Évaluation formative

Les concepts d’évaluation formative et sommative ont été apportés par Michael Scriven en 1967[1], dans le contexte de l’évaluation de programmes éducatifs (Curriculum evaluation). Pour Scriven, une évaluation formative devait permettre à un établissement scolaire d’estimer la capacité de ses programmes scolaires à atteindre leurs objectifs, de façon à guider les choix de l’école pour les améliorer progressivement, au contraire d’une évaluation sommative qui cherche à poser un jugement final sur les programmes : « marchent-ils » ou pas ? Et en conséquence, faut-il les maintenir, les étendre ou les abandonner ?

Benjamin Bloom reprend dans les années suivantes cette distinction pour l’appliquer au processus d’apprentissage, notamment dans son ouvrage Handbook on formative and sommative evaluation of student learning[2].

Cette distinction a connu une large succès dans deux domaines d’évaluation, c’est-à-dire en pédagogie et dans l’évaluation des politiques publiques.

En pédagogie

L'évaluation formative est une évaluation qui a pour fonction d’améliorer l’apprentissage en cours en détectant les difficultés de l’apprenant (diagnostic) afin de lui venir en aide (remédiation), en modifiant la situation d’apprentissage ou le rythme de cette progression, pour apporter (s’il y a lieu) des améliorations ou des correctifs appropriés.

Au contraire de l’évaluation sommative (qui fait la somme des connaissances en fin de formation) ou certificative, qui a une fonction administrative et sociale, l'évaluation formative a avant tout une fonction pédagogique.

Les implications pour l’enseignant sont nombreuses, dans la mesure où la mise en œuvre de l’évaluation formative nécessite un changement d’attitude de la part de l’enseignant : une modification des attitudes d’évaluation, du statut de l’erreur, de l’implication de l’apprenant dans la mise en œuvre des décisions pédagogiques et des évaluations[3].

Selon Linda Allal[4], l’évaluation formative peut être :

  • rétroactive sur la base d’un contrôle ou d’une interrogation, « lorsque l’évaluation formative est réalisée à la fin d’une phase d’enseignement » ;
  • interactive par une observation des comportements, des interactions orales, un regard rapide sur les productions individuelles ou en sous-groupes ;
  • proactive lors d’un recueil d’indices susceptibles de guider des apprentissages ultérieurs.

L’évaluation formatrice (Nunziati, 1990[5]) est de l’autoévaluation formative, qui implique les apprenants dans le processus d’évaluation formative, en les amenant à s’approprier les critères d’évaluation, et en les responsabilisant face aux processus de gestion des erreurs. Les travaux de l’université de Aix Marseille ont montré que les performances des apprenants augmentent de façon significative lorsque ces derniers se sont approprié les critères d’évaluation. L'évaluation formatrice s'inscrit dans une approche constructiviste de l'apprentissage. Elle s'apparente à un processus d'accompagnement qui rend lisible les variables en jeu dans l'apprentissage.

Ce mode d'évaluation repose sur différents outils pédagogiques :

  • la mise en œuvre de critères d'évaluation par une démarche de contractualisation ou de négociation : l'apprenant peut mesurer le chemin parcouru et celui restant à parcourir. Ces critères permettent une décentration de l'apprenant en même temps qu'ils favorisent sa centration sur la tâche à réaliser ;
  • le concept de l'erreur formative : l'erreur est positive, elle fait partie de l'acte d'apprendre, elle doit être analysée et traitée dans une approche différenciée ;
  • les entretiens d'évaluation : ils visent à permettre à l'apprenant à prendre conscience des stratégies qu'il utilise, à porter une réflexion critique sur son activité. C'est aussi un temps de mise en confiance de l'apprenant.

L'évaluation formative, y compris l'évaluation formatrice, coupent court à tout fatalisme et permettent à l'apprenant de piloter son propre processus d'apprentissage.

Évaluation des politiques publiques

Dans l’évaluation d’une intervention publique, et dans la suite de Michael Scriven, l’évaluation formative est une évaluation généralement menée en cours de mise en œuvre et qui vise à améliorer le fonctionnement d’un programme existant.

L’évaluation formative se définit par sa visée : elle peut prendre des formes très diverses, et porter sur l’atteinte des objectifs comme sur les conséquences non anticipées, désirables ou non, d’une intervention[6]. Elle peut également être menée par une personne, professionnel de l’évaluation, extérieure à l’équipe en charge de la mise en œuvre, ou être un processus interne. Dans tous les cas, cependant, elle doit être l’occasion d’apprentissages par l’équipe en charge de la mise en œuvre.

Une évaluation formative suppose une grande proximité entre la personne en charge de l’évaluation et l’équipe en charge de la mise en œuvre, et donc une perte de l’indépendance de l’évaluateur : il est ainsi difficile pour Scriven d’envisager que la même personne en charge de l’évaluation formative puisse établir un jugement final sur l’intervention[1].

Notes et références

  1. (en) Michael Scriven, The Methodology of Evaluation, Social Science Education Consortium, (lire en ligne), p. 7-14
  2. Bloom, Benjamin S. (Benjamin Samuel), 1913-1999. et Madaus, George F.,, Handbook on formative and summative evaluation of student learning, McGraw-Hill, [1971] (ISBN 0-07-006114-9 et 978-0-07-006114-9, OCLC 126430, lire en ligne)
  3. ALTET, M. (2001). Pratiques d’évaluation et communication en classe. In : G. FIGARI & M. ACHOUCHE (Éd.). L’activité évaluative réinterrogée. Regards scolaires et socio-professionnels. Bruxelles : De Boeck.
  4. ALLAL, L. (1991). Vers une pratique de l'évaluation formative : matériel de formation continue des enseignants, Bruxelles : De Boeck-Wesmael.
  5. NUNZIATI, G. (1990). "Pour construire un dispositif d'évaluation formatrice", Cahiers Pédagogiques : Apprendre, n°280 janv. 1990, pp. 48-64.
  6. Hobivola A. Rabearivelo & Jihane Lamouri, L’évaluation « affranchie des objectifs » : une approche sans but, PERFEVAL, (ISBN 978-2-9811262-3-8, lire en ligne), p. 17-22

Voir aussi

Articles connexes

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