Dans son livre sur Ravensbrück,(Le Seuil 1988), Germaine Tillion confirme « que les premières femmes déportées NN en Allemagne furent les Lorraines de Jœuf et de Jarny : Sœur Elizabeth (Joséphine Krebs), Sœur Eustache (Marie Wachs), Andrée François, Berthe Bonino, Emma Lalevée, Lucie Primot »

Bibliographie

  • Les Passeurs. Des Lorrains anonymes dans la Résistance / Francis Petit Demange et Jean François Genet. - Éditions de l’Est, 2004, 187 p.
  • Les Roses d’AÏchach : Lucie et ses compagnes Résistantes et Déportées NN / Marie-José Garel Masconi. - Éditions Serpenoise : 2006, 79 p.
  • Éric Le Normand (dir.), Christophe Clavel (ill.) et Association pour des études sur la Résistance intérieure des Alsaciens, La Résistance des Alsaciens, Paris, Fondation de la Résistance, Département AERI, coll. « Histoire en mémoire 1939-1945 », 2016 (ISBN 9782915742329), (OCLC 959964698), (notice BnF no FRBNF45050358).
  • La Longue Nuit de Lucie. une résistante et ses compagnes dans les bagnes nazis / Marie-José Garel Masconi. - Éditions La Nuée bleue, 2019, 95 p.

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

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