Jean Hatzfeld (journaliste)

Jean Hatzfeld, né le 14 septembre 1949 à Madagascar, est un journaliste et écrivain français.

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Biographie

Jeunesse

Il est le petit-fils de l'helléniste Jean Hatzfeld et le fils de l'historien Olivier Hatzfeld et de Maud Hatzfeld, dont il hérite le goût du voyage et de l'imprévu. Il est né à Madagascar, quatrième enfant d'une très nombreuse famille, et a vécu son enfance au Chambon-sur-Lignon. Ses grands-parents ont été déportés en France pendant la Seconde guerre mondiale, mais ont survécu. Il a de ce fait lu beaucoup d'ouvrages sur la Shoah[1].

Au lendemain de Mai 68, il fait la route vers Kaboul et Peshawar et, au retour, travaille en usine et exerce différents métiers de façon militante ou dilettante avant de monter à Paris.

Carrière journalistique

En 1975, il publie son premier reportage dans le quotidien Libération dont il rejoint la rédaction peu après. Dans un premier temps, il contribue à créer et diriger le service des sports, où il découvre un monde romanesque, le plaisir de raconter de belles histoires et l'apprentissage du récit en feuilleton quotidien. Puis il devient reporter tous azimuts, pour rapporter des faits divers et écrire des portraits, puis essentiellement à l'étranger en Israël et en Palestine, en Pologne, en Roumanie et dans toute l'Europe orientale, pendant et après le socialisme.

Son premier séjour à Beyrouth détermine immédiatement sa vocation de correspondant ou chroniqueur de guerre. Pendant vingt-deux ans, il traverse en long et en large de nombreuses guerres, dont celles du Moyen-Orient, d'Afrique et de Croatie et de Bosnie-Herzégovine, dont il tire un récit L'air de la guerre, rédigé en grande partie après avoir été immobilisé à la suite d'un accident à Sarajevo en .

De ces parcours sur les lignes de front, il écrit quatre romans La guerre au bord du fleuve, La ligne de flottaison, Où en est la nuit et Robert Mitchum ne revient pas, inspirés d'un imaginaire de guerre, dans lesquels il revient sur des personnages laissés en cours de route pendant ces années de reportage. Il retourne aussi en souvenirs sur des lieux et remet en scène plusieurs thèmes de la guerre et de l'écriture de la guerre. Dans ses derniers romans il revisite aussi le monde du sport, en particulier Deux mètres dix, lui aussi imprégné de guerres du passé.

Reporter au Rwanda peu après le génocide des Tutsi, saisi par l'échec collectif des journalistes face à l'événement et leur incapacité à affronter l'effacement des rescapés, il suspend son activité au sein de sa rédaction quatre années plus tard pour séjourner près de marais et travailler avec des rescapés tutsis originaires de Nyamata, un village de la région du Bugesera. Il tente de créer un univers du génocide par une autre littérature où emmener le lecteur. Selon Eléonore Sulser, « C’est parce que les journalistes sont passés trop vite, n’ont pas pu saisir ce qui s’était réellement passé au Rwanda, parce que le mot de «génocide» quand il apparaît est trop grand, trop lourd, trop fort pour qu’on l’envisage et le comprenne d’emblée, que Jean Hatzfeld retourne depuis des années au pays des collines et des marais. »[2].

Il s'attache, non pas à comprendre, ni à enquêter, mais à construire et monter les récits de ceux qui ont traversé cette expérience de l'extermination[3]. Le premier livre, Dans le nu de la vie, obtient le prix France Culture en 2001. Il poursuit son travail avec un groupe de Hutus ayant participé au génocide sur les mêmes collines, dans le pénitencier de Rilima. De ces entretiens naîtra en 2003 Une Saison de machettes, qui recevra le prix Femina essai la même année[4]. Puis il publie un roman dont l'un des personnages principaux est un correspondant de guerre, de retour à Paris.

Un troisième ouvrage consacré au génocide des Tutsi, La Stratégie des antilopes paraît en (prix Médicis). Jeune Afrique considère que les trois livres (Dans le nu de la vie, Une saison de machettes et La Stratégie des antilopes) méritent d'être considérés comme des classiques de la littérature sur le génocide rwandais[5].

Un quatrième suit les traces d’Englebert des Collines, un vieil ami, rescapé de ces marais, vagabond et alcoolique, qu'il connaît depuis son premier jour à Nyamata. Jean Hatzfeld y raconte les traces du temps, la vie « après » le génocide des protagonistes de ses premiers livres, l'impossible dialogue entre les rescapés et les tueurs, lorsque ceux-ci sont sortis de prison, leurs peurs, doutes et incompréhensions et surtout leurs fantômes. Vingt ans après les tueries, avec un papa de sang, il revient au bord des marais pour travailler cette fois avec les enfants des tueurs et des rescapés qui peuplaient ses précédents livres, des adolescents qui n'ont pas connu les machettes mais héritent de leur souvenir, et partagent une langue au phrasé et au vocabulaire métaphorique souvent poétique[6],[7].

Plusieurs de ses livres ont été traduits en de nombreuses langues européennes et asiatiques.

Il a collaboré à L'Autre Journal, GEO, L'Équipe magazine, Autrement, Rolling Stones, Cahiers du cinéma, Le Monde, Actuel. il a également participé à des revues et livres collectifs en France et à l'étranger (parmi lesquels The Paris Review et la collection BPI Centre Pompidou) et a coécrit des films.

Parmi les adaptations au théâtre de ses livres, on note les spectacles Igishanga, conçu et joué par Isabelle Lafon [8]Igishanga : Extraits du spectacle () Maison des Métallos.; Une saison de machettes, conçu et mis en scène par Dominique Lurcel[9] ; Dans le nu de la vie, réalisé par Jacques Taroni et produit par France Culture pour le Festival d'Avignon; Les voix de Nyamata, conçu et mis en scène par Anna Feissel-Leibovici; Exil, conçu, mis en scène et interprété avec son violoncelle par Sonia Wieder-Atherton à la Philharmonie de Paris.

Œuvre

Participations

Distinctions

[réf. souhaitée]

Notes et références

  1. « Génocide rwandais : « Un papa de sang » de Jean Hatzfeld – JeuneAfrique.com », JeuneAfrique.com, (lire en ligne, consulté le )
  2. « Jean Hatzfeld: «La bienheureuse enfance n’a pas voulu d’eux» », Le Temps, (ISSN 1423-3967, lire en ligne, consulté le )
  3. « Rwanda : les enfants de bourreaux et de victimes parlent », sur L'Humanité, (consulté le )
  4. Mohammed Aïssaoui, « Jean Hatzfeld : Roméo et Juliette à Sarajevo », sur Le Figaro.fr, (consulté le )
  5. « Écrire le génocide – Jeune Afrique », sur JeuneAfrique.com, (consulté le )
  6. Etienne de Montety, « Un papa de sang : Nyamata, capitale de la douleur », sur Le Figaro.fr, (consulté le )
  7. « Génocide rwandais : « Un papa de sang » de Jean Hatzfeld – Jeune Afrique », sur JeuneAfrique.com, (consulté le )
  8. « Jean Hatzfeld : "Je m’intéresse au temps qui passe, probablement pour ne pas avoir pu le faire pendant mes années de journalisme" », sur France Culture (consulté le )
  9. « Rwanda : comment guérir du génocide », sur www.estrepublicain.fr (consulté le )
  10. http://wyborcza.pl/kapuscinski/0,0.html

Liens externes

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