Revue Projet

La Revue Projet est une parution bimestrielle. C’est la revue du Ceras (Centre de Recherche et d’Action Sociales) issu de l’Action Populaire, créé en 1903 par la Compagnie de Jésus et engagé depuis cent ans dans la réflexion sur la justice sociale.

La revue, dans la tradition universaliste de la pensée sociale de l’Église catholique, croise diverses approches sur des problèmes d’actualité et fait ressortir les enjeux en matière de justice sociale dans les domaines économique, social et politique.

Elle s'attache à décrypter les enjeux politiques et sociaux d'une société complexe pour soutenir ceux qui agissent et ouvrir les voies d'un monde plus humain. Elle représente un lieu de débat où se complètent et se confrontent chercheurs et acteurs, experts et profanes, chrétiens et non chrétiens.

Historique de la revue Projet

La Revue de l’Action Populaire

L’Action populaire est fondée en 1903 par le père Henri-Joseph Leroy alors en exil en Belgique. Elle s’affirme comme un des pôles de réflexion du catholicisme social, qui comprend à cette époque différents mouvements tels que le Sillon, la Quinzaine, l’Acjf, …
En 1904, l’Action Populaire s’installe à Reims avec des objectifs larges. Son fondateur propose d’ « aimer le monde » (sous-entendu, moderne) à la suite de l’encyclique Rerum Novarum () qui inaugure la doctrine sociale de l’Église catholique mais également de l’encyclique Au milieu des sollicitudes () qui invite les catholiques de France à rallier la République.
L’élaboration et la promotion d’une doctrine sociale de l’Église catholique se concrétise à partir de 1905 par la publication des « Brochures jaunes » sous la direction du père Gustave Desbuquois. Paraissant trois fois par mois, ces brochures visent à améliorer le niveau d’information sur le rôle des institutions sociales et touchent une large base de militants mais aussi des patrons chrétiens.

Des brochures à la revue

C’est le que paraît le premier numéro de la Revue de l’Action Populaire en remplacement des trois brochures mensuelles.
En 1911, la Revue de l’Action Populaire devient bimensuelle.
En 1914, elle compte déjà 8000 abonnés, mais sa parution est interrompue pendant la guerre.
En 1920, l’intitulé de la revue est modifié en Dossiers de l’Action Populaire, marquant l’intention d’élaborer des synthèses plus expertes.

De l’entre-deux-guerres à la période vichyssoise

Les Dossiers de l’Action Populaire connaissent un succès croissant durant la période de l’entre-deux-guerres, encourageant leur expansion. Une revue bimensuelle plus militante voit le jour en 1933 intitulée les Cahiers d’action religieuse et sociale - ancêtre de Croire aujourd’hui -. C’est l’occasion d’une ouverture à l’international et d’une collaboration croissante avec les institutions et mouvements ecclésiaux.
Cette période est également marquée par la création de branches spécialisées regroupant des jeunes de l’action catholique telles que la Jeunesse ouvrière chrétienne, la Jeunesse étudiante chrétienne, la Jeunesse agricole chrétienne où sont engagés beaucoup de jésuites de l’Action Populaire.
De 1939 à 1945, le père Desbuquois, qui dirigeait l’Action Populaire depuis 1905, recommande la loyauté à l’égard du maréchal Pétain alors que d’autres membres de l’équipe sont proches des Cahiers du Témoignage chrétien qui soutiennent la Résistance. Critiqué, malade et vieillissant, le père Desbuquois cèdera sa place en 1946 à Jean Villain.
En 1945, la revue s’intitule Travaux de l’Action Populaire avant de reprendre en son premier titre de 1908, la Revue de l’Action Populaire.

Les années d’après-guerre

À partir de 1946, Jean Villain choisit le terrain de l’action militante, notamment par la création de la mission ouvrière jésuite. Le lectorat de la revue est en constante diminution dans les années qui suivent la Seconde Guerre mondiale.
La revue reprend de la vigueur au cours des années 1950, sans pour autant retrouver le nombre d’abonnés de 1939. Les questions du marxisme et de l’URSS sont abordées. Projet se préoccupe également des colonies françaises africaines, le Ceras adoptant une position en faveur de la décolonisation.

De la Revue de l’Action Populaire à Projet

En 1966, sous l’impulsion du père Jean-Yves Calvez, provincial de France, qui en a confié la responsabilité au père Henri Perroy, la Revue de l’Action Populaire devient Projet. Ce nouvel intitulé est accompagné de trois sous-titres : « civilisation – travail - économie ».

L’essor des années 1970

L’arrivée du père Philippe Laurent à la direction de Projet en 1968 se traduit par un essor substantiel de la revue.
Polytechnicien, aumônier international du patronat chrétien, le père Laurent dispose d’un immense réseau de relations très utile à la revue. C’est à ce moment que des jésuites plus jeunes le rejoignent, Henri Bussery – polytechnicien, économiste à l’Insee -, Henri Madelin – enseignant de sciences politiques. La collaboration se poursuit avec de nombreux chercheurs de la Fondation des sciences politiques qui donnent à Projet une réputation de très bonne vulgarisation.
À partir de 1970, la CFDT est représentée dans le comité de rédaction de la revue par Jeannette Laot, puis Pierre Rosanvallon à partir de 1974, accompagné de Marcel Gonin et Jacques Moreau, puis Albert Mercier. Le comité compte aussi un membre du quai d’Orsay, d’abord Philippe Beaulieu (pseudonyme) puis Bertrand Dufourcq.
Dans le souci de s’inscrire dans un monde sécularisé, l’ « Action Populaire » disparaît au profit du Ceras. Les 11 jésuites n’y apparaissent pas en tant que tels et rien, dans le contenu des numéros, n’apprend au lecteur néophyte qu’il s’agit d’une revue jésuite. En 1989, second retournement, la revue affiche à nouveau que l’équipe de rédaction comprend des « jésuites du Ceras » et des collaborateurs laïcs.

Les difficultés des années 1980

Le Père Laurent est remplacé par le philosophe et sociologue des religions Jean-Louis Schlegel en 1982.
La revue connaît des problèmes de diffusion. La Compagnie de Jésus décide de réunir l’administration et les rédactions de ses quatre revues parisiennes. Projet déménage et rejoint, à l’été 1984, les revues Etudes, Christus et Croire Aujourd’hui à Paris, 14 rue d’Assas. En 1985, Projet change de rédacteur en chef, Henri Bussery remplaçant Jean-Louis Schlegel. La revue devient alors bimestrielle pour réaliser quelques économies.
En 1989, Henri Bussery est remplacé par Christian Mellon. On opte pour une revue trimestrielle faisant le point sur de grands dossiers mais le format livre que cela requiert manque d’un éditeur et d’un diffuseur.

Des difficultés à l’adoption d’une nouvelle formule

De 1989 à 2003, les ventes au numéro de Projet ne sont finalement pas plus rentables que les abonnements. La revue connaît le plus fort déficit des revues jésuites. Assas-éditions, à la suite d’un accord entre la Compagnie de Jésus et les Assomptionnistes, rejoint le groupe Bayard Presse. La Société d’édition des revues (SER) est créée, à qui sont confiées la production et la gestion des revues.
Projet retrouve alors une forme plus traditionnelle, bimestrielle, avec des rubriques, … Le Conseil d’Administration (dans lequel Bayard tient les cordons) a accepté d’investir une nouvelle fois dans la revue.
En , le père Bertrand Cassaigne devient rédacteur en chef. En , le père Pierre Martinot-Lagarde lui succède.

À partir de 2003 paraît la formule actuelle de Projet avec une pagination légèrement réduite et une maquette rafraîchie pour améliorer la lisibilité. En 2005, la Compagnie ne désirant pas laisser la revue à la charge de Bayard, place Projet sous la gestion du Ceras. Le poste de rédacteur en chef est séparé de celui de directeur du Ceras (et de la revue) et Françoise Terrel-Salmon est nommée rédactrice en chef. Elle occupera le poste jusqu'à sa retraite en , date à laquelle elle est remplacée par Jean Merckaert, issu du CCFD-Terre Solidaire.

La revue aujourd’hui

Depuis 2003 Projet est une revue de 96 pages découpée en plusieurs rubriques. « Acteurs du monde » présente l’engagement partagé de personnes, groupes ou institutions portés par des convictions. L’actualité est développée et débattue dans deux articles complémentaires ou contradictoires de la « Question en débat  ». Le « Dossier » (6 ou 7 articles) approfondit une question portant sur une évolution de fond qui oriente l’avenir. Enfin, 2 chroniques et des lectures complètent chaque numéro : la « chronique économique » éclaire la complexité des situations économiques et financières.

La ligne éditoriale de Projet a évolué en fonction du contexte tout en gardant la justice sociale comme trame de fond.

L’évolution des disciplines et des sujets

Le premier numéro de la Revue de l’Action Populaire possédait un contenu pluridisciplinaire s’articulant autour d’articles sociologiques, juridiques, littéraires, accompagnés par des chroniques sur le mouvement social français et étranger ainsi qu’un bulletin de législation sociale et économique. Une rubrique « l’intermédiaire social » reproduisait des questions reçues de correspondants et la réponse documentée qui y était faite. À son commencement, la revue s’est focalisée sur la question du droit du travail avant d’élargir sa réflexion à l’entreprise.
La réflexion sur le monde agricole devient prépondérante dans l’entre-deux-guerres. Dans le contexte de guerre froide, le marxisme et l’URSS prennent une place importante tandis que la problématique coloniale est également interrogée, la revue s’engageant d’emblée en faveur de la décolonisation. Le père Delanglade – sous le pseudonyme de Jacques Sémoy - décrit dans un article de 1955, les premiers événements d’. Il y présente l’hypothèse d’une Algérie algérienne[1].
Dans les années 1960, le changement de titre – on passe en 1966 de la Revue de l’Action populaire à Projet - résonne dans le contenu, la revue utilisant de plus en plus les moyens des disciplines modernes (sociologie, science politique, ethnologie) dans un souci d’adéquation avec son temps. Il s’agit de concilier l’assise historique avec la modernisation nécessaire à la projection vers l’avenir.

Par ailleurs, Alain Lancelot (jeune chercheur qui deviendra directeur de l’IEP de Paris, puis membre du Conseil Constitutionnel) analyse l’élection présidentielle de 1965. Dès lors, la sociologie politique devient une des spécialités de Projet. Dans les années 1970, la revue laisse une part de plus en plus importante aux articles sur l’économie internationale (négociations du GATT, transferts des technologies, entreprises multinationales). Le père Laurent lui-même s’investit sur la Chine avant de reconnaître qu’il faisait fausse route en soutenant la révolution culturelle.
Les années 1980 voient un changement de centres d’intérêt accompagner le changement de génération. Les problématiques de société deviennent très présentes avec les thèmes de l’immigration, de l’exclusion et du lien social, de la communication et de l’information ainsi que de l’éthique biomédicale. Des numéros spéciaux en témoignent : « le tout-ordinateur » (1986), « le médiacosme » (1987), « l’héritage de la Révolution française » (fin 1988).

Une réflexion actualisée

Depuis 40 ans, Projet se penche sur les possibilités d’allouer les ressources de manière plus équitable. La revue lie des articles de fond avec des questions d’actualité.
Sur le plan national, Projet a investi plus récemment la question des banlieues et de l’aménagement territorial (notamment le numéro spécial 299 de , « Banlieues, cités dans la Cité »).
Sur le plan international, Projet se penche encore sur le devenir des pays émergents et les nouveaux rapports de force sur la scène internationale.

Projet devient la Revue Projet

En , Projet devient la Revue Projet. La revue devient une revue numérique : www.revue-projet.com et adopte une nouvelle maquette pour sa déclinaison papier, plus colorée, faisant place à la photographie noir et blanc. La rédaction travaille en lien avec des partenaires de la société civile.

Exemples de contenu

L’équipe de la Revue Projet

La Revue Projet est une revue publiée par le Ceras. Le comité de rédaction correspond donc à l’ensemble de l’équipe du Ceras (voir article détaillé Ceras), ainsi que plusieurs laïcs.

Le rédacteur en chef est Benoit Guillou.
Le Comité de rédaction est composé de Jean-Marc Boisselier, Matthieu Calame, Aurore Chaillou, Alain Cugno, Stéphane Duclos, François-Euvé, Gaël Giraud, Michel Griffon, Bertrand Hériard Dubreuil.
Le Comité scientifique est composé de Jawad Abdou, Damien de Blic, Sylvie Bukhari-de Pontual, Jean Caron, Max de Chanterac, Eve Chiapello, Jean-Pierre Dubois, Jean-Pierre Duport, Christophe Duval-Arnoud, Brigitte Fouilland, Vincent Gourdon, Jean-Charles Hourcade, Marie-Ève Joël, Augustin Jomier, Anousheh Karvar, Françoise Lorcerie, Jean-Paul Maréchal, Christian Mellon, Anne Muxel, Bernard Perret, Xavier Ricard Lanata, Dominique Seux, Clément Thibaud, Raphaël Vincent, Patrick Viveret, Catherine Withol de Wenden.

Notes et références

  1. article "Projet" par Françoise Terrel-Salmon dans la Revue des revues

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

Bibliographie

  • Le Père Desbuquois et l'Action Populaire (1919-1946) de Paul Droulers aux éditions ouvrières
  • Chrétiens penseurs du social, l'après-guerre (1945-1967) de Jean-Yves Calvez aux éditions du Cerf
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