Centrale nucléaire de Civaux

La centrale nucléaire de Civaux est un centre nucléaire de production d'électricité (CNPE) situé sur la commune de Civaux (Vienne) au bord de la Vienne entre Confolens (55 km en amont) et Chauvigny (16 km en aval), à 34 km au sud-est de Poitiers. Elle a été mise en service en 1997[3], ce qui en fait donc la centrale française la plus récente à produire de l'électricité.

Présentation

La centrale de Civaux se compose de deux réacteurs nucléaires de la filière REP et précurseurs du projet de EPR, désignés comme « palier N4 », de 1495 mégawatts chacun. Elle utilise l'air ambiant et l'eau de la Vienne pour son refroidissement[4].
La centrale est équipée de deux tours aéroréfrigérantes d'une hauteur de 178m [5] qui utilisent l'eau de la Vienne pour contribuer au refroidissement des installations. Leur hauteur est déterminée pour optimiser les échanges de chaleur avec l'air ambiant, en fonction du débit de la Vienne et de la puissance des réacteurs.

La centrale de Civaux produit environ 20 millions de mégawattheures par an. Civaux-1 a produit 11,6 TWh en 2019 : c'est le deuxième réacteur le plus productif durant cette année au monde après l'EPR de Taishan[6].

Caractéristiques des réacteurs

Les caractéristiques détaillées de chaque réacteur en service sont les suivantes :

Nom du réacteurModèleCapacité [MW]ExploitantConstructeurDébut constr.Raccord. au réseauMise en service comm.
Thermique (MWt)brute (MWe)Nette (MWe)
Civaux-1[1] N4 REP 1450427015611450EDFFramatomeoctobre 1988décembre 1997janvier 2002
Civaux-2[2] N4 REP 1450427015611450EDFFramatomeavril 1991décembre 1999avril 2002


Dates clés

  • 1980 : Décision d'implanter une centrale nucléaire à Civaux[7].
  • 1981 : Création de la Commission Locale d'Information (CLI).
  • 1984 : Signature du Décret d'Utilité Publique.
  • 1985 : Obtention du label « Grand chantier », label est décerné à toute construction déclarée d'utilité publique qui nécessite des mesures d'accompagnement et d'accueil.
  • 1987 : Obtention du permis de construire.
  • 1988 : Début de la coulée des bétons de l’unité de production 1.
  • 1997 : Couplage au réseau de l’unité de production 1.
  • 1998 : Incident niveau 2 sur le circuit RRA (Refroidissement du Réacteur à l'Arrêt) de l’unité de production 1, sans conséquence sur l’environnement.
  • 1999 : Couplage au réseau de la tranche 2.
  • 2001 : Premier arrêt pour rechargement et visite complète de l'unité de production 1.
  • 2002 : Premier arrêt pour rechargement et visite complète de l'unité de production 2.
  • 2003 : OSART (Operational Safety Assessment Review Team), mission d'évaluation de la sûreté en exploitation.
  • 2004 : Certification ISO 14001.
  • 2005 : Première évacuation de combustible usé vers la Hague.
  • 2006 : Entrée en tenue de travail standard en zone nucléaire.
  • 2007 : Certification OHSAS 18001 (démarche d’amélioration continue de la santé et de la sécurité du personnel).
  • 2009 : Accréditation NF EN ISO 17025 pour le laboratoire d'environnement.
  • 2011 : Première visite décennale du réacteur no 1[8].
  • 2012 : Première visite décennale du réacteur no 2[8]
  • 2014 : Demande de renouvellement et d'extension de l'accréditation ISO 17025 dans le laboratoire d’environnement.

Fonctionnement

Schéma d'une centrale nucléaire à eau pressurisée

Dans chacun des deux réacteurs nucléaires à eau pressurisée de Civaux, la fission des noyaux d’uranium produit de la chaleur transmise aux quatre générateurs de vapeur, qui génèrent de la vapeur d'eau pour faire tourner la turbine, qui elle-même entraîne l'alternateur qui produit l'électricité[9]. La vapeur d'eau issue de la turbine est condensée puis renvoyée vers les générateurs de vapeur.

Pour éviter toute contamination radioactive vers l’extérieur de la centrale, il existe trois barrières :

Le cœur de chaque réacteur, où se produit la réaction en chaîne, contient 205 assemblages combustibles. Chaque assemblage contient 264 crayons combustibles contenant les pastilles d'uranium produites par la Franco-Belge de Fabrication du Combustible. Tous les 15 mois environ, chacune unité est mise à l'arrêt pour réaliser des opérations de maintenance, retirer le tiers le plus usé des assemblages combustibles et le remplacer par un neuf. Après 4 à 5 ans d’entreposage dans l'eau, le combustible usé est envoyé vers l'Usine de retraitement de la Hague où il refroidit encore 5 à 10 ans avant d’être traité.

Réglementation de l'utilisation de l'eau

Les exploitants de la centrale de Civaux sont particulièrement vigilants à l'utilisation de la rivière Vienne. La Vienne présente un débit capricieux, faible l'été, pouvant générer des crues l'hiver. La centrale de Civaux utilise la Vienne pour refroidir ses installations et pour effectuer des rejets. Le débit de la Vienne, comme celui de tous les cours d'eau français est soumis à un SAGE (Schéma d'Aménagement et de Gestion des Eaux) ; placé sous la responsabilité du Préfet, celui-ci impose un débit minimum de 13 m3/s en amont de la centrale (à Lussac-les-Châteaux), débit qui permet une utilisation de l'eau pour tous les utilisateurs : agriculteurs, rejets d'eaux usées, prélèvements d'eau potable, pêcheurs... Il est important de souligner que lors des années de forte température ou sécheresse (2003 - 2004 - 2011) grâce aux barrages situés en amont d'avril à octobre, la Vienne a conservé un débit supérieur de 13 m3/s à la satisfaction de tous les utilisateurs. De plus, la centrale est soumise à un arrêté de rejet[10] précisant entre autres les seuils maximum de température des rejets de la centrale. Quand la température de la Vienne en amont est inférieure à 25 °C, la centrale ne doit pas contribuer à échauffer de plus de 2 °C entre l'amont et l'aval. Lorsque la température de la Vienne est supérieure à 25 °C, la centrale ne doit pas échauffer la Vienne. C'est pour cela qu'elle est équipée d'un système de refroidissement additionnel. Ainsi, lors des périodes très chaudes, lorsque la Vienne monte naturellement à des températures élevées, la centrale contribue à son refroidissement.

Risques liés au réchauffement climatique

Selon une étude publiée par la revue scientifique Nature, dans les années 2040, la production pourrait perdre en moyenne 6 % l’été par rapport à la période de référence (1971-2000)[11]. Cette perte moyenne de 6 % pourrait masquer des accidents plus prononcés. Et elle pourrait représenter une baisse de puissance, pour les deux réacteurs de Civaux, d’environ 300 mégawatts, soit la consommation de plusieurs dizaines de milliers de personnes[12].

L'étude mentionne aussi des risques pour la faune et la flore de la Vienne en raison du réchauffement de l'eau par la centrale nucléaire[13].

Actualité

L'année 2015 en quelques chiffres[14]:

Vue aérienne.

En 2015, la centrale a produit 20,5 milliards de kWh soit environ 5 % de la production nationale d’électricité d’origine nucléaire et a atteint un taux de disponibilité[15] de 85,2 %.

La production[16]

  • Énergie produite en milliards de kWh : 20,5
  • Disponibilité : 85,2 %

La centrale de Civaux a produit deux fois la consommation annuelle de la région Poitou-Charentes.

Les effectifs

  • Effectif total (EDF et salariés extérieurs permanents) : 1 100 personnes, dont 200 salariés d'entreprises permanentes
  • Âge moyen : 40,8 ans
  • Embauches : 29 personnes (soit 236 salariés recrutés depuis 2010)
  • Nombre de salariés d’entreprises extérieures sur les arrêts : de 500 personnes à 2 000 personnes suivant la quantité et la nature des travaux
  • Formation (nombre d’heures par salarié) : 100 heures par an
  • Apprentis : 41 personnes, dont 22 nouveaux apprentis en 2015

Les retombées socio-économiques

  • Fiscalité locale : 30 millions d'euros, dont 9,7 millions de taxe foncière

La sûreté

  • Visites de l’Autorité de Sûreté Nucléaire : 18 programmées ; 1 inopinée
  • Investissements de maintenance, prestations et matériels : 36,3 millions d'euros
  • Entraînement des équipes de gestion d’un événement : 11 exercices réalisés

L’environnement

  • Analyses et mesures en laboratoire : 20 000 par an

Incidents

Salle des machines.

Le 12 mai 1998, alors que l'unité était à l'arrêt, une fuite d'eau - estimée à 30 m3/h - s'est produite en raison d'une fissure sur un coude de la tuyauterie du circuit de refroidissement à l'arrêt du réacteur no1. Après avoir isolé la voie accidentée, le refroidissement du réacteur à l'arrêt a été assuré par la seconde voie. Les procédures ont été appliquées et la fuite a été stoppée quelques heures plus tard[17]. Les 230 m3 d'eau faiblement radioactive échappés ont été, selon le directeur de la sûreté nucléaire (DSIN), entièrement récupérés dans le puisard du réacteur.

Les expertises ont montré que les fissures étaient provoquées par un mauvais mélange des eaux chaudes et froides à l'intérieur du circuit. À l'époque de l'incident, un défaut de qualité des tubes avait aussi été évoqué[18].

À la suite de cet incident, EDF a déchargé les quatre réacteurs du « palier N4 », c'est-à-dire l'autre réacteur de Civaux et les deux réacteurs de la centrale nucléaire de Chooz qui étaient tous porteurs du même défaut. L'Autorité de sûreté nucléaire autorisera ces réacteurs à redémarrer plus de 10 mois après l'incident[19],[20]. Cet incident a été classé au niveau 2 de l'échelle INES qui en compte huit (de 0 à 7).

En juin 2001, à la suite du premier test de mise en pression, l'ASN publie un avis d'incident sur un "défaut d'étanchéité de l'enceinte" car le béton des enceintes, autant interne qu'externe, est fissuré[21],[22].

En 2007, lors du déchargement du combustible du réacteur n°1, un dépassement d’activité avait été constaté à la cheminée à cause du dégazage d'assemblages fuitards. Plusieurs crayons d'assemblage combustible identifiés comme fuitards subissent alors des investigations afin d’identifier l’origine de leurs défauts[23].

Le 13 janvier 2012, l'analyse d'un prélèvement réalisé dans un puits de contrôle de la qualité des eaux souterraines avait révélé la présence de tritium dans les eaux souterraines situées sous la centrale nucléaire de Civaux, à une concentration de 540 becquerels/litre (Bq/L) contre une valeur de 8 Bq/l attendue. L'Autorité de sûreté nucléaire a publié un rapport sur cet événement[24]. Les investigations menées sur les installations ont montré que cette radioactivité, de l'ordre d'un vingtième de la limite autorisée par l'Organisation mondiale de la santé (OMS) pour l'eau potable, a pour origine un écoulement d'eau provenant des réservoirs d'effluents situés au-dessus du puits de contrôle. L'eau de cette nappe souterraine, qui communique avec la Vienne, n'est utilisée ni pour l'eau potable ni pour les besoins agricoles. Deux défaillances sont à l'origine de cet écoulement : un robinet défectueux et un bassin de rétention non étanche[24]. Des travaux ont été engagés rapidement, sur les réservoirs de stockage comme sur le dispositif de rétention qui se situe en dessous. Une réfection totale du revêtement a été réalisée.

Les effluents liquides inhérents à la production d'électricité, à l'instar du tritium, sont collectés, contrôlés et rejetés dans la Vienne conformément aux critères et seuils définis dans des prescriptions de l'Autorité de sûreté nucléaire réglementant les prélèvements d'eau et les rejets d'effluents[25].

L'ASN publie en 2018, avec plusieurs années de retard, un « avis d'incident » détecté dès 2015 et 2016 concernant les centrales de Chooz et de Civaux; une fois les réparations effectuées[26].

Notes et références

  1. (en) « IAEA - Power Reactor Information System - CIVAUX-1 », sur pris.iaea.org (consulté le ).
  2. (en) « IAEA - Power Reactor Information System - CIVAUX-2 », sur pris.iaea.org (consulté le ).
  3. EDF, « Civaux » (consulté le )
  4. ASN, « La centrale de Civaux » (consulté le )
  5. [PDF] Document Afsset, 10 octobre 2007
  6. « Reactor Database », sur world-nuclear.org (consulté le )
  7. [PDF]La centrale nucléaire de Civaux, bilan 2012 EDF, février 2013
  8. Le petit économiste - 18/07/2011 : La visite décennale de la centrale nucléaire de Civaux, un rendez-vous majeur
  9. Au cœur du réacteur d'une centrale nucléaire - La Nouvelle République, 16 septembre 2014
  10. Arrêté de rejet, commune de Civaux legifrance.gouv.fr, 23 juin 2009
  11. (en) Nature (revue) - 3 juin 2012 : Vulnerability of US and European electricity supply to climate change
  12. Le Figaro - 8/06/2012 : Le réchauffement menace les centrales nucléaires
  13. La Nouvelle République - 10/06/2012 : Le réchauffement climatique menace la centrale de Civaux
  14. [PDF] Dossier de presse 2016 énergie.edf.com
  15. Le taux de disponibilité est le rapport entre le temps où les unités ont effectivement produit de l’électricité, et le temps pendant lequel elles auraient pu en produire si les réacteurs n’étaient jamais arrêtés pour effectuer les travaux de maintenance ou de rechargement du combustible.
  16. [PDF]Dossier de presse 2016
  17. Revue de presse par Stop Civaux
  18. http://www.dissident-media.org/infonucleaire/incident_civeaux_stop.html
  19. Redémarrage du réacteur 1 de la centrale de Chooz B - Communiqué de l'ASN du 19 mars 1999
  20. Autorisation de chargement en combustible du réacteur no2 de la centrale de Civaux - Communiqué de l'ASN du 27 juillet 1999
  21. « Réacteur 1 Défaut d'étanchéité de l'enceinte », sur asn.fr (consulté le ).
  22. « [titre manquant] », sur La Nouvelle République du Centre-Ouest (consulté le ).
  23. https://www.asn.fr/content/download/72653/478621/version/1/file/INS-2009-EDFCIV-0005.pdf
  24. La Nouvelle République - 24/01/2012 : Un rapport accablant pour la centrale de Civaux
  25. Les principaux rejets sont consultables chaque mois sur le site internet http://civaux.edf.com
  26. Hervé Liffran, « Le gendarme de l'atome a perdu sa langue », Le Canard enchaîné, , p. 4

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

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