Toumaï

Toumaï (nom signifiant « espoir de vie » en langue gorane[1]) est le surnom d'un crâne fossile de primate découvert en 2001 au Tchad[2], dans le désert du Djourab.

Pour la série télévisée, voir Toumaï (série télévisée).

Toumaï

Stéréolithographie du crâne de Toumaï.
Coordonnées 17° nord, 18° est
Pays Tchad
Région désert du Djourab
Période géologique Ma
Découvert le 2001
Découvreur(s) MPFT (Mission paléoanthropologique franco-tchadienne) dirigée par Michel Brunet de l'université de Poitiers
Identifié à Sahelanthropus tchadensis
Géolocalisation sur la carte : Tchad

Il a conduit à la définition d'une nouvelle espèce, Sahelanthropus tchadensis, que certains paléoanthropologues considèrent comme l'origine de la lignée humaine, probablement très proche de la séparation entre les Panines (comprenant les chimpanzés) et les Hominines (comprenant le genre Homo et l'Homme)[3]. Le fossile a été daté d'environ 7 millions d'années avant le présent, ce qui signifie que près de 350 000 générations le séparent des humains des années 2000[4].

Historique

Lieu de découverte dans le désert du Djourab, au Tchad.
Sculpture représentant Toumaï au jardin botanique de N'Djaména.

Le crâne subcomplet[5] de Toumaï (subcomplet : quasiment complet) a été mis au jour dans le désert du Djourab au Tchad, à 800 km au nord de N'Djaména dans le cadre de la MPFT (Mission paléoanthropologique franco-tchadienne) dirigée par Michel Brunet de l'université de Poitiers. Il a été découvert le par une équipe de quatre hommes (Ahounta Djimdoumalbaye, qui fut le premier à toucher le fossile, Fanoné Gongdibé, Mahamat Adoum et Alain Beauvilain qui dirigeait la mission) en service au Centre national d'appui à la recherche (CNAR, Ministère de l'enseignement supérieur de la République du Tchad). Il a été inventorié sous le code TM 266-01-060-01 (TM pour Toros-Menalla, région de sa découverte).

Le crâne, cinq fragments de mâchoire, quelques dents et surtout une diaphyse de fémur gauche (TM266-01-063)[6] ayant pu appartenir à neuf individus ont été découverts de à sur le site 266 de Toros-Menalla et sur deux autres sites proches. La revue Nature publie trois articles sur cette découverte, dont deux de l'équipe, dans son numéro de [7].

Des méthodes de datations biogéochronologiques ont permis d'estimer l’âge de Toumaï à environ 7 millions d'années, en se fondant sur le degré d'évolution des mammifères présents à ses côtés, par comparaison avec d'autres faunes africaines similaires. Une série de date absolues a été obtenue par une équipe française pour les niveaux de sédiments qui étaient censés renfermer le fossile. Ces datations réalisées grâce à la méthode du béryllium 10 / béryllium 9 ont permis d'établir que l'âge de Toumaï serait compris entre 6,8 et 7,2 millions d'années[8]. Toutefois il ne faut pas oublier que le crâne a été trouvé en surface et sur un site balayé plusieurs fois entre sa mise au jour en 2001 et le moment du prélèvement des sédiments[9] et que la méthode paraît affectée par un biais de type raisonnement circulaire puisque c'est l'âge biochronologique des fossiles trouvés à proximité qui a servi à calibrer les appareils[10]. De plus, le crâne de Toumaï n’étant pas en place (in situ) dans le sédiment[11] (noter que les coupes géologiques publiées par la MPFT varient fortement de 2002 à 2008) et a même été déplacé lors d’une vraisemblable inhumation récente[12], cette méthode ne peut lui être appliquée.

Caractéristiques de Toumaï

Reconstitution de Toumaï.

Toumaï mesurait environ un mètre et pesait près de 35 kg, il a des canines moins prononcées, une face moins projetée et un foramen magnum (trou occipital) plus en avant, témoin d'une certaine bipédie. Pour les chercheurs de la MPFTO, Toumaï serait un mâle comme l'indique son très fort bourrelet sus-orbitaire. Il vivait dans les forêts qui jouxtaient le voisinage d'un lac ou à proximité d'une rivière. La découverte de Toumaï, 2 500 km à l'ouest du rift est-africain, a obligé le paléoanthropologue Yves Coppens à remettre lui-même en cause sa théorie de l'East Side Story formulée en 1982.

En 2003, le crâne de Toumaï est scanné à l'European Synchrotron Radiation Facility afin de déterminer la structure des mâchoires[13].

Dénomination

Toumaï signifie « espoir de vie » en langue gorane. Ce nom a été suggéré par le président de la République du Tchad Idriss Déby, pas uniquement parce qu'il désigne dans cette langue des enfants nés juste avant la saison sèche et qui ont, de ce fait, des chances de survie assez limitées, mais aussi pour célébrer la mémoire d'un de ses camarades de combat, vivant dans le nord du pays où le fossile a été découvert, et tué en combattant pour renverser le président Hissène Habré[14].

Polémique autour du fémur de Toumaï

Quinze ans après la découverte du fossile, l’anthropologue Roberto Macchiarelli suspecte Michel Brunet et son laboratoire de Poitiers de bloquer des informations relatives à un fémur, potentiellement de primate, retrouvé à proximité du crâne[12], mais que le laboratoire aurait tardé à identifier comme tel, cet os pouvant remettre en cause la bipédie de Toumaï[15],[16],[17].

Le 2 février 2018, dans l'émission La Tête au carré, Michel Brunet exhibe un fémur qu'il présente comme celui de Toumaï[18].

Notes et références

  1. Birx, H. James (2006) Encyclopedia of Anthropology, Volume 1 p.1181 SAGE, 2006 (ISBN 0761930299) - 19 décembre, 2018
  2. Beauvilain, 2003. Toumaï, l’aventure humaine.
  3. Brunet M., Guy F., Pilbeam D., Mackaye H. T., Likius A., Djimdoumalbaye A., Beauvilain A., Blondel C., Bocherens H., Boisserie J.-R., de Bonis L., Coppens Y., Dejax J., Denys C., Duringer P., Eisenmann V., Fanone G., Fronty P., Geraads D., Lehmann T., Lihoreau F., Louchart A., Mahamat A., Merceron G., Mouchelin G., Otero O., Pelaez Campomanes P., Ponce De Leon M., Rage J.-C., Sapanet M., Schuster M., Sudre J., Tassy P., Valentin X., Vignaud P., Viriot L., Zazzo A. et Zollikofer C. P. E., 2002. A new hominid from the Upper Miocene of Chad, Central Africa, Nature, 418 (6894): 145-151.
  4. « Tchad - Espoir de vie », Ushuaïa Nature, n° 44.
  5. image Vue antérieure, postérieure, latérale et basale du crâne
  6. Hawks, 2009, « Sahelanthropus: "The femur of Toumai?"
  7. A new hominid from the Upper Miocene of Chad, Central Africa, Geology and palaeontology of the Upper Miocene Toros-Menalla hominid locality, Chad, et Palaeoanthropology : Hominid revelations from Chad sur (en) « Focus on human origin »
  8. Lebatard A.-E., Bourles D. L., Duringer P., Jolivet M., Braucher R., Carcaillet J., Schuster M., Arnaud N., Monie P., Lihoreau F., Likius A., Mackaye H. T., Vignaud P. et Brunet M., 2008, « Cosmogenic nuclide dating of Sahelanthropus tchadensis and Australopithecus bahrelghazali: Mio-Pliocene hominids from Chad », PNAS, 105, (9): 3226-3231. PDF
  9. Tchad berceau de l'humanité, les missions scientifiques
  10. Hervé Morin, Le Monde du 9 mai 2008 .
  11. Beauvilain A., 2008. « Lors de leur découverte, les fossiles d'Australopithecus bahrelghazali (Abel) et de Sahelanthropus tchadensis (Toumaï) étaient-ils enchâssés dans le grès, ont-ils été déterrés ou ramassés en surface ? », South african Journal of Science, 104 (3): 165-168. Pdf article original en anglais disponible sur ce site
  12. Beauvilain A. et Watté J.-P., 2009. « Toumaï (Sahelanthropus tchadensis) a-t-il été inhumé ? »
  13. esrf.eu du 23 mai 2003, Toumaï, our earliest relative, at the ESRF. (en)
  14. Dépêche de l'Associated Press du 12 juillet 2002.
  15. Beauvilain A. «Chronique de la redécouverte du fémur de Toumaï»
  16. Nicolas Constans, « L’histoire du fémur de Toumaï », Le Monde, (lire en ligne)
  17. (en) Ewen Callaway, « Controversial femur could belong to ancient human relative », Nature, vol. 553, no 7689, , p. 391-392 (DOI 10.1038/d41586-018-00972-z).
  18. Axel Villard, « Fémur de Toumai : Michel Brunet s'exprime », sur franceinter.fr, (consulté le )

Voir aussi

Articles connexes

Bibliographie

  • Alain Beauvilain, Toumaï : l’aventure humaine, Paris, La Table Ronde, , 239 p. (ISBN 978-2-7103-2592-5).
  • Michel Brunet, D'Abel à Toumaï : nomade, chercheur d'os, Paris, Odile Jacob, , 254 p. (ISBN 978-2-7381-1738-0, lire en ligne).
  • (en) Ann Gibbons, The first human : the race to discover our earliest ancestors, New York, Doubleday, , 306 p. (ISBN 978-0-385-51226-8, lire en ligne).
  • Pascal Picq, Au commencement était l'homme : de Toumaï à Cro-Magnon, Paris, Odile Jacob, , 256 p. (ISBN 978-2-7381-1281-1, lire en ligne).
  • Tidiane N'Diaye, 2006. L'Éclipse des Dieux. Chap. : Afrique berceau de l'humanité. Éditions du Rocher/Serpent à Plumes, 317 p. (ISBN 978-2-268-05641-8)
  • (en) John Reader, Missing links : in search of human origins, New York, Oxford University Press, , 538 p. (ISBN 978-0-19-927685-1, lire en ligne).

Liens externes

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