Les Lettres françaises
Les Lettres françaises sont une publication littéraire créée en France, en , pendant l'Occupation, par Jacques Decour et Jean Paulhan. C'est l'une des nombreuses publications du mouvement de résistance Front national. Il s'agissait alors d'une publication clandestine bénéficiant entre autres de la collaboration de Louis Aragon, François Mauriac, Claude Morgan, Édith Thomas, Georges Limbour, Raymond Queneau et Jean Lescure.
Les Lettres françaises | |
Pays | France |
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Langue | Français |
Périodicité | Mensuel, sur abonnement |
Genre | Littérature |
Prix au numéro | 1,40 € |
Diffusion | 80 000 ex. (15 mai 2014) |
Fondateur | Jacques Decour Jean Paulhan |
Date de fondation | 20 septembre 1942 |
Ville d’édition | Paris |
Directeur de publication | Jean Ristat |
Directeur de la rédaction | Jean Ristat |
Rédacteur en chef | Jean-Pierre Han |
ISSN | 0024-1393 |
Site web | les-lettres-françaises.fr |
Après la Libération, à partir de 1953 jusqu'en 1972, Les Lettres françaises, dirigées par Louis Aragon, bénéficient du soutien financier du Parti communiste français (PCF).
Repères historiques
La rivalité avec Action
Après la guerre, Les Lettres françaises subissent la forte concurrence d'un hebdomadaire au rayonnement littéraire et politique important, le journal Action, dont le rédacteur en chef Pierre Hervé entre en conflit avec Louis Aragon, ce qui lui vaut son remplacement à la tête du journal en 1949, sur injonction de la direction du PCF, et contribue au déclin de ce rival, qui disparaitra en 1952.
L'affaire Kravtchenko
En 1949 aussi, une polémique, puis un procès retentissant opposent le journal au dissident soviétique Victor Kravtchenko. Après la parution de son livre J'ai choisi la liberté, parlant des camps de prisonniers soviétiques et de leur exploitation, Les Lettres françaises l'accusent de désinformation et d'être un agent des États-Unis à partir de faux documents écrits par le journaliste André Ulmann qui travaillait pour les services de renseignement soviétiques. La vérité sur l'origine de ceux-ci ne sera connue qu'à la fin des années 1970. La décrédibilisation de la personne de Kravtchenko dans la revue avait pour but de minorer la portée de son témoignage[1].
Kravtchenko porte plainte contre Les Lettres françaises pour diffamation, et nommément contre Claude Morgan, directeur et André Wurmser, rédacteur[1]. Le journal est défendu par l'avocat Joë Nordmann.
Le procès, surnommé le « procès du siècle », a lieu en 1949 et regroupe une centaine de témoins. L'Union soviétique présente les anciens collègues de Kravtchenko et son ancienne femme pour le dénoncer. Les défenseurs de Kravtchenko amènent à la barre des survivants de camps de prisonniers soviétiques. Parmi eux Margarete Buber-Neumann, la veuve du leader communiste allemand Heinz Neumann. En lien avec les protocoles secret du pacte germano-soviétique, alors qu'elle purge une peine de camp depuis deux ans, elle est remise par les autorités soviétiques à la Gestapo qui l'interne au camp de concentration de Ravensbrück, en Allemagne. Le procès est remporté par Kravtchenko en qui reçoit une somme symbolique pour cette diffamation.
Après la sortie en 1947 du livre de Victor Kravtchenko, David Rousset, résistant et ancien déporté crée en la Commission internationale contre le régime concentrationnaire (CICRC), qui entreprend des enquêtes sur les situations espagnole, grecque, yougoslave et soviétique. Pour la première fois en France, il utilise le terme de Goulag pour désigner le système concentrationnaire soviétique. Ceci lui vaut d'être traité de « trotskiste falsificateur » par Les Lettres françaises, à qui il intente un procès[2] qu'il gagne en 1951.
Arrêt et reparution
Dans les années 1960, Les Lettres françaises contribuent au débat littéraire et artistique, notamment par les chroniques sur le cinéma sous la plume de Michel Mardore et de Georges Sadoul.
L'URSS a cessé de souscrire ses nombreux abonnements au profit de ses universités, écoles, et bibliothèques, à cause de la prise de position du journal contre l'invasion de la Tchécoslovaquie en . Cette décision lui fut fatale : la parution du journal cesse en 1972, le soutien du PCF ne pouvant compenser cette perte des ventes dans les pays de l'Est de l'Europe.
Entre 1990 et 1993, cette revue est à nouveau publiée de manière mensuelle. Après une interruption, elle paraît sous la forme d'encart mensuel dans L'Humanité à partir de [3]. À partir du mois d', Les Lettres françaises sont publiées chaque premier jeudi du mois. Le , la revue cesse de paraître sous sa forme papier et n'est plus publiée que sur Internet.
Le , à l'occasion des 75 ans du journal, Jean Ristat annonce la reparution du journal en version papier pour le début de l'année 2018[4].
Directeurs
- 1942-1953 : Claude Morgan
- 1953-1972 : Louis Aragon
- 1993-… : Jean Ristat
Chroniques
Actuellement composé de seize pages mensuelles, Les Lettres françaises sont composées :
- d'une « une » avec une œuvre d'art contemporaine ;
- d'un éditorial de Jean Ristat ;
- d'un dossier ;
- des pages « Arts », Lettres, « Musique », « Patrimoine », « Savoir » et « Théâtre » ;
- d'inédits d'écrivains ou de poètes.
Collection « Les Lettres françaises »
« Les Lettres françaises » sont aussi une collection littéraire publiée à l'origine par les éditions du Mercure de France. La collection est depuis 2010 publiée par les éditions du Temps des cerises[5]. Cette collection comporte actuellement sept ouvrages :
- Ils, de Franck Delorieux (2010).
- Le Musée Grévin, de Louis Aragon (2011).
- Une saison en enfer, d'Arthur Rimbaud (2011), avec une préface inédite d'Aragon.
- Larrons de François Esperet[6] (2013).
- Paradis argousins, de Victor Blanc[7] (2013).
- Vers et proses, de Vladimir Maïakovski (2014), traduit par Elsa Triolet.
- Gagneuses, de François Esperet (2014).
- Le Corps écrit, de Franck Delorieux[8] (2016).
- Filigrane, de Victor Blanc (2019)[9], avec une œuvre de Bernard Moninot en couverture.
Notes et références
- Liora Israël, Un procès du Goulag au temps du Goulag ? L'affaire Kravchenko (1949), Critique internationale, 2007/3 (n° 36), pages 85 à 101.
- Frédéric Verger, « Les lumières et le goulag » dans la Revue des deux Mondes, no 1, janvier 2011, p. 133.
- Comment renaît un journal et pourquoi, Les Lettres françaises, 19 mars 2004. À lire sur le site Internet.
- « Les Lettres Françaises, retour vers le papier », Le site du journal, (lire en ligne, consulté le ).
- Voir encadré dans Les Lettres françaises. Ici en page 11 : http://www.les-lettres-francaises.fr/wp-content/uploads/2014/12/lf121.pdf.
- François Esperet sur data.bnf.fr.
- Victor Blanc sur data.bnf.fr.
- « Le corps écrit | Le Temps des Cerises [éditeurs] » (consulté le ).
- « Filigrane | Le Temps des Cerises [éditeurs] » (consulté le ).
Sources et bibliographie
- Pierre Daix, Les Lettres françaises, jalons pour l'histoire d'un journal, 1941-1972, Tallandier, 2004.
- Robert O. Paxton - Olivier Corpet - Claire Paulhan, Archives de la vie littéraire sous l'Occupation, À travers le désastre, Éditions Taillandier et les Éditions de l'IMEC, 2009, 448 p. (ISBN 978-2-84734-585-8).
- Georges Aillaud - François Eychart, Les Lettres françaises et Les Étoiles dans la clandestinité, 1942-1944, Le Cherche-midi, 2008 (ISBN 978-2749112299).
- Guillaume Roubaud-Quashie (dir.), Les Lettres françaises. Cinquante ans d'aventures intellectuelles. Anthologie depuis 1942, Paris, Hermann, 2019, 1026 p. (ISBN 979-1-0370-0164-1).
Liens externes
- Site officiel.
- Les Lettres françaises sur le site de l'Humanité.
- Les premières Lettres françaises sur Gallica.
- Les Lettres françaises: de la Résistance à l’œuvre-monde | EMAN (hypotheses.org), par Luc Vigier.
- Les Lettres françaises en 1955, par Luc Vigier.
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