Cantoniste
Les cantonistes (russe : Кантонисты Kantonisty) sont les fils de conscrits de l’armée russe, engagés eux-mêmes pour une durée de vingt-cinq ans et éduqués dans les « écoles cantonales » (russe : Кантонистские школы kantonistskie skoly) en préparation de leur service militaire.
À partir de 1827, un décret oblige les minorités ethniques à y enrôler leurs enfants, à l’âge de douze ans. Le décret est appliqué avec un zèle particulier aux Juifs et aux Karaïtes. Coupés de leurs familles et du judaïsme, ils sont soumis à des pressions intenses en vue de les convertir au christianisme orthodoxe.
L'article 219 du tome XV du Code pénal de l'Empire stipulait que les mineurs orthodoxes dont les parents ou tuteurs les ont autorisés à accomplir des cérémonies religieuses juives ou hérétiques devaient être envoyés, pour ceux aptes, dans les bataillons de cantonistes;[1]par exemple, un oukaze du incorpora les Subbotniks mineurs à ces corps
.
Historique
Le terme de « cantoniste » est à l’origine appliqué aux fils des militaires de carrière russes, éduqués de 1805 à 1827 dans des « écoles cantonales » pour leur futur service militaire. Cependant, à la date du , un statut contraint les enfants juifs mâles à effectuer leur service militaire à partir de l’âge de douze ans et à être placés dans les écoles cantonales de provinces éloignées pour leur formation militaire. « Cantoniste » ne désigne désormais plus qu’eux.
Les fils des soldats juifs sont, à cette époque, considérés comme propriété du gouvernement. Durant le règne de Nicolas Ier, le gouvernement met un zèle particulier à leur appliquer ce statut car il est plus facile de les convertir au christianisme orthodoxe que leurs aînés dont les principes religieux sont mieux établis. La meilleure méthode est de les éloigner de leur lieu de naissance (ceux de Kiev sont envoyés à Perm, ceux de Brest à Nijni-Novgorod etc.) et de les soumettre à une intense propagande missionnaire de la part des officiers de l’armée. Des témoins oculaires rapportent en outre les mauvais traitements dont les cantonistes sont victimes[Note 1].
S’agissant d’une mesure antisémite d’État, les plaintes sont sans effet. Cependant, les méthodes employées pour forcer les Juifs à se convertir sont critiquées à travers l’Europe. Pressé par l’opinion publique, Alexandre II abolit le système cantoniste en 1857.
Statistiques
Recrues juives, de 1843 à 1854: 29,115[3].
Année | Nombre de recrues |
---|---|
1843 | 1 490 |
1844 | 1 428 |
1845 | 1 476 |
1846 | 1 332 |
1847 | 1 597 |
1848 | 2 265 |
1849 | 2 612 |
1850 | 2 445 |
1851 | 3 674 |
1852 | 3 351 |
1853 | 3 904 |
1854 | 3 611 |
Notes et références
Notes
- Alexandre Herzen confia ainsi avoir vu un convoi de cantonistes dont le conducteur dit que le tiers avait péri en chemin, et que la moitié des survivants n'arriverait pas vivante à destination.
Références
- Fircks, 1863, p. 204
- Fircks, 1863, p. 220
- (ru) Кантонисты (Cantonists) article in the Electronic Jewish Encyclopedia, based on the Shorter Jewish Encyclopedia. Jerusalem, 1976-2005: the Society for Research on Jewish Communities in cooperation with the Hebrew University of Jerusalem
Voir aussi
Bibliographie
- (en) Simon Dubnow, The Newest History of the Jewish People, 1789-1914 Vol. 2 (Russian ed. (ISBN 5-93273-105-2)) p. 141-149, 306-308
- CANTONISTS, by Herman Rosenthal at Jewish Encyclopedia, 1901-1906
- Benjamin Nathans, Beyond the Pale: The Jewish encounter with late imperial Russia (University of California Press, Berkeley, CA. 2002). p. 26-38
- (en) Yohanan Petrovsky-Stern, Drafted into Modernity: Jews in the Russian Army (1827-1917) (Stanford University Press, 2007-8)
- (en) Larry Domnitch, The Cantonists: The Jewish Children's Army of the Tsar (Devora Publishing, 2004). (ISBN 1-930143-85-0)
- Theodor von Fircks, Études sur l'avenir de la Russie, vol. 7 : La tolérance et le schisme religieux en Russie, Bruxelles, Behr, , 435 p. (lire en ligne)
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