Uniformitarisme

L'uniformitarisme, est un des principes de base de la géologie moderne. Il postule que les processus qui se sont exercés dans le passé lointain s'exercent encore de nos jours. L'adage « le présent est la clé du passé » résume la méthode qui en découle. Ce principe s'oppose au catastrophisme selon lequel les caractéristiques de la surface terrestre sont apparues soudainement dans le passé à partir de processus radicalement différents de ceux qui sont à l’œuvre aujourd'hui.

Comparaison d'un terrain près de Jedburgh en Écosse. Le dessin du haut est une illustration publiée en 1787, alors que la photo du bas date de 2003.
Des lits de sédiments inclinés ont été recouverts de lits horizontaux. Cette non-conformité est la conséquence d'un long travail géologique pendant lequel les dépôts ont cessé alors que des pliages et des fractures sont survenus. La strate basse s'est inclinée, puis les dépôts ont repris.

Plus précisément, l'uniformitarisme est un principe philosophique, pouvant être dogmatique, qui affirme que des phénomènes semblables s'opèrent en tous temps et en tous lieux. L'actualisme est une méthode qui repose sur la transposition du système actuel à des systèmes passés ; son acception peut être plus ou moins forte selon qu'il est purement heuristique ou reposant sur des démarches expérimentales.

L'uniformitarisme a d'abord été formulé au XVIIIe siècle par James Hutton, puis plus largement répandu par John Playfair et Charles Lyell, actualistes qui proposent de ne considérer que l'action lente et graduelle (uniformitarisme) des phénomènes géologiques connus de nos jours (actualisme)[1]. Pendant le XVIIIe et le XIXe siècle, une vive controverse existe entre cette théorie et le catastrophisme, en particulier parce que l'uniformitarisme est incompatible avec les événements tels que décrits par la Bible. La notion a ensuite évolué. Avant que la théorie de la dérive des continents, expliquée plus tard par celle de la tectonique des plaques, ne soient acceptées au XXe siècle, certains géologues pensaient que la surface de la Terre était restée globalement inchangée depuis sa formation, son refroidissement depuis un état en fusion ayant provoqué des plissements formant les montagnes. Dans les dernières décennies du XXe siècle, l'uniformitarisme a été modifié pour tenir compte de certains événements catastrophiques dans le passé de la terre, tels que les impacts de météorites ou les périodes de volcanisme intense. Il est plutôt énoncé maintenant comme : « les forces géologiques sont la plupart du temps lentes et restent identiques à travers le temps ».

Paléogéographie

Le principe d'actualisme est une des bases de la reconstitution des organismes et de l'environnement en paléontologie.

Il pose l'hypothèse que les relations observées actuellement se vérifiaient également à la période étudiée, ce qui n'est qu'une hypothèse, probable mais non démontrée. Par exemple, considérer qu'un dinosaure aux dents acérées était carnivore et non herbivore est une application de ce principe.

De façon moins triviale, on sait que les coraux ne peuvent pas vivre à plus de 10–20 m de profondeur, sans quoi la lumière leur manque. Les coraux fossilisés nous permettent donc de reconstituer le niveau de la mer à l'époque (eustatisme).

Ce principe est donc l'outil conceptuel qui permet de formuler des hypothèses sur des époques dont nous n'avons que des traces. Il est parfois pris en défaut ; l'actualisme pourrait faire dire que les cristaux contenants du fer pris dans les laves volcaniques pointent vers le nord géographique, alors qu'ils se sont peut-être formés à une période où les pôles magnétiques ne correspondaient pas aux pôles géographiques, et que la dérive des continents les a déplacés et fait pivoter.

Notions d'uniformitarisme dans la littérature

Montaigne disait, dans le chapitre 31[2] de ses Essais :

Quand je considere l’impression que ma riviere de Dordoigne faict de mon temps vers la rive droicte de sa descente, et qu’en vingt ans elle a tant gaigné, et desrobé le fondement à plusieurs bastimens, je vois bien que c’est une agitation extraordinaire : car, si elle fut tousjours allée ce train, ou deut aller à l’advenir, la figure du monde seroit renversée.

Traduit en francais courant :

Quand je considère la progression de ma rivière de Dordogne, de mon vivant, vers la rive droite par rapport au sens de son courant, et qu'en vingt ans, elle a gagné tant de terrain et sape les bases de plusieurs édifices, je vois bien que c'est un mouvement extraordinaire ; car si elle était toujours allée à cette vitesse, ou si elle devait le faire à l'avenir, la figure du monde serait bouleversée.[3]

Cette observation contient l'idée principale de l'actualisme.

Notes et références

  1. Cédric Grimoult, L'évolution biologique en France. Une révolution scientifique, politique et culturelle, Librairie Droz, , p. 108.
  2. Michel de Montaigne, « Des Cannibales », dans Essais (1595), P. U. F., (lire en ligne), p. 83v–90v
  3. Michel Tarpinian, Essais : "Des cannibales" et "Des coches", Paris, Ellipses, , 91 p. (ISBN 2-7298-4414-7), p. 25

Articles connexes

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