La Veuve (poème)

La Veuve est un poème de Jules Jouy composé en 1887 et mis plus tard en musique par Pierre Larrieu.

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Histoire de La veuve

Ce poème contre la peine de mort (« la veuve » est un surnom donné à la guillotine) a été écrit en 1887 par le poète, chansonnier et goguettier montmartrois Jules Jouy. Il a été dit dans les cabarets et cafés-concerts de Montmartre par Jules Jouy, par Paul Félix Taillade et par Mévisto aîné avec beaucoup de succès.

En 1924, il a été mis en musique par Pierre Larrieu[1] à la demande de Damia, surnommée « la tragédienne de la chanson ». Elle l'enregistre la même année. Cet enregistrement a été réédité en 1974 par Pathé sur deux 33 tours consacrés à la chanteuse.

Paroles

La Veuve, auprès d'une prison,
Dans un hangar sombre demeure.
Elle ne sort de sa maison
Que lorsqu'il faut qu'un bandit meure.
Dans sa voiture de gala
Qu'accompagne la populace
Elle se rend, non loin de là,
Et, triste, descend sur la place.

Avec des airs d'enterrement,
Qu'il gèle, qu'il vente ou qu'il pleuve,
Elle s'habille lentement,
La Veuve.

Les témoins, le prêtre et la loi
Voyez, tout est prêt pour la noce ;
Chaque objet trouve son emploi :
Ce fourgon noir, c'est le carrosse.
Tous les accessoires y sont :
Les deux chevaux pour le voyage
Et le grand panier plein de son :
La corbeille de mariage.
 
Alors, tendant ses longs bras roux,
Bichonnée, ayant fait peau neuve,
Elle attend son nouvel époux,
La Veuve.

Voici venir le prétendu
Sous le porche de la Roquette[2].
Appelant le mâle attendu,
La Veuve, à lui s'offre, coquette.
Tandis que la foule, autour d'eux,
Regarde frissonnante et pâle,
Dans un accouplement hideux,
L'homme cracher son dernier râle.

Car les amants, claquant du bec,
Tués dès la première épreuve,
Ne couchent qu'une fois avec
La Veuve.

Tranquille, sous l'œil du badaud,
Comme, en son boudoir, une fille[3],
La Veuve se lave à grande eau,
Se dévêt et se démaquille.
Impassible, au milieu des cris,
Elle retourne dans son bouge,
De ses innombrables maris
Elle porte le deuil en rouge.

Dans sa voiture se hissant,
Goule horrible que l'homme abreuve[4],
Elle rentre cuver son sang,
La Veuve.

Notes

  1. Déclaration SACEM du 20 février 1924.
  2. Les exécutions capitales étaient à cette époque publiques et avaient lieu à Paris devant la prison de la Roquette.
  3. À l'époque « fille » signifiait « prostituée ».
  4. Les goules sont des monstres fabuleux dévoreurs de cadavres.

Source

  • Robert Brécy, Florilège de la chanson révolutionnaire, de 1789 au Front populaire, éd. Ouvrières, Paris, 1990, p. 130-133.

Articles connexes

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