Suède-Norvège

L'Union entre la Suède et la Norvège (en suédois : Svensk-norska unionen, en norvégien : Den svensk-norske union), officiellement les Royaumes unis de Suède et de Norvège (en suédois : Förenade konungarikena Sverige och Norge, en norvégien : De forenede Kongeriger Norge og Sverige), couramment appelée Suède-Norvège, est une union personnelle des royaumes de Suède et de Norvège entre 1814 et 1905.

Pour des articles plus généraux, voir Histoire de la Norvège et Histoire de la Suède.

Cet article concerne l'union personnelle entre la Suede et la Norvège de 1814 à 1905. Pour les relations entre les deux pays, voir Relations entre la Norvège et la Suède. Pour la frontière entre les deux pays, voir Frontière entre la Norvège et la Suède.

Royaumes unis de Suède et de Norvège
Förenade Konungarikena Sverige och Norge
De forenede Kongeriger Norge og Sverige

  
(90 ans, 11 mois et 22 jours)

Les Royaumes unis de Suède et Norvège en 1905.
Informations générales
Statut Union personnelle
Capitale Stockholm (Suède) et Kristiania (Norvège)
Langue(s) Suédois, danois, norvégien
Religion Luthéranisme
Démographie
Population (est. 1820) 3 550 000
• est. 1905 7 560 000
Superficie
Superficie (1905) 774 184 km2

Entités précédentes :

Entités suivantes :

L'Union est mise en place par le traité de Kiel par lequel le Danemark cède la Norvège à la Suède. Cependant, les Norvégiens déclarent leur indépendance ; il s'ensuit une courte guerre qui aboutit à la Convention de Moss durant laquelle la Norvège accepte l'union, mais conserve sa Constitution et son administration.

Les armes, les drapeaux et l’armée de la Suède-Norvège

Contexte historique


La perte de la Finlande

En 1810, le roi de Suède Charles XIII n'a plus d'héritier à la suite du décès du prince Charles-Auguste : avec l'assentiment de la Diète de Suède, il choisit comme successeur Jean-Baptiste Bernadotte, maréchal de Napoléon et parent par alliance de ce dernier, qui a laissé une réputation favorable comme chef militaire et comme gouverneur du Hanovre et de Hambourg. Le nouveau prince royal est adopté sous le nom de Charles Jean[1].

La Suède, engagée dans les guerres napoléoniennes, vient de perdre la Finlande face à l'Empire russe. Choisi pour succéder à Charles XIII, Bernadotte s’aperçoit vite qu'il est vain de penser à reconquérir la Finlande, et qu'il serait plus avantageux pour la Suède de chercher un dédommagement en Norvège[2]. Il voit ce pays dans les frontières naturelles de la péninsule scandinave, comme un « pays dont la position géographique semble indiquer que la nature elle-même l'a destiné à faire un jour partie intégrante du Royaume de Suède » (Lettre de Bernadotte à l'envoyé suédois à Saint-Pétersbourg datée de ).

Rupture avec la France et alliance avec la Russie

Napoléon, qui veut abattre économiquement le Royaume-Uni pour la convaincre de signer la paix puisqu'il ne peut plus l'envahir après la désastreuse bataille de Trafalgar, impose alors à toutes les nations européennes l’arrêt des échanges commerciaux avec la Grande-Bretagne. Mais les échanges anglo-suédois continuent malgré le blocus, ce qui l'oblige à menacer la Suède de représailles si elle continue d'accueillir des navires anglais dans ses ports. En , devant la désobéissance de la Suède, il met ses menaces à exécution et donne des ordres aux troupes du maréchal Davout pour occuper la Poméranie suédoise, vestige de l'empire de Charles XII perdu en 1721 à la fin de la désastreuse Grande guerre du Nord. L'alliance qui avait été esquissée entre la France et la Suède grâce à l'élection de Bernadotte, maréchal de Napoléon Ier comme futur roi de Suède est abandonnée. La garnison suédoise, stationnée en Poméranie, est faite prisonnière. L'agression est suffisante pour convaincre le gouvernement suédois et l'opinion publique de rompre avec la France.

Mais, on ne pouvait pas rompre avec Napoléon tout en étant en mauvais termes avec la Russie et le Royaume-Uni ; s'engager trop tôt, c'eût été faire les frais d'un nouveau traité de Tilsit, où la Suède avait perdu la Finlande. Deux missions diplomatiques furent donc lancées, l'une à Londres pour obtenir la paix et le soutien du Royaume-Uni, l'autre à Saint-Pétersbourg. Cette dernière était de loin la plus importante : il fallait obtenir de la Russie qu'elle se prononce pour le rattachement de la Norvège à la Suède. De son côté, la Suède renoncerait définitivement à la Finlande et apporterait ensuite des contingents qui, associés aux troupes russes, pourraient faire diversion sur les arrières de l'armée napoléonienne.

Dans l'immédiat, le Conseil de Gouvernement des 21 et se contente d'affirmer une politique de neutralité. Mais le , la diplomatie suédoise remporte un succès ; par le traité de Saint-Pétersbourg, Alexandre Ier sentant venir le grand affrontement avec la France, donnait les satisfactions qu'attendaient les Suédois. Le traité de Saint-Pétersbourg prévoyait en effet que les Suédois pourraient annexer la Norvège et, ensuite seulement, participer à l'opération de diversion contre Napoléon en Allemagne avec un corps de 30 000 hommes ; quant au roi de Danemark-Norvège, Frédéric VI, il obtiendrait en compensation des territoires en Allemagne s'il s'associait à cette alliance, dans le cas contraire on devrait le traiter en ennemi et il serait attaqué. C'est sur ce traité qu'allait se construire la politique de Bernadotte. Le traité signé avec le Royaume-Uni à Örebro le fut en revanche décevant par rapport aux attentes : un simple traité de paix, sans engagement quant à la Norvège et peu de choses quant aux subsides. La nouvelle politique extérieure suédoise nécessitant de lourds besoins financiers, le Riksdag fut convoqué à Örebro au début d'.

Préparation des opérations

Charles-Jean qui avait fait une longue carrière au mérite pendant les guerres de la Révolution et de l'Empire, est persuadé qu'il faut rénover l'armée en s'inspirant des mesures en vigueur en France, et notamment de la conscription. L'ancienne organisation militaire, avec ses troupes cantonnées à la charge de propriétaires terriens, même si elle avait fait l'objet de modifications, demandait à être profondément rénovée en ce début du XIXe siècle. De plus, la Suède n'était alors pas la seule à réformer ses armées ; la Prusse, l'Autriche et la Russie réformaient leurs armées en profondeur à la suite des cuisantes défaites qui leur avaient été infligées par Napoléon. Le gouvernement réussit donc à introduire la conscription dans l'armée suédoise sans résistance d'aucun des cadres de l'armée. Désormais, un service militaire obligatoire de l'âge de 20 à 25 ans permettrait de lever toutes les recrues nécessaires dès que l'ancienne armée ne suffirait plus. » Par quelques mesures radicales (annulation des dettes extérieures) on parvint à assainir provisoirement les finances et le budget put être rétabli, sans nouvelles charges fiscales. La politique extérieure de neutralité fut approuvée et il ne semble pas que le Riksdag fut informé des négociations en cours avec la Russie et le Royaume-Uni. Des amendements restreignant la liberté de la presse, en particulier pour des raisons de sécurité furent adoptés. Toutefois, Charles-Jean renonça à une révision complète de la Constitution à laquelle il semblait avoir songé. Le Riksdag d'Octobre fut cependant pour l'essentiel un grand succès pour lui.

Lorsque, à la suite du refus du tsar de cesser les échanges commerciaux avec le Royaume-Uni, Napoléon lança la campagne de Russie, le plan mis en place par Alexandre Ier et Charles-Jean s'écroula. En effet, le rapide repli des armées russes, conseillé par Koutouzov jusque devant Moscou rendait bien aléatoire l'ancien projet de diversion commune en Allemagne du Nord. Charles-Jean et Alexandre Ier se rencontrèrent donc à Åbo (Turku)[3] en Finlande, le pour y renégocier les termes du traité. Pour Alexandre, les contingents suédois, au lieu d'aller menacer les possessions de Frédéric VI, roi du Danemark, - à savoir la Norvège et la Finlande - devraient être envoyés dans les provinces baltes ; du côté du prince-héritier suédois, Bernadotte, on n'avait pas totalement renoncé à la Finlande qu'on voulait monnayer pour le prix d'une aide militaire à la Russie envahie. Finalement, la rencontre se termina sur une convention additionnelle au traité de Saint-Pétersbourg par laquelle, on s'accordait sur le fait qu'un corps expéditionnaire de 25 000 soldats russes serait d'abord engagé dans la région de Riga. Cette clause signifiait que la Suède devrait se débrouiller seule pour s'emparer de la Norvège car « jamais plus il ne fut possible d'envoyer de troupes dans le Sud de la Suède » ; de plus, le tsar de Russie ne voulait et ne pouvait se permettre de froisser François Ier d'Autriche qui s'était déclaré pour le maintien de la Norvège dans les possessions de la Couronne danoise.

Déroulement des opérations

Heureusement, les relations avec le Royaume-Uni s'améliorent. Par le traité d'alliance de Stockholm le , la Suède obtient d'importants subsides et la cession de la Guadeloupe que le Royaume-Uni venait de prendre à la France ; le Royaume-Uni admet aussi les revendications suédoises sur la Norvège. À la fin d', Bernadotte débarque en Poméranie et prend le commandement de l'Armée du Nord, l'armée suédoise formant un corps d'armée à côté des gros contingents fournis par l'armée prussienne et l'armée impériale russe de Frédéric-Guillaume III de Prusse et Alexandre Ier de Russie. Forte de 150 000 hommes, cette armée permet, avec la bataille de Gross-Beeren, de dégager la capitale prussienne ; elle intervint aussi à la bataille de Leipzig. Ensuite, l'Armée du Nord reçoit l'ordre de marcher sur la Hollande ; Bernadotte, peu soucieux de participer à l'invasion de la France, obtient l'accord du tsar pour régler d'abord la question de la Norvège : le , il entre au Danemark, écrase les Danois à la bataille de Bornhoft et s'empare de Lübeck. Le Danemark, à genoux, n'a plus qu'à demander des pourparlers de paix ; le , les deux parties aboutissent au traité de Kiel qui récompense l'obstination de Bernadotte. Frédéric VI, roi de Danemark et Norvège, renonce en faveur du roi de Suède à tous ses droits sur la Norvège - sauf les anciennes possessions norvégiennes des îles Féroé, du Groenland et de l'Islande – et reçoit en compensation la Poméranie suédoise, l'île de Rügen comprise. La Norvège n'est pas intégrée au royaume de Suède mais unie à celui-ci par une union personnelle.

Histoire

Fondation de l'Union

L'instauration de cette union suit le traité de Kiel signé le dans lequel le Royaume de Danemark-Norvège, perdant des guerres napoléoniennes, s'engage à céder la Norvège au roi Charles XIII de Suède. S'ensuit une tentative d'indépendance de la Norvège avec la désignation du prince héritier Christian Frédéric du Danemark et de la Norvège comme régent, l'élection d'une assemblée constituante le 10 mai, assemblée qui adopte une monarchie constitutionnelle le 17 mai et élit le régent comme roi sous le nom de Christian Frédéric. C'est le premier monarque de l'État de Norvège dans les temps modernes. Une campagne militaire de la Suède contre la Norvège la même année se conclut par la convention de Moss le 14 août : la Norvège conserve son statut de royaume et sa constitution démocratique mais est contrainte d'entrer en union personnelle avec la Suède, c'est-à-dire que les royaumes partagent le même souverain.

Le Royaume de Suède devenait donc partie des Royaumes unis de Suède et Norvège, dont la frontière occidentale à l'Atlantique leur garantissait une sécurité plus sûre et des facilités de défense. Même si bien des Suédois avaient la nostalgie de la Finlande, il est indiscutable que la Suède compensait sa perte de manière satisfaisante par l'union avec la Norvège.

Le , Charles XIII de Suède était élu roi de Norvège par le Storting, le parlement norvégien. Ses pouvoirs étaient limités par la Constitution d'Eidsvoll.

Dissolution

Le Storting (parlement) et le Gouvernement norvégien maintenaient avec fermeté l'indépendance du royaume et rejetaient toutes les tentatives du roi commun d'établir une union plus proche entre les deux pays. En 1821, ils introduisaient un pavillon norvégien pour la flotte de commerce norvégienne, qui devint au fur et à mesure la troisième du monde. Du point de vue démographique, la Norvège comptait 2,2 millions d'habitants en 1900, malgré l'émigration de plus de 800 000 Norvégiens aux États-Unis. Le chemin de fer, l'industrie textile et surtout les industries de transformation du bois (papier, cellulose) bouleversèrent l'économie du pays. Un prolétariat urbain apparut, pour lequel furent votées les lois sociales.

En 1884, la gauche (Venstre) obtint la majorité au Parlement, forçant Oscar II, le roi de Suède et de Norvège, à nommer Johan Sverdrup Premier ministre ; il dut en outre se soumettre au système parlementaire en Norvège. Le début du XXe siècle fut marqué par l'extension progressive du suffrage devenu universel pour les femmes comme pour les hommes en 1913 et par des relations tendues avec la Suède du fait du refus d’Oscar II d'accepter une représentation norvégienne à l'étranger. Ce refus entraîna la dissolution unilatérale de l'Union le , reconnue par la Suède en , et l'avènement d'un prince danois qui prit le nom de Haakon VII de Norvège.

Symboles

Drapeaux

Héraldique

L'Union ne posséda pas de blason avant la réglementation officielle du demandée par le roi Oscar Ier de Suède qui coupa le blason en deux parties. Avant cette date l'Union se servait du blason du Roi.

Notes et références

  1. Christian Bazin 2000, p. 85-120.
  2. Christian Bazin 2000, p. 121-128.
  3. La ville finlandaise désignée sous le nom suédois de Åbo est aujourd'hui plus connue sous le nom finnois de Turku.

Annexes

Bibliographie

  • Chapitre III, « Les premières difficultés », page 40-42 de la Thèse de Doctorat, La séparation de la Suède et de la Norvège, soutenue le à 13 heures à la Faculté de Droit de Paris devant M. L. Renault, professeur, M. Lesueur, M. Piedelievre, professeur
  • Histoire de la Suède, (p. 290-310) écrit par Jean-Pierre Mousson-Lestang, paru en aux Éditions Hatier dans la Collection « Nations d'Europe »
  • Encyclopédie Bordas, Tome VII, p. 3480, Paris 1994, (ISBN 2-907092-79-0)
  • Jean-Jacques Fol, Les Pays Nordiques au XIXe siècle, PUF, Paris, 1970, p. 270-276
  • Grand Larousse Universel (p. 7449)
  • Christian Bazin, Bernadotte, un cadet de Gascogne sur le trône de Suède, France Empire, (ISBN 2704809011)

Articles connexes

Précédents historiques

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