El Jem

El Jem ou El Djem (arabe : الجم ) est une ville tunisienne située aux portes de la région du Sahel.

El Jem

Vue sur El Jem.
Administration
Pays Tunisie
Gouvernorat Mahdia
Délégation(s) El Jem
Maire Adel Farhat[1]
Code postal 5160
Démographie
Population 21 234 hab. (2014[2])
Géographie
Coordonnées 35° 18′ nord, 10° 43′ est
Localisation
Géolocalisation sur la carte : Tunisie
El Jem
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El Jem

    Rattachée administrativement au gouvernorat de Mahdia, elle constitue une municipalité comptant 21 234 habitants en 2014[2].

    Fondée sur les ruines de la cité antique de Thysdrus ou Thysdritania colonia[3], elle est célèbre pour son amphithéâtre, le plus grand de l'Empire romain (entre 27 000 et 30 000 spectateurs[4]) après le Colisée de Rome (45 000 spectateurs) et celui de Capoue. Il accueille le Festival international de musique symphonique d'El Jem chaque été depuis 1985.

    Histoire

    Histoire antique

    Ancienne cité phénicienne, fondée par les Puniques et prospère sous Hadrien, elle reçoit, sans doute dès l'époque césarienne, le statut de colonie romaine puis acquiert le statut de municipe libre (municipia libera) sous le règne de l'empereur Septime Sévère[5]. Par la suite elle est intégrée à la province de Byzacène. Au cœur d'une région qui connaît une forte productivité agricole, la cité semble jouir d'une relative prospérité.

    La cité de Thysdrus bénéficie d'une active politique de mise en valeur des terres et de développement économique : les empereurs Vespasien et Titus y amènent l'eau par l'entremise du proconsul d'Afrique. Ainsi, dès le IIe siècle, elle apparaît selon l'expression de Gilbert Charles-Picard comme la « capitale de l'huile » de Byzacène. Nœud routier des plus importants puisque six voies romaines y aboutissent[6], localisé au centre d'une région oléicole, Thysdrus dispose d'un marché agricole très dynamique.

    Révolution de 238

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    Au début de l'an 238, Thysdrus est le cadre d'un litige qui doit avoir de fortes répercussions sur l'histoire de l'Empire romain. À la suite d'un différend survenu à la suite de la levée de nouveaux impôts, une révolte éclate. Le procurateur de l'empereur Maximin Ier le Thrace, doit affronter le peuple thysdritain et les habitants des campagnes environnantes. Le collège des iuvenes et les paysans semblent apparaître comme le fer de lance du mouvement.

    Portrait de Gordien Ier.

    Après l'assassinat du procurateur, les révoltés se rendent à la résidence du vieux proconsul d'Afrique, Gordien, qui réside à Thysdrus, dans le cadre de sa tournée provinciale, et le proclament empereur. Le nouvel empereur accompagné de son fils, Gordien II, associé au pouvoir, se rend à Carthage et procède à son adventus. La répression du légat de Numidie, Capelianus, est aussi rapide que brutale. Cependant, l'appui puis la reconnaissance de la lignée par le Sénat romain ainsi que par certaines provinces déclenche une brève guerre civile et une crise du pouvoir impérial.

    Cette singulière révolte civile se solde par l'élimination de l'empereur Maximin et l'avènement du jeune Gordien III.

    Édifices

    Amphithéâtre

    Vue des deux premiers amphithéâtres.

    Si le troisième amphithéâtre d'El Jem compte parmi les monuments les plus célèbres de Tunisie, l'antique Thysdrus a possédé deux autres amphithéâtres, de moindre mesure.

    Le premier serait datable du Ier siècle av. J.-C. et devait donc être rudimentaire, sans maçonnerie, mais avec une cavea « creusée dans le roc d'une colline, dont la typographie lui a imposé ses dimensions et ses contours »[7]. Il a dû être aménagé par des marchands ou des agriculteurs italiens immigrés pour les combats de gladiateurs. Il est d'une grande valeur documentaire car représentant un jalon unique dans son genre[8].

    Par suite de la détérioration de cet amphithéâtre et au développement économique et urbanistique de Thysdrus, et après plusieurs tentatives de restauration, il est décidé à l'époque flavienne de réaménager complètement la même colline — la seule de la région — en « la comblant de remblais sur une hauteur de plus de deux mètres, [pour] allonger le grand axe de l'arène, qui atteignit les proportions de 60 × 40 mètres »[9].

    Amphithéâtre d'El Jem.

    Une tribune est ajoutée sur le petit axe, des gradins construits sur des remblais tassés, deux carceres (cellules et pièces où les gladiateurs et les bêtes sauvages attendent l'entrée en scène) sont mis en communication avec l'arène. Si l'édifice gagne en solidité et fonctionnalité, c'est sans préoccupation d'ordre esthétique. Malgré leur proximité, ce deuxième amphithéâtre est distinct du premier par l'emplacement et le style de construction, notamment les éléments essentiels que sont la cavea et l'arène qui « divergent totalement par le choix de leur modèle »[10]. Ce nouvel amphithéâtre est comparable à de nombreux autres présents en Tunisie, comme à Thuburbo Majus, avec une structure adossée à une butte naturelle partiellement aménagée[9].

    El Jem est « unique au monde » par le fait de posséder trois édifices appartenant chacun à l'une des trois grandes catégories connues d'amphithéâtres, tous trois étant civils et non militaires, puisque la ville n'a jamais eu de garnison[11].

    Musée archéologique

    À la périphérie de la ville, le musée archéologique présente de nombreuses mosaïques issues des fouilles dans les villas romaines de Thysdrus, comme la maison de la procession dionysiaque. Nombre de pièces retrouvées sur le site sont conservées au musée national du Bardo et au musée archéologique de Sousse.

    Jouxtant le musée, la villa d'Africa est une reconstitution à portée didactique d'une maison romaine. Elle comporte deux mosaïques remarquables : la première représente la déesse Africa, surmontée d'une dépouille d'éléphant et entourée de bustes représentant les quatre saisons. La seconde est une représentation symbolisée de Rome et de ses provinces.

    El Jem accueille en 2010 un festival de la mosaïque[12].

    Culture

    Le Festival international de musique symphonique d'El Jem est fondé en 1985 par Mohamed Ennaceur.

    La ville héberge aussi le festival El Jem World Music dont la troisième édition a lieu en 2019[13]. La même année a lieu la quatrième édition du Festival Thysdrus, journées romaines d'El Jem[14].

    Économie

    La ville compte une zone industrielle sur le bord de la RN1, avec notamment la présence du groupe industriel allemand Dräxlmaier (en) qui fabrique des faisceaux de câble pour l'industrie automobile dans deux usines employant environ 1 500 personnes[15].

    Politique

    Les premières élections municipales depuis la révolution de 2011 ont lieu en 2018 et permettent l'élection de 24 conseillers municipaux. Nidaa Tounes arrive en tête avec 11 sièges (2 012 voix), suivi par Ennahdha avec 9 sièges (1 718 voix) et la liste indépendante Al-Horra avec 4 sièges (1 008 voix)[16],[17].

    Jumelage

    Les villes de Romans-sur-Isère et Vienne établissent des relations de coopération décentralisée avec El Jem en 1995 et 1999 respectivement[18]. En 2006, un accord est signé entre ces villes pour mettre en valeur le patrimoine historique et culturel d'El Jem dans une perspective de développement durable, avec une formation des élus et cadres territoriaux et la création d'un musée[18].

    Un jumelage est mis en place en 2019 entre le parc archéologique du Colisée de Rome, l'Institut national du patrimoine et l'Agence de mise en valeur du patrimoine et de la promotion culturelle pour organiser des fouilles, recherches et travaux de restauration du site d'El Jem[19]. La même année, un autre accord est signé pour la mise en place d'un partenariat entre les États-Unis et la Tunisie concernant des travaux de réhabilitation de l'amphithéâtre d'El Jem[20].

    Personnalités

    Références

    1. « La Fondation Arts & Culture by UIB, mécène de la 34e édition du Festival d'El Jem », sur webmanagercenter.com, (consulté le ).
    2. (ar) « Populations, logements et ménages par unités administratives et milieux » [PDF], sur census.ins.tn (consulté le ).
    3. Victor Guérin, Voyage archéologique dans la régence de Tunis, t. I, Paris, Plon, , 438 p. (lire en ligne), p. 98.
    4. Slim 1996, p. 89.
    5. Antonio Ibba et Giusto Traina, L'Afrique romaine : de l'Atlantique à la Tripolitaine (69-439 ap. J.-C.), Paris, Bréal, , 206 p. (ISBN 9782749505749, lire en ligne), p. 107.
    6. Antoine Héron de Villefosse, « Lettre à M. le Docteur Carton sur une inscription de Thysdrus », Bulletin de la Société archéologique de Sousse, no 1, , p. 35 (lire en ligne, consulté le ).
    7. Ammar Mahjoubi, Villes et structures urbaines de la province romaine d'Afrique, Tunis, Centre de publication universitaire, , 271 p. (ISBN 9789973937957), p. 167-168.
    8. Slim 1986, p. 469.
    9. Mahjoubi 2000, p. 168.
    10. Slim 1986, p. 462.
    11. Slim 1986, p. 468.
    12. « Festival international de la mosaïque d'El Jem : une identité artisanale locale et un créneau prometteur de développement », sur turess.com, (consulté le ).
    13. « Festival El Jem World Music, du 13 au 31 août », sur webmanagercenter.com, (consulté le ).
    14. « Thysdrus : journées romaines d'El Jem », sur agendas.ovh, (consulté le ).
    15. « Dräxlmaier El Jem », sur tn.draexlmaier.com (consulté le ).
    16. « Élections municipales Tunisie 2018 : décompte des voix dans toutes les municipalités à Mahdia », sur directinfo.webmanagercenter.com, (consulté le )
    17. « Résultats », sur isie.tn (consulté le ).
    18. Lamia Kratou et Jacques Poirot, « El Jem - Vienne et Romans-sur-Isère », sur coopdectunisie.org (consulté le ).
    19. « Le parc archéologique du Colisée signe un accord pour un jumelage avec l'amphithéâtre d'El Jem », sur ambtunisi.esteri.it, (consulté le ).
    20. « Discours de l'ambassadeur à l'occasion du lancement de projet de restauration du site archéologique “Colisée d'El Jem », sur tn.usembassy.gov, (consulté le ).

    Bibliographie

    • Gilbert Charles-Picard, La civilisation de l'Afrique romaine, Paris, Études augustiniennes, coll. « Collection des études augustiniennes », , 359 p. (ISBN 9782851211002).
    • Hédi Slim, « Djem », dans Encyclopédie berbère, t. XVI, Aix-en-Provence, Edisud, (lire en ligne), p. 2427-2434.
    • Hédi Slim, El Jem : l'antique Thysdrus, Tunis, Alif, , 127 p. (ISBN 9789973220196).
    • Hédi Slim, « Le modèle urbain romain et le problème de l'eau dans les confins du Sahel et de la Basse Steppe : actes du colloque de Rome (3-5 décembre 1987) », Publications de l'École française de Rome, no 134, , p. 169-201 (lire en ligne, consulté le ).
    • Hédi Slim, « Les amphithéâtres d'El-Jem », CRAI, vol. 130, no 3, , p. 440-469 (lire en ligne, consulté le ).
    • Hédi Slim et Latifa Slim, Vie et artisanat à Thysdrus, El Jem, ville d'Africa, IIe – IIIe siècles : exposition au musée archéologique de Nice-Cimiez, Paris, Éditions du Comité des travaux historiques et scientifiques, , 87 p. (lire en ligne).

    Voir aussi

    Articles connexes

    Liens externes

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