L'Enfant à la balustrade

L'Enfant à la balustrade est un roman très largement autobiographique de René Boylesve, publié en 1903.

L'Enfant à la balustrade

Frontispice de l'édition de 1913
(Claude Chopy).

Auteur René Boylesve
Pays France
Genre Roman de mœurs
Éditeur Calmann Lévy
Lieu de parution Paris
Date de parution 1903
Nombre de pages 386
Chronologie

Il raconte, vu par les yeux d'un enfant d'une dizaine d'années dont le père est notaire, la vie des petits bourgeois d'une ville du sud de la Touraine. Une maison achetée par le notaire au nez et à la barbe d'un notable local et dont le jardin en terrasse est clos par une balustrade dominant la ville tient un rôle majeur dans le récit.

Ce roman est la suite de La Becquée, publiée deux ans plus tôt.

Résumé

Henri (Riquet) Nadaud est un enfant d'une dizaine d'années[1]. Fils de notaire, il habite Beaumont, une petite ville du sud de la Touraine. Entre son père, sa belle-mère qu'il appelle « petite-maman » et sa grand-mère qui n'a jamais accepté que son fils, veuf, se remarie (avec une Créole, de surcroît), il observe les relations complexes qui régissent le monde des notables d'une petite ville de province [2] : amitiés, haines, alliances, trahisons, réconciliations de circonstance. L'origine de ces chassés-croisés est l'achat, par Me Nadaud, d'une maison qu'il ne pourra habiter qu'après la mort de Madame Colivaut, l'actuelle occupante. Cette maison était également convoitée par M. et Mme Plancoulaine, de riches bourgeois de Beaumont ; à l'instigation de ces derniers, la famille Nadaud subit, par vengeance, une « mise en « quarantaine » » de la part de tous les notables de Beaumont.

L'isolement ne prend fin qu'à la mort de Madame Colivaut. Les Nadaud viennent habiter la maison tant convoitée et voient revenir vers eux, un par un, tous ceux qui les avaient délaissés, y compris Clérambourg, l'ami de trente ans qui leur avait aussi tourné le dos. Il faut toutefois que Me Nadaud fasse lui-même la démarche qui le réconcilie avec les incontournables Plancoulaine  il leur fait parvenir un panier de gibier qu'il a lui-même chassé.

Au milieu de ces préoccupations d'adultes dont il ressent les contrecoups, le seul véritable bonheur de Riquet, quand il ne songe pas à l'amour platonique qu'il voue à Marguerite Charmaison, est de se promener dans le jardin de la maison que son père a achetée, en quête d'un idéal qu'il a lui-même du mal à définir. Ce jardin, en terrasse, est fermé par une balustrade d'où l'on domine tout le panorama de la ville.

Personnages principaux

  • Maître Nadaud, notaire à Beaumont ;
  • Henri Nadaud, dit « Riquet », narrateur, fils de maître Nadaud ;
  • « Petite-maman », seconde épouse de maître Nadaud ;
  • Maître Clérambourg, notaire honoraire ;
  • M. et Mme Plancoulaine, bourgeois de Beaumont ;
  • Marguerite Charmaison, amie de Riquet.

Analyse de l'œuvre

Roman autobiobraphique

Maison natale de René Boylesve.

L'Enfant à la balustrade est la suite de La Becquée (1901) et les premières phrases du roman font le lien avec l'œuvre précédente[3]. L'idée de ces deux romans a probablement été suggérée à René Boylesve par son ami Hugues Rebell qui lui conseillait de porter par écrit ses souvenirs d'enfance[TR 1].

En 1876, le père de René Boylesve (maître Nadeau dans le roman), notaire à La Haye-Descartes (Beaumont), achète la maison Mouton (la maison Colivaut), devançant monsieur Defond (M. Plancoulaine[Note 1]) qui souhaitait aussi l'acquérir. Cet achat, considéré comme une trahison par M. Defond, vaut à Me Tardiveau d'être mis au ban de la bonne société de la ville et les clients fuient son étude les uns après les autres, ce qui le conduit à la ruine. Ses amis eux-mêmes, comme son prédécesseur maître Defrance (Clérambourg), se détournent de lui. Deux ans plus tôt, René avait fait la connaissance de Louise Renaut (Marguerite Charmaison) mais il ne lui avouera jamais l'amour qu'il lui porte. Ces événements servent de trame à l'intrigue de L'Enfant à la balustrade.

La fin du roman, qui voit maître Nadeau revenir en grâce auprès des notables de Beaumont est bien plus heureuse que la réalité : Me Tardiveau, ruiné, doit quitter Descartes ; il s'installe à Tours mais ne parvient pas à se créer une clientèle, et il se suicide en 1883.

Principaux thèmes abordés

Statue de René Descartes à Descartes.

La peinture du petit monde de notables citadins mené par le roitelet Plancoulaine est faite au travers du regard de l'enfant, ce qui en accentue la férocité naïve, bien qu'elle soit parfois adoucie par des touches d'humour[TR 2] :

« [...] madame Plancoulaine avait au menton la barbe d'un pâté de ménage qui moisit[5]. »

Tout ce petit monde est mesquin et servile, y compris Me Nadaud, médiocre et faible[TR 3]. L'épisode du « raisiné », cette confiture de mauvaise qualité servie lors des réceptions chez Plancoulaine, montre de manière ironique la médiocrité des hôtes eux-mêmes, et le fait qu'à la fin du roman, Mme Plancoulaine offre à Riquet et son père, venus se réconcilier, du pâté de gibier au lieu du raisiné, est un message fort de bienveillance.

Riquet commence de son côté à ressentir l'attrait d'un idéal qui pourrait être la poésie, matérialisé par la statue d'Alfred de Vigny qui orne la place de Beaumont  dans la réalité, il s'agit d'une statue de René Descartes. La quête de cet idéal, un temps mise à mal par les péripéties et les mesquineries des adultes, resurgit aux dernières lignes du roman[6] lorsque, depuis le jardin à la balustrade, l'enfant s'adresse à la cantonade à la statue au poète : « Que voyez-vous ? que voyez-vous ? vous qui avez l'air d'être au-dessus de nous ! »[7]. L'idéal de Riquet pourrait aussi être l'amour qu'il se découvre pour Marguerite Charmaison, d'autant qu'il la sent inaccessible et qu'il ne lui avouera jamais ses sentiments[TR 3].

Boylesve écrit de son livre « qu'il fournit le triste exemple de la vie médiocre et méchante et qu'il pose, à côté de l'idéal, le besoin du mieux, du plus beau, [...] parce qu'une telle tendance existe réellement dans l'enfance[8]. »

Ce roman reflète le goût de René Boylesve pour sa province natale et ses paysages. Le jardin de la propriété y occupe une place prépondérante, et il permet à l'enfant de se plonger dans de longues rêveries. De même, d'autres jardins figurent également dans l'œuvre de Boylesve, du parc de Leçon d'amour au Souvenirs du jardin détruit[9].

Éditions

  • Comédie sous la balustrade, parution en feuilleton (4 parties) dans La Renaissance Latine entre le 15 mai et le avec un texte légèrement différent des parutions en volume[TR 4].
  • L'Enfant à la balustrade, Paris, Calmann Lévy, , 386 p. (édition originale plusieurs fois rééditée).
  • L'Enfant à la balustrade, Paris, Calmann Lévy-Nelson, , 366 p.
  • L'Enfant à la balustrade, parution sous forme de supplément, Echo de la mode,
  • L'Enfant à la balustrade, Paris, Union générale d'éditions (10/18), , 286 p.
  • L'Enfant à la balustrade (préf. André Bourin), Monaco, Éditions du Rocher, , 293 p.
  • L'Enfant à la balustrade, Paris, Libretto, , 270 p.

Pour en savoir plus

Bibliographie

  • André Bourgeois, René Boylesve, l'homme, le peintre de la Touraine, Paris, Droz, , 268 p.
  • André Bourgeois, La vie de René Boylesve, vol. 1 : Les enfances (1867-1896), Genève, Paris, Droz, Minard, , 240 p. (ISBN 978-2-600-03450-0, lire en ligne).
  • François Trémouilloux, René Boylesve, un romancier du sensible (1867-1926), Presses universitaires François-Rabelais, (ISBN 978-2-86906-336-5, lire en ligne).

Liens externes

Notes et références

Notes

  1. M. Defond habitait à Buxeuil la propriété de Plancoulaine, dont René Boylesve a donné le nom à son personnage[4].

Références

  • François Trémouilloux, René Boylesve, un romancier du sensible (1867-1926), 2010 :
  • Autres références :
  1. « L'Enfant à la balustrade - René Boylesve - Babelio », sur Babelio (consulté le ).
  2. « René Boylesve - LiTTéRaTuRe », sur LiTTéRaTuRe (consulté le )
  3. « L'enfant à la balustrade, de René Boylesve (1867-1926): Combray par la petite porte », sur www.actualitte.com (consulté le )
  4. Bourgeois 1958, p. 59.
  5. L'Enfant à la balustrade, p. 33 de l'édition Calmann Lévy-Nelson.
  6. Pierre Joulia, René Boylesve, sa vie, son œuvre : conférence au château royal de Loches, 12 juin 1969, Le Réveil lochois, , 34 p., p. 20.
  7. L'Enfant à la balustrade, p. 366 de l'édition Calmann Lévy-Nelson.
  8. René Boylesve, Opinions sur le roman, Paris, Plon, , 241 p., p. 120.
  9. Marc Bonnemayre et Patrick Spinace, « Le Beau Livre - Boylesve René - Carlègle - La leçon d'amour dans un parc », sur www.lebeaulivre.com (consulté le )
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