Annette Kellermann

Annette Kellermann (parfois écrit Kellerman[1]), née le à Sydney et morte le à Southport (Australie), est une pionnière de la pratique de la natation synchronisée.

Pour les articles homonymes, voir Kellerman.

Féministe, elle a revendiqué le droit de disposer de son corps en contribuant au développement du maillot de bain moderne et aux bienfaits de la pratique sportive pour les femmes.

Biographie

Enfance

La mère d'Annette Kellermann, Alice Charbonnet, est une pianiste française et l'arrière-petite-fille de James Jackson. Elle s’installe en Australie en 1878 et épouse le violoniste Frederick Kellermann en 1882, à Sydney[2].

Annette Kellermann naît le à Marrickville[2].

Née avec les muscles des jambes atrophiés, elle doit porter des bretelles d'acier pour faciliter sa marche. Quand elle a six ans, son médecin lui recommande de pratiquer la natation pour stimuler ses jambes. Pour aider ses muscles à se développer, ses parents commencent à l’emmener à la piscine locale, Cavill's Baths[3].

À l'âge de treize ans, elle a tellement nagé que ses jambes sont presque aussi robustes que la normale. Deux ans plus tard, elle maîtrise toutes les nages, apprenant entre autres le Trudgeon et l'arm over stroke, et gagne sa première compétition de natation. Elle se lance également dans le plongeon[2].

Alors qu'elle est encore au lycée, elle est embauchée par un aquarium où elle joue une sirène deux fois par jour dans un spectacle aquatique. Elle participe également à un spectacle de plongeon où elle saute d'une grande hauteur[3].

« Sirène australienne »

À 17 ans, elle enchaîne les exploits. Elle effectue des plongeons de 28 mètres et traverse Londres dans les eaux de la Tamise sur 27 km[4].

À 19 ans, elle se démarque également en tentant la traversée de la Manche à la nage. Les nageurs sont autorisés à nager nus, tandis qu’Annette Kellermann est contrainte de porter une combinaison. Au bout de dix heures de nage dans une eau à 11 °C, elle abandonne la course en cours en raison des conditions difficiles, après s'être révélée particulièrement combative face à l’abandon entre-temps de ses adversaires masculins[4].

La même année, elle participe à la traversée de Paris à la nage avec sept autres concurrents masculins et termine 4e. Couverte de saindoux, elle s'élance la première à 8 h du matin du pont National, part d'abord en sens inverse mais finit la course au niveau du viaduc d'Auteuil en 4 h 58 min, trente minutes derrière le premier[5]. L'année suivante, elle se représente pour la traversée, cette fois accompagnée de deux autres nageuses : Rosa Frauendorfer et Dora Herxheimer[6]. Elle termine la course en 3 h 59 min 30 s 04, ex-eaquo avec Frauendorfer[6].

Féministe du maillot de bain

Annette Kellermann en maillot de bain une pièce (vers 1910).

Pour maximiser ses performances en natation, Kellermann porte une combinaison qui lui dévoile les bras et les jambes et colle à sa peau de très près[3].

En 1907, elle est d’ailleurs arrêtée à Boston pour « indécence », du fait qu’elle porte une combinaison moulante et à manches courtes. Le juge fait jurisprudence en statuant en faveur de l’argument sportif. Médiatisé, cet évènement a permis la popularisation du maillot de bain une pièce mais aussi de la natation pour les femmes[7],[8].

Par la suite, Annette Kellerman a conçu sa propre gamme de maillots de bain.

Elle revendiqua également le confort vestimentaire en commercialisant des « chemises », amples et atteignant les chevilles, précurseurs des modes des années 1920[9].

Carrière artistique

Outre ses performances sportives, Annette Kellermann se fait remarquer pour sa silhouette par un professeur d’Harvard, qui la qualifie de « femme parfaite » en comparant ses mensurations à celles de la Vénus de Milo. À ces propos, elle aurait réagi en répliquant avec humour : « seulement en dessous du cou ! »[10].

À partir de 1908, elle commence les ballets aquatiques, pour lesquels les journaux américains saluent « l’élégance de la jeune nageuse » et relèvent son origine française (par sa mère). À partir de 1913, Annette Kellermann exporte ses spectacles en France à travers un spectacle, La Femme parfaite. Elle entame par la suite une carrière d’actrice[11].

En 1916, elle fut la première actrice à apparaître nue dans un film d’une production hollywoodienne traditionnelle (La Fille des dieux). Assise nue sur une branche d’arbre, ses cheveux couvrant largement ses seins, les bras tendus vers le haut, Annette Kellermann a provoqué un scandale médiatique dans le contexte d’époque[12]. Aucune copie du film ne semble exister[13].

Elle tourne aussi dans des films, en particulier des rôles de danseuse dans des ballets aquatiques :

Sa notoriété s’est progressivement estompée. Après avoir vécu un temps aux États-Unis, elle est retournée en Australie[14].

Engagement caritatif

Mariée à son manager, James Raymond Louis Sullivan, Annette Kellermann a joué un rôle actif pendant la Seconde Guerre mondiale en Australie, produisant des spectacles de charité pour la Croix-Rouge[15].

Hommages et postérité

En 1952, un film américain, La Première Sirène (Million Dollar Mermaid) retrace sa vie. Son rôle est interprété par l’actrice Esther Williams, une autre nageuse de compétition devenue actrice.

Elle possède une étoile sur le Hollywood Walk of Fame.

En France, la ville de Clermont-Ferrand inaugure en 2021 une esplanade Annette-Kellermann[16].

Notes et références

  1. Son nom d'origine allemande est souvent anglicisé.
  2. G. P. Walsh, « Kellermann, Annette Marie (1886–1975) », dans Australian Dictionary of Biography, National Centre of Biography, Australian National University (lire en ligne)
  3. (en) « Heroes of swimming: Annette Kellerman », sur theguardian.com, (consulté le ).
  4. Sand Collectif georgette, Ni vues ni connues, Hugo et compagnie, , 270 pages p. (ISBN 9782755631920).
  5. Anne Velez, 2010, p. 42
  6. Anne Velez, 2010, p. 43
  7. (en) « Annette Kellerman – the modern swimmer for modern women ».
  8. « Bibliothèque des femmes célèbres », sur Ministère chargé de l'égalité entre les femmes et les hommes, de la diversité et de l'égalité des chances (consulté le )
  9. (en) « Annette Kellerman – the modern swimmer for modern women », sur http://www.australia.gov.au (consulté le ).
  10. (en) « Heroes of swimming: Annette Kellerman », sur www.theguardian.com,  : « By now, Kellerman held many of the world records for female swimmers, and in truth was competing with the men. In 1905, for example, she had come third in a seven-mile race down the river Seine. She became so famous that her swimming career began to morph into a showbiz one. This process was given a shove in 1908, when a Harvard professor announced that Kellerman was "the Perfect Woman". (When told, she's said to have quipped, "But only from the neck down.") He had measured the bodies of thousands of different women, and Kellerman's was the one closest to that of the Venus de Milo. Always one with a keen eye for publicity, she named her next show The Perfectly Formed Woman. ».
  11. Gilles Dhers, « Annette Kellerman, sirène de beauté », Libération, (lire en ligne)
  12. (en) James Crighton Robertson, The Hidden Cinema : British Film Censorship in Action, 1913–1975, Londres, Routledge, , 199 p. (ISBN 978-0-415-09034-6, notice BnF no FRBNF37424126, lire en ligne), p. 9–10.
  13. (en) « Annette Kellerman: Hollywood's first nude star », sur http://www.bbc.com, (consulté le ).
  14. Rachel Wadoux (collectif Georgette Sand), Ni vues ni connues, Paris, Hugo Doc, , 253 p. (ISBN 9782755635393), p. 84
  15. (en) « The amazing life of Australia's "million-dollar mermaid" », sur bbc.com, (consulté le ).
  16. « Esplanade Kellerman : Entre tranquillité et verdure », chaîne Youtube de la ville de Clermont-Ferrand, 2 juin 2021.

Voir aussi

Bibliographie

  • Annette Kellerman, sirène dans Pénélope Bagieu, Culottées 1 - Des femmes qui ne font que ce qu'elles veulent, Paris, Gallimard, , 144 p. (ISBN 978-2-07-060138-7, notice BnF no FRBNF45163114) (bande dessinée)
  • (en) G. P. Walsh, Australian Dictionary of Biography, National Centre of Biography, Australian National University (lire en ligne), « Kellermann, Annette Marie Sarah (1886–1975) »
  • Elsa Devienne, « Les frontières invisibles de la plage : l'interdiction du port du maillot de bain dans le Los Angeles du début du siècle », Métropolitiques.eu, no 1028, (lire en ligne, consulté le ).
  • Anne Velez, « Les filles de l’eau. Une histoire des femmes et de la natation en France (1905-1939), thèse de doctorat en histoire contemporaine sous la direction de Christine Bard, Université d’Angers, 2010 », Genre & Histoire, (lire en ligne, consulté le ).

Liens externes

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