Rééducation périnéale

La rééducation périnéale consiste en la rééducation des muscles du périnée ou du plancher pelvien. Elle peut être pratiquée par les sage-femmes ainsi que par certains masseurs-kinésithérapeutes spécialisés. Elle utilise les divers moyens dont elle dispose afin de réduire voire supprimer les séquelles et troubles liées à un traumatisme (accouchement, prostatectomie,…) ou au vieillissement.

Le périnée

Le périnée est un vaste ensemble musculaire losangique situé entre le pubis en avant, et le coccyx en arrière. On le divise classiquement en deux triangles : un triangle postérieur, à destinée digestive, commun aux deux sexes ; et un triangle antérieur à destinée uro-génitale, qui diffère selon le sexe[1].

Périnée

En post-partum

Conséquences de l’accouchement

Au cours de l’accouchement, le périnée des femmes a tendance à être fortement étiré par le passage du fœtus. Les tissus humains étant physiologiquement extensibles, il est donc normal que les muscles et ligaments constituant la région périnéale reviennent à leur forme initiale après quelques semaines, sans causer de problèmes ultérieurs.

Cependant, il arrive parfois que ces tissus soient trop distendus. Les capacités toniques des muscles périnéaux sont alors altérées, et ceux-ci ne peuvent plus assurer leurs fonctions de soutien des viscères et de continence anale et urinaire.

L’accouchement peut ainsi être à l’origine d’un certain nombre de troubles en post-partum, d’autant plus chez les primipares. L’importante baisse du tonus musculaire qui en résulte conduit le plus fréquemment à l’incontinence urinaire, qui touche 15 à 40 % des femmes parturientes[2]. L’incontinence fécale, elle, est beaucoup plus rare, et ne toucherait que 1 à 5 % d’entre elles[2]. Il est parfois possible d'observer des descentes d'organes (prolapsus) ou des dysfonctionnements sexuels dans certains cas, même si cela demeure tout de même assez rare.

Il existe 2 principaux types d’incontinence urinaire : (cf. incontinence urinaire)

  • l’incontinence urinaire d’effort ou de stress (Stress Urinary Incontinence) : Les fuites urinaires apparaissent au cours de l'utilisation des muscles profonds lors de la toux, du rire ou de l'éternuement[3].
  • l’incontinence urinaire par urgences mictionnelles. Dans ce cas, l'envie pressante d'uriner ne peut plus être contenue par la contraction des muscles du périnée du fait de leur distension. La personne ressent la nécessité absolue d'uriner.

Par conséquent, il est conseillé aux femmes d’effectuer une rééducation du périnée en postpartum, dans le but de traiter les problèmes existants (traitement curatif) ou d'anticiper d'éventuelles complications (traitement préventif).

Lutte contre la douleur

La douleur est évaluée par des échelles. L’interrogatoire des patientes permet de préciser le lieu, la fréquence, les facteurs déclenchants, le type et l’intensité de la douleur périnéale, pelvienne, rachidienne et abdominale, et d’estimer les effets de celle-ci sur la vie quotidienne et sexuelle des femmes[2].

Selon une étude récente (2016), la rééducation périnéale par massages ne semble pas donner de résultats très significatifs en termes de diminution de la prévalence des douleurs périnéales et dyspareunies à 15 jours ni à 12 mois après l'accouchement[4], pas plus que le massage digital périnéal au cours du 3ème trimestre de grossesse[4] (excepté chez des femmes ayant déjà accouché « par voie basse »[4].
L’utilisation des agents physiques naturels n’a, à ce jour, donné aucune preuve d’efficacité de lutte contre la douleur. Seule la cryothérapie[5] (utilisation du froid) semble être efficace pour lutter contre les douleurs périnéales. Mais certaines patientes la tolèrent mal.

Récupération du tonus musculaire

La récupération du tonus musculaire est nécessaire à la continence, principal problème vécu par les femmes après leur accouchement.

Techniques de rééducation

Il apparait presque impossible de proposer un protocole unique de rééducation, du fait de la diversité des techniques employées. Cependant, les études tendent à démontrer qu’il serait préférable d’utiliser différentes techniques combinées, plutôt que de ne se fixer que sur l'utilisation d'une seule d’entre elles[2]. La rééducation ne débute classiquement que 6 à 8 semaines après l’accouchement. Le nombre de séances demeure là encore très variable[2],[6]: certaines femmes ne nécessiteront que quelques séances afin de recouvrer leurs capacités, quand d'autres auront parfois besoin de 20 séances pour parvenir à un résultat similaire.

Exercices de Kegel ou du plancher pelvien

Les exercices de Kegel sont destinés aux renforcement du tonus et de la puissance des muscles du plancher pelvien. Ils consistent en une alternance de contraction et décontraction musculaire. Dans le cadre de la rééducation postpartum, il convient que les trois premières séances soient supervisées par un professionnel de santé habilité à pratiquer cette rééducation. Par la suite, il est vivement conseillé aux patientes d'effectuer ces exercices deux à trois fois par jour de façon autonome, à leur domicile[2],[7],[8],[9]

Biofeedback instrumental

Le Biofeedback instrumental consiste à enregistrer le travail des muscles périnéaux grâce à des électrodes de surfaces ou des sondes endocavitaires. Les courbes qui en résultent sont alors directement observées par la patiente, laquelle peut apprécier la qualité de ses contractions périnéale. Cette technique, qui fait appel à l'électromyographie de surface, a pour but d'aider la patiente à prendre conscience de ses muscles afin qu'elle réussisse à les contracter de manière volontaire pour mieux les renforcer[2].

Cônes vaginaux

Les cônes vaginaux sont des dispositifs coniques dont l'utilisation est proche des sphères vaginales. Introduits dans le vagin, ils provoquent une contraction réflexe des muscles du plancher pelvien afin d'êtres retenus. Ils sont souvent associés avec des techniques de biofeedback.

Sphères vaginales

Sphères vaginales
Placement des sphères

Les sphères vaginales, également appelées boules de geisha, sont des sphères d'un diamètre de 2 à 3,5 cm, introduites dans le vagin dans un but de rééducation. La femme, pour empêcher la boule de tomber, est obligé de contracter légèrement ses muscles périnéaux. Bien tolérées, elles n’augmentent pas significativement la récupération mais ont tendance à l'accélérer[10].

Il existe également des boules vaginales vibrantes, dont l'efficacité n'a pas encore été clairement définie[11].

Le travail manuel intra-vaginal

Le travail manuel intra-vaginal permet de faire travailler le muscle de deux façons différentes : soit en concentrique (le muscle se raccourcit), soit en excentrique (on étire passivement le muscle et il se contracte pour freiner le mouvement). Elle permet aussi d’accentuer le travail sur des faisceaux musculaires bien précis au lieu de contracter uniformément le muscle[2].

Sondes vaginales d'électrostimulation

Les sondes vaginales d'électrostimulation ont pour but de contracter les muscles du périnée par voie réflexe. Le kinésithérapeute ou la sage-femme qui l'utilise envoie une légère décharge électrique sur le muscle concerné qui se contracte en retour. Cette méthode, bien que beaucoup utilisée par le passé, est aujourd’hui en retrait car sujette à certaines contre-indications majeures.

En effet, au cours de l’accouchement il est très fréquent qu’il survienne des lésions périphériques sur les nerfs contrôlant les muscles périnéaux. Cependant, le corps humain est capable de lutter contre ce problème : on assiste alors à une repousse nerveuse. Or, si on procède à de l' électrostimulation, il a été montré que le courant supprime ce processus de ré-innervation, se montrant ainsi bien plus nuisible à la patiente que bénéfique. C'est pourquoi il est préférable de ne pas utiliser cette technique dans le cadre de la rééducation périnéale postpartum[2].

Aspect préventif

La prévention pourrait améliorer radicalement les suites d’accouchement, en réduisant drastiquement les phénomènes d’incontinence et de douleur à court-terme. Elle consiste principalement en l'information rigoureuse de la patiente et en la réalisation d'exercices périnéaux pré-nataux similaires aux exercices de Kegel[2].

En cas d’ablation de la prostate

La rééducation périnéale ne concerne pas uniquement les femmes. La prostatectomie est une opération chirurgicale fréquente consistant en l’ablation de la prostate, le plus souvent dans le cas d’un cancer[12]. Le cancer de la prostate est une affection fréquente qui touche chaque année 40 000 nouvelles personnes au Royaume-Uni[13]. Si la prostatectomie demeure l'un des moyens de traitement les plus efficaces, les hommes la subissant expérimentent très souvent des troubles de la continence urinaire, parfois associée à des dysfonctionnements érectiles, d’où la nécessité de la rééducation[13]. C'est un aspect moins connu de la rééducation périnéale, puisqu'elle se limite souvent à la rééducation postpartum chez la femme, dans l'imaginaire collectif.

Notes et références

  1. Michel Dufour, Anatomie de l'appareil locomoteur, Tome 3, tête et tronc, Elsevier Masson, page 314
  2. « Rééducation dans le cadre du post-partum », sur Haute Autorité de Santé
  3. Ireneusz Jurczak et Maja Chrzęszczyk, « [The impact assessment of pelvic floor exercises to reduce symptoms and quality of life of women with stress urinary incontinence] », Polski Merkuriusz Lekarski: Organ Polskiego Towarzystwa Lekarskiego, vol. 40, no 237, , p. 168–172 (ISSN 1426-9686, PMID 27088198, lire en ligne, consulté le )
  4. Battut A & Nizard J (2016). Impact de la rééducation périnéale sur la prévention des douleurs et des dyspareunies en post-partum. Progrès en urologie, 26(4), 237-244.
  5. Caroline de Souza Bosco Paiva, Sonia Maria Junqueira Vasconcellos de Oliveira, Adriana Amorim Francisco et Renata Luana da Silva, « Length of perineal pain relief after ice pack application: A quasi-experimental study », Women and Birth: Journal of the Australian College of Midwives, vol. 29, no 2, , p. 117–122 (ISSN 1878-1799, PMID 26395154, DOI 10.1016/j.wombi.2015.09.002, lire en ligne, consulté le )
  6. X. Deffieux, S. Vieillefosse, S. Billecocq et A. Battut, « [Postpartum pelvic floor muscle training and abdominal rehabilitation: Guidelines] », Journal De Gynecologie, Obstetrique Et Biologie De La Reproduction, vol. 44, no 10, , p. 1141–1146 (ISSN 1773-0430, PMID 26530172, DOI 10.1016/j.jgyn.2015.09.023, lire en ligne, consulté le )
  7. S. Cavkaytar, M. K. Kokanali, H. O. Topcu et O. S. Aksakal, « Effect of home-based Kegel exercises on quality of life in women with stress and mixed urinary incontinence », Journal of Obstetrics and Gynaecology: The Journal of the Institute of Obstetrics and Gynaecology, vol. 35, no 4, , p. 407–410 (ISSN 1364-6893, PMID 25264854, DOI 10.3109/01443615.2014.960831, lire en ligne, consulté le )
  8. Louise-Helene Gagnon, Jodi Boucher et Magali Robert, « Impact of pelvic floor muscle training in the postpartum period », International Urogynecology Journal, vol. 27, no 2, , p. 255–260 (ISSN 1433-3023, PMID 26282094, DOI 10.1007/s00192-015-2822-6, lire en ligne, consulté le )
  9. Daria Chmielewska, Magdalena Stania, Agnieszka Smykla et Krystyna Kwaśna, « Bioelectrical activity of the pelvic floor muscles after 6-week biofeedback training in nulliparous continent women », Acta of Bioengineering and Biomechanics, vol. 18, no 3, , p. 105–113 (ISSN 1509-409X, PMID 27840432, lire en ligne, consulté le )
  10. (en) Oriol Porta-Roda, Jesús Vara-Paniagua, Miguel A. Díaz-López et Pilar Sobrado-Lozano, « Effect of vaginal spheres and pelvic floor muscle training in women with urinary incontinence: A randomized, controlled trial », Neurourology and Urodynamics, vol. 34, no 6, , p. 533–538 (ISSN 1520-6777, DOI 10.1002/nau.22640, lire en ligne, consulté le )
  11. (en) Claudia Oblasser, Christine McCourt, Engelbert Hanzal et Janice Christie, « Vibrating vaginal balls to improve pelvic floor muscle performance in women after childbirth: a protocol for a randomised controlled feasibility trial », Journal of Andvanced Nursing, vol. 72, (lire en ligne).
  12. (en) « Prostate Cancer », sur Physiopedia (consulté le )
  13. (en) « Prostate Cancer », sur NHS, (consulté le ).
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