Tamara de Lempicka
Tamara Łempicka [wɛmˈpit͡ska], connue en France sous le nom Tamara de Lempicka, née Maria Górska le à Varsovie (Pologne, alors dans l'Empire russe) et morte le à Cuernavaca (Mexique), est une peintre polonaise représentative du mouvement Art déco.
Pour les articles homonymes, voir Lempicka.
Biographie
Fille de Boris Górski, un juif russe, et d'une mère polonaise, son enfance se passe dans un milieu aisé et cultivé entre Saint-Pétersbourg, Varsovie et Lausanne. En 1914, elle est retenue par la guerre à Saint-Pétersbourg où elle s'inscrit à l'Académie des Beaux-Arts. Elle épouse en 1916 Tadeusz Łempicki (1888-1951), un jeune avocat polonais. La révolution d'Octobre bouleverse sa vie et, après un détour par Copenhague, elle gagne Paris.
Paris
Elle y est recueillie par ses cousins qui l'ont précédée dans l'exil. Tamara commence alors avec beaucoup de ténacité une carrière de peintre.
En 1920, à l'académie Ranson, elle reçoit l'enseignement de Maurice Denis et à l'académie de la Grande Chaumière, celle d'André Lhote. C'est là qu'elle forge petit à petit son style qui, dans une synthèse inattendue de l'art maniériste de la Renaissance et du néo-cubisme, va correspondre parfaitement à la mode de son époque.
L'envol de sa carrière coïncide avec sa première exposition personnelle à Milan en 1925. C'est là qu'elle fait la connaissance de Gabriele D'Annunzio et de son entourage, aussi aristocratique qu'excentrique.
De retour en France, elle participe pleinement à la vie artistique et mondaine parisienne où elle rencontre de nouveaux modèles : André Gide, Suzy Solidor, de riches industriels, des princes russes émigrés, etc. En 1929, elle installe sa maison-atelier au no 7 de la rue Méchain, dans le 14e arrondissement de Paris, conçue par l'architecte Robert Mallet-Stevens[1],[2], décoré par Adrienne Gorska, sa sœur, et illuminé par Jean Perzel[3]. Cet atelier fait partie en effet du seul immeuble d'habitat collectif conçu par Mallet-Stevens, dont le travail porte habituellement sur des villas et hôtels particuliers. Il est inscrit à l'inventaire supplémentaire des monuments historiques depuis 1984[4].
La même année, appelée par Rufus Bush, un riche Américain qui lui a commandé le portrait de sa fiancée, Tamara de Lempicka fait son premier voyage à New York. Outre le portrait de commande, elle exécutera sur place plusieurs tableaux, dont des études de gratte-ciel. Elle expose simultanément en Pologne (médaille de bronze à l'exposition internationale de Poznan), à Paris (dans quatre salons et à la galerie Colette Weil) et aux États-Unis (Carnegie Institute de Pittsburgh).
Elle divorce en 1928 pour se remarier, en 1933, avec le baron Raoul Kuffner (1886-1961). Cette transition entre son divorce et son remariage coïncide avec une crise morale et artistique qui provoque un ralentissement de sa production. Fuyant les menaces de guerre, elle s'installe aux États-Unis en 1939 où elle fait trois expositions à New York et à San Francisco chez Paul Rheinardt et chez Julien Levy. Après-guerre, son œuvre tombe dans un profond oubli jusqu'à ce que la redécouverte de l'Art déco, dans les années 1970, fasse ressurgir son nom.
La chanteuse Madonna a rendu hommage à Tamara dans son clip vidéo Vogue ainsi que dans Open Your Heart avec la toile Andromède (L'Esclave).
Vie privée
Tamara de Lempicka était bisexuelle et assumait publiquement ses liaisons avec Colette, Suzy Solidor, etc. [5],[6]. Elle a donné naissance à une fille, Marie-Christine, (1916-1980) dite Kizette[7], épouse Foxhall.
Ses œuvres
Tamara de Lempicka occupe une place à part dans l'art du XXe siècle : malgré une production modeste (à peine 150 tableaux dans sa meilleure période, qu'on situe entre 1925 et 1935), ses œuvres évoquent et reflètent le style et la mode des années folles de l'entre-deux-guerres.
Avec une stylisation néo-cubiste, ses œuvres, principalement des portraits, se caractérisent par un modelé accentué, des couleurs vives mais dans une gamme restreinte, mises en valeur par des fonds gris ou noirs. La composition très resserrée s'inspire du cadrage cinématographique.
Collections publiques
Beaucoup d’œuvres de Tamara de Lempicka sont encore dans des collections privées[8], tel son fameux Autoportrait à la Bugatti verte de 1929 (en Suisse). On peut cependant voir certaines de ses œuvres dans les musées français, notamment au musée national d'Art moderne et au musée d'Arts de Nantes qui possèdent chacun sept tableaux.
- 1927 : Lassitude, musée national de Varsovie
- 1927 : Kizette en rose, musée d'Arts de Nantes[9]
- 1927 : Kizette au balcon, musée national d'Art moderne (Paris)[10]
- 1928 : M. Thadeus Lempicki, musée des Années Trente (Boulogne-Billancourt)[11]
- 1929 : La Communiante, La Piscine (Roubaix)[12]
- 1929 : Saint-Moritz, musée des beaux-arts d'Orléans
- 1930 : Jeune fille en vert, musée national d'Art moderne (Paris)[13]
- 1930 : Sainte Thérèse d'Avila, musée Soumaya (Mexico)
- 1932 : Portrait du Baron Raoul Kuffner, musée national d'Art moderne (Paris)[14]
- 1933 : Portrait de Suzy Solidor, château Grimaldi (Cagnes-sur-Mer)[15]
- 1935 : Madone ronde, MUDO (Beauvais)[16]
- 1935 : Les Arums, musée national d'Art moderne (Paris)[17]
- 1937 : Les Réfugiés, musée d'art et d'histoire de Saint-Denis
- 1939 : Jeune femme les bras croisés, Metropolitan Museum of Art (New York)[18]
- 1940 : La Fuite ou Quelque part en Europe, musée d'Arts de Nantes[19]
- 1941 : Nature morte aux œufs, Musée d'art moderne et contemporain de Saint-Étienne Métropole[20]
- 1945 : Le Turban orange II, musée d'art moderne André-Malraux (Le Havre)[21]
- 1952 : La femme au chapeau, Musée d'art moderne et contemporain de Saint-Étienne Métropole[22]
Expositions
- de 1922 à 1950, Salon d’Automne, Salon des indépendants
- 1925, exposition personnelle, Bottega di Poesia, Milan
- 1926, 30 et 31, expositions personnelles, Galerie Colette Weil, Paris
- 1929, Exposition Internationale des Beaux-Arts, Poznan, Pologne
- 1932, 1933, 1934, 1935, 1936 : Femmes Artistes Modernes (FAM), Théâtre Pigalle, Maison de France, Galerie Bernheim-Jeune[23].
- 1941, 42, expositions personnelles, Julien Levy Gallery, New York et Los Angeles
- 1947, Salon d'hiver : Quelque part en Europe
- 1957, exposition personnelle, Galerie Sagittarius, Rome
- 1961, rétrospective, galerie Ror-Volmar, à Paris, figuratif et abstrait
- 1972, rétrospective, galerie du Luxembourg (Alain Blondel et Yves Plantin), Paris.
- 1980, rétrospective, Seibu, Tokyo, catalogue (préface par Germain Bazin)
- 1989, rétrospective, Museo Nacional de Arte, Mexico
- 1991, Musée des beaux-arts de Montréal, « Les années 20, l'âge des métropoles » (commissariat : Jean Clair)
- 1992, The National Museum of Women in the Art, « Polish Women Artists and Avant-Garde »
- 1994, exposition personnelle, Accademia di Francia (Villa Medici), Rome
- 1997, Musée des beaux-arts d'Hiroshima, Japon (catalogue par Alain Blondel)
- 2004, rétrospective, Royal Academy of Arts, Londres & Kunstforum Wien, Vienne[24].
- 2006, rétrospective, Musée des Années Trente, Boulogne-Billancourt, France
- 2006, rétrospective, Palazzo Reale. Milan
- 2007, rétrospective, Fundación CaixaGalicia, Vigo, Espagne
- 2009, rétrospective, Palacio de bellas Artes, Mexico, Mexique
- 2013, Tamara de Lempicka, la Reine de l'Art déco, Pinacothèque de Paris[25].
- 2015, exposition personnelle, Palazzo Chiablese, Turin
Prix
- 1929, médaille de bronze à l'Exposition internationale de Poznan, Pologne
Iconographie
- Willy Maywald, Tamara de Lempicka dans son atelier, 7 rue Méchain, Paris XIVe, 1949, photographie[26]
Notes et références
- (en) Lempicka par Patrick Bade, éd. Parkstone International, 2006, (ISBN 9781780429694), p.95 et 119.
- Encyclopédie Universalis
- Entrée de l'Atelier de Tamara de Lempicka, rue Méchain - Décoratrice Adrienne Gorska, architecte Robert Mallet-Stevens, luminaires par Jean Perzel, Paris, 1931. Bibliothèque de la Smithsonian Institution.
- Immeuble de rapport par Robert Mallet-Stevens, notice no PA00086624, base Mérimée, ministère français de la Culture.
- « Tamara de Lempicka - Ce qu'il faut savoir », Vanity Fair, 5 août 2013 (lire en ligne)
- (en) Elizabeth Ashburn, « Lempicka, Tamara de (1898?-1980) », qlbtq: An Encyclopedia of Gay, Lesbian, Bisexual, Transgender, and Queer Culture, 2002 (lire en ligne)
- Kizette de Lempicka évoquée sur APJN.org.
- http://www.delempicka.org/artwork.html
- https://www.navigart.fr/museedartsdenantes/#/artwork/110000000002438
- https://collection.centrepompidou.fr/#/artwork/150000000028434
- https://collection.centrepompidou.fr/#/artwork/150000000020483
- https://collection.centrepompidou.fr/#/artwork/150000000012532
- https://collection.centrepompidou.fr/#/artwork/150000000008509
- https://collection.centrepompidou.fr/#/artwork/150000000004556
- « Encyclopédie Larousse en ligne - Tamara de Lempicka », sur larousse.fr (consulté le ).
- http://mudo.oise.fr/collections/details/oeuvre/madone-ronde/
- https://collection.centrepompidou.fr/#/artwork/150000000024468
- https://www.metmuseum.org/art/collection/search/484524
- https://www.navigart.fr/museedartsdenantes/#/artwork/110000000002439
- Musée d’art moderne et contemporain Saint-Etienne Métropole, « Musée d’art moderne et contemporain Saint-Etienne Métropole », sur Navigart.fr, (consulté le )
- http://www.muma-lehavre.fr/fr/collections/oeuvres-commentees/xxe-siecle/lempicka-le-turban-orange-ii
- Musée d’art moderne et contemporain Saint-Etienne Métropole, « Musée d’art moderne et contemporain Saint-Etienne Métropole », sur Navigart.fr, (consulté le )
- Catalogues des expositions
- https://www.kunstforumwien.at/de/ausstellungen/hauptausstellungen/90/tamara-de-lempicka
- « A la Pinacothèque de Paris, Tamara de Lempicka, peintre art déco », sur Franceinfo, (consulté le )
- Collection de l'association Willy Maywald, ADAGP.
Annexes
Bibliographie
- Dictionnaire Bénézit
- « Arsène Alexandre », article dans La Renaissance de l'art français, , Paris
- Tamara de Lempicka, monographie, préface de Giancarlo Marmori, Franco Maria Ricci, Milan, traduction de l'italien par Nino Franck, 1978 (ISBN 2-85108-183-7)
- Kizette Foxhall. & C. Philips, Passion by Design: The Art and Times of Tamara De Lempicka, biographie, Abbeville Press Publishers, New York, 1987
- Gioia Mori, Tamara de Lempicka - Paris 1920-1938, monographie, Giunti, Florence, 1994
- Alain Blondel, Catalogue raisonné, éditions Acatos, Lausanne, 1999
- Gilles Néret, Tamara de Lempicka 1898-1980, monographie, Taschen, 2001
- Gioia Mori, Tamara de Lempicka, la Reine de l'art déco, Skira, 2013, catalogue de l'exposition à la Pinacothèque de Paris (ISBN 978-88-572-2022-2)
- Isabelle Mourgere, Tamara de Lempicka, femme libre et peintre libertaire, racontée en BD, TV5 Monde, , [lire en ligne]
- Tatiana de Rosnay & Charlotte Jolly de Rosnay, Tamara par Tatania. Neuilly-sur-Seine : Michel Lafon, 2018, 223 p. (ISBN 978-2-7499-3336-8) ; rééd. Pocket, 2021, 304 p. (ISBN 978-2-266-32154-9)
Liens externes
- Notices d'autorité :
- Fichier d’autorité international virtuel
- International Standard Name Identifier
- CiNii
- Bibliothèque nationale de France (données)
- Système universitaire de documentation
- Bibliothèque du Congrès
- Gemeinsame Normdatei
- Bibliothèque nationale de la Diète
- Bibliothèque nationale d’Espagne
- Bibliothèque royale des Pays-Bas
- Bibliothèque nationale de Pologne
- Bibliothèque nationale d’Israël
- Bibliothèque universitaire de Pologne
- Bibliothèque nationale de Catalogne
- Bibliothèque nationale d’Australie
- Bibliothèque nationale tchèque
- WorldCat Id
- WorldCat
- Notices dans des dictionnaires ou encyclopédies généralistes :
- Ressources relatives aux beaux-arts :
- AGORHA
- Delarge
- (en) Bénézit
- (en) Grove Art Online
- (da + en) Kunstindeks Danmark
- (en + nl) RKDartists
- (en) Union List of Artist Names
- Site officiel de la succession de Tamara de Lempicka
- Portail de la peinture
- Portail de la Pologne
- Portail de l’Art déco
- Portail de la France
- Portail de l’histoire de l’art
- Portail LGBT