L'Humanité nouvelle
L'Humanité nouvelle a été entre 1965 et 1968 une publication mensuelle française, éditée par des militants d'extrême-gauche s'intitulant "marxistes léninistes", défendant et diffusant les thèses maoïstes. Le titre est interdit de parution le , dans le cadre de l'interdiction de plusieurs organisations "révolutionnaires" par le Ministère de l'Intérieur.
Esquisse historique
La rupture, au début des années soixante, entre les deux grands pays se réclamant du Communisme, entre la Chine et l'URSS divise selon la même ligne fracture (Approbation ou rejet de la Coexistence pacifique, soutien à partir de 1966 de la Révolution culturelle en Chine), les partisans de l'une ou l'autre. En France le peu de militants Pro chinois était divisé en plusieurs "chapelles". La plus ancienne de ces organisations, est la Fédération des cercles marxistes-léninistes[1]. Créée en 1964, cette organisation se dote d'un organe de presse, L'Humanité nouvelle. Par ce titre elle affirme la vocation à prendre le relais de... L'Humanité. La plupart des animateurs et rédacteurs du journal sont issus du Parti communiste français. Celui-ci est taxé de "révisionnisme", d'"opportunisme" avec la précision "de droite", de Khrouchtchevisme", de "traîtres"[2]
D'un format demi page de l'époque, soit 43,5 x 32 centimètres, le numéro 1 de L'Humanité nouvelle, paraît en . Le journal est domicilié à Marseille, 26 Boulevard des Dames, imprimé à Marseille, 27 boulevard Féraud, et diffusé en kiosque par les NMPP. Son prix de vente est de 1 franc[3] Le titre monochrome est placé à gauche du logo historique des communistes, la faucille et le marteau croisés. La pagination semble être de façon régulière, de 16 pages[4].
Au printemps 1966, la fédération des cercles marxistes-léninistes se transforme en Mouvement communiste français marxiste-léniniste. L'Humanité nouvelle en devient l'organe central mensuel. La promotion s'accompagne du déménagement de Marseille vers Paris. La rédaction est sise boulevard Magenta (Paris 10e), l'impression se fait à Meaux en Seine-et-Marne[réf. nécessaire].
Fin 1967-début 1968, nouveau baptême pour L'Humanité nouvelle, qui se mue en organe central du Parti communiste marxiste léniniste de France, PCMLF. Celui-ci est interdit en juin 1968[réf. nécessaire].
Le « staff »
Le rédacteur en chef, Régis Bergeron, est un professionnel du journalisme. Âgé de 42 ans en 1965, il a travaillé pour L'Information de Seine-et-Marne, pour le quotidien Ce soir, pour la revue idéologique mensuelle La Nouvelle Critique. Il a aussi travaillé à L'Humanité à la rubrique littéraire, aux Lettres françaises et à France Nouvelle.
Le directeur gérant se nomme François Marty. Âgé de 59 ans en 1965[5], c'est un ancien instituteur des Pyrénées-Orientales, département où il a été un des dirigeants de la Fédération communiste, après y avoir été Résistant dans les FTP. Il a dirigé l'organe départemental du PCF, Le Travailleur Catalan (Il se présente comme "fondateur de ce journal).
Faisant suivre son nom de « secrétaire politique », sans que l'on sache si cette fonction s'exerce au journal ou dans le groupe politique qu'il pilote, Jacques Jurquet affiche son pédigrée d'« ex-machin chose » dans le Parti communiste. Âgé de 43 ans (fin 1965), inspecteur des impôts de profession, lui aussi a fait de la Résistance ; puis il a été membre de la direction fédérale communiste en Seine-et-Marne[6], puis dans le département des Bouches-du-Rhône. C'est là qu'il se fait exclure, en 1964, du PCF, pour son soutien aux thèses véhiculées par le Parti communiste chinois. Ces thèses chinoises trouvent d'abord un relai en France dans une Association des amitiés franco-chinoise, créée dans les années 50 dans la mouvance du Parti communiste, comme celui-ci le faisait pour chaque « Démocratie populaire »[7]
Parmi les signatures d'éditoriaux de première page de L'Humanité nouvelle[8], on peut relever ceux de Yves-Marc Tiberat, 43 ans[9], employé à la Sécurité sociale, de Bordeaux, de Robert Thiervoz, professeur à Grenoble.
Le tirage du journal aurait atteint, pour son premier numéro, 15 000 exemplaires[10].
La rivalité entre organisations prônant le "Marxisme-léninisme"
L'Humanité nouvelle bénéficie d'un réseau d'anciens membres du PC français, dans certaines entreprises, où sa diffusion prend appui sur des articles renseignés sur le réel du travail de la Classe ouvrière et des employés des grandes entreprises tertiaires (PTT, Chemins de fer). Mais ses animateurs ont dépassé la quarantaine. Or le créneau des mobilisations pré-soixante-huitardes, semble plus jeune, dans le milieu universitaire et lycéen, principalement étudié[11]. C'est sans doute pourquoi, en 1965 Jacques Jurquet lance un organe politique, L'avant-Garde de la jeunesse française[12], "organe des jeunes marxistes-léninistes", dont il signe l'éditorial. Sa périodicité est annoncée bimestrielle. Le premier numéro comporte deux pages consacrées à l'Union des étudiants communistes en France, et... 2 pages sur "l'histoire du mouvement étudiant à Shanghai" de 1945 à 1949. Outre une page dédiée à la prose de Staline, y apparaît la préoccupation de s'adresser à la jeunesse ouvrière.
Pourtant en 1966 naît Garde rouge, mensuel de la Jeunesse marxiste-léniniste, basée à Nancy[13]. Le titre Garde rouge est repris en 1967 par l'Union des jeunesses communistes (marxistes-léninistes), dont elle est l'organe mensuel.
Le marché de la couleur "rouge"
En 1967, d'autres maoïstes, organisés dans un "Centre marxiste-léniniste de France", publient Tribune rouge, qui revendique "unité des Marxistes-léninistes". Il semble que le rouge du journal s'appuie sur l'illustration du communisme de la petite République populaire d'Albanie, dont le leader est "le camarade Enver Hodja, éminent dirigeant du mouvement communiste international". Le numéro 2 de cette revue, daté d'août 1967 publie, en Une, la photo de l'idole et une de ses phrases : L'existence de contradictions profondes au sein du camp impérialiste, est sans aucun doute tout au profit des forces révolutionnaires et marxistes-léninistes[réf. nécessaire].
Après les interdictions de , la couleur rouge, est prise d'assaut par plusieurs groupes. Rouge, l'hebdomadaire de la ligue communiste puis de la ligue communiste révolutionnaire, "rouge, L'Humanité rouge, en lequel se mue L'Humanité nouvelle publiée par les tenants du PCMLF "clandestin"[14].
Articles connexes
Notes et références
- Le Monde, 3 avril 1970, dossier sur deux pages(8-9) intitulé Panorama de l'extrême-gauche révolutionnaire, sous la signature du journaliste Thierry Pfister.
- Terminologie relevée pour exemple dans le numéro 12 de L'Humanité nouvelle.
- Pour donner un ordre de grandeur, les quotidiens nationaux sont achetés 0,40 francs en 1967. Mais la plupart de la presse mensuelle d'extrême gauche est vendue franc, tels Sous le drapeau du socialisme, Le Communiste, Garde rouge, Tribune rouge, Avant-garde jeunesse, Lutte communiste, La quatrième internationale, etc. Certains sont à 1,50 francs, mais plus copieux, tels le débat communiste puis Unir-débat, voire 2 francs comme La vérité. Un autre paraît moins cher, à 0,50 franc mais il sort tous les 15 jours, La voix ouvrière.
- telle pour les numéros 12, 13, 17, et...
- Le numéro 12, de décembre 1965, publie un manifeste : Pour la fidélité à l'idéal communiste, en p. 16. Chacun des 80 signataires accompagne son paraphe d'un résumé biographique, utilisé ici.
- On peut supposer qu'il y a rencontré Régis Bergeron
- La première du genre étant l'association France-URSS.
- Contrairement au mouvement trotskiste, il semble que les auteurs signent de leur propre nom leurs articles et utilisent peu des pseudonymes.
- En 1965, comme pour les autres personnes présentées.
- Notice biographique de Jacques Jurquet, dans le Dictionnaire biographique Mouvement ouvrier mouvement social, tome 7, 2011
- Cf Génération, de Hervé Hamon et Patrick Rotman.
- à ne pas confondre avec Avant-garde jeunesse! organe de la Jeunesse communiste révolutionnaire d'autre obédience.
- Numéro 1 en novembre 1966.
- Le Monde 3 avril 1970, déjà cité.
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