Elisabeth Förster-Nietzsche

Therese Elisabeth Alexandra Nietzsche, née le à Röcken en province de Saxe et morte le à Weimar dans le Troisième Reich, est la sœur du philosophe Friedrich Nietzsche. Elle est connue aussi sous son nom de femme mariée : Förster-Nietzsche.

Pour les articles homonymes, voir Förster et Nietzsche (homonymie).

Sœur aimante[1] et soucieuse de préserver la mémoire de son frère, elle fut néanmoins à l'origine de la falsification de l'une des œuvres du philosophe, La Volonté de puissance. Au cours du XXe siècle, elle a été accusée d'avoir commis de nombreux forfaits à l'égard de son frère et de son œuvre, quelques commentateurs récents admettent que la plupart sont des inventions sans preuve ou contraires aux documents dont on dispose pour rejeter sur elle les accusations de fascisme et d'antisémitisme formulées contre Nietzsche[2],[3].

Biographie

Sœur cadette de deux ans de Friedrich Nietzsche, Elisabeth Förster-Nietzsche reçoit la même éducation luthérienne que son frère. Elle perd son père (pasteur) à l’âge de trois ans.

Elisabeth vénéra son frère dès le plus jeune âge, au point de lui reprocher ses premières amours. Elle s'occupa de son ménage à Bâle, et fut près de lui quand il tomba malade. Il y avait entre eux une complicité parfois faite de secrets qui échappaient à leur mère. Elle fut ainsi sa première confidente. Cet amour fraternel était si fort que vers l'âge de huit ans, Elisabeth et Friedrich déclarèrent qu'ils se marieraient ensemble quand ils seraient grands[4].

Les biographes estiment que le frère et la sœur commencèrent à s'éloigner l'un de l'autre vers 1878, quand Nietzsche, alors que la maladie l'avait plongé dans de violentes souffrances physiques et morales, publie Humain, trop humain. Le livre, conçu au contact et avec l'aide de Paul Rée, est désapprouvé par tous les proches de Nietzsche, et sa sœur est choquée des propos anti-chrétiens de son frère, propos qu'elle juge vulgaires et inhumains[réf. nécessaire].

En 1882, Elisabeth écarte Lou Andreas-Salomé de son frère qui en est éperdument amoureux. Puis, en 1885, au grand désespoir de son frère[réf. nécessaire], elle épouse un agitateur d'extrême droite, antisémite et ancien professeur, Bernhard Förster. Le couple souhaite fonder une colonie de pure race aryenne au Paraguay du nom de Nueva Germania qui verra le jour grâce à l’immigration d’une dizaine de familles allemandes. Mais l’échec de l’implantation de la colonie conduira son mari à se suicider le 3 juin 1889, à 46 ans, dans sa chambre d'hôtel, à San Bernardino (Paraguay), avec un mélange de morphine et de strychnine[5].

Après avoir fait passer le suicide de son mari pour le résultat d'une « maladie mortelle »[6], Elisabeth décide donc de rentrer définitivement en Allemagne pour s’occuper de son frère qui tombe malade la même année. Avec la mère du philosophe, elle prend la tutelle d’un Nietzsche qui n’est plus que l’ombre de lui-même. Il faut rappeler que la mère de Nietzsche reprochait à son fils « d’avoir tué le Christ »[réf. nécessaire].

En 1894, alors que son frère vit à l’état végétatif, elle crée le Nietzsche Archiv[7]. Elle sera à l’origine d’une grande campagne de promotion de l’œuvre de son frère et elle organisera les pèlerinages venus de toute l'Europe à Weimar pour venir voir son frère, qui devient ainsi une attraction touristique que l'on visite pour se faire prendre en photo[réf. nécessaire]. Dans le cadre de cette activité de promotion, elle défend son frère contre les récupérations antisémites, et elle tente en particulier de minimiser les textes qui expriment des propos antisémites plus ou moins explicites[2].

En 1930, elle adhère au NSDAP. En 1935, Hitler, qui souhaite profiter de l'aura du philosophe, fera le déplacement pour les funérailles de la sœur de celui-ci[8]. Après la Seconde Guerre Mondiale, elle sera accusée d'avoir manipulé jusque dans les années 1930 les écrits de son frère afin de soutenir les idéologues conservateurs puis nazis. Mais, si des falsifications sont avérées, elles ont peu à voir avec la récupération de la pensée de Nietzsche par le nazisme[9].

Notes et références

  1. Voir Nietzsche et sa sœur Elisabeth, H.F. Peters.
  2. Robert C. Holub, « The Elisabeth Legend: The Cleansing of Nietzsche and the Sullying of His Sister », in Nietzsche, Godfather of Fascism? On the Uses and Abuses of a Philosophy, édité par Jacob Golomb et Robert S. Wistrich, Princeton University Press, 2002.
  3. Lire l'essai de Mazzino Montinari, « La Volonté de puissance » n'existe pas, texte établi et postfacé par Paolo D’Iorio, Éditions de l'éclat, 1994, dans lequel il rejette comme saugrenue l'idée que la sœur de Nietzsche aurait mis les œuvres de son frère au service d'Hitler.(texte en ligne)
  4. Sur les relations très fortes entre Nietzsche et sa sœur, voir Nietzsche et sa sœur Elisabeth, H.F. Peters.
  5. Kracht, C., & Woodard, D., Five Years (Hanovre: Wehrhahn (de), 2011).
  6. Voir l'ouvrage de Diane Chauvelot, Elisabeth Nietzsche, de la sottise à la trahison, éditions de l'Harmattan, (ISBN 9782738459763)
  7. (de)(en) Nietzsche-Archive sur klassik-stiftung.de.
  8. Robert C. Holub, « The Elisabeth Legend: The Cleansing of Nietzsche and the Sullying of His Sister », in Nietzsche, Godfather of Fascism? On the Uses and Abuses of a Philosophy, édité par Jacob Golomb et Robert S. Wistrich, Princeton University Press, 2002, p. 218.
  9. « In fact [...] Elisabeth’s falsifications, when examined for their content, add little or nothing to the Nazi image of Nietzsche. » Robert C. Holub, « The Elisabeth Legend: The Cleansing of Nietzsche and the Sullying of His Sister », in Nietzsche, Godfather of Fascism? On the Uses and Abuses of a Philosophy, édité par Jacob Golomb et Robert S. Wistrich, Princeton University Press, 2002, p. 222.

Annexes

Bibliographie

  • H. F. Peters, Nietzsche et sa sœur Elisabeth, trad. de l'anglais par Monique Poublan, Paris, Mercure de France, 1978.
  • Irvin Yalom, Et Nietzsche a pleuré, 1992.
  • (en) Robert C. Holub, « The Elisabeth Legend: The Cleansing of Nietzsche and the Sullying of His Sister », in Nietzsche, Godfather of Fascism? On the Uses and Abuses of a Philosophy, édité par Jacob Golomb et Robert S. Wistrich, Princeton University Press, 2002.
  • Nietzsche "Je suis en guerre", Adaptation des lettres de Nietzsche à sa sœur Elisabeth (1885-1889) par Virginie Berling, Editions TriArtis, Collection "Scènes Intempestives à Grignan". (ISBN 978-2-916724-87-4), 2017.

Articles connexes

Liens externes

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