Fusil Charleville

Le fusil Charleville Modèle 1777 est une arme de guerre française conçue pendant le règne de Louis XVI par l'ingénieur Gribeauval, réputée pour sa production et son emploi massif sur les théâtres militaires européens (Révolution française, Vendée, guerres napoléoniennes) et également américains (Guerre d'indépendance des États-Unis, guerre anglo-américaine de 1812) de la fin du XVIIIe siècle au début du XIXe siècle. Il est progressivement remplacé, au gré des déclassements, par un autre fusil à poudre noire et à silex, le Modèle 1816/1822, mais on trouve le fusil Charleville de 4,6 kg datant de 1777, encore largement en service lors de la prise d'Alger en 1830. Beaucoup d'exemplaires ont été modifiés à partir de 1840 pour devenir des fusils à percussion, et réutilisés comme armes civiles de chasse.

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Fusil modèle 1777
Présentation
Pays Royaume de France
Type Fusil à poudre noire
Munitions 17,5 mm / .69"
Période d'utilisation 1777-1822
Poids et dimensions
Longueur(s) 1,529 m
Longueur du canon 1,1366 m
Caractéristiques techniques
Mode d'action Platine à silex
Portée maximale 200 à 250 m
Portée pratique Jusqu'à 150 m
Cadence de tir 2-3 coups/min
Vitesse initiale 450 m/s au maximum (temps sec)

Présentation

Comme pour l'artillerie, l'ingénieur Jean-Baptiste de Gribeauval s'efforça de parvenir à une interchangeabilité des pièces comparables pour le fusil modèle 1777, qui fut adopté par l'armée royale dès 1776. Devenu inspecteur général de l'artillerie et des manufactures royales, il institua même un système dit « de 1777 », comprenant de nombreuses armes destinées aux différentes spécialités de l'armée.

Le fusil modèle 1777 résulte de la longue évolution d'une arme apparue en 1717 à la Manufacture d'armes de Charleville[1], destinée à remplacer les fusils de modèles pour le moins variés que les soldats français employaient au combat. Conçu de la manière la plus rationnelle qui soit, de façon à parvenir à une standardisation plus poussée, le fusil modèle 1777 dut être modifié en 1801. Dans l'intervalle, le système 1777, comptant quatorze types d'armes différents, avait été simplifié en étant porté à six modèles seulement.

Pour tirer avec ce fusil à poudre noire, un soldat devait déchirer le papier de la cartouche avec ses dents[2], remplir un peu de poudre (de type pulvérin) servant d'amorce le bassinet, petite pièce creuse de la platine (le soldat devant s'assurer que la platine à silex était bien aiguisée), refermer le bassinet, verser le restant de la poudre dans le canon, la tasser avec la baguette de fer avant, pousser le papier ayant contenu la poudre et devenu la bourre, ensuite glisser ou cracher la balle dans le canon et la pousser jusqu'à la bourre, enfin, armer le chien, viser sans point de mire (le tireur se servant de son pouce gauche pour prendre sa visée) et presser la détente[3].

Variantes

Le modèle 1777 a été décliné en pistolets d'infanterie, de cavalerie avec deux modèles (le mécanisme de platine à silex est enfermé dans un coffre en laiton), et de marine, et en mousquetons, avec des variantes de mousquetons de cavalerie, de grosse cavalerie (carabiniers), de hussards (dit modèle 1786, plus court), de dragons, de gendarmerie, mousquetons de marine (garnitures en laiton).

Il a été produit dans les manufactures royales puis impériales de Saint-Étienne, de Tulle, de Maubeuge, de Versailles, deChatelleraut, de Mutzig, de Turin,.. et copié dans plusieurs pays comme l'Amérique (Model 1795 Springfield).

Évolutions et limites

Tableau établi d'après les mémoires du Capitaine Rayne (Metz, 1818)[4].

Les principales transformations apportées à cette arme concernèrent l'embouchoir, la grenadière et la forme de batterie. Le fusil modèle 1777 se révéla d'une robustesse peu commune, même si sa fiabilité fut assez souvent sujette à caution. Il connut beaucoup de problèmes d'amorçage, et son canon qui ne supportait pas la poudre de mauvaise qualité, employée pourtant à l'époque par l'armée française, était régulièrement encrassé (obligeant le canon à être lavé au chiffon puis séché et graissé après 50 ou 60 coups, chose impossible sur le champ de bataille et qui de fait, obligeait la plupart des soldats à y uriner afin de le décrasser et de pouvoir s'en resservir)[5]. En outre, l'obturation de la lumière était très fréquente (par des résidus de poudre, de papier, etc.) faisant que seule la poudre contenue dans ce dernier s’enflammait.

En comparaison, le fusil modèle 1777 fut certainement quelque peu inférieur au Brown Bess utilisé par les troupes britanniques, qui sans être le meilleur du monde comme certains le prétendirent en son temps (car beaucoup moins précis, étant même totalement dépourvu de tout organe de visée) s'avérait toutefois plus puissant et davantage dévastateur contre la cavalerie du fait de son calibre (19 mm) et de sa vitesse de tir de 3 à 4 tirs par minute contre seulement 2 à 3 trois pour le fusil français[6]. La portée maximale du Brown Bess est toutefois limitée à 100 mètres, alors que le Charleville atteint 250 mètres.

Utilisation

Été 2012 : reconstitution de la bataille de Waterloo, grenadiers de la garde impériale et fusils en faisceau

Cependant, la longévité de cette arme en dit long sur ses qualités. Fabriquée jusqu'en 1822, elle fut produite à raison de 2 millions d'exemplaires, équipant tous les fantassins du 1er Empire qui combattirent sur l'ensemble des champs de bataille d'Europe et d'outre-mer.

La Garde Consulaire, puis Impériale, se servit du même fusil d'infanterie modèle 1777 que les autres Corps, mais cette arme se différenciait par un certain nombre de détails importants. La monture et les garnitures avaient été modifiées par rapport au modèle de base et le fusil en question disposait d'une platine de sécurité, destinée à empêcher que l'arme ne se déclenchât accidentellement ou que l'amorce fût atteinte par l'humidité.

Caractéristiques

Tableau tiré du Manuel d'infanterie, 1808[7].

Fusil modèle 1777 corrigé an IX :

  • Poids du fusil : 4,6 kg
  • Longueur du fusil : 1,529 m
  • Longueur du canon : 1,1366 m
  • Calibre du canon : 17,48 mm
  • Diamètre de la balle : 16,54 mm
  • Longueur de la baïonnette : 0,4059 m
  • longueur de la lame de baïonnette : 0,38 m
  • Poids de la balle : 27,2 g (20 à la livre)
  • Poids de la charge de poudre : 12,24 g
  • Poids total de la cartouche : 39,44 g
  • Lumière : 0,94 mm
  • Prix du fusil : 25 à 34 francs (selon la manufacture)

Voir aussi

Liens externes

Articles connexes

Notes et références

  1. Henri Manceau, Jean Clerc, La Manufacture d'armes de Charleville, 1962, plaquette rééditée partiellement en 1990 par la SOPAIC
  2. Pour échapper à la conscription, certains se tranchaient l'index, et ne pouvaient donc plus appuyer sur la détente du fusil, ou parfois se faisaient arracher les dents de devant, ce qui les rendait impropres à déchirer le papier de la cartouche
  3. Jean-Claude Lorblanchès, Les soldats de Napoléon en Espagne et au Portugal, 1807-1814, L'Harmattan, , p. 189
  4. Voir : Napoléon Ier le magazine du Consulat et de l'Empire, N°35, p15.
  5. Voir : Les cahiers du capitaine Coignet, publication par Lorédan Larchey, Ed. Hachette, Paris, 1883.
  6. Étant convenu que la fourchette supérieure dépend en grande partie du climat (sec, mais pas trop chaud pour le refroidissement) et de l'expérience du tireur.
  7. Manuel d'infanterie ou résumé des tous les règlements, décrets, usages, renseignements propres à cette arme, Ed. Magimel, Paris, 1808. Consultation en Pdf : http://www.austerlitz.org/download/manuel.infanterie.pdf


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