Référendum constitutionnel cubain de 2019

Un référendum constitutionnel se tient à Cuba le [1]. Les citoyens sont appelés à se prononcer sur l'adoption d'une nouvelle Constitution, qu'ils approuvent avec près de 87 % de votes favorables.

Référendum constitutionnel cubain de 2019
Corps électoral et résultats
Inscrits 9 298 277
Votants 7 848 343
84,41%
Ratifiez-vous la nouvelle Constitution de la République ?
Pour
86,85%
Blancs
2,53%
Nuls
1,62%
Contre
9,00%

Contexte

La précédente constitution de 1976 a été adoptée avec presque 98 % des voix[2].

Après la mort de Fidel Castro en 2016, les élections législatives de mars 2018 (effectuées dans le cadre du parti unique) aboutissent à l'élection de Miguel Díaz-Canel à la tête de l'État et du gouvernement. Dans le même temps, la libéralisation très partielle de l'économie socialiste du pays se poursuit.

Proposition de Constitution

La Constitution de Cuba date de 1976. Elle entérine la Révolution cubaine en posant le cadre d'une économie planifiée et en confirmant la responsabilité de l'État de pourvoir à tous les Cubains l'éducation et les soins médicaux.

Cette première version est approuvée par le Parlement en , reconnaît le rôle de l'économie de marché et les « formes de propriétés comme la coopérative, la propriété mixte et la propriété privée » (art. 21), tout en réaffirmant l'importance de la planification économique et des entreprises publiques. Il interdit toute discrimination fondée sur le sexe, les origines ethniques et le handicap, et définit le mariage comme « l'union consensuelle de deux personnes, quel que soit leur sexe », permettant ainsi le mariage homosexuel. Sur le plan des institutions politiques, il préserve le rôle dominant du Parti communiste de Cuba, mais fonde un poste de président de la République et un poste distinct de Premier ministre, alors que depuis 1976 la direction de l'État et du gouvernement est exercée par le président du Conseil d'État. Un candidat à la présidence de la République ne devra pas être âgé de plus de 60 ans, et ne pourra exercer que deux mandats consécutifs[1],[3],[4],[5]. Enfin, si ce projet de constitution réaffirme le caractère socialiste de l'État, il supprime la notion d'« objectif suprême [...] de l’avancée vers la société communiste », inscrite dans la Constitution de 1976[6]. Une société communiste étant, dans la théorie marxiste, une société sans État.

À l'issue de la consultation populaire, le texte définitif est rédigé par une commission parlementaire de trente-trois députés, présidée par Raúl Castro en sa qualité de premier secrétaire du comité central du Parti communiste cubain [2]. Est alors retirée du projet l'élection du président de la République au suffrage universel direct, bien que la limite de deux mandats présidentiels consécutifs de cinq ans soit préservée. Et face au « rejet d’une partie de la population et des Églises catholique et évangéliques », le projet de Constitution ne légalise finalement pas le mariage homosexuel. Le gouvernement prévoit plutôt de le légaliser par un amendement ultérieur au code de la famille, qui serait soumis à un référendum séparé[7].

Cette proposition de Constitution inclut le droit à l’habeas corpus, le droit à un avocat pour toute personne dès son arrestation, la présomption d'innocence, et le droit de porter plainte contre l'État pour dommages et intérêts et pour négligence[8].

Campagne

Déroulement

Du au , les Cubains sont invités à débattre du projet de Constitution, « dans les entreprises, les écoles, les universités et les quartiers ». Le gouvernement invite explicitement les Cubains installés à l'étranger, dont les exilés, à participer aux débats  « une première depuis la révolution de 1959 ». Le président Miguel Díaz-Canel assure que « chaque Cubain pourra exprimer librement ses opinions » durant ces discussions. Les débats pourront aboutir à des amendements marginaux au projet de Constitution, qui sera ensuite soumis à l'approbation des citoyens par référendum le [1]. Ainsi des demandes comme la démocratisation du système politique sont refusées par les autorités cubaines [9].

En septembre, Miguel Díaz-Canel se dit favorable à titre personnel à la légalisation du mariage homosexuel, tout en précisant que la décision en reviendra à la population. L'Église catholique à Cuba, pour sa part, s'oppose « fortement » à cette légalisation[10]. L'archevêque de Santiago de Cuba, Dionisio Garcia, estime ainsi publiquement que le mariage homosexuel est contraire à la culture cubaine, et contre-nature. Il le décrit comme une forme de « colonialisme idéologique » et d'« impérialisme culturel » voulu par les « lobbys » des pays riches[11]. Cette opposition des églises amène le gouvernement à différer cette légalisation en la retirant du projet de Constitution, pour la mettre en œuvre via un amendement ultérieur du code de la famille[7].

À la clôture de la phase de consultation en novembre, les autorités indiquent que « 7,4 millions de Cubains  sur 11 millions d’habitants  ont participé à 110 000 débats, organisés par quartier, centre de travail ou encore université »[6].

Au cours des mois qui suivent, les espaces publics du pays sont dédiés à la campagne du gouvernement pour le « oui ». Celle-ci est diffusée également à la télévision et sur les réseaux sociaux [1].

Opposition

L'opposition appelle à voter non ; elle n'a pas accès aux espaces publics, mais est active sur les réseaux sociaux, auxquels les Cubains ont accès grâce notamment au déploiement de la 3G dans le pays en [1]. Toutefois elle indique que les sites Internet d’opposition aux autorités communistes étaient inaccessibles les derniers jours de la campagne. Par ailleurs il n’était pas autorisé une autorité électorale indépendante et des observateurs internationaux pour garantir la transparence du vote [2].

Conditions

En accord avec l'article 141 de la constitution de 1976, celle-ci ne peut être modifiée que par un vote des deux tiers des membres de l'Assemblée Nationale, suivi d'un référendum pour lequel est requis un quorum de 50 % des électeurs inscrits sur les listes électorales en faveur de la proposition[12].

Question et résultat

La question posée est : « Ratifiez-vous la nouvelle Constitution de la République ? »[1] (en espagnol : « ¿ Ratifica usted la nueva Constitución de la República ? »).

En raison de la comptabilisation du vote blanc ou nul à Cuba[réf. nécessaire], les autorités indiquent que la Constitution est approuvée par 86,85 % des votants, ce qui correspond à 90,61 % des votes ayant exprimé un oui ou un non.

Par ailleurs, le total de votes favorables totalise 73,30 % des inscrits, soit bien au-delà du quorum de 50 %, ce qui permet de valider le changement de constitution.

Référendum cubain de 2019[13]
Choix Votes %
Votes pour 6 816 169 86,85
Votes blancs 198 674 2,53
Votes nuls 127 100 1,62
Votes contre 706 400 9,00
Total 7 848 343 100
Abstention 1 449 934 15,59
Inscrits/Participation 9 298 277 84,41

Répartition des suffrages exprimés :

Votes
Pour
(86,85 %)
Majorité absolue

Suites

L'article transitoire no 11 de la nouvelle constitution précise qu'un nouveau processus de consultation populaire suivi d'un référendum sera organisé dans les deux ans sur la question de la définition du mariage[14].

La loi électorale, votée le , prévoit que le Conseil d'État soit dirigé par le président de l'Assemblée nationale, alors que ces deux institutions voient leur nombre de membres baisser. Par ailleurs, le président de la République et son vice-président seront élus en octobre 2019 au suffrage indirect, avant que le Premier ministre ne soit désigné en décembre[15].

Références

  1. « Cuba ouvre le débat sur sa nouvelle Constitution », Le Monde, (lire en ligne, consulté le ).
  2. Le Monde avec AFP Cuba approuve massivement sa nouvelle Constitution Le Monde, 26 février 2019
  3. « Cuba: les Cubains appelés à valider leur nouvelle Constitution en février 2019 », RFI, (lire en ligne, consulté le ).
  4. (en) « Cuba sets out new constitutional reforms », BBC News, (lire en ligne, consulté le ).
  5. (en) Ed Augustin, « Cuba's new constitution paves way for same-sex marriage », The Guardian, (ISSN 0261-3077, lire en ligne, consulté le ).
  6. « Après trois mois de débats, Cuba vers une nouvelle Constitution », Le Monde, (lire en ligne, consulté le ).
  7. « Les Cubains se prononcent sur la nouvelle Constitution », Le Monde, (lire en ligne, consulté le ).
  8. (en) « Explainer: What is old and new in Cuba's proposed constitution », Reuters, (lire en ligne, consulté le ).
  9. Cuba approuve massivement sa nouvelle Constitution Le Monde, 26 février 2019
  10. « Cuba : le président Diaz-Canel se dit favorable au mariage homosexuel », Le Monde, (lire en ligne, consulté le ).
  11. « Archevêque cubain : le mariage gay c'est du «colonialisme idéologique» », Le Figaro, (lire en ligne, consulté le ).
  12. « Constitution de 1976 » [PDF], sur univ-ag.fr (consulté le )
  13. (es) « Cuba dijo Sí a la nueva Constitución (+Video) (+ Carta Magna) », Granma, (lire en ligne, consulté le ).
  14. (es) « Constitución de la República que va a referendo », sur eleccionesencuba.cu, (consulté le )
  15. « Cuba réforme son système de gouvernement, sans toucher à l'essentiel », sur Le Point, (consulté le )
  • Portail de Cuba
  • Portail de la politique
  • Portail des années 2010
Cet article est issu de Wikipedia. Le texte est sous licence Creative Commons - Attribution - Partage dans les Mêmes. Des conditions supplémentaires peuvent s'appliquer aux fichiers multimédias.