Indice d’abondance des populations d’oiseaux communs

Le programme STOC ou suivi temporel des oiseaux communs, est un programme de science citoyenne de suivi des populations d'oiseaux en France. C'est une méthode de production d'indices (ou indicateurs) d'évolution annuelle de l'abondance de différentes espèces d'oiseaux communs. Ces indices (via des extrapolations) permettent de suivre les tendances en termes de dynamique des populations d'oiseaux communs sur de vastes territoires, ce qui est nécessaire aux stratégies de protection de la nature et en particulier dans le domaine de la biologie de la conservation. Le suivi temporel des oiseaux communs fait partie du programme Vigie-Nature coordonné par le Muséum national d'histoire naturelle (MNHN). D'autres programmes de suivi d'espèces ont été élaborés en s'inspirant de la méthode mise au point pour le programme STOC (par exemple, le STERF).

C'est un indicateur environnemental retenu parmi les indicateurs de développement durable par la France.

Ce suivi est généralement effectué par des réseaux locaux d'ornithologues bénévoles encadrés par des ornithologues professionnels et une autorité scientifique.

Contenu

Ce type d'indice peut prendre plusieurs formes :

  • un indicateur global (moyenne pour toutes les espèces communes suivies) ;
  • un indicateur qualifiant les variations d'abondances de groupes d'espèces caractéristiques des grands milieux (milieux urbains, forestiers, agricoles...) ;
  • un indice par espèce (peu fiable sur quelques années pour dégager une tendance, car il existe des variations naturelles significatives dues à des aléas climatiques (grands froids, sécheresses.. épidémies...).

Ces variations peuvent traduire des problèmes non locaux dans le cas des oiseaux migrateurs.

Méthodologie

L'acquisition de données se fait par écoute des oiseaux par des ornithologues (bénévoles) sur un maillage territorial (carrés tirés au sort comportant 10 points d’écoute de 5 minutes. l'opération est répétée deux fois chaque printemps (en France : 9 000 points d’écoute réalisés dans 90 départements en 2004) ;
Ce travail est complété par des captures et baguages aux mêmes dates et sur les mêmes lieux (avec par exemple 100 points avec plus de 18 000 individus capturés et relâchés en France en 2004[1]).

En Europe

Un indice agrégé est produit par le programme paneuropéen de surveillance des oiseaux communs :
En 15 ans (de 1990 à 2005), l’indice montre :

  • un recul de 21 % des espèces agricoles (pour 33 espèces suivies) ;
  • un recul de 17 % pour les espèces forestières (pour 27 espèces suivies) ;
  • un déclin général (pour 123 espèces suivies) d’environ - 10 %.

De 2000 à 2007 la situation semble s’être stabilisée ou localement améliorée, sauf en France pour les espèces forestières. Cet indice ne renseigne pas directement sur les causes du déclin, mais il montre que les milieux ruraux ont le plus souffert, peut-être en raison des pesticides et de l’intensification de l’agriculture. En forêt, la perte des habitats complexes semble être la première menace.

En France (métropolitaine)

Cet indice est fourni par l'IFEN, avec le Muséum national d'histoire naturelle à Paris via le programme STOC piloté au sein du Muséum par le Centre de Recherches par le Baguage des Populations d'Oiseaux (CRBPO).

Ce programme suit annuellement 65 espèces d’oiseaux nicheurs jugés communs, selon une méthode codifiée :

  1. Relevés de présence/absence sur une grille de points d’écoute (le STOC-EPS, Échantillonnages Ponctuels Simples)[2] ;
  2. Mesure de variations de deux paramètres démographiques dits de « fitness » ; survie des adultes et succès de la reproduction ; STOC-Capture. La technique capture/recapture de passereaux nicheurs est utilisée depuis 1989, relancée en 2000 pour le STOC-capture et en 2001 pour le STOC-EPS (plan d’échantillonnage constitué via un tirage aléatoire).

Pour chaque espèce, est calculé un indice de variation d’abondance (variation annuelle du nombre d’individus) sur la période considérée (1989-2007), pour l’ensemble des sites suivis en France (métropolitaine).

Ce type d'indice peut agréger des sous-indices par groupe ou par espèces, mais est généralement présenté pour qualifier les variations d'abondances de groupes d'espèces caractéristiques de grands milieux (urbains, forestiers, agricoles...) Chacun de ces indices est obtenu en faisant la moyenne géométrique des indices d'espèces d’un même groupe (milieux urbains, forestiers, agricoles...)

Résultats (tendance en France)

Sur 18 ans (de 1989 à 2007), les oiseaux communs ont encore régressé en France métropolitaine (-18 %) ;
plus précisément :

  • les espèces spécialisées reculent le plus (surtout celles qui sont typiques des milieux agricoles, qui ont régressé de -28 %) au profit d’espèces ubiquistes et généralistes (augmentation de +10 %). Les mêmes tendances sont observées dans les pays voisins ce qui évoque des causes globales (dérèglements climatiques, pollution généralisée de l'environnement par les pesticides notamment, banalisation et fragmentation des milieux, forestiers notamment)[1].
  • les espèces régressent plus vite au nord de la Loire, et surtout dans le nord de la France (-20 % en 14 ans ; de 1989 à 2003 pour 95 espèces d'oiseaux suivis).

De 1989 à 2008, la France a perdu près de 10 % de ses oiseaux nicheurs [3]. Les espèces vivant dans les milieux agricoles, les bâtiments (granges et clochers notamment) sont les plus touchées avec une chute de 20 % des effectifs. Les espèces jugées indésirables ont aussi fortement régressé en milieu rural. Les oiseaux forestiers nicheurs régressent moins vite, mais ont quand même perdu 11 % de leurs populations. Le nombre d'individus d'espèces généralistes a continué à croître (+20 % en 20 ans) ; par exemple, la Bergeronnette printanière (Motacilla flava) adaptée aux prés et aux terrains vagues semble s'adapter aux nouveaux milieux agricoles (+96 % en 20 ans) alors que la Linotte mélodieuse (Carduelis cannabina), l'Alouette des champs ou la Perdrix grise ont vu leurs populations décroître de 71 % de 1989 à 2008. Les espèces en fort recul (déjà classées comme vulnérables sur la liste rouge de l'UICN) comprennent aussi :

Dans d'autres régions du monde, la régression plus rapide des oiseaux communs dans les milieux d'agriculture intensive laisse penser que cette dernière est une des causes du déclin général[1].

1/3 environ de 32 espèces étudiées semblent nettement souffrir des printemps inhabituellement chauds (alors que les autres 2/3 en bénéficient avec un succès de reproduction amélioré). Les espèces qui souffrent des printemps plus chaud sont aussi les espèces qui régressent le plus de manière générale ; les espèces ubiquistes et généralistes au contraire déclinent moins ou même augmentent leurs densités et/ou aire de répartition, au moins localement[1].

En 2017, les résultats montrent un déclin « catastrophique », avec une perte d'un tiers des effectifs des oiseaux de campagne depuis 2001, 55 % depuis 1989. Ce déclin observé est lié principalement à l'intensification des pratiques agricoles responsables de la raréfaction de nombreux insectes. Elle est plus particulièrement marqué depuis 2008-2009, « une période qui correspond, entre autres, à la fin des jachères imposées par la politique agricole commune [européenne], à la flambée des cours du blé, à la reprise du suramendement au nitrate permettant d’avoir du blé surprotéiné et à la généralisation des néonicotinoïdes »[4].

En Amérique du Nord

Les mêmes tendances qu'en Europe sont observées.

L'Inventaire Nord-Américain des Oiseaux Nicheurs (Sauer et al. 2005) note par exemple qu'au Québec, de 1980 à 2005, la population de bruant des prés a décliné en moyenne de 2,5 % par an et celle de bruants chanteurs de 1 % par an.

Notes et références

  1. Note en ligne du Muséum sur le programme STOC, 2004
  2. « Suivi temporel des oiseaux communes - détails du protocole », sur vigienature.fr (consulté le )
  3. Conférence de presse du 9 juin 2009, par le Muséum national d'histoire naturelle (MNHN) sur le bilan de 20 ans de programme STOC
  4. « Le printemps 2018 s'annonce silencieux dans les campagnes françaises », sur mnhn.fr, .

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

Bibliographie

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