Équité
L'équité, du latin aequitas (« esprit de justice, égalité, juste proportion ») est un principe impliquant le juste traitement, le respect absolu de ce qui est dû à chacun[1]. Ainsi, l'équité est la vertu qui permet d’appliquer la généralité de la loi à la singularité des situations concrètes et qui vise à instaurer une égalité de droit, en tenant compte des inégalités de fait[2].
Pour les autres significations, voir Équité (informatique).
La notion d'équité appelle celles d'impartialité et de justice, et se rapproche de celle d'égalité des chances[3] (relevant plutôt du domaine de l'éthique) tandis que la notion d'égalité se rapproche de l'égalité de traitement[3] (relevant plutôt du domaine de la morale), bien que ces notions soient proches.
Dans la société humaine, l'équité permet une discrimination positive adaptant les conséquences de la Loi (souvent générale) aux circonstances et à la singularité des situations et des personnes (spécificités historiques, socioculturelles liées aux passés et cultures individuelles).
Étymologie
Le terme français est un emprunt savant datant de la fin du XIIIe siècle au latin classique aequitas dérivant lui-même de aequus « égal » puis « impartial »[4]. Dans son usage latin, aequitas peut signifier « égalité », « équilibre moral », « esprit de justice » ou encore « juste proportion ». À l'instar de sa signification latine, le terme français s'inscrit dans le registre de la justice naturelle pour désigner la juste appréciation de ce qui est dû à chacun. Dans le registre religieux, on parlera d'« équité divine » ou encore d'« équité suprême » pour désigner la justice divine. La notion d'équité est enfin parfois opposée aux notions de droit positif ou de loi[4].
Pour le philosophe et les évolutionnistes
Le sens humain de l'équité, lié aux idéaux d'impartialité et de protection du bien commun, a longtemps été une énigme évolutive car semblant aller à l'encontre des intérêts à court terme d'au moins une partie des individus, notamment dans un monde réputé dominé par des processus de concurrence, de compétitivité ou du « combat pour la survie ».
Les éthologues ont montré que l'Homme n'est pas la seule espèce à éprouver le sens de l'équité ; des primates non humains et d'autres animaux en sont ou en semblent dotés. Et ce sens en favorisant la cohérence du groupe social et de la société semble être un avantage du point de vue de la sélection naturelle[5].
Équité et droit
Dans les pays de droit civil napoléonien, par exemple en France et en Belgique, l'équité est la partie non écrite du droit. Le juge civil, en effet, juge « en droit et en équité »[6] et si aucune loi écrite ne s'applique à un litige qui lui est soumis, ou si la loi est obscure, le juge doit néanmoins « dire le droit » faute de se rendre coupable de déni de justice.
En revanche, en droit pénal, l'obscurité ou l'absence de loi écrite pertinente doit profiter à l'accusé.
Équité et développement durable
Dans le domaine du développement durable on parle aussi d'équité intergénérationnelle[7],[8], envers les jeunes ou plus âgés, ou envers les générations futures qui ne sont pas encore nées.
Équité et santé publique
En santé publique, l’équité se rapporte à l’impartialité dans l’allocation de ressources ou le traitement des résultats entre différents individus ou groupes. Référence est généralement faite à l’équité horizontale et verticale.
L’équité horizontale s’applique communément à un « traitement égal de besoin égal ». Par exemple, l’équité horizontale en matière d’accès aux soins de santé implique l’accès équitable à tous quels que soient les facteurs comme le lieu, l’ethnicité ou l’âge.
En revanche, l’équité verticale porte sur la mesure dans laquelle les personnes dotées de caractéristiques différentes doivent être traitées différemment. Par exemple, le financement des soins de santé par le biais d’un régime d’assurance maladie peut exiger que, par solidarité, les personnes à revenus plus élevés contribuent davantage au système d’assurance que les personnes à revenus modestes.
La notion d’équité en santé publique soulève aussi la question des inégalités en matière de santé notamment les différences injustifiées qui sont observées alors qu’elles sont évitables[9].
Selon l'OMS, les hommes et les femmes doivent tous pouvoir améliorer ou préserver leur santé et leur bien-être[10].
Équite algorithmique
Le développement des algorithmes d'apprentissage automatique et l'utilisation de ces algorithmes pour prendre des décisions et l'identification de biais algorithmiques a conduit au développement de la notion d'équité algorithmique[11].
Corbett-Davies et Goel 2018 distinguent trois définitions[12] :
- l'anti-classification consiste à ne pas prendre en compte les variables susceptibles de discriminer (par exemple le genre ou la race)
- la parité de classification consiste à faire en sorte que la performance du modèle soit la même entre les différents groupes
- la calibration consiste à faire en sorte que les résultats conditionnellement au risque estimé soient indépendants des différents groupes.
Hamilton (2016) distingue aussi l'équité individuelle et l'équité de groupe. L'équité individuelle garantit que les individus aux caractéristiques similaires soient traitées de la même manière tandis que l'équité de groupe traite les personnes des différents groupe de manière différente de manière à obtenir une égalité de résultats[13].
Notes et références
- « ÉQUITÉ : Définition de ÉQUITÉ », sur www.cnrtl.fr (consulté le )
- André Comte-Sponville, Dictionnaire philosophique, Presses Universitaires de France, , 1120 p. (ISBN 978-2-13-062779-1, lire en ligne), p. 325
- Glossaire associé à la Charte de la diversité en entreprise
- « Équité », dans Alain Rey (dir.), Dictionnaire historique de la langue française, t. I, Le Robert, (ISBN 2-85036563-7), p. 1281-82
- Sarah F. Brosnan1, & Frans B. M. de Waal (2014) Review : Evolution of responses to (un)fairness ; Vol. 346 no. 6207 DOI: 10.1126/science.1251776, Science 17 10 2014, en ligne 18 09 2014 (résumé)
- Le Code civil suisse indique que « Le juge applique les règles du droit et de l’équité, lorsque la loi réserve son pouvoir d’appréciation ou qu’elle le charge de prononcer en tenant compte soit des circonstances, soit de justes motifs ». Référence : Code civil suisse (CC) du (état le ), RS 210, art. 4.
- Hartwick JM (1977) Intergenerational equity and the investing of rents from exhaustible resources. American economic review, 67(5), 972-974.
- Solow, R. M. (1974). Intergenerational Equity and Exhaustible Resources. Review of Economic Studies, 41(5).
- MARGARET WHITEHEAD, « The concepts and principles of equity and health », Health Promotion International, vol. 6, no 3, , p. 217–228 (ISSN 0957-4824 et 1460-2245, DOI 10.1093/heapro/6.3.217, lire en ligne, consulté le )
- OMS, comité régional de l’Europe, cinquante-huitième session, Tbilissi (Géorgie), 15-18 septembre 2008
- Patrice Bertail, David Bounie, Stephan Clémençon et Patrick Waelbroeck, « Algorithmes : biais, discrimination et équité », sur https://www.telecom-paris.fr (consulté le ).
- (en) Sam Corbett-Davies et Sharad Goel, « The Measure and Mismeasure of Fairness: A Critical Review of Fair Machine Learning », Arxiv.org, (lire en ligne).
- Evan Hamilton, Benchmarking Four Approaches to Fairness-Aware Machine Learning, Haverford College Computer Science, 2016
Voir aussi
Articles connexes
Bibliographie
- Race Mohride (2019), Linguistic equity as open access: Internationalizing the language of scholarly communication, The journal of Academic Librarianship, Elservier.
- Alcalde, Javier (2015), Linguistic Justice: An Interdisciplinary Overview of the Literature, Amsterdam Working Papers in Multilingualism #3. 2015, 27-96, 71 pages.
- Ammon, Ulrich (2012) Linguistic inequality and its effects on participation in scientific discourse and on global knowledge accumulation – With a closer look at the problems of the second-rank language communities. Applied Linguistics Review 3(2): 333–355.
- Cheffins BR & Armour J (2007) « The Eclipse of Private Equity », ECGI – Law Working Paper n° 082, april.
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- van Parijs, Philippe (2003) Linguistic justice. In: Will Kymlicka & Alan Patten (eds.) Language rights and political theory. Oxford: Oxford University Press. pp. 153-186.
- Bolton GE & Ockenfels A (2000). ERC: A theory of equity, reciprocity, and competition. American economic review, 166-193.
- Clément Valérie, Le Clainche Christine et Serra Daniel, Economie de la justice et de l'équité, Economica, Paris, 2008, 431 pages (ISBN 978-2-7178-5557-9)
- Robbie W & Mike K (1998) Venture capital and private equity: a review and synthesis. Journal of Business Finance & Accounting, 25(5‐6), 521-570 (résumé)
- Fama EF & French KR (1997) Industry costs of equity. Journal of financial economics, 43(2), 153-193.
- Marc Fleurbaey, François Maniquet, Equality of Opportunity: The Economics of Responsibility, World Scientific Edition, 2012, préface par le prix Nobel d'économie Eric Maskin; (OCLC 939929190) (ISBN 9814368873)
- Ohlson JA (1995). Earnings, book values, and dividends in equity valuation. Contemporary accounting research, 11(2), 661-687.
- French KR& Poterba JM (1991) Investor diversification and international equity markets (No. w3609). National Bureau of Economic Research (résumé).
- Pool, Jonathan (1987) Thinking about linguistic discrimination. Language Problems & Language Planning 11(1): 3–21.
Liens externes
- (fr) Wikimédia face au principe d'égalité (injustice linguistique)
- (en) Victory for language equality in the European Parliament (victoire pour l'égalité linguistique au Parlement européen).
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