Hydrogène vert

L'« hydrogène vert » ou « hydrogène propre » est le dihydrogène produit à partir d'énergie renouvelable, par le processus d'électrolyse de l'eau. On le distingue de l'« hydrogène gris » produit par vaporéformage du méthane, de l'« hydrogène noir » produit à partir de source fossile ou d'électricité en découlant ou de l'« hydrogène jaune » produit à partir d'énergie nucléaire.

Contexte : production et utilisations de l'hydrogène

En 2015, l'hydrogène produit par électrolyse ne représente que 4 % de l'hydrogène utilisé, alors que l'Europe en consomme 8,8 mégatonnes par an[1]. Son utilisation se fait dans l'industrie du raffinage, la production d'ammoniac pour l'agriculture, la production de méthanol et dans une moindre mesure d'acier. Elle s'accompagne en 2020 de l'émission de 830 millions de tonnes de CO2 par an, soit environ 2 % des émissions mondiales et quasiment autant que le secteur aérien ou que le transport maritime[2].

Rôle dans la transition écologique

L'hydrogène est présenté par certains industriels et dirigeants comme un potentiel pilier de la transition écologique, potentiellement vers l'économie hydrogène, notamment dans le cadre des transports (voiture à hydrogène, train à hydrogène, avion à hydrogène...)[3],[4], du stockage d'énergie issue de sources renouvelables intermittentes[5] ou dans l'industrie (sidérurgie et industrie chimique)[6]. L'utilisation de l'hydrogène pour décarboner l'économie n'a de sens que si ce dernier est produit de façon décarbonée.

L'hydrogène produit à partir de nucléaire est considéré comme « vert » selon la classification en vigueur en France et la « taxonomie » verte.

Adéquation des types d'énergies renouvelables

Selon le think-tank allemand Agora Energiewende, l'électrolyse pour la production d'hydrogène vert requiert de longues durées annuelles de fonctionnement à pleine charge (supérieures à 3 000 à 4 000 heures par an) et de l'électricité renouvelable à bas coût. Cela écarte les éoliennes à terre (en moyenne 1 500 h/an). Les gisements les plus favorables sont les grands parcs éoliens de la Mer du nord et les grandes centrales solaires en Afrique du nord ou au Moyen-Orient[7].

Ambition politique

Union européenne

En 2020, la Commission européenne publie une « stratégie pour l'hydrogène en vue d'une Europe neutre climatiquement » qui prévoit d'installer d'ici 2024 des électrolyseurs d'une puissance totale de GW pour produite Mt de dihydrogène par an. D'ici 2030, cette capacité doit atteindre 40 GW pour produire 10 Mt d’hydrogène renouvelable[8].

L'hydrogène produit à partir d'énergie nucléaire est considéré comme « vert » selon la classification en vigueur en France[9], « violet »[10] voire « jaune »[11] par d'autres. Dans tous les cas, il est à très faible empreinte en carbone. Aussi de très nombreux syndicats européens enjoignent-ils à l'Union européenne d'inclure le nucléaire dans la « taxonomie » verte[12]. En , le rapport de l'UE aboutit à la conclusion que le nucléaire devrait entrer dans le cadre de la « taxonomie » verte[13].

France

La France, dans son plan de relance de 2020, a décidé d'investir deux milliards d'euros dans ce secteur d'ici 2022 et sept milliards d'ici 2030[14],[15].

Chine

La province chinoise de Mongolie intérieure donne en août 2021 son feu vert à un projet géant de parcs solaires et éoliens destinés à fabriquer de l'hydrogène vert près des villes d'Ordos et Baotou : ces parcs d'une capacité de 1,85 GW d'énergie solaire et 370 MW d'énergie éolienne produiront 67 000 tonnes d'hydrogène vert par an à partir de 2023. Ce projet nécessitera 465 MW d'électrolyseurs, soit plus du double de la production mondiale de 2020. Le sidérurgiste China Baowu Steel a annoncé des plans pour 1,5 GW d'électrolyseurs. La « China Hydrogen Alliance » estime les besoins en hydrogène du pays à 35 millions de tonnes d'ici à 2030[16].

Controverse

La production d'hydrogène nécessite d'importantes quantité d'énergie. Si l'hydrogène n'est pas produit directement à partir d'hydrocarbures fossiles, sa production par électrolyse se fait au détriment de l'électricité injectée sur le réseau électrique. Les rendements médiocres de récupération énergétique de la filière hydrogène, les difficultés de stockage, ainsi que la capacité limitée des électrolyseurs à absorber les fluctuations rapides des énergies vertes (éoliennes et solaire) font que la filière hydrogène dite verte est économiquement peu viable à grande échelle[17]. Seuls des cas particuliers ou des avancées technologiques dans les piles à combustibles avec des cycles intégrés à récupération de chaleur par cogénération associées aux pertes de rendement permettraient de justifier un intérêt énergétique et écologique pour la filière[réf. souhaitée]. Selon Jean-Marc Jancovici, la « quantité d’électricité nécessaire [interdit] d’envisager une conversion à l’hydrogène d’une large fraction de nos engins de transport »[18]. Pour la Fédération européenne pour le transport et l'environnement (T&E), cette inefficacité des e-carburants conduirait à les réserver au secteur de l'aviation[19].

L'Académie des technologies, société savante française, résume l'état de l'art de la filière hydrogène vert dans la conclusion de son rapport du  : « Le développement de la filière hydrogène relève du temps long. Des perspectives séduisantes sont ouvertes ; mais leur point d’arrivée n’est pas acquis. Il convient d’accepter que de nombreux travaux de développement n’aboutissent que dans les décennies à venir ; et on ne connaît pas les résultats. On ne saurait construire une politique énergétique sur des espoirs »[20].

Notes et références

  1. Association française pour l'hydrogène et les piles à combustibles, « Production et consommation d’hydrogène aujourd’hui » [PDF], sur afhypac.org, , p. 1.
  2. Jérôme Marin, « Lhyfe va produire de l'hydrogène vert avec des éoliennes », La Tribune, .
  3. (en) « Uses of hydrogen », sur Air Liquide Énergies, (consulté le ).
  4. « Un plan "hydrogène propre" pour l'Europe : cinq questions pour mieux comprendre », sur RTBF Info, (consulté le ).
  5. « L'hydrogène : la clé du stockage pour les énergies renouvelables », sur L'EnerGeek, (consulté le ).
  6. La rédaction, « De l'hydrogène pour fabriquer de l'acier », sur Transitions & Energies, (consulté le ).
  7. (en) Making the most of offshore wind [PDF], Agora Energiewende, 2019, page 5.
  8. Une stratégie pour l'hydrogène en vue d'une Europe neutre climatiquement, Commission européenne, 8 juillet 2020.
  9. « Plan de relance: quelle place pour l’énergie? », sur connaissancedesenergies.org, .
  10. (en) « Hydrogen produced from nuclear will be considered ‘low-carbon’, EU official says » L'hydrogène produit à partir du nucléaire sera considéré comme « à faible empreinte en carbone », selon un fonctionnaire de l'UE »], sur EURACTIV, .
  11. « Le plan hydrogène français entérine discrètement la relance du nucléaire », sur Reporterre, .
  12. (en) « Nuclear must be part of taxonomy, say unions; HPC delayed over COVID-19 » Le nucléaire doit faire partie de la taxonomie, estiment les syndicats ; la centrale nucléaire de Hinkley Point C retardée à cause du COVID-19 »], sur Reuters, .
  13. (en) « LEAK: EU experts to say nuclear power qualifies for green investment label » FUITE : Les experts de l'UE vont dire que l'énergie nucléaire peut bénéficier du label "investissement vert" »], sur Euractiv, .
  14. « Pourquoi la France va-t-elle investir tant d’argent dans l’hydrogène ? », sur 20 Minutes (France) (consulté le )
  15. Par Erwan Benezet et David DoukhanLe, « Le plan de relance consacrera 2 milliards d’euros à l’hydrogène », sur Le Parisien, (consulté le ).
  16. Energies renouvelables : la Chine lance un méga projet d'hydrogène vert, Les Échos, 19 août 2021.
  17. « L’hydrogène, cet hallucinogène. Les faits sont têtus et la physique impitoyable. », Contrepoints, .
  18. « Une interview dans le Journal des Activités sociales de l’énergie en  », sur Jean-Marc Jancovici, .
  19. (en) « E-fuels too inefficient and expensive for cars and trucks, but may be part of aviation's climate solution – study » Les e-carburants sont trop inefficaces et trop chers pour les voitures et les camions, mais pourraient faire partie de la solution climatique pour l'aviation - étude »], sur Fédération européenne pour le transport et l'environnement, .
  20. Rôle de l'hydrogène dans une économie décarbonée (rapport), Académie des technologies, , 166 p. (ISBN 979-10-97579-16-6, présentation en ligne, lire en ligne [PDF]).

Voir aussi

articles connexes


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