Secretum secretorum

Le Secretum secretorum, Secret des secrets, dit aussi Lettre d'Aristote à Alexandre, est un traité pseudo-aristotélicien médiéval, concernant l'occultisme, mais aussi la politique. Sous une forme qui tient de l'encyclopédie et du miroir des princes, il traite de sujets très variés comme la politique, la morale, la physiognomonie, l'astrologie, l'alchimie, la médecine et les propriétés magiques des plantes, des pierres et des nombres. Il eut une importante influence en Europe pendant le haut Moyen Âge. Selon Gast[Qui ?], ce livre est « le livre le plus répandu en Europe au Moyen Âge[1]. »

Composition

Une partie du Secret des secrets (Secretum secretorum) s'appelle Du régime de santé (De regimine sanitatis, autrement dit hygiène de vie). Le plan de la version la plus courante (version C) est le suivant :

  1. Table des matières.
  2. Premier prologue traitant des rapports entre Aristote et Alexandre et de la composition du traité, suivi des deux lettres échangées par le Stagirite et le conquérant après sa conquête de la Perse.
  3. Prologue de Yahyâ ibn al-Batrik, prétendu traducteur, rappelant les circonstances de la découverte du livre et les étapes de sa traduction.
  4. Chapitres de morale.
  5. Chapitres d’hygiène.
  6. Extraits des chapitres sur la justice.
  7. Extraits des chapitres sur le gouvernement.
  8. Physiognomonie.


Histoire : attribution et traductions

Ce pseudépigraphe se présente comme une lettre adressée par Aristote à Alexandre le Grand, dont il avait été le précepteur en Macédoine, de 343 à 341 av. J.-C., et qui venait de vaincre le roi des Perses Darius III.

En réalité le Secret des secrets est traduit d'un texte arabe du {{Xe siècle}} le Kitâb sirr al-'asrâr (en arabe : كتاب سر الأسرار). Certains historiens, dont J. Ruska (Al-Razi's Buch Geheimnis der Geheimnisse, 1937, rééd. 1973) lui donnent pour auteur Abû Bakr al-Râzî (Rhazes, 865-925). D'autres ont proposé Yuhannâ ibn al-Bitrîq, vers 941.

Il se diffuse en Europe en deux versions latines, une brève, une longue. La version brève, apparue vers 1145, centrée sur la médecine, est traduite par Jean de Séville Johannes Hispalensis entre 1112 et 1128, sous le titre De Regimine sanitatis (Du régime de santé) ou Epistula Alexandro de dieta servanda. La version longue, vers 1220, est traduite par Philippe de Tripoli (identifié par Haskins à un Philippe chanoine de Tripoli, cité dans les registres de Grégoire IX et Innocent IV[2]).

Le Secretum secretorum a été traduit dans de nombreuses langues vernaculaires. C'est cette dernière qui est principalement diffusée, notamment au XVe siècle. Le texte est plus ou moins modifié au cours des traductions successives. Pierre d'Abernon vers 1287 en fait une version versifiée et largement remaniée.

Il est commenté par Albert le Grand et Roger Bacon, et inspire des traités encyclopédiques comme le Placides et Timeo ou le Livre de Sidrac.

Dans une des versions élargies du {{XIIIe siècle}} on trouve des considérations alchimiques dont la fameuse Table d'émeraude (Tabula smaragdina).

Notes et références

  1. Abd al-Raḥmān Badawī, La transmission de la philosophie grecque du monde arabe sur Google Livres, Vrin, 1968, p. 11.
  2. Charles Homer Haskins Studies in the history of mediaeval science Cambridge, Harvard University Press, 1924. (Harvard historical studies, XXVII.)

Bibliographie

Le texte et ses versions

  • rédaction courte : De regimine sanitatis, ou Epistula Alexandro de dieta servanda, traduction partielle en latin Jean de Séville (v. 1145) : J. Brinckmann, Die apokryphen Gesundheitsregeln des Aristoteles für Alexander den Grossen, Leipzig, 1914.
  • rédaction longue (la plus courante) : Secretum secretorum, traduction en latin Philippe de Tripoli (1243 ?) : Secretum secretorum Aristotelis ad Alexandrum Magnum, Cambridge (Mass.), Omnisys, 1990, 153 p., reprint de l’édi. Venise 1555.
  • édition de la version la plus diffusée au Moyen Âge : Denis Lorée, Édition commentée du Secret des Secrets du Pseudo-Aristote, Thèse, Université Rennes 2, 2012, vol. I : Édition, p. 144-204
  • rédaction tardive : par Engelbert d’Admont (vers 1287).
  • trad. fr. de la rédaction longue version C (XV° s.), apud L’instruction d’un jeune prince [de Guillebert de Lannoy]. Le Secret des Secrets. Les Enseignements de Saint Louis à sa fille Isabelle, Paris, Antoine Vérard, 1497. Trad. en ligne *
  • traductions anglaises : Three prose versions of the Secreta secretorum, intro. Robert Steele, Londres, Kegan Paul, 1898, vol. I : Text and Glossary . Secretum secretorum. Nine English Versions, édi. par M. Manzalaoui, Oxford, Oxford University Press, coll. « Early English Text Society. Original Series », no 276, 1977, 631 p.

Les commentaires sur le texte

  • Roger Bacon, Secretum secretorum cum Glossis et Notulis (Le Secret des secrets, avec gloses et notes) (1275-1280), R. Steele édi. : Opera hactenus inedita Rogeri Baconis, Oxford, Clarendon Press, 1909-1940, t. 5, 1920, p. 1-172 [Internet Archive]. p. 287-313 : trad. en français versifié par Pierre de Vernon, Le secré de secrez, vers 1250.

Les études sur le texte

  • Françoise Fery-Hue, "Secret des secrets", in G. Hasenohr et M. Zink (dir.), Dictionnaire des lettres françaises. Le Moyen Âge, Paris, Le livre de poche, 1992, p. 1366-1370.
  • Mario Grignaschi, L'origine et les métamorphoses du Sirr al 'asrâr (Secretum secretorum)", Archives d'histoire doctrinale et littéraire du Moyen Âge, 43 (1976), p. 7-112.
  • D. Lorée, "Le statut du Secret des secrets dans la diffusion encyclopédique du Moyen Âge", in Encyclopédies médiévales : discours et savoirs, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 1998, p. 155-171.
  • Steven J. Williams The Secret of Secrets : the scholarly career of a pseudo-Aristotelian text in the Latin Middle Âges, Ann Arbor, University of Michigan Press, 2003.

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

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