Scrutin proportionnel plurinominal

Le mode de scrutin proportionnel plurinominal (également appelé représentation proportionnelle à scrutin de liste, RPSL) est un système électoral où le nombre de sièges à pourvoir est partagé en fonction du nombre de voix recueillies. C'est le système électoral proportionnel le plus répandu parmi les États indépendants et les territoires semi-autonomes qui tiennent des élections parlementaires au scrutin direct[1]. Il est né au XIXe siècle avec l'apparition des partis politiques. Il semble que l'inventeur de la représentation proportionnelle soit Victor Considerant, dans un ouvrage paru en 1846[2]. Les premiers systèmes pour le mettre en place ont d'abord été proposés par des mathématiciens et portent souvent le nom de leurs auteurs. La Belgique fut la première à adopter le scrutin proportionnel pour ses députés en 1899 (méthode D'Hondt élaborée par Victor D'Hondt).

Ne doit pas être confondu avec Proportionnalité.

Pour un article plus général, voir Système électoral.

Schéma du mode de scrutin proportionnel.

Principe

Chaque parti présente une liste de candidats pour un nombre de mandats définis. À l'issue du vote, ces mandats sont attribués à chaque liste en proportion du nombre de voix que chacune a recueillies. Le nombre de voix nécessaire pour obtenir un mandat est appelé le quotient électoral et constitue normalement le résultat de la division entre le nombre de suffrages exprimés et le nombre de mandats à distribuer.

Il existe plusieurs variantes :

  • la proportionnelle intégrale, où toutes les listes peuvent obtenir des mandats dès lors qu'elles ont franchi le quotient électoral ;
  • la proportionnelle avec seuil, où seules les listes ayant franchi un seuil électoral préalablement défini (une fraction du nombre de suffrages exprimés par exemple) peuvent obtenir des mandats.

Le scrutin proportionnel plurinominal reposant sur la présentation de listes de candidats, l'électeur peut se trouver limité dans sa capacité à influer sur la composition personnelle de l'assemblée concernée. Il existe donc un système de vote préférentiel, qui permet à l'électeur d'indiquer sa préférence pour un (ou plusieurs) candidats de la liste qu'il choisit, et d'influer sur la composition de l'assemblée au niveau des personnes et plus uniquement des forces politiques.

Listes bloquées

Les électeurs votent pour un parti. Puis les sièges sont attribués aux différents partis proportionnellement au nombre de voix qu'ils ont obtenu. Les candidats élus sont pris dans chacune des listes dans leur ordre d'apparition.

Vote préférentiel

Les électeurs votent pour un parti, et au sein de la liste ils ont la possibilité de voter pour un candidat (Pays-Bas, Danemark, Suède, Norvège, Italie, Pologne, élections régionales en Autriche, Algérie), pour plusieurs sur la même liste (Belgique[3], élections régionales dans le Land de Brême, élections communales dans plusieurs Länder allemands) ou pour plusieurs sur n'importe quelle liste (Luxembourg, Suisse), ce dernier système étant le panachage. Les sièges sont d'abord attribués aux différents partis proportionnellement au nombre de voix qu'ils ont obtenues. Les candidats élus sont pris dans les listes en fonction de leurs scores personnels (avec des variantes selon les pays, un seuil d'éligibilité peut être exigé).

Au Danemark, lors des élections municipales, chaque liste peut choisir (avant élection) de tenir compte ou non des votes préférentiels.

En Italie, l'électeur vote pour un parti et s'il veut favoriser un candidat il peut ajouter, en l'écrivant lui-même, un nom (communales, provinciales, régionales), deux noms (parlementaires nationales) et jusqu'à trois noms (parlementaires européennes) sur le bulletin de vote[4]. L'impact de ces votes préférentiels sur l'élection des députés avait été fort limité de 1994 à 2006 puisqu'un quart d'entre eux seulement était élu à la proportionnelle. La proportionnelle a été restaurée en 2006 (avec une prime de majorité)[5], avec la suppression du vote de préférence aux législatives.

En Belgique, le débat a pendant longtemps été focalisé sur le poids à donner à la « case de tête » (vote en faveur de la liste, sans préférence pour un candidat en particulier) par rapport aux votes préférentiels. Les partisans d'un poids plus grand de la case de tête argumentent que cela permet aux partis de faire élire des candidats de valeur et pas seulement des candidats populaires, voire populistes. L'argument opposé met en exergue la nécessité de respecter le choix de l'électeur, même si celui-ci aboutit à faire élire des candidats considérés par certains comme incompétents. Les réformes électorales successives ont été dans le sens d'une forte diminution du poids de la case de tête.

Plus récemment, notamment en 2001, une autre polémique a éclaté en Belgique à propos du stemblok (en néerlandais : « bloc de voix »), un député écologiste ayant estimé qu'il fallait réduire le nombre de candidats pour lesquels un même électeur pouvait voter, alors que jusque-là ce nombre était illimité[6]. La motivation en était que par le biais du stemblok, c'est-à-dire en appelant à voter pour un groupe de candidats sur une même liste (le parti X présentant des candidats sur une liste de cartel entre plusieurs partis, les candidats flamands sur une liste bilingue, les femmes etc.), les partisans de ce groupe pouvaient réussir à fausser le principe « un homme, une voix ». Un deuxième argument avancé par ce député imputait aux électeurs allochtones la tendance à accorder des voix de préférence à tous les candidats d'une même liste dont les patronymes laissaient penser qu'ils étaient d'une même origine ethnique ou nationale. Les deux propositions de modification de la législation en la matière ont en fin de compte été abandonnées.

Un avantage indéniable du système de vote préférentiel est qu'il peut permettre une représentation plus variée que celle voulue par l'instance du parti qui a confectionné la liste. Sans les votes préférentiels, quasiment aucun des candidats d'origine marocaine, turque ou congolaise n'aurait été élu en Région de Bruxelles-Capitale aux communales de 1994 et 2000 ou aux régionales de 2004. D'un autre côté, surtout depuis la diminution du poids de la case de tête aux communales de 2000, certains partis se sont parfois rendu compte a posteriori que des candidats dits « de remplissage », placés sur la liste pour la compléter, se retrouvaient élus, ou ultérieurement appelés à siéger en tant que suppléants, par le biais des votes préférentiels alors qu'ils étaient pour ainsi dire inconnus au sein du parti, voire non membres de celui-ci.

En Suisse, le système se complique encore un peu avec l'utilisation de listes ouvertes. Chaque parti peut présenter une liste avec un nombre de candidats ne pouvant excéder le nombre de sièges à pourvoir. L'électeur peut dès lors utiliser la liste telle quelle, biffer le nom d'un candidat, le remplacer par le nom d'un candidat d'un autre parti (panachage) ou alors le remplacer par le nom d'un candidat déjà nommé sur la liste (cumul). Les limites sont les suivantes : le nombre maximal de candidats sur chaque liste ne peut excéder le nombre de sièges à pourvoir et on ne peut cumuler un candidat qu'une fois (son nom peut apparaître au maximum deux fois par liste). Il est également possible de remplir une liste vierge (sans dénomination de parti) et la remplir selon les règles édictées ci-dessus.

Répartition des sièges

Beaucoup de systèmes imposent un seuil de représentativité, généralement de 5 %. Ce n'est toutefois pas toujours le cas. Après élimination des listes ne remplissant pas ce critère et des voix correspondantes, on peut se lancer dans la répartition. Le système serait parfait si l'application de la proportionnalité permettait d'obtenir un nombre de sièges entier, mais c'est rarement le cas. Il faut donc appliquer un arrondi. Cet arrondi peut se faire selon plusieurs méthodes.

Par la suite, on emploiera à titre d'exemple la situation suivante : Pour attribuer 6 sièges parmi quatre partis A, B, C, D, la répartition des voix (pour 100 votes) est la suivante : 42 voix pour A, 31 pour B, 15 pour C et 12 pour D.

Méthode utilisant le quotient de Hare

On calcule le quotient de Hare égal au quotient électoral : nombre de votes divisé par le nombre de sièges. On effectue la division entière du nombre de voix (obtenues par chaque parti) par le quotient électoral. On obtient le quotient entier et on calcule le reste de la division. Les sièges sont d'abord affectés selon le quotient entier. Puis les sièges non attribués se distribuent entre les partis dans l'ordre des plus forts restes. Au plus un siège supplémentaire est attribué à chaque parti.

Exemple : dans la situation décrite précédemment le quotient électoral est de 16,67 (100/6 sièges = 16,67).

Parti Voix Quotient entier Reste Répartition des derniers sièges Total sièges (%siège totaux) Différence %voix−%sièges
A 42 2 42 − (2 × 16,67) = 8,66 0 2 (33 %) 9 %
B 31 1 31 − (1 × 16,67) = 14,33 1 2 (33 %) -2 %
C 15 0 15 1 1 (17 %) -2 %
D 12 0 12 1 1 (17 %) -5 %
Total 100 3 sièges distribués 3 sièges restants 6 (100 %) 0 %

La répartition de sièges est donc de 2 sièges à A, 2 sièges à B, 1 siège à C et 1 siège à D. L'écart maximum de répartition est ici de |9|+|-5| = |14| soit 14 % de répartition (supérieur au total de D).

La méthode de liste à la proportionnelle avec plus fort reste est utilisée en Italie pour les élections parlementaires européennes[7]. Elle présente le défaut de fournir des résultats parfois incohérents comme le montre le paradoxe de l'Alabama[7]. Elle a différents effets sur la proportionnalité des résultats selon la méthode utilisée pour calculer le quotient.

Autres méthodes

On peut également utiliser d'autres quotients que le quotient électoral (ou quotient de Hare)

  • le quotient de Droop : le nombre de voix est divisé par le nombre de sièges plus 1 et le quotient est majoré de 1
  • le quotient de Hagenbach-Bischoff : le nombre de voix est divisé par le nombre de sièges + 1 (ce quotient est utilisé en Suisse[7],[8], au Liechtenstein[9] et en Slovaquie[réf. souhaitée])
  • le quotient de Impériali : le nombre de voix est divisé par le nombre de sièges + 2 (utilisé dans la loi électorale italienne de 1946)

Méthode de la plus forte moyenne

Dans ces méthodes, on fait le rapport entre le nombre de voix et le nombre de sièges et on prend les meilleures moyennes[à développer]. Pour cela, pour attribuer le premier siège restant, on calcule le rapport entre le nombre de voix attribué à chaque liste et le nombre de sièges de cette liste augmenté d'une unité (cette unité servant à simuler le fait qu'on attribuerait le premier siège restant à la liste en question). Le premier siège restant est attribué à la liste pour laquelle ce rapport est le plus élevé. On recommence ensuite à calculer ces mêmes rapports pour l'attribution du deuxième siège, en prenant en compte le fait que le premier siège a été attribué, et ainsi de suite jusqu'à attribuer tous les sièges. Les méthodes à la plus forte moyenne ont des effets sur la proportionnalité différents de ceux de la méthode au plus fort reste.

Méthode de Jefferson ou méthode D'Hondt

La méthode de Jefferson, connue sous ce nom aux États-Unis, est équivalente à la méthode D'Hondt : « il arrive d’ailleurs que leurs deux noms se trouvent confondus, alors que c’est techniquement la méthode de Jefferson, plus claire et plus concise, qui est en fait employée »[10],[11]. Les sièges ne se voient pas affectés de coefficients particuliers, chaque siège compte pour 1.

Il s'agit ici d'appliquer le quotient simple et chaque siège restant est affecté successivement à chaque liste en plus de ceux déjà acquis. On calcule alors pour chaque liste le rapport voix/sièges. Le siège est attribué à la liste présentant la plus forte moyenne de voix par sièges.

La première répartition s'effectue exactement de la même manière qu'avec la méthode des plus forts restes, grâce au quotient électoral.

Mais ensuite, les nombres de voix de chaque liste (et non le reste) servent ensuite à calculer pour chaque siège restant les plus fortes moyennes pour chaque liste, afin de désigner celle qui recevra le siège en question :

  • pour le premier siège résiduel, les scores de chacune des listes sont divisés par leur nombre de sièges obtenus précédemment au quotient électoral, plus un ; les résultats sont comparés et le siège va à la liste au quotient le plus élevé ;
  • pour le deuxième siège résiduel, la même méthode est appliquée, mais le score de la liste qui a obtenu le siège résiduel précédent est divisé par son nombre de sièges (obtenus antérieurement au quotient électoral) augmenté de deux, et non plus d’un. Autrement dit, la moyenne est calculée pour chaque liste en ajoutant 1 siège (le futur siège à attribuer) au nombre de sièges acquis dans les étapes précédentes ;
  • les calculs se poursuivent pour chaque liste selon la même logique d'incrémentation, jusqu’à ce que plus aucun siège ne soit à attribuer.

La méthode D'Hondt ou de Jefferson est utilisée en Australie, en Finlande, en Hongrie, en Israël, en Pologne, au Portugal, en Espagne, au Luxembourg, et aux élections législatives et régionales de Belgique. Elle est appliquée sous le nom de D'Hondt dans de nombreux pays européens[11]. Elle est aussi utilisée en France pour les élections du Parlement européen et pour les élections des comités d'entreprise[12],[13][source insuffisante] ainsi que pour les représentants étudiants aux conseils d'administration des CROUS. Par ailleurs, elle a été retenue par l'Accord du Vendredi Saint pour répartir les portefeuilles ministériels de l'exécutif de l'Irlande du Nord.

Elle porte le nom du mathématicien belge Victor D'Hondt. Elle a la particularité d'avantager les listes ayant bénéficié du plus grand nombre de voix[14].

Exemple de mise en œuvre

Dans l'exemple suivant, six sièges sont à répartir entre quatre partis ; 100 voix ont été exprimées.

Parti Voix Répartition des premiers sièges Nombre de sièges pourvus Répartition du premier siège restant Total sièges pourvus Répartition du deuxième siège restant Total sièges pourvus Répartition du dernier siège restant Total sièges pourvus Différence % voix − % sièges
A 42 6×42/100=2,52 2 42÷(2+1)=14 2+0=2 42÷(2+1)=14 2+0=2 42÷(2+1)=14 2+1=3 42/100−3/6=−8 %
B 31 6×31/100=1,86 1 31÷(1+1)=15,5 1+1=2 31÷(2+1)=10,3 2+0=2 31÷(2+1)=10,3 2+0=2 31/100−2/6=−2,33 %
C 15 6×15/100=0,90 0 15÷(0+1)=15 0+0=0 15÷(0+1)=15 0+1=1 15÷(1+1)=7,5 1+0=1 15/100−1/6=−1,67 %
D 12 6×12/100=0,72 0 12÷(0+1)=12 0+0=0 12÷(0+1)=12 0+0=0 12÷(0+1)=12 0+0=0 12/100−0/6=+12 %
Total 100 3 4 5 6

La répartition de sièges est donc de 3 sièges à A, 2 sièges à B, 1 siège à C et 0 siège à D. Ce mode de répartition des sièges restant favorise la représentation des partis ayant reçu le plus de voix, au détriment de ceux en ayant reçu le moins (voir dernière colonne), exactement à l'inverse de la méthode du plus fort reste.

Second exemple de mise en œuvre

Rappel de l'exemple : pour attribuer 6 sièges parmi quatre partis A, B, C, D, la répartition des voix (pour 100 votes) est la suivante : 42 voix pour A, 31 pour B, 15 pour C et 12 pour D.

Le calcul des moyennes est effectué en divisant le nombre de votes par 2, 3, 4… Pour A, cela donne les moyennes de 42, 21 (42/2), 14 (42/3), et ainsi de suite. On aboutit alors au tableau suivant (certaines moyennes inutiles ne sont pas calculées).

Nombre de sièges 1 2 3 4
Moyenne pour A 42 21 14 10,5
Moyenne pour B 31 15,5 10,3
Moyenne pour C 15 7,5
Moyenne pour D 12

Les 6 plus fortes moyennes sont 42 (A), 31 (B), 21 (A), 15,5 (B), 15 (C) et 14 (A). On attribue alors 3 sièges à A, 2 à B et 1 à C.

Méthode de Sainte-Laguë

Dans la méthode de Sainte-Laguë, un coefficient est attribué à chaque siège en estimant que l'influence entre nombre de sièges et pouvoir de décision n'est pas proportionnelle. Le premier siège est affecté du coefficient 1 (ou 1,4 dans la méthode de Sainte-Laguë modifiée), le second du coefficient 3, le troisième du coefficient 5, et ainsi de suite en utilisant des coefficients impairs.

Après le décompte de tous les votes, des quotients sont calculés successivement pour chaque liste à chaque tour. La formule du quotient est :

 :

  • V est le nombre total de votes qu'une liste a reçu
  • s est le nombre de sièges qui ont déjà été attribués à cette liste

La liste qui obtient le quotient le plus élevé à un tour gagne un siège. Puis on recalcule tous les quotients pour le prochain tour en prenant en compte les sièges qui ont été attribués aux tours précédents. La procédure se termine quand il ne reste plus aucun siège.

La méthode de Sainte-Laguë ne garantit pas qu'une liste recevant plus de la moitié des suffrages obtiendra plus de la moitié des sièges. Exemple avec 7 sièges, 3 listes et 100 votants répartis en 53 pour A, 24 pour B et 23 pour C :

tour

(1 siège par tour)

1 2 3 4 5 6 7 Sièges obtenus

(gras)

Liste A

Quotient et sièges :

53

1

17,67

1

17,67

1

17,67

2

10,6

3

7,57

3

7,57

3

3
Liste B

Quotient et sièges :

24

0

24

1

8

1

8

1

8

1

8

2

4,8

2

2
Liste C

Quotient et sièges :

23

0

23

0

23

1

7,67

1

7,67

1

7,67

1

7,67

2

2

La méthode D'Hondt diffère par sa formule de calcul des quotients : .

Autre exemple de la méthode de Sainte-Laguë en reprenant l'exemple précédent à 6 sièges :

Nombre de sièges 1 2 3
Sièges pondérés 1,4 3 5
Moyenne pour A (42 voix) 30 14 8,4
Moyenne pour B (31 voix) 22,1 10,3 6,2
Moyenne pour C (15 voix) 10,7 5
Moyenne pour D (12 voix) 8,5

Les 6 meilleures moyennes sont alors 30 (A) - 22,1 (B) - 14 (A) - 10,7 (C) - 10,3 (B) - 8,5 (D)

La répartition de sièges est donc de 2 sièges à A, 2 sièges à B, 1 siège à C et 1 siège à D

Remarque : la méthode de Sainte-Laguë non modifiée aurait ici donné le même résultat pour 6 sièges mais un résultat différent s'il avait fallu pourvoir 5 sièges.

La méthode de Sainte-Laguë est utilisée en Allemagne, Bosnie-Herzégovine, Norvège, Nouvelle-Zélande, Suède, au Danemark. Elle porte le nom de son inventeur, le mathématicien français André Sainte-Laguë[10]. Comparée au système D'Hondt, elle assure une meilleure représentation des petites listes[10].

Apparentement

L'institution d'apparentements permet d'accorder un avantage aux listes apparentées dans la répartition des sièges : si elles ont remporté ensemble une majorité simple des voix, elles se partagent l'ensemble des sièges à pourvoir.

Ainsi, en reprenant l'exemple précédent avec un système de scrutin proportionnel avec apparentements et répartition au plus fort (selon le quotient électoral), et en supposant que les listes A et C s'apparentent, elles ont ensemble une majorité (57 voix sur 100) et se partagent donc la totalité des sièges. Le quotient électoral est fixé à 9,5 = (42 + 15) / 6.

Parti Voix Quotient entier Reste Répartition des derniers sièges
A 42 4 42−4×9,5 = 4 0
B 31 0 - -
C 15 1 15−9,5 = 5,5 1
D 12 0 - -

Dans ce système, la liste A obtient 4 sièges et la liste C obtient 2 sièges. Les listes B et D n'obtiennent aucun siège, alors même que la liste B a obtenu plus de voix que la liste C.

Avantages

  • Le scrutin proportionnel permet une meilleure représentation de la diversité des opinions.
  • Le système de liste à représentation proportionnelle permet à chaque parti politique d'obtenir un nombre de sièges proportionnel au nombre de voix. C'est pourquoi il peut sembler plus juste que le système majoritaire, car il rend impossible la prédominance exclusive d'une formation politique qui n'aurait pas le soutien d'une majorité dans le pays.
  • Si le seuil est raisonnable, il permet une représentation des petits partis.
  • Reflétant davantage la diversité de l'électorat, le résultat est plus facilement accepté par les électeurs.
  • La constitution d'un parlement à plusieurs partis incite à la création de gouvernement de coalition : c'est souvent un facteur de modération.
  • Contrairement au scrutin majoritaire uninominal, l'électeur est plus enclin à voter pour des candidats proches de ses opinions plutôt que pour un candidat ayant le plus de chances d'être élu.
  • Le recours éventuel au vote préférentiel permet à l'électeur de choisir à la fois un candidat et une formation politique, ce qui réduit considérablement le poids des partis politiques dans le choix de leurs candidats, ce qui n'est pas forcément le cas avec les modes de scrutin majoritaire.

Inconvénients

  • Le gouvernement de coalition, s'il rassemble des partis trop éloignés idéologiquement, rend plus difficile la mise en place de grandes réformes. Cet inconvénient dépend du mode de désignation du gouvernement. La Suisse supprime cet inconvénient en pratiquant le gouvernement collégial qui comprend tous les grands partis. Dans ce système, il n'y pas de notion de coalition au pouvoir, tous les partis (importants) y étant. La majorité se forme alors objet par objet au parlement.
  • Pour le philosophe et politologue Alain, qu'il y ait proportionnalité ou non dans la représentation, la majorité reste seule à emporter les décisions, ce qui ne change donc rien in fine.
  • Contrairement au vote uninominal par circonscription, le lien est faible entre l'élu et l'électeur, celui-ci ayant voté pour une liste et non une personne si ladite liste est bloquée. Le problème ne se pose en revanche pas lorsque l'électeur peut recourir au vote préférentiel.
  • Pour les partis très hiérarchisés, la création de listes bloquées donne un grand pouvoir aux chefs de parti, qui décident seuls de l'ordre des candidats dans sa liste et peut créer un système de dictature à l'intérieur d'un parti (d'où l'intérêt de la variante).
  • Certains systèmes de répartition des voix peuvent déboucher sur des situations où il est plus rentable pour un parti de présenter deux listes plutôt qu'une seule, puis de réunir les élus dans une coalition une fois les résultats proclamés. C'est notamment le cas de la méthode du plus fort reste de Hare, car elle avantage les petits partis qui gagnent leur seul élu au plus fort reste.
  • Enfin, selon certains auteurs, les systèmes de répartition des sièges, tels que présentés ci-dessus, rendent le système électoral « confus et surtout peu démocratique »[15].
  • Le parti arrivé en première position n'est pas assuré de faire partie de la coalition gouvernementale.

Application au cas français

Proportionnelle départementale aux élections législatives françaises

La répartition proportionnelle fut utilisée pour les législatives françaises à la Libération et au début de la Quatrième République avec, dans les années suivantes, des corrections par la loi des apparentements. Les circonscriptions étaient départementales. En 1958, Charles de Gaulle fit rétablir le scrutin uninominal majoritaire à deux tours, en vigueur sous la Troisième République.

En 1985, le Parti socialiste, conformément à un de ses engagements électoraux de 1981 (110 propositions pour la France), refit voter, pour les élections législatives de , à la proportionnelle départementale : une répartition rigoureusement proportionnelle attribue à chaque département, à chaque parti, un nombre fractionnaire de députés, mais elle exclut les toutes petites formations pour maintenir une logique majoritaire et d'éviter un trop grand fractionnement de la vie politique. A ce titre on ne peut parler de proportionnelle intégrale qui implique un scrutin national comme aux élections européennes. Plusieurs observateurs ont analysé que ce changement voulu par François Mitterrand favorisa (« institutionnalisa » selon Edwy Plenel) le Front national dans les années 1980, afin de contrer le RPR et d'empêcher ainsi la défaite de la gauche aux élections de 1986. Ce calcul est même assumé, y compris par le PS, le chef de l'État ayant déclaré préférer quelques députés FN au retour de la droite[16],[17],[18]. L'objectif n'est pas atteint, la droite revenant au pouvoir amenant à la première cohabitation. Le Gouvernement Jacques Chirac (2) abroge alors la proportionnelle par le mécanisme de l'article 49 alinéa 3 de la Constitution[19] dès 1987. Pourtant à bien lire le dossier du fait de son caractére départemental et donc partiel avec 10 % des voix le FN ne put faire élire qu'une trentaine de députés sur 577 sièges ; au lieu de 58 sur la base du scrutin proportionnel intégral des élections européennes.

Proportionnelle aux élections municipales

Le président François Mitterrand et le gouvernement de Pierre Mauroy s'engagèrent aussi dans la réforme, désormais passée dans les mœurs, du scrutin ultra-majoritaire des élections municipales. Avant 1981, toutes les listes obtenant au premier ou au second tour cinquante pour cent de la totalité plus une voix emportaient la totalité des sièges. À partir de , l'introduction législative de l'année précédente d'une dose limitée de proportionnelle permet aux listes minoritaires d'obtenir des sièges.

Proportionnelle aux élections sénatoriales

En 2012, la Commission sur la rénovation et la déontologie de la vie publique présidée par Lionel Jospin propose l'introduction d'une dose de proportionnelle à l'élection du Sénat. La mesure est adoptée en 2013 pour les circonscriptions élisant plus de trois sénateurs[20].

Notes et références

  1. Voir RP à scrutin de liste dans le projet Administration et Coût des Élections (ACE).
  2. Opuscule de 1846 De la sincérité du gouvernement représentatif ou Exposition de l'élection véridique. Lettre adressée à MM. les membres du grand conseil constituant l’État de Genève reprenant des articles parus dans La Phalange en décembre 1841 (Olivier Ihl, «Sur les origines de la revendication proportionnelle», Revue d'histoire des idées politiques, no 38, 2013, p. 376).
  3. Où il est également possible de voter pour la liste, sans donner de préférence à un candidat, ce qui n'existe pas aux Pays-Bas par exemple.
  4. sources en italien : élections administratives et européennes et élections nationales.
  5. Giampiero Buonomo, Quell'illusione ottica del proporzionale corretto.
  6. Pierre-Yves Lambert, Polémique sur le "stemblok ethnique" et la réforme du mode de scrutin régional bruxellois, Suffrage Universel, décembre 2001.
  7. Jérôme Cottanceau, Le choix du meilleur urinoir : Et 19 autres problèmes amusants qui prouvent que les maths servent à quelque chose !, Belin, coll. « Science à plumes », , 216 p. (ISBN 978-2-7011-9766-1), chap. 16 (« À quoi servent les maths... À assoir les bonnes personnes sur les sièges de conseillers régionaux ? »)
  8. Loi fédérale sur les droits politiques.
  9. Inter-Parliamentary Union.
  10. Thomas Messias, « Les municipales, une élection pour profs de maths », sur Slate, (consulté le ).
  11. Jean-Louis Boursin, Le Paradoxe du Vote, Odile Jacob, , 226 p. (lire en ligne), p. 202.
  12. « Site legifrance.gouv.fr ».
  13. « autre source ».
  14. Quelques considérations théoriques sur la représentation proportionnelle, J-M-A Paroutaud, Revue française de science politique, Année 1963, Volume 13.
  15. Groupe Coudenberg, Au nom de la démocratie, Zellik, Roularta Books, (ISBN 9072411951), p. 17.
  16. William Karel, François Mitterrand : que reste-t-il de nos amours ?, 2015, film documentaire de 90 minutes.
  17. Franz-Olivier Giesbert, La Fin d'une époque, Fayard, coll. « Documents, témoignages », , 308 p. (ISBN 978-2213032023).
  18. Jim Jarrassé, « En 1986, la proportionnelle avait partiellement profité au FN », sur lefigaro.fr, (consulté le ).
  19. Jim Jarrassé, « En 1986, d'après le Figaro la proportionnelle avait profité au FN », Le Figaro, (ISSN 0182-5852, lire en ligne, consulté le )
  20. Loi no 2013-702 du 2 août 2013 relative à l'élection des sénateurs, sur Légifrance

Voir aussi

Pour augmenter ou diminuer la proportionnalité, de nombreux systèmes existent mélangeant la proportionnelle avec l'uninominal : les systèmes mixtes.

D'autres systèmes de vote, n'utilisant pas le système de liste permettent une représentation proportionnelle :

L'indice de Gallagher est utilisé pour mesurer la disproportionnalité des résultats d'une élection.

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