Iakov Iourovski
Iakov Mikhaïlovitch Iourovski (en russe : Яков Михайлович Юровский), né le à Tomsk et mort le à Moscou, membre du soviet de l'Oural lors de la Révolution russe, est le chef du peloton ayant exécuté Nicolas II et sa famille dans la nuit du 16 au , à Iekaterinbourg.
Origines
Iourovski est le huitième enfant d'une famille de dix enfants. Son père, de famille juive orthodoxe, travaille comme vitrier, sa mère comme couturière. Selon son propre témoignage, sa famille voue aux Romanov un véritable culte et il se querelle souvent avec son père sur ce point. Selon lui, c'est Alexandre II qui a le mérite des réformes, Nicolas II n’étant qu’un personnage méprisable qu’il se met vite à haïr. Il n’hésite pas à le traiter de tueur et de vampire devant sa famille et ses amis.
Il étudie l’horlogerie dans une école juive de Tomsk et trouve du travail dans un atelier de la ville. En 1897, il mène les premières grèves à Tomsk. Arrêté, libéré après quelques mois, il est renvoyé de son atelier et s'installe à Iekaterinbourg vers 1900. Il y trouve un emploi de bijoutier.
Lors de la révolution russe de 1905, il se joint aux Bolcheviks et se montre un fervent militant. Arrêté par l'Okhrana, il est exilé de Russie et s'établit à Berlin. Il habite l'Allemagne jusqu’en 1912, où il se convertit à la religion luthérienne et transforme son nom de Yankel Chaimovitch en celui de Iakov Mihaïlovitch. À cette époque, il est marié et père de trois enfants.
De retour en Russie, il s'établit à nouveau à Iekaterinbourg où il crée son propre studio photographique. En 1915, enrôlé dans l'armée, il préfère s'inscrire dans la formation médicale et est assigné au 198e régiment d'infanterie de Perm. Il participe à la campagne des Carpates en 1916 mais en revient complètement sans illusions sur la valeur réelle des unités russes déployées face aux puissances centrales.
Profitant du vide du pouvoir laissé par la Révolution russe de mars 1917, il quitte l’armée et retourne à Iekaterinbourg où, à l’automne, il est l’un des membres du soviet régional de l’Oural. Au début de 1918, après la Révolution d'Octobre, il est élu député régional et est nommé Commissaire de justice. Il rejoint également la Tchéka régionale et en devient l’un des chefs. Au début de juillet, il obtient le poste de commandant en chef de la villa Ipatiev, où sont détenus la famille de Nicolas II et leurs derniers serviteurs.
L'exécution des Romanov
Avant même son arrivée, Iourovski a reçu des instructions du soviet de l’Oural concernant les préparatifs pour une prochaine exécution. Il commence par changer la garde de la maison, la remplaçant par des hommes qui lui sont entièrement acquis. Alarmé par l'avance de l’Armée blanche, qui approche d’Iekaterinbourg, il reçoit bientôt ce message : « Informé de la menace que font peser les bandits tchécoslovaques sur la rouge capitale de l’Oural et prenant en considération le fait que le bourreau couronné, en se dissimulant, pourrait échapper à la sentence du peuple, le Comité exécutif, exécutant la volonté du peuple, a décidé de fusiller le ci-devant tsar Nicolas Romanov, coupable d'innombrables crimes sanglants ».
Au cours des jours suivants, Iourovski et son second, Piotr Ermakov (en), examinent les terrains du côté de Koptiaki, à dix-huit kilomètres de Iekaterinbourg, afin de trouver un endroit assez discret pour y enterrer les corps et garder secret le lieu de l’inhumation.
Le 16 juillet, il reçoit de Iakov Sverdlov, à Moscou, l'autorisation d'abattre toute la famille. L’exécution a lieu dans la nuit du 16 au 17 dans l'une des pièces du sous-sol de la maison Ipatiev. Les victimes sont au nombre de onze : Nicolas II, sa femme Alexandra Fedorovna, ses quatre filles Olga, Tatiana, Maria et Anastasia, son fils Alexis, le médecin de la famille Ievgueni Botkine, la femme de chambre Anna Demidova, le valet de chambre Alekseï Trupp et le cuisinier Ivan Kharitonov.
Aussitôt l’exécution terminée, les corps sont chargés dans un camion et emmenés à un ancien puits de mine, dans un boisé de Koptiaki, où ils sont jetés après avoir été dépouillés de leurs vêtements et de leurs bijoux. Iourovski s'avise vite cependant que les Blancs ne tarderont pas à les retrouver. La nuit suivante, aidé d'un autre commando, il repêche les cadavres et les emmène plus loin dans la forêt. À un moment, le camion s'enlise définitivement dans le sentier et il décide de les enterrer sur place. Après avoir fait brûler deux corps, les hommes de Iourovski préparent une fosse commune pour les autres. Ils y installent les corps, les aspergent d’acide sulfurique pour empêcher leur identification s’ils étaient retrouvés, puis remplissent la fosse en plaçant des traverses de chemin de fer par-dessus.
Deux jours plus tard, Iourovski part pour Moscou, emmenant avec lui les biens des Romanov. Il est également chargé de convoyer jusqu’à la capitale l’or des banques de l’Oural.
Les dernières années
Iourovski passe les deux années de la guerre civile à Moscou. Il travaille un temps au Kremlin, où il fait l'inventaire des affaires personnelles et des bijoux de la famille impériale. En 1920, il retourne à Iekaterinbourg. La même année, à la demande du soviet de Moscou, il écrit un compte-rendu détaillé des circonstances entourant la mort des Romanov. Il y décrit également de façon minutieuse le site où il a enterré les corps et le moyen de les retrouver. C'est grâce à ce document que Serge Abramov et Alexandre Avdonine (en) pourront découvrir la tombe des Romanov en mai 1979.
Au milieu des années 1930, Iourovski et ses amis commencent à être victimes des purges staliniennes. Ainsi, en 1934, sa fille est arrêtée et envoyée dans un camp de travail.
Souffrant d'une maladie du cœur et d'ulcères d'estomac, il est admis à l'hôpital du Kremlin en 1937. Selon son fils Alexandre, il aurait, sur son lit de mort, exprimé de grands regrets pour son rôle dans l'assassinat de la famille Romanov. Il décède le et est inhumé au cimetière de Novodevitchi, en banlieue de Moscou.
Sources
- Edvard Radzinsky, Nicolas II, le dernier des tsars, Le Cherche midi, 2002.
- Pierre Lorrain, La fin tragique des Romanov, Bartillat, 2005.
- Helen Rappaport, The Last Days Of The Romanovs, St. Martin's Griffin, 2009.
Article connexe
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