Yaxchilan

Yaxchilan (prononcer Yachtchilan[1]) est une ancienne cité maya située à l'est de l'État du Chiapas, au Mexique. Le site archéologique se trouve dans une boucle en fer à cheval du fleuve Usumacinta, qui fait office de frontière naturelle entre le Mexique et le Guatemala.

Yaxchilan

La structure 33, emblématique du site.
Localisation
Pays Mexique
État Chiapas
Coordonnées 16° 32′ 09″ nord, 90° 34′ 48″ ouest
Géolocalisation sur la carte : Chiapas
Yaxchilan
Géolocalisation sur la carte : Mexique
Yaxchilan

Toponymie

Les rives du fleuve Usumacinta, près de Yaxchilan.

Le site a été appelé Yaxchilán par l'archéologue Teobert Maler, au début du XXe siècle. Selon Carolyn E. Tate, il aurait choisi d'assembler les mots mayas "yax" (vert) et "tsilan" (ce qui est éparpillé), pour former le toponyme Yaxchilán, qui signifiait donc selon Maler « pierres vertes » en langue maya[2], en référence à la couleur verdâtre des pierres couvertes de mousse ou d'algues qu'il avait observées dans le lit de la rivière qui se jette dans l'Usumacinta au-dessus de la ville en ruine[3].

Le site a également été appelé Menché et Lorillard Ville (une idée de Désiré Charnay en l'honneur de Pierre Lorillard qui avait contribué à financer ses expéditions dans la zone maya).

Selon les recherches du mayaniste Simon Martin (en), le nom antique de la ville serait Pa' chan (littéralement « ciel coupé »), et peut être interprété comme une référence mythologique (allusion à la naissance du dieu du maïs K'awiil (en)) ou comme une métaphore du lever de soleil[4].

Histoire préhispanique

Une des pyramides sur la terrasse supérieure de Yaxchilan.

Il y a peu d'informations concernant les premiers souverains, hormis leur nom. Yopaat Bahlam I, fondateur d'une longue dynastie, est monté sur le trône le alors que Yaxchilan était encore un site mineur. Il a dominé de plus petits sites tels que Bonampak, et a été longtemps en guerre avec Piedras Negras, qui lui disputait le contrôle de la route commerciale de l'Usumacinta[5] et, au moins pendant un certain temps, avec Tikal ; c’était une ville rivale de Palenque, avec lequel Yaxchilan a fait la guerre en 654. La ville-État est devenue une capitale régionale et la dynastie a duré jusqu'au début du IXe siècle.

La première stèle connue de Yaxchilán date du règne de Yeux noués-Jaguar I. Elle célèbre la fin d'un katun en 514. Plusieurs fois victorieux au cours de guerres contre Bonampak, Piedras Negras et même Tikal, il finit cependant par être capturé par le souverain de Piedras Negras aux environs de 518.

Yaxchilán atteignit le faîte de sa puissance pendant le long règne du roi Itzamnaaj Bahlam III, mort à plus de 90 ans en 742. La plupart des monuments que l'on voit actuellement sur le site datent de son règne et de celui de son fils Oiseau-Jaguar IV. Ce dernier n'a succédé à son père qu'au bout de dix ans, en 752. Cette période obscure, que l'on appelle l'« interrègne », n'a cessé d'intriguer les archéologues. Au cours de cette période, un monument de Piedras Negras, la rivale de Yaxchilán, mentionne un souverain de cette dernière, Yopaat Bahlam II, en visite à Piedras Negras en 749. Son nom n'apparaît par contre nulle part dans les inscriptions de Yaxchilan, ce qui pourrait indiquer qu'à cette époque Yaxchilan était soumise à Piedras Negras, chose qu'on préféra passer sous silence sous ses successeurs. Par ailleurs Oiseau-Jaguar IV n'était que le fils de la troisième épouse de son père, une dame originaire de Calakmul. Tout semble donc indiquer que l'interrègne correspond à une période de crise à Yaxchilán, ce que confirment les monuments érigés par Oiseau-jaguar IV, dont le but est de souligner sa légitimité et le statut de sa mère. Parmi ses nombreuses activités constructrices figure notamment le réaménagement de la grande place. Oiseau-Jaguar IV fut non seulement un constructeur mais également un souverain guerrier, ce que souligne un titre qu'il affectionne : « aj k'al baak », c'est-à-dire « celui de vingt captifs ».

Ses entreprises militaires furent poursuivies par son fils Itzamnaaj Bahlam IV, qui contrôlait sans doute la cité de Bonampak, puisqu'il supervisa l'accession au trône de son souverain en 790. En 808, son fils K'inich Tatb'u-Crâne III remporta un dernier triomphe sur Piedras Negras, dont il captura le souverain. Cette victoire semble avoir été le chant du cygne de Yaxchilán : le Linteau 10 qui rapporte cet événement est le dernier monument de la cité portant une date en compte long. La piètre qualité du texte hiéroglyphique témoigne de la décadence de la cité à cette époque[6]. Bien que les circonstances exactes ne soient pas connues, la fin fut sans doute violente, comme tend à le prouver la découverte par l'archéologue Akira Taneko de 217 pointes de projectiles éparpillées à un endroit stratégique de l'Acropole Ouest[7].

Chronologie des rois de Yaxchilán

Linteau 53, Structure 55 : Itzamnaaj Bahlam III et son épouse Dame Ik'-Crâne, mère d'Oiseau-jaguar IV en 709.
Nom[8] ou sobriquet[9]Règne
Yopaat Bahlam I 359 ?
Itzamnaaj Bahlam I («Bouclier jaguar I»)  ?
«Oiseau-Jaguar I» 378 - 389
«Yax-Bois de Cerf-Crâne» -389 - 402 ?
«Souverain 5» 402 ?
K'inich Tatb'u-Crâne I  ?
«Lune-Crâne» 454 - 467
«Oiseau-Jaguar II» vers 467
«Yeux noués-Jaguar I» 508 - vers 518
K'inich Tatb'u-Crâne II 526 - 537
«Yeux noués-Jaguar II» 564
«Oiseau-Jaguar III» 629 - 669
Itzamnaaj Bahlam II alias «Bouclier-Jaguar II» 681 - 742
Yopaat Bahlam II vers 749
«Oiseau-Jaguar IV» 752 - 768
Itzamnaaj Bahlam III alias «Bouclier-Jaguar III» 769 - 800
K'inich Tatb'u-Crâne III vers 808

Histoire moderne

Télégramme de Rice, collaborateur du philanthrope Pierre Lorillard IV qui finançait l'expédition de Désiré Charnay, annonçant à Jules Ferry, ministre de l'instruction publique, la découverte d’une cité maya inconnue, Yaxchilan.

La première mention faite de l'emplacement, semble avoir été une brève note de Juan Galindo en 1833. Le professeur Edwin Rockstoh de l'université nationale du Guatemala a visité les lieux en 1881 et en a aussi rendu compte. Les explorateurs Alfred Maudslay et Désiré Charnay sont arrivés ici, l'un et l'autre, en 1882, et ont donné des comptes rendus plus détaillés des ruines par le biais de schémas et de photographies. Teobert Maler a visité le site à plusieurs reprises de 1897 à 1900 et édité, en deux volumes, une description fouillée de Yaxchilan et d'emplacements voisins en 1903.

En 1931, Sylvanus Morley a mené, à Yaxchilan, une expédition financée par l’Institut Carnegie, qui lui a permis d'en faire la topographie et de découvrir d'autres édifices.

L'Institut national d'anthropologie et d'histoire (INAH) du gouvernement mexicain a mené des recherches archéologiques à Yaxchilan dans les années 1972-1973, puis d'autres en 1983, pour finir par entreprendre, au début des années 1990, des travaux supplémentaires.

Description du site

Structure 19, surnommée "Le labyrinthe".

Situé en territoire mexicain dans une boucle de la rivière Usumacinta, Yaxchilan se compose de trois ensembles principaux : la Grande Place, la Grande Acropole et la Petite Acropole.

Linteau 24, structure 23, Yaxchilan. La sculpture dépeint un rituel sacré d'autosacrifice ayant eu lieu le 24 octobre 709. Le Roi Itzamnaaj Bahlam III est montré tenant une torche, alors que son épouse Dame K'abal Xook tire une corde à travers sa langue.

Yaxchilan est connue pour son grand nombre d'excellentes sculptures, notamment ses superbes linteaux, notamment la remarquable série du Temple 23,la maison de Dame K'abal Xook, une des épouses du roi Itzamnaaj Bahlam III. Trois linteaux de ce temple (24, 25 et 26) représentent K'abal Xook dans l'accomplissement d'un rituel. La série commence chronologiquement par le Linteau 25, datant de 681, la représentant en proie à une vision. Le Linteau 24, daté de 709, est une scène de saignée rituelle : la reine fait passer à travers sa langue une corde munie d'épines, tandis que son époux l'éclaire avec un flambeau. Le linteau 26, daté de 724, la représente tendant à son époux un casque en forme de jaguar. On compte généralement ces trois sculptures parmi les chefs-d'œuvre de l'art maya.

Accès

Jusqu'aux années 1990, les seuls moyens d'accès à Yaxchilan étaient le bateau ou l'avion. Il n'y avait pas de route à moins de 150 kilomètres. Depuis la construction d'une autoroute par le gouvernement mexicain le long de la frontière avec le Guatemala, il est possible de se rendre à Yaxchilan par voie terrestre. Depuis la localité de Frontera Corozal, sur les rives du fleuve Usumacinta, il est cependant toujours nécessaire d'emprunter une pirogue (lancha) pour se rendre sur le site même.

Bibliographie

  • (en) Carolyn E. Tate, Yaxchilan. The Design of a Maya Ceremonial City, University of Texas Press,
  • (en) Simon Martin et Nikolai Grube, Chronicle of the Maya Kings and Queens. Decyphering the Dynasties of the Ancient Maya, Thames & Hudson, , 2e éd.
  • (en) Robert J. Sharer et Loa P. Traxler, The Ancient Maya, Stanford University Press, , 6e éd.

Notes et références

  1. voir Transcription alphabétique des langues maya
  2. (en) Carolyn E. Tate, Yaxchilan: The Design of a Maya Ceremonial City, page 8.
  3. (de) Teobert Maler, Bauten der Maya aufgenommen in den Jahren 1886 bis 1905 und beschrieben, édition G. Mann de 1971, page 26 : yäx = yäS = »grün«, chilan = tiilan = »Daliegendes«, »Umhergestreutes«, in diesem besonderen Falle: Steine. Yäxchilin = yäiStsilan = »Grüne Steine«: Anspielung auf die durch Moosoder Algenbildung hervorgerufene grünliche Farbe der Steine im Bette jenes Flusses, der oberhalb der Ruinenstadt in den Usumatsinda mündet.
  4. (en) Simon Martin, « A Broken Sky: The Ancient Name of Yaxchilan as Pa' Chan », PARI Journal, vol. V, n°1, 2004.
  5. Sharer et Traxler 2006, p. 431.
  6. Simon Martin & Nikolai Grube, Chronicle of the Maya Kings and Queens, Thames & Hudson, 2008, p. 137.
  7. Michael D. Coe, The Maya (8e éd.), Thames & Hudson, 2011, p. 170.
  8. Simon Martin & Nikolai Grube, Chronicle of the Maya Kings and Queens, Thames & Hudson, 2008, p. 118-137
  9. entre guillemets

Voir aussi

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