Jean XII

Octavien (ou Ottaviano ou Octavius), né vers 937 et mort le , fut le 130e pape de l'Église catholique romaine sous le nom de Jean XII.

Jean XII

Otton Ier (empereur du Saint-Empire) rencontre le pape Jean XII. Dessin de l'atelier de Diebold Lauber. Vers 1450. Bibliothèque universitaire de Heidelberg.
Biographie
Nom de naissance Octavien
Naissance vers 937, Latium
Rome
Décès
Rome
Pape de l’Église catholique
Élection au pontificat
Intronisation
Fin du pontificat

.html (en) Notice sur www.catholic-hierarchy.org

Origine et accession au trône pontifical

Octavien est le fils d'Albéric II de Spolète, et de Alda (ou Ada), fille de Hugues d'Arles, roi d'Italie (926-947).

En 932, Albéric se révolte contre sa mère Marousie et son beau-père Hugues d'Arles ; il chasse Hugues de Rome et enferme sa mère, qui meurt en prison. Albéric s'autoproclame prince de tous les Romains, patrice ou consul de Rome. Il épouse en 936 Alda, fille de Hugues d'Arles, dont il a un fils, Octavien, vers 937. Il est cependant possible qu'Octavien ait été le fils d'une de ses maîtresses. Avant sa mort qui survint en 954, il fit prêter serment aux nobles romains rassemblés à Saint-Pierre de Rome qu'à la prochaine vacance du trône pontifical, son fils Octavien serait élu pape, en dépit du décret du pape Symmaque qui interdisait toute forme d'accord sur la succession d'un pontife alors que ce dernier était encore en vie. Alberic meurt en août 954, et Octavien lui succède alors comme Princeps de Rome.

Après la mort du pape Agapet II, en novembre 955, Octavien alors probablement âgé de dix-huit ans[1],[2],[3] fut élu comme son successeur le , bien que n'ayant pas l'âge canonique pour cela[4]. Il est également probable qu'il n'avait eu aucune formation ecclésiastique jusque-là. De plus, on peut penser que, compte tenu de son pouvoir, il avait brûlé les étapes en vue de l'élection de pontife, obtenant facilement le titre de diacre ou de prêtre, ce qui était le minimum nécessaire.

Il devint pape sous le nom de Jean XII et fut le deuxième pape (après Jean II) à changer de nom, inaugurant ce qui devint une pratique fréquente à partir du xe siècle.

L'alliance avec Othon Ier et les promesses

Il est considéré comme le plus scandaleux des « papes Jean », les chroniqueurs ayant dénoncé en termes souvent vigoureux son règne, certains allant même jusqu'à le qualifier d'« Antéchrist siégeant dans le temple de Dieu ». Plus familier en raison de son âge et de son milieu d'origine à la chasse et à la guerre qu'au gouvernement de l'Église, amateur de festins et d'aventures amoureuses, il mène toutefois une politique d'expansion territoriale vigoureuse, qui le conduira à subir une défaite devant le duc Pandulf de Capoue et, dans le même temps, voir l'occupation des États pontificaux par Bérenger, roi d'Italie, et son fils Adalbert.

Afin de riposter à cette occupation, Jean XII sollicite l'aide du roi de Germanie, Otton Ier, ayant hérité de droits sur l'Italie par son mariage avec Adélaïde de Bourgogne. Voyant Otton arriver en Italie à la tête d'une puissante armée, Béranger, refusant l'affrontement direct, se replia dans des places fortifiées. Otton entra dans Rome le . Il fit le serment de reconnaître Jean XII comme pape et maître absolu de Rome, de ne pas prendre de décret sans le consentement papal, et, en cas de délégation du pouvoir en Italie, de faire que la personne à qui le pouvoir est remis prête serment de défendre le pape et les possessions pontificales au maximum de ses possibilités. Jean XII, de son côté, jura allégeance à l'Empereur et de ne pas conclure d'alliance avec Béranger ou Adalbert. Cette reconnaissance des États pontificaux (étendus jusqu'aux régions byzantines) en échange d'un serment de fidélité du pape, librement élu, aux représentants impériaux est formalisé par l'octroi du Privilegium Ottonianum, confirmation de la Donation de Pépin.

Jean XII le couronna solennellement empereur le . Le se tient un synode romain durant lequel le Pape fonde, selon la volonté d'Otton, l'archevêché de Magdebourg et l'évêché de Mersebourg, accorda le pallium aux archevêques de Salzbourg et de Trèves, et confirma la nomination de Rother en tant qu'évêque de Vérone. Le lendemain, Otton prend un décret connu sous le nom de Diploma Ottonianum dans lequel il confirme l'Église catholique romaine dans ses possessions, en particulier celles accordées par Pépin et Charlemagne, et indiqua dans le même temps qu'à l'avenir les papes devraient être élus selon une procédure canonique, bien que leurs consécrations ne puissent avoir lieu qu'après que les gages nécessaires eurent été donnés à l'Empereur et ses ambassadeurs. L'authenticité du contenu de ce document très discuté est avérée, même si le document existant n'est qu'une copie de l'original[5]. Dès le lendemain, , Otton quitte Rome à la tête de son armée pour reprendre les hostilités contre Béranger et Adalbert. Jean XII modifia alors ses plans pendant qu'Othon de son côté essayait de pousser l'autorité impériale jusqu'à des limites excessives. Le Pape commença des négociations secrètes avec Adalbert, le fils de Béranger, et dépêcha des émissaires en Hongrie et à Constantinople avec des lettres incitant au déclenchement d'une guerre contre Otton. De plus, Jean XII reprend la tradition, abandonnée dès Adrien Ier (772795), de dater ses actes à partir des années de règne des empereurs byzantins. Ces missives furent interceptées par des soldats impériaux, ce qui fit que l'Empereur fut mis au courant du revirement papal.

Les manœuvres de Jean et la fin du règne

Jean XII envoya alors une ambassade de conciliation à Otton, et en profita pour lui expliquer ses griefs qui étaient que l'Empereur avait reçu pour lui-même les serments d'allégeance des cités des États pontificaux qu'il avait reconquis sur Béranger. Otton fit alors répondre par une ambassade qu'il réfute cette accusation. Dans le même temps, Adalbert vint à Rome où il fut reçu avec cérémonie par le Pape : cela provoqua la transformation du désaccord qui existait de la part de la noblesse romaine qui avait sympathisé pour la cause impériale en révolte ouverte contre Jean XII. Le retour d'Otton à Rome le provoqua la fuite de Jean XII et Adalbert à Tivoli. Otton fit probablement renouveler à la noblesse romaine la promesse sous serment de n'élire ni consacrer un pape sans le consentement de l'Empereur. Il est à noter que Liutprand, évêque de Crémone et qui décrivit ces faits en tant témoin oculaire, faisait alors partie de l'entourage d'Otton.

Le , un synode de cinquante évêques italiens et allemands est convoqué par l'Empereur à Saint-Pierre de Rome : Jean XII y est accusé de sacrilège, simonie, parjure, meurtre, adultère et inceste et fut sommé par écrit de se défendre. Ce dernier refuse de reconnaître la légitimité du synode, et prononce une sentence d'excommunication (ferendæ sententia) contre l'ensemble des participants à cette assemblée, les incitant par là à élire un autre pape. Otton ajouta alors aux accusations celle de rupture de l'accord ratifié par serment, de trahison envers sa personne et d'avoir contacté Adalbert et donna son accord au dépôt de Jean XII par le synode qui intervint le . Le protoscriniaire Léon — un laïc — est donc élu pour le remplacer. Il reçut les ordres le même jour de manière non canonique (sans les délais — interstitia — requis entre chaque) et couronné pape sous le nom de Léon VIII. Cette procédure contraire aux canons de l'Église rendit cette élection invalide de manière quasi-universelle dans la Chrétienté.

Le gros des troupes impériales quittant alors Rome, les partisans de Jean XII se soulevèrent encore une fois contre l'Empereur, mais furent matés le dans le sang. Néanmoins, sur la demande de Léon VIII, Otton relâcha la centaine d'otages pour lesquels il avait fait appel, et marcha sur Rome pour rencontrer Adalbert sur le terrain. Une nouvelle insurrection éclate dans la ville contre le parti impérial, provoquant la fuite de Léon VIII et le retour de Jean XII à Rome. Ce dernier prit une revanche sanglante sur les dirigeants du parti adverse : le cardinal-diacre Jean fut amputé de la main droite, l'évêque Otgar de Spire fut fouetté, un haut fonctionnaire du Palatin perdit le nez et les oreilles. Le , Jean tint un synode à Saint-Pierre durant lequel les décrets du synode du furent annulés ; Léon VIII et tous ceux qui participèrent à son élection furent excommuniés, son ordination déclarée invalide et l'évêque Sicon d'Ostie qui l'avait consacré, fut privé à jamais de ses dignités. L'Empereur, ayant les mains libres à la suite de la défaite de Béranger, se préparait à retourner sur Rome lorsque la mort du Pape modifia la situation : Jean XII est mort le , huit jours après qu'il a été, selon les rumeurs de l'époque, battu à mort par un mari jaloux ou frappé d'une attaque d'apoplexie en plein adultère. Le chroniqueur Liutprand de Crémone attribue pour sa part cette mort subite à un coup infligé par le Diable en personne.

Annexes

Bibliographie

  • Yves-Marie Hilaire (s. dir.), Histoire de la papauté, Seuil, coll. « Points histoire », 2003 ;
  • Philippe Levillain (s. dir.), Dictionnaire historique de la papauté, Fayard, 2003.
  • Liber Pontificalis, ed. DUCHESNE, II, 24609.
  • Jaffé, Regesta Rom. Pont., I (2de ed.), 463 sq.
  • Liutprand, De rebus gestis Ottonis, ed. Dümmler Opp., 124-36.
  • Hergenröther-Kirsch, Kirchengesch., II (4e ed.), 201-7.
  • Langen, Gesch. der römischen Kirche, II, 336-51.
  • Reumont, Gesch. der Stadt Rom, II, 237 sqq.
  • Hefele, Konziliengesch., IV (2nd ed.,), 605 sqq.
  • Dümmler, Otto der Gross, V, 313 sqq.

Articles connexes

Liens externes

Notes et références

Partiellement traduit de Pope John XII (de la Catholic Encyclopedia (1913) dans le domaine public) dans la version anglophone de Wikisource (lien permanent).

  1. Biographie universelle, ancienne et moderne: ou, Histoire, par ordre alphabétique, de la vie publique et privée de tous les hommes qui se sont fait remarquer par leurs écrits, leurs actions, leurs talents, leurs vertus ou leurs crimes, Volume 20, p. 607.Joseph Fr. Michaud, Louis Gabriel Michaud. A. T. Desplaces, 1858
  2. Histoire générale de l’Église, depuis la prédication des apôtres jusqu'au pontificat de Grégoire XVI. Antoine-Henri de Bérault-Bercastel, 1835
  3. Histoire du christianisme, Louis Joseph Antoine De Potter, REP sprl-bvba, 1908
  4. Il est généralement admis qu'il a été élu pape à dix-huit ans, après avoir succédé à son père à l'âge de seize ans. Certaines sources le donnent élu dès seize ans.
  5. (de) J. v. Pflugk-Hartung, Das Privilegium Ottos I, für die römische Kirche, Innsbruck, 1883. Lire en ligne
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