Concile de Jérusalem

Le « concile de Jérusalem » — ou « assemblée de Jérusalem » ou « réunion de Jérusalem » ou encore « concile des apôtres » — est un nom appliqué rétrospectivement à des discussions décrites dans le livre des Actes des Apôtres, quinzième chapitre[1], tenues sous la direction de Jacques le Juste et qui sanctionnent l'ouverture de la communauté des Juifs chrétiens aux « païens »[2] au milieu du Ier siècle.

Contexte

D'après les Actes des Apôtres, à la suite du retour de Paul de Tarse et de Barnabé d'Antioche, une controverse se pose au sein des tenants de Jésus de Nazareth sur la possibilité du salut des non-Juifs ; la question est alors portée à Jérusalem[3].

Une réunion d'apôtres, représentés par Pierre, et d’Anciens, représentés par Jacques le Juste, s'y tient pour répondre plus précisément à la question de savoir si la circoncision est nécessaire au salut ou si la seule foi en Jésus est suffisante. Faut-il être d'abord Juif avant d'entrer dans la communauté ? La circoncision et la filiation juive sont-elles secondaires au point d'admettre des non-Juifs[4] ? La question se déplace sous l'influence des pharisiens chrétiens[5] sur l'observance stricte de la Loi, y compris la circoncision tandis que Pierre expose comment les nations païennes sont devenues croyantes en entendant de sa bouche la parole de l'Évangile[6].

La question est donc double et le discours de Pierre répond en fonction du salut tandis que celui de Jacques s'articule en fonction de la Loi. C'est, en filigrane, la question du rôle du Christ dans le salut de Dieu et l'organisation des rapports entre Juifs et non-Juifs dans les premières communautés judéo-chrétiennes.

Datation

Ces événements sont généralement datés des environs de l'an 50, une dizaine d'années avant la mort de Jacques le Juste, « frère de Jésus ». Les indices littéraires amènent à diviser ce concile de Jérusalem en deux périodes distinctes : l'une vers 49-50, dominée par Pierre, portant sur la question du salut, dans une théologie du Christ et de l'Esprit. L'autre, après 52 et avant 58 dominé par Jacques qui traite de questions pratiques concernant la communauté, dans un esprit de légalisme intelligent et pacifique[7], alors que Paul est en Asie mineure, en Grèce et en Macédoine, et en apprend les résultats à son retour en 58[8].

Le débat

Le débat peut être ainsi résumé : la foi en Jésus était-elle suffisante pour être sauvé ou devait-on en plus observer les règles traditionnelles du judaïsme y compris la circoncision ? Le débat était devenu crucial après la conversion du centurion Corneille par Pierre.

Jacques apportera les éléments de solutions en faveur de Pierre et donnera tort aux pharisiens en écartant la nécessité de la circoncision avant le baptême. Il propose de réduire les interdits au strict minimum pour qu'un païen puisse être reçu dans la communauté avec les membres issus du judaïsme : interdit de manger les viandes non-saignées[9], et des sacrifices aux idoles[10], interdit de pratiquer l'immoralité sexuelle (la fornication)[11]. Pour autant, en Judée et à Jérusalem, Jacques maintiendra cependant la séparation entre Juifs et païens[12].

La décision de l'assemblée, connue ultérieurement sous le nom de Lettre apostolique se trouve dans les Actes 15, 23-29[13]  :

« Les apôtres et les anciens, vos frères, aux frères de la gentilité qui sont à Antioche, en Syrie, et en Cilicie, salut ! Ayant appris que, sans mandat de notre part, certaines gens venus de chez nous ont, par leur propos, jeté le trouble parmi vous et bouleversé vos esprits, nous avons décidé d'un commun accord de choisir des délégués et de vous les envoyer avec nos bien-aimés Barnabé et Paul, ces hommes qui ont voué leur vie au nom de notre Seigneur Jésus-Christ. Nous vous avons donc envoyé Jude et Silas, qui vous transmettent de vive voix le même message. L'Esprit Saint et nous-mêmes avons décidé de ne pas vous imposer d'autres charges que celles-ci qui sont indispensables : vous abstenir des viandes immolées aux idoles, du sang, des chairs étouffées et des unions illégitimes. Vous ferez bien de vous en garder. Adieu. »

Notes et références

  1. Ac 15
  2. « Païen est un terme qui n'apparaît dans le sens qui lui est resté aujourd'hui qu'au IVe siècle, il est donc anachronique pour parler des origines du mouvement chrétien. C'est de plus un terme typiquement chrétien. Il conduit en conséquence et subrepticement à adopter un point de vue christiano-centrique, à la différence du terme plus objectif et neutre polythéiste. », François Blanchetière, Enquête sur les racines juives du mouvement chrétien, éd; Cerf, 2001,p. 150.
  3. P.M. du Buit, Le concile de Jérusalem, in Aux origines du christianisme, éd. Gallimard/Le Monde de la Bible, 2000, p. 283-288
  4. Étienne Nodet, Qui sont les premiers chrétiens de Jérusalem, in Aux origines du christianisme, éd; Gallimard/Le Monde de la Bible, 2000, p. 240
  5. Ac 15. 5, cité par P. M. du Buit, op. cit. p. 283
  6. Ac 15. 7
  7. P.M. du Buit, Le concile de Jérusalem, in Aux origines du christianisme, éd. Gallimard/Le Monde de la Bible, 2000, p. 287
  8. Ac 21. 25, cité par P. M. du Buit, op. cit., p. 287
  9. Cf Lv 17. 210-13
  10. Ac 15. 20,29
  11. Cf Lv 18. 26
  12. Étienne Nodet, Qui sont les premiers chrétiens de Jérusalem, in Aux origines du christianisme, éd; Gallimard/Le Monde de la Bible, 2000, p. 241
  13. Ac 15. 23-29

Voir aussi

Bibliographie

  • Marcel Simon, « The Apostolic Decree and its Setting in the Ancient Church », in Bulletin of the John Rylands Library, vol. LII, 1969-1970, pp. 437-460
  • Pierre Geoltrain (éd.), Aux origines du christianisme, éd. Gallimard/Le Monde de la Bible, coll. Folio histoire, n°98, 2000
  • François Vouga, « Le concile des apôtres et le décret apostolique », in Les Premiers Pas du christianisme : Les écrits, les acteurs, les débats, éd. Labor et Fides, 1997, pp. 137-144

Articles connexes

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