Jean Rouaud

Jean Rouaud, né le à Campbon (Loire-Atlantique, à l'époque Loire-Inférieure), est un écrivain français. Il a reçu le Prix Goncourt en 1990 pour son premier roman : Les Champs d'honneur.

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Biographie

De 1962 à 1969, Jean Rouaud fait ses études secondaires au lycée catholique Saint-Louis à Saint-Nazaire ; il passe un baccalauréat scientifique[1], puis étudie les lettres modernes à l'université de Nantes.

Après avoir obtenu une maîtrise, il occupe différents emplois provisoires, tels que pompiste, vendeur d'encyclopédies médicales ou monteur et démonteur de décors de théâtre[2].

En 1978, il est engagé à Presse-Océan et, comme il le raconte dans son livre Régional et drôle, après avoir travaillé à la sélection des dépêches de l'AFP, il est chargé de rédiger un « billet d'humeur » publié tous les deux jours à la « une » du journal, avec la consigne de faire régional et drôle.

Il part ensuite à Paris, où il travaille dans une librairie, puis comme vendeur de journaux dans un kiosque. En 1988, il rencontre Jérôme Lindon, directeur des éditions de Minuit, qui deviendra son éditeur principal.

Son premier roman, Les Champs d'honneur, est publié en 1990[3], et reçoit le prix Goncourt[4]. Durant les années 1990, ayant pu arrêter l'activité de kiosquier, il écrit les quatre romans qui, avec Les Champs d'honneur, forment un cycle romanesque racontant l'histoire de sa famille et certains aspects de sa propre vie.

Il est président du jury du prix du Livre Inter en 2000 et du prix Jeune Mousquetaire du premier roman en 2014.

En 2001, il quitte les éditions de Minuit pour les éditions Gallimard, qu'il quitte en 2014 pour les Éditions Grasset & Fasquelle.

En 2014, il publie aux éditions Dialogues, Éclats de 14.

Depuis 2015, il tient une Chronique hebdomadaire dans L'Humanité.

Présentation de l'œuvre

Le cycle romanesque familial et autobiographique

Marqué par la mort de son père au lendemain du jour de Noël 1963, alors qu'il n'a que onze ans, et par celle de deux autres proches parents au début de l'année 1964, Jean Rouaud ressuscite au fil de ses œuvres une famille décimée, à l'aide de mots simples et de clins d'œil remplis de malice et de tendresse. La mort de sa mère a lieu en 1996, avant qu'elle ait pu lire les lignes qu'il lui consacre dans ses derniers romans.

Dans ces récits familiaux, les événements ne sont pas exposés dans l'ordre chronologique ; le récit est en général constitué d'une suite de digressions, sans devenir cependant difficile à suivre. Sur un plan pratique, on peut noter que, dans les trois premiers livres du cycle, Jean Rouaud change les noms et prénoms de plusieurs personnages et de certaines localités : en particulier, il parle de « Random » et non de « Campbon » et n'énonce pas le nom de Rouaud. Ce n'est que dans le quatrième livre, publié après la mort de sa mère, qu'il renonce à ces artifices littéraires.

  • Les Champs d'honneur est construit autour des deux décès qui ont suivi la mort de son père : celui du grand-père maternel, Alphonse Burgaud, ancien tailleur à « Riancé » (Riaillé) et celui d'une tante de son père, Marie, ancienne institutrice. Il évoque longuement ces deux personnalités, puis d'autres défunts : les deux oncles de son père, Joseph et Émile, morts pendant la Première Guerre mondiale (ce qui est l'origine du titre) ; les parents de son père, Aline et Pierre, morts en 1940 et 1941.
  • Des hommes illustres est centré sur le père de Jean Rouaud, Joseph. La première partie évoque les dernières années de sa vie, du point de vue professionnel, comme représentant de commerce ; ses relations familiales ; ses relations avec d'autres habitants du village ; les circonstances de son décès. Dans la deuxième partie sont évoquées les années de guerre : son départ pour le STO, son évasion en gare de Nantes, son séjour clandestin dans une ferme à « Riancé » puis son retour à Nantes où il travaille dans un atelier de menuiserie. Le livre se termine le , date du premier grand bombardement de Nantes, subi à la fois par Joseph et par sa future épouse, Anne Burgaud, venue à Nantes par hasard ce jour-là.
  • Dans Le Monde à peu près, Jean Rouaud évoque d'abord ses études secondaires comme pensionnaire au lycée Saint-Louis (rebaptisé « Saint-Cosmes »), essentiellement ses années de sixième (1962-63) et de cinquième (1963-64), l'année du décès de son père ; ses expériences comme footballeur amateur et peu doué au club de « L'Amicale logréenne » ; ses problèmes de vue (l'origine du titre : atteint d'une myopie grave, il refuse cependant de porter des lunettes et voit le monde très flou au-delà de quelques mètres) ; ses premiers essais littéraires et ses essais musicaux (guitare mais aussi violon, un héritage de son grand-père).
    Dans une deuxième partie, il raconte quelques épisodes de sa vie d'étudiant à Nantes. Le récit est ici plus linéaire et supposé se dérouler sur quelques jours. Il retrouve successivement deux anciens camarades du lycée Saint-Cosmes, en particulier « Gyf » qui lui propose de réaliser la bande-son d'un film expérimental. Après plusieurs péripéties gastronomiques (une monumentale beuverie), politique (participation à une AG et à une manifestation contre la réforme des sursis[5]) et sentimentale (rencontre avec une amie de Gyf), la dernière suivie d'une déconvenue, le héros, déçu, se lance dans une course à l'aveugle à travers la ville ; elle se termine place Saint-Pierre par une chute sur un tuyau des pompiers en train de lutter contre l'incendie de la cathédrale de Nantes[6]. Quelques jours plus tard, alors qu'il travaille à la sonorisation du film de Gyf, il bloque la bobine avec son archet et provoque la destruction de la pellicule. Le récit se termine par une fuite peu glorieuse sur un Solex poussif (un des traits de ce livre est la propension à l'autodérision).
  • Pour vos cadeaux est consacré à la mère de Jean Rouaud, Annick Brégeau (Anne Burgaud dans les trois premiers livres). La personnalité de son père est cependant très présente, notamment à travers le titre : on apprend en effet (p. 152) qu'il avait commandé « à un faïencier de Quimper une série de cendriers marqués Pour vos cadeaux / Maison Rouaud ». Ce livre évoque un certain nombre d'événements : outre la mort du père, le bombardement du à Nantes, le mariage en 1946, la mort en 1947 d'un premier né, peu après sa naissance, victime du choléra dans une maternité nantaise ; la longue période de survie de la mère à partir de 1964 ; la période où elle s'investit totalement dans son activité commerciale, qui ne prend fin qu'avec la maladie, rapidement suivie de sa mort, à l'hôpital de Nantes.
  • Dans Sur la scène comme au ciel, Jean Rouaud adopte un point de vue distancié sur ses précédents livres. La première partie concerne la période de la maladie et de la mort de sa mère mais établit aussi une sorte de dialogue entre la mère et le fils à propos de son œuvre ; cette partie comporte de nombreuses citations de Pour vos cadeaux et est constituée par une suite de monologues intérieurs où Je représente alternativement Jean Rouaud et sa mère, jusqu'à l'instant fatal. La seconde partie expose de façon d'abord objective, puis de plus en plus irréelle, les funérailles de la mère de Jean Rouaud et leurs suites. La troisième partie reprend la biographie paternelle en se plaçant du point de vue des amis de Joseph Rouaud, peu satisfaits de la façon dont il a été présenté par son fils. À cette occasion, il rectifie l'épisode de l'évasion du STO, qui a eu lieu, très logiquement, en gare de Savenay et non en gare de Nantes.

Autres œuvres autobiographiques

  • Régional et drôle regroupe plusieurs textes, dont le premier, le plus long donne son titre au recueil. Le texte Régional et drôle débute par l'expérience de Jean Rouaud à Presse-Océan, mais il passe ensuite à une étude de ce qu'est pour lui la littérature, évoquant notamment le personnage d'Arthur Rimbaud, sur lequel il écrivait au début des années 1970. Ce texte se termine par un aspect de son projet initial (p. 36) : faire de ce milieu de nulle part [c'est-à-dire : Campbon, Loire-Inférieure] un lieu mythique. Les autres textes évoquent : l'école primaire ("Honoré Honorat"), la période du kiosque ("Station les sœurs Calvaire"), les vacances d'été dans les années 1960 ("L'été en play back"), l'avenir proche ("Bibi en l'an 2000")

Œuvre

Autobiographie familiale

Essais

  • 1999 : Cadou Loire-Intérieure, Nantes, Éd. Joca Seria, 1999, 45 p. (ISBN 2-908929-65-1), texte écrit par Jean Rouaud pour l'émission consacrée à René Guy Cadou dans la série de Bernard Rapp, Un siècle d'écrivains.
  • 2001 : Les Corps infinis, Actes-Sud. Texte sur des peintures de Pierre-Marie Brisson., Éd. Gallimard
  • 2007 : Préhistoires, éd. Gallimard, 101 p. Une préhistoire revisitée sur le thème sur la genèse de l'art pariétal.
  • 2009 : Souvenirs de mon oncle, éd. Naïve, 43 p. Revisite du film de Jacques Tati
  • 2013 : Manifestation de notre désintérêt[18], 58 p., éd. Climats (ISBN 978-2081305021)
  • 2015 : Misère du roman, Grasset, 112 p. (ISBN 978-2-246-85731-0)
  • 2016 : Tout paradis n’est pas perdu, 198 p., Grasset (ISBN 978-2-246-86091-4)
  • 2018 : La Splendeur escamotée de frère Cheval ou Le Secret des grottes ornées, 288 p., Grasset (ISBN 978-2-246-81567-9)
  • 2020 : L'avenir des simples, 252 p., Grasset (ISBN 978-2-246-82194-6)

Livres illustrés, bandes dessinées

Autres

  • 1997 : Les Très Riches Heures, Éd. de Minuit - (théâtre)
  • 1998 : Le Paléo-circus, Éd. Flohic
  • 2001 : La Désincarnation, Éd. Gallimard
  • 2001 : Régional et drôle, Éd. Joca seria, Nantes
  • 2004 : L'Invention de l'auteur, Éd. Gallimard
  • 2006 : L'Imitation du bonheur, Éd. Gallimard
  • 2006 : La Fuite en Chine, Éd. Les Impressions nouvelles, Bruxelles - (théâtre)
  • 2008 : La Fiancée juive[21], Éd. Gallimard
  • 2009 : La Femme promise[22], Éd. Gallimard
  • 2010 : Évangile (selon moi), éditions des Busclats
  • 2014 : Éclats de 14, éditions Dialogues

Notes et références

  1. Le Monde à peu près évoque « les épreuves de mathématiques, physique, chimie »
  2. Jean-Louis Ezine, « Rouaud le routard », L'Obs, .
  3. Patrick Kéchichian, « « Les Champs d’honneur », la Grande Guerre écrite avec grâce par Jean Rouaud », sur Le Monde, .
  4. Raphaëlle Leyris, « 13 septembre 1990 : « Le Monde » transforme le kiosquier Jean Rouaud en auteur », sur Le Monde, .
  5. La loi Debré envisageait la suppression du sursis pour les étudiants ; la lutte étudiante contre cette loi date du début de 1973
  6. L'incendie de la charpente de la cathédrale a lieu le 28 janvier 1972. Le rapprochement entre cette date et celle de la loi Debré montre que Jean Rouaud a reconstruit la chronologie de cette période.
  7. André Clavel, « Jean Rouaud refait Mai 68 », L'Express, .
  8. Antoine de Gaudemar, « Rouaud tout flou », Libération, .
  9. Jean-Baptiste Harang, « Orphelin de la veuve », Libération, .
  10. Jean-Claude Lebrun, « Jean Rouaud Joseph et Jean », sur L'Humanité, .
  11. Jean-Claude Lebrun, « La chronique littéraire de Jean-Claude Lebrun sur "Un peu la guerre" de Jean Rouaud », sur L'Humanité, .
  12. Jean-Louis Ezine, « Jean Rouaud, comme en 14 », L'Obs, .
  13. Jean-Claude Lebrun, « Jean Rouaud, suite de l’aventure », sur L'Humanité, .
  14. les critiques du Masque et la Plume , « 'Le Kiosque ' de Jean Rouaud ennuyeux ou merveilleux ? Les critiques du 'Masque' sont partagés », sur France Inter, .
  15. Jean-Claude Raspiengeas, « « Kiosque » de Jean Rouaud », La Croix, .
  16. Anne Coudreuse, Jean Rouaud et les leçons des quotidiens, Nonfiction, 2 mars 2019
  17. « Dans le cerveau poétique de Jean Rouaud », sur La République des livres, .
  18. Jean-Claude Lebrun, « Jean Rouaud : D’Haddock à Sarkozy », sur L'Humanité, .
  19. Erik Kempinaire, « Les Champs d’Honneur - par Deprez et Rouaud - Casterman », Actua BD, .
  20. Marion Festraëts, « Moby Dick », L'Express, .
  21. Didier Jacob, « Rock and Rouaud », L'Obs, .
  22. P.A., « Jean le bon », L'Obs, .

Liens externes

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