Benoît Chassériau

Benoît Chassériau du Chiron (La Rochelle - Porto Rico ) est un diplomate, agent secret français, et ministre de la police de l'État libre de Carthagène des Indes (Colombie). Il est le premier diplomate français auprès de la République de Colombie (1824).

Son nom en Amérique du Sud est souvent orthographié Benito Chassériau ou Chasserieux.

Biographie

  • 1798 à 1801 - Campagne d'Orient - Contrôleur des Finances de deux importantes provinces de la Haute-Égypte

Benoît Chassériau entra très tôt dans l'administration et fit la mémorable campagne d'Orient. Bien que très jeune, il administra, comme Contrôleur des Finances, deux importantes provinces de la Haute-Égypte de 1798 à 1801, sous le Commandement, d'abord du Général de Division François-Étienne de Damas et ensuite sous celui du Général Augustin-Daniel Belliard.

  • 1802 à 1807 - Expédition de Saint-Domingue – Trésorier-Général et Secrétaire Général de la Colonie

Nommé Trésorier-Général, lors de l'expédition de Saint-Domingue en 1802, Benoît Chassériau exerçait les fonctions de Secrétaire général sous le gouvernement du général Jean-Louis Ferrand de la partie Est de Saint-Domingue, cédée à la France par le Traité de Bâle. Lors de l'invasion de la Péninsule par les armées impériales, cette partie du territoire de Saint-Domingue, restée plus espagnole que française se souleva. Fait prisonnier, Benoît Chassériau parvint à s'échapper des fers, mais la guerre maritime l'empêcha de revenir en France. Il visita les Antilles et le continent de l'Amérique espagnole. Il fit partie des exilés français partis de Saint-Domingue à l'origine de la ville d'Aigleville (Alabama) et de la Vine and Olive Colony.

Chassériau fut nommé en 1813, ministre de la police du gouvernement de Carthagène[1],[2] en compagnie de son ami Antoine Leleux, qui devait quant à lui détenir le portefeuille de la Guerre[3].

  • Janvier 1814 - Commandant de l'expédition secrète contre Portobelo (Panama) et de l'armée de l'Occident - 1re expédition pour la libération de Panama - Major de l'armée de l'État de Carthagène

Benoît Chassériau comme commandant en chef[4] dirigea la première expédition des indépendants visant à libérer Portobelo de la domination espagnole. Il partit de Carthagène avec 460 soldats et marins embarqués à bord de huit goélettes et attaqua Portobelo le 16 janvier 1814. Parmi eux se trouvaient les célèbres capitaines corsaires Renato Beluche (l'amiral préféré de Bolivar) et Louis-Michel Aury avec lequel il aura par la suite d'autres projets de conquête dans la Caraïbe. Cette expédition se solda par un échec et fut repoussée par les royalistes espagnols commandés par le gouverneur Joaquín Rodríguez Valcárcel. La seconde expédition qui devait se conclure par la prise du port fut menée en 1819 par le général écossais Gregor MacGregor. En 1822, Benoît Chassériau fut chargé de représenter la loge maçonnique de la Guajira auprès du Grand Orient de France afin d'obtenir une reconnaissance mutuelle. Appartenir à une loge était moins un signe d’adhésion à des principes philosophiques ou religieux que dans un but révolutionnaire pour la liberté et contre l’Espagne.

  • 1822 - Employé par le Département des Affaires étrangères, comme agent en mission dans l'Amérique du Sud
  • 1824 - Agent commercial et maritime auprès de Colombia, dépêché par François-René de Chateaubriand alors ministre des Affaires étrangères - 1er diplomate français auprès de la République de Colombie (1824)[5]. À noter que les lettres de créances ne furent pas présentées aux autorités colombiennes.

Chateaubriand confia de 1823 à 1824[6] deux missions à Benoît Chassériau, la première de s’assurer des dispositions du Gouvernement de Colombia et suggérer une médiation de la France, et la seconde de faciliter les relations commerciales entre ce nouvel État et la France, principalement avec la Martinique[7]. Il put fournir d’importants renseignements sur la situation de la colonie espagnole, sur l’opinion et la tendance de ses habitants. La France ne voulait pas favoriser ouvertement l'indépendance de la Colombie, mais elle souhaitait que cette dernière en appelât à elle. Chargé par le ministre d’aller préparer la voie, sans blesser la susceptibilité de l’Espagne, Benoît Chassériau partit avec un vaisseau de l’État accompagné de son fils aîné Frédéric-Victor-Charles Chassériau, bien jeune encore (il avait 17 ans) mais capable d’aider son père. Tandis qu’il remplissait sa difficile mission, la France déclara la guerre au gouvernement des Cortès. Le duc d’Angoulême, qui commandait l’armée, déclarait dans une proclamation que non seulement la légitimité et le pouvoir absolu devaient être maintenus en Espagne, mais aussi dans ses colonies. Cette imprudente déclaration mettait l’agent dans la plus fausse position. Il arriva que Benoît Chassériau fut même considéré comme un agent secret de l’Espagne. Son assurance du bon vouloir de la France en faveur de l’indépendance, démentie par la proclamation du duc, fut regardée comme mensongère et les partisans de la liberté des colonies faillirent lui faire un mauvais parti, tandis que la faction espagnole le regardait d’un mauvais œil. Rappelé en France, il apprit en débarquant à Brest la chute du ministère Chateaubriand.

  • 1826 à 1830 - Agent du Département de la Marine à l'île danoise de Saint Thomas
  • 1832 à 1833 - Vice-consul à Saint Thomas[8]
  • 1840 à 1844 - Consul titulaire de 2e et 1re classe à Porto Rico

Chassériau fut accrédité en 1835, comme Consul de France à Porto Rico où il y avait une population de 450 000 âmes - sur laquelle 12 000 français et la plupart des réfugiés de Saint-Domingue formaient la partie la plus industrieuse de cette population. La proximité de Porto Rico, de nos établissements des Antilles, son extrême fertilité, la préférence marquée de ses nombreux consommateurs pour nos produits développèrent de plus en plus l'actif cabotage de nos colonies et les rapports directs de la France avec cette île. La protection due aux nombreux français établis à Porto Rico, ainsi qu'aux intérêts de commerce et de navigation qui se rattachaient à cette possession espagnole obligèrent en 1840 le gouvernement français à élever à la première classe le consulat que Chassériau gérait depuis 5 années.

Benoît Chassériau meurt en poste à Porto Rico le .

L'ami français de Simón Bolívar

Benoît Chassériau a entretenu pendant de longues années une relation amicale avec Simón Bolívar qui dans sa correspondance l’appelait « mon ami français ».

  • En 1815, Benoît Chassériau sauva indirectement la vie de Simón Bolívar à Kingston.

Le 10 décembre 1815 quelques heures avant la tentative d'assassinat, Chassériau rend visite à Bolivar et lui donne de l'argent afin de chercher un autre logement. Ainsi, le Libérateur quitta la chambre où José Antonio Páez avait dormi pendant plusieurs nuits et qui dépendait de la maison d'hôtes Rafael Pisce, à l'angle des rues Prince et White. La même nuit, Pio le serviteur de Bolivar et Paez plongeait son couteau meurtrier dans le cou du capitaine Felix Amestoy, pensant qu’il s’agissait du Libérateur[9],[10],[11].

En 1816, pour aider Simón Bolívar au financement de l’expédition de los Cayos dans la partie sud-ouest d'Haïti, Benoît Chassériau constitua une sorte consortium avec Jean Pavageau, Michael Scott, George Robertson, S. Campbell et Maxwell Hyslop pour réunir la somme de 3.000 pesos[12],[13],[14]. Benoît Chassériau prêta pour sa part la somme de 404 pesos à Simón Bolívar. Pour lui exprimer sa gratitude, Bolivar demanda en 1827 le remboursement de ce prêt en l’augmentant des intérêts de 6% par an depuis le .

  • En 1822, Benoît Chasseriau s'est vu confié la garde à Paris du cousin de Simon Bolivar, José Félix Ribas y Palacios[15]. Dans une lettre datée du depuis Caracas, Francisco Ribas Galindo, secrétaire particulier de Simón Bolívar remerciait Benoît Chassériau de veiller sur José Félix Ribas y Palacios laissé en pension à Paris. José Felix Ribas y Palacios était le fils du héros de l’indépendance José Félix Ribas et de María Josefa Palacios, tante de Simon Bolivar.
Portrait de Benoît Chassériau par Théodore ChassériauMusée du Louvre, Paris

Famille

Benoît Chassériau était le dernier des 18 enfants de Jean Chassériau, négociant-armateur, conseiller perpétuel de l'Hôtel de ville de La Rochelle. Il épousa en 1806, Marie Madeleine Couret de la Blaquière, née le 15 juillet 1791 à Santa Bárbara de Samaná, (ile de Saint-Domingue), fille d'un riche propriétaire français de Saint-Domingue et eut 5 enfants dont :

Distinctions

Bibliographie

Notes et références

  1. ‘Indiana University Publications: Social science series, Volumes 8-10 p. 58 - Publisher Indiana University, 1939
  2. ‘Selected Writings of Bolivar: 1823-1830’ – Ed. Colonial Press, 1951 - Latin America
  3. ‘Simón Bolívar, más allá del mito: una reconstrucción documental de la vida de El Libertador, don Simón Bolívar, sus relaciones con El Protector, don José de San Martín y sus conexiones con la pequeña y grande historia de América’ - Guillermo Ruíz Rivas - Ediciones Tercer Mundo, 1964
  4. son nom est déformé en espagnol et s'écrit Benito Chaserieux – voir ‘La Independencia de Panamá en 1821: antecedentes, balance y proyecciones’ par Celestino Andrés Araúz - edition Academia Panameña de la Historia, 1980 – page 83 et ‘Panamá y sus relaciones internacionales: Estudio introductorio - Volume 15 of Biblioteca de la cultura panameña Volume 1 of Panamá y sus relaciones internacionales’ par Celestino Andrés Araúz – edition EUPAN, Editorial Universitaria, 1994 – page 17
  5. Courrier du Général Donzelot, gouverneur de la Martinique, le 25 mai 1824 ordonnant à Benoit Chassériau, agent commercial et maritime de la France auprès de la République de Colombie de s'embarquer à la Guaira sur la frégate la Flore pour se transporter à Carthagène d'où il se rendra à Santa-Fé de Bogotá pour remettre les dépêches au général Santander, vice-président de Colombie et au ministre des affaires étrangères.
  6. Bulletin de la Société Chateaubriand – Édition La Vallée-aux-Loups, p. 8 à 10, 1979
  7. The Beinecke Lesser Antilles Collection at Hamilton College: A Catalogue of Books, Manuscripts, Prints, Maps, and Drawings, 1521-1860 par Samuel Jones Hough et Penelope R. O. Hough – Editions University Press of Florida, 1994 - pages 292, 293, 297, 299, 300 et 301
  8. ‘‘ Roi de Louis Philippe - Neuilly 12 octobre 1832: nomination de Benoit Chassériau comme vice consul à Saint Thomas (île danoise); Saint Cloud 30 juillet 1839 contresignée par Soult comme duc de Dalmatie
  9. ‘Bolívar y los emigrados patriotas en el Caribe (Trinidad, Curazao, San Thomas, Jamaica, Haití)’ - Par Paul Verna – Édition INCE, 1983 (Pages 42, 43 et 96)
  10. ‘Simón Bolívar: Ensayo de interpretación biográfica a través de sus documentos’ - Par Tomás Polanco Alcántara - Édition Academia Nacional de la Historia, 1994 (page 505)
  11. ‘Petión y Bolívar: una etapa decisiva en la emancipación de Hispanoamérica, 1790-1830’ - Colección Bicentenario - Par Paul Verna - Ediciones de la Presidencia de la República, 1980 (page 131)
  12. ‘Memorias del general O'Leary: Documentos Daniel Florencio O'Leary, Simón Bolívar O'Leary, Manuel Pérez Vila – Ed. Ministerio de la Defensa, 1981
  13. ‘Robert Sutherland: un amigo de Bolívar en Haití : contribución al estudio de los destierros del Libertador en Haití, y de sus expediciones de Los Cayos y de Jacmel’ - Paul Verna – Ed. Fundación John Boulton, 1966 - Haiti (p. 23 et 25)
  14. Archivo General de la Nación presenta al público amante de la historia el Catálogo Digital del Archivo del Libertador Simón Bolívar / http://www.archivodellibertador.gob.ve/escritos/buscador/spip.php?article932
  15. José Félix Ribas y Palacios séjourna également à Paris en 1827 sous la protection bienveillante de la famille Chassériau
  16. Notice biographique Le Figaro - Evene - Jean-Baptiste Nouvion
  17. Article de Stéphane Guégan sur « L'ami des Colombiens, Benoît Chassériau (1780-1844) », paru sur Mots dits LeMonde.fr - 24 mars 2019 et Catalogue de l'exposition « Le modèle noir » au Musée d'Orsay, Flammarion - 2019, page 80, note 42

Lien externe

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