Voie maritime du Saint-Laurent

La voie maritime du Saint-Laurent (en anglais : Saint Lawrence Seaway) est un cours d'eau du Canada et des États-Unis qui permet aux navires en provenance de l'océan Atlantique d'atteindre les Grands Lacs à l'intérieur des terres, jusqu'à l'extrémité occidentale du lac Supérieur. La voie maritime est nommée d’après le fleuve Saint-Laurent, qui s’écoule du lac Ontario jusqu’à l’océan Atlantique. Légalement la voie maritime s'étend du port de Montréal au lac Érié, y compris le canal Welland.

Pour les articles homonymes, voir Saint-Laurent.

Voie maritime du Saint-Laurent

Deux navires se croisent sur le canal Wiley-Dondero.
Géographie
Pays Canada, États-Unis
Coordonnées 43° 41′ 00″ N, 77° 57′ 00″ O
Début Montréal, Québec
Fin Port Colborne, Ontario
Caractéristiques
Statut actuel Ouvert
Longueur 600 km
Altitudes Début : 174 m
Fin : 6 m
Dénivelé 168 m
Gabarit Seawaymax
Alimentation Grands Lacs, Saint-Laurent
Infrastructures
Écluses 15
Histoire
Année début travaux 1954
Année d'ouverture 1959
Inauguration 26 juin 1959
Site web www.grandslacs-voiemaritime.com

La voie maritime du Saint-Laurent n'est pas un canal continu mais plutôt un système composé d’écluses et de canaux aménagés le long des berges du Saint-Laurent et de chenaux navigables dragués dans le fleuve. Ces installations, sous administration conjointe canado-américaine, permettent de contourner une série de rapides et de barrages, dont deux importantes centrales hydroélectriques.

Histoire

Les Grands-Lacs et le fleuve Saint-Laurent, nés avec la fin de l'ère glaciaire il y a moins de 10 000 ans, sont un système hydrologique jeune. Le trajet qu'emprunte l'eau depuis le lac Supérieur jusqu'à l'océan Atlantique présente plusieurs irrégularités que l'érosion n'a pas encore fait disparaître. Ces irrégularités que sont les rapides et les chutes sont autant d'obstacles à la navigation. Jacques Cartier déjà avait été arrêté dans sa quête du passage du Nord-Ouest par les rapides de Lachine au niveau de ce qui deviendra Montréal.

L'âge des canaux

Un bateau à vapeur sur les rapides de Lachine, 1901.

La première tentative de contournement concerne les rapides de Lachine que le régime français tente d’éviter par un premier canal dont les travaux débutent dès 1680 mais qui ne sera achevé que plus d'un siècle plus tard.

Les premiers canaux opérationnels sont creusés pour répondre à des impératifs militaires après l'invasion américaine. Entre 1779 et 1783, le Corps des ingénieurs royaux, sous la direction du gouverneur Frederick Haldimand, relie le lac Saint-Louis au lac Saint-François par quatre canaux profonds de seulement 0,76 mètre évitant une série de rapides. Cinq écluses, larges de 1,83 mètre, sont les premières construites sur le Saint-Laurent et possiblement dans toute l'Amérique du Nord[1].

Si les rapides ne sont pas infranchissables, l'aventure est périlleuse car il arrive que les bateaux se fracassent contre les rochers émergents et la seule alternative est le portage. L'accroissement de la population de la colonie vers l'ouest et les besoins accrus de mobilité des biens et des personnes qui en résultent vont faire entrer le Canada de plain-pied dans « l'âge des canaux ».

De l'Atlantique aux Grands Lacs

Le premier transit sur le canal Welland, 30 novembre 1829.

Après le canal de Lachine à Montréal en 1825, le premier canal Welland entre les lacs Ontario et Érié est ouvert à la navigation en 1833. La même année une commission gouvernementale recommande l'instauration d'un gabarit unique d'écluses de 61 mètres (200 pieds) de long par 13,7 (45 pi) de large et 2,7 (9 pi) de profondeur.

Le gouvernement de la jeune province du Canada construit une série de canaux permettant de contourner les principaux rapides sur le fleuve ; ainsi naissent les canaux de Cornwall (1843), Beauharnois (1845), Galop (1846), Farran's Point, Rapide Plat et Iroquois (1847). Plus à l'ouest, un second canal Welland, plus large, est achevé en 1848.

Dans les années qui suivent, ces canaux et leurs écluses sont reconstruits pour accueillir des navires toujours plus grands. Le développement des Prairies à l'ouest amène la Confédération à envisager un nouvel ensemble de canaux reliant le lac Huron et Montréal via les rivières des Français et des Outaouais, le Georgian Bay Ship Canal.

La voie maritime

En 1895, la U.S.-Canadian Deep Waterways Commission est créée pour étudier la faisabilité d'une voie maritime puis une commission mixte internationale voit le jour en 1909. Si la voie maritime reste un rêve, le gouvernement canadien prend néanmoins des dispositions. Quand la Beauharnois Light, Heat and Power Company débute, en 1929, le creusement d'un canal pour alimenter sa future centrale hydroélectrique le gouvernement fédéral intervient pour s'assurer que ce dernier sera assez profond pour accommoder de possibles navires.

Avec l’achèvement en 1932 du quatrième et dernier canal Welland débute la voie maritime moderne. Le Canada et les États-Unis signent le traité de la Voie navigable en eau profonde Grands Lacs/Saint-Laurent suivi, en 1941, de l'accord sur le bassin des Grands Lacs et du Saint-Laurent mais ils demeurent sans suite entre autres du fait de l'opposition d'influentes entreprises ferroviaires américaines.

Après la Seconde Guerre mondiale, les pressions commerciales relancent le projet avec la création d'une nouvelle commission canado-américaine en 1949. Cette fois sera la bonne puisqu'en 1951 les États-Unis amorcent des travaux sur le canal Wiley-Dondero qui contournera les rapides internationaux.

Construction

Deux bâtiments de guerre américains près de l’écluse de Saint-Lambert, 1959.

Les travaux de construction de la voie maritime du Saint-Laurent débutent en . Le long du tracé 6 500 personnes sont expropriées et 550 habitations sont déplacées. Quatre ponts de Montréal sont modifiés, de nouveaux chenaux dragués et des écluses assemblées.

La voie maritime ouvre à la navigation le pour un coût approximatif de 470,3 millions de dollars (dont 336,5 millions payés par le Canada). La reine Élisabeth II et le président Dwight Eisenhower inaugurent officiellement la voie maritime le par une courte croisière à bord du yacht royal Britannia piloté par le duc d’Édimbourg, Philip Mountbatten.

L'année 2009 a célébré le 50e anniversaire de l'inauguration par différentes activités le long du parcours[2].

Description

La voie maritime du Saint-Laurent est un système composé d'une part de chenaux navigables dragués dans le fleuve et d'autre part d’écluses et de canaux aménagés pour franchir les différents obstacles à la navigation qu'ils soient d'origine naturelle ou humaine (rapides, chutes, barrages).

Franchir les rapides

Écluse Saint-Lambert, Québec

Les rapides du Saint-Laurent sont présents sur trois sections du fleuve. D'amont en aval : la section internationale (28 mètres de chute sur 77 kilomètres) la section de Beauharnois (25 m de chute sur 29 km) et la section de Lachine (15 m de chute sur 40 km). C'est pour franchir ces sections qu'ont été aménagés des canaux au XIXe siècle et pour en exploiter le potentiel hydraulique qu'ont été construits des barrages au XXe. La voie navigable et ses sept écluses permettent de franchir ces sections et leurs obstacles.

La voie commence au port de Montréal, où le canal de la Rive Sud et ses deux écluses permettent de franchir les rapides de Lachine. À l'ouest de l'île de Montréal et du lac Saint-Louis, les écluses de Beauharnois permettent de passer la centrale de Beauharnois et d’accéder au canal du même nom. La voie maritime quitte le Québec par le lac Saint-François et le territoire de la première nation Mohawks d'Akwesasne. Un peu plus loin, du côté américain, le canal Wiley-Dondero et ses écluses Snell et Eisenhower permettent d’éviter le barrage international Moses-Saunders. La dernière écluse, avant d'atteindre les Grands Lacs, est située à Iroquois et permet le franchissement du barrage homonyme contrôlant le niveau du lac Ontario.

Canaux sur le fleuve Saint-Laurent

Le canal de la Rive-Sud à gauche du fleuve.
Nom Province

/État

Longueur

(km)

Canal de la Rive-Sud Québec 25,9
Canal de Beauharnois 20,9
Canal Wiley-Dondero New York 14,8
Canal d'Iroquois Ontario 0,55

Écluses sur le fleuve Saint-Laurent

Écluse Eisenhower, Massena, NY
Nom de l’écluse Localité Province

/État

Dénivelé*

(m)

Notes
1 Saint-Lambert Saint-Lambert Québec 4,5 Sous le pont Victoria. À 4,8 km de l'embouchure est du canal de la Rive Sud.
2 Côte Sainte-Catherine Sainte-Catherine 9,1 Sur le canal de la Rive Sud à 13,7 km de l’écluse précédente.
3 Beauharnois Melocheville 12,5 Franchissement de la centrale de Beauharnois.
4 12,5 Accès au Canal de Beauharnois.
5 Bertrand H. Snell Massena New York 13,7 Accès est au canal Wiley-Dondero.
6 Dwight D. Eisenhower 11,6 Sur le canal Wiley-Dondero à 6,5 km de l’écluse précédente.
7 Iroquois Iroquois Ontario 0,6 à 1,8 Écluse de régularisation. Franchissement du barrage d'Iroquois.

*La hauteur d'eau du fleuve variant avec les saisons, le dénivelé indiqué est le dénivelé moyen sauf pour l’écluse d'Iroquois.

Franchir les chutes

Après les rapides sur le fleuve, les chutes du Niagara sont l'obstacle majeur à l’accès aux Grands Lacs. Depuis le lac Ontario le quatrième canal Welland, long de 43,4 kilomètres et ses huit écluses permettent de rejoindre le lac Érié, situé 99,5 mètres plus haut, en contournant les chutes par l'ouest[3].

Écluses du canal Welland

Écluses 5,4 et au loin 3 du canal Welland.
Distance*

(km)

Localité Province Dénivelé*

(m)

1 3,1 Saint Catharines Ontario 14
2 5,9 14
3 10,2 14
4 12,6 15
5 Thorold 13
6 16
7 13,9 14
8 39,3 Port Colborne 0,3 à 1,2

*La distance et le dénivelé sont définis par rapport à l'embouchure du canal dans le lac Ontario.

Les écluses du Sault situées entre les rives des villes jumelles Sault Sainte-Marie, permettent la navigation entre les lacs Supérieur et Huron[4]. Ainsi un navire Seawaymax peut rejoindre Chicago, IL ou Duluth, MN, depuis l’océan Atlantique, à des milliers de kilomètres de ces villes.

Gabarit

Écluse d'Iroquois, Iroquois, Ontario

Le gabarit Seawaymax définit la taille maximale des navires qui peuvent emprunter la Voie maritime sur tout son parcours, soit 225,6 mètres (740 pieds) de long, 23,8 m (78 pi) de large, 7,92 m (26 pi) de tirant d'eau, et 35,5 m (116 pi) de tirant d’air.

Gestion

La Voie maritime du Saint-Laurent est sous la responsabilité de la Corporation de Gestion de la Voie Maritime du Saint-Laurent, côté Canadien, et de la Saint Lawrence Seaway Development Corporation, côté Américain[5].

Écologie

La navigation des grands lacquiers[6] qui forment la flotte intérieure de la Voie maritime a provoqué l'introduction involontaire d'espèces animales et végétales non indigènes dans les écosystèmes aquatiques du Saint-Laurent et des Grands Lacs, telles que la moule zébrée et la lamproie de mer.

Trafic

Depuis 1959, plus de 2,5 milliards de tonnes de marchandises, d'une valeur estimée de 375 milliards de dollars, ont transité par la Voie maritime entre le Canada, les États-Unis et une cinquantaine d'autres pays[7].

Depuis la fin des années 1960 le nombre de navires empruntant la Voie maritime a connu une diminution, passant d'un maximum de 10 615 transits en 1966 à environ 4 000 depuis 1989. Si la masse de cargaison transportée a continué de croître plus longtemps, pour atteindre le record de 74,3 millions de tonnes en 1979, elle est depuis aussi en diminution[8].

Transits de navires et tonnes de cargaison amont et aval sur la Voie maritime par années[9].
Année Nombre de navires Tonnes de cargaison
1960 9 078 30 578 847
1965 10 558 54 408 391
1970 9 115 64 513 235
1975 7 099 60 687 018
1980 7 296 66 961 131
1985 4 428 48 554 290
1990 4 290 48 406 871
2000 4 185 46 573 444
2005 4 361 43 301 146
2010 3 925 36 547 367
2015 3 781 36 249 572

Notes et références

  1. « Réseau de la Voie maritime - La Voie maritime - 300 ans d'histoire », sur www.grandslacs-voiemaritime.com (consulté le )
  2. 50e anniversaire
  3. La voie maritime du Saint-Laurent, rappel technique et historique
  4. On peut voir ici une vue satellite
  5. Le réseau Grands Lacs Voie maritime du Saint-Laurent
  6. OQLF du Québec
  7. « Réseau de la Voie maritime - La Voie maritime - Faits et chiffres », sur www.grandslacs-voiemaritime.com (consulté le )
  8. La Corporation de la Voie maritime du Saint-Laurent, « La Voie maritime du Saint-Laurent Rapport sur le trafic Tableaux historiques 1959-1992 », sur www.grandslacs-voiemaritime.com (consulté le )
  9. « Réseau de la Voie maritime - La Voie maritime - Faits et chiffres - trafic », sur www.grandslacs-voiemaritime.com (consulté le )

Liens externes

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