Procrastination

La procrastination (du latin pro « en avant » et crastinus « du lendemain ») est une tendance à remettre systématiquement au lendemain[alpha 1] des actions (qu’elles soient limitées à un domaine précis de la vie quotidienne ou non). Le « retardataire chronique », appelé procrastinateur, n’arrive pas à se « mettre au travail », surtout lorsque cela ne lui procure pas de satisfaction immédiate.

Cet article concerne la notion de psychologie. Pour le livre portant ce titre, voir Procrastination (roman).

Gilbert Stuart remit durant quinze ans l'achèvement de ce portrait d'Abigail Adams.

Profil et comportements types

Être un « retardataire chronique » ne signifie pas ne rien faire. Au contraire, le sujet peut être pris d’une véritable frénésie d’activités (aller faire les courses, entamer un grand ménage de printemps, repeindre les volets, prendre des nouvelles de la grand-mère, faire de la maintenance informatique, etc.), tant que celles-ci ne possèdent aucun rapport avec la tâche problématique[2].

Descriptions et raisons probables

Les causes psychologiques de procrastination sont toujours sujettes aux débats. Par étude clinique, il y aurait une connexion avec l'anxiété et une faible estime de soi. D'un autre côté, par étude méta-analytique, l'anxiété et le perfectionnisme n'ont aucune connexion ou, au mieux, une connexion extrêmement faible avec la procrastination. À la place, la procrastination est fortement connectée avec un manque de confiance en soi (par exemple l'impuissance apprise), l'ennui et l'apathie. La plus forte connexion avec la procrastination, cependant, est l'impulsivité[3][Comment ?].

Selon le psychologue Walter Mischel de l'université Stanford, qui a mené des expériences dans les années 1960, ce phénomène est principalement dû à un manque d'apprentissage de la maîtrise de soi. Selon lui, et quelques autres universitaires à sa suite, on peut apprendre cela « vite et bien », ce qui est le cas des enfants, lorsque les parents les guident dans cet apprentissage[4],[5].

René Le Senne distingue, en caractérologie, le sous-type actif, qui fait ce qu'il doit faire indépendamment du plaisir qu'il y trouve, du sous-type émotif, qui agit seulement quand il est porté par l'enthousiasme, et sur ce qui lui apporte des satisfactions immédiates. Le groupement « E nA » (émotif-non actif) peut donc donner une apparence trompeuse d'activité pour un domaine donné, tandis que le groupement nE nA sera le plus propice à la procrastination.

Procrastination chez les étudiants

Différentes études tendent à montrer que des étudiants en phase de stress développent la procrastination et ont tendance à avoir une « addiction à l’internet »[6],[7],[8],[9],[10].

Journée mondiale de la procrastination

Le est la « journée mondiale de la procrastination » lancée en 2010 par David d'Équainville, fondateur de la maison d'édition Anabet[11],[12].

En littérature

  • La procrastination est le symptôme de l'oblomovisme, thème principal d'Oblomov, d'Ivan Gontcharov.
  • Un leitmotiv dans le fameux Journal intime d'Henri-Frédéric Amiel : « […] Je ne lis toujours rien, sauf les journaux, et je ne trouve le temps pour rien. Une immense paresse engourdit de plus en plus mon être, et la procrastination du vieux professeur réduit à zéro ma vie utile. Toujours ni but, ni volonté, ni plan, ni énergie, ni espérance ; vie au jour le jour et à vau-l’eau[13]. »
  • L'expression est utilisée par Marcel Proust dans À la recherche du temps perdu : « Les difficultés que ma santé, mon indécision, ma « procrastination », comme disait Saint-Loup, mettaient à réaliser n'importe quoi, m'avaient fait remettre de jour en jour, de mois en mois, d'année en année, l'éclaircissement de certains soupçons comme l'accomplissement de certains désirs[14]. »
  • La version française de l'un des tomes des Annales du Disque-monde de Terry Pratchett s'intitule Procrastination.
  • Élisabeth Canitrot, La Tentation du lendemain (2010).
  • John Perry, La Procrastination : l’art de remettre au lendemain, Paris, Flammarion, 2012 (ISBN 9782746733787).
  • Le premier chapitre de La Conscience de Zeno d'Italo Svevo traite du rapport entre son héros et le tabac. Il est ainsi question de sa résolution reconduite de jour en jour d'arrêter de fumer dès le lendemain et donc de procrastination.

Notes et références

Notes

  1. Voire plus : « Ne jamais remettre au lendemain ce que l'on pourrait faire le surlendemain », disait Mark Twain[1].

Références

  1. Perry (2012), en exergue du livre
  2. (en) John Perry, « How to procrastinate and still get things done », chronicle.com, (lire en ligne).
  3. (en) Steel Piers, The procrastination equation : how to stop putting things off and start getting stuff done, New York, HarperCollins, (ISBN 978-0-06-170361-4, lire en ligne).
  4. Pourquoi remettons-nous souvent les choses au lendemain ?, article du Le Monde, daté du 7 janvier 2011.
  5. Pourquoi remettons-nous souvent les choses au lendemain ?, Hubert Guillaud, publié le 7 décembre 2010 sur InertnetActu.net.
  6. (en) nha Kim, Hyeongi Hong, Jungeun Lee et Myoung-Ho Hyun, « Effects of time perspective and self-control on procrastination and Internet addiction », Journal of Behavioral Addictions, vol. 6, no 2, , p. 229–236 (ISSN 2062-5871, DOI 10.1556/2006.6.2017.017, lire en ligne) (licence CC)
  7. (en) Shuai-lei Lian, Xiao-jun Sun, Zong-kui Zhou, Cui-ying Fan, Geng-feng Niu et Qing-qi Liu, « Social networking site addiction and undergraduate students’ irrational procrastination: The mediating role of social networking site fatigue and the moderating role of effortful control », PLoS ONE, vol. 13, no 12, (DOI 10.1371/journal.pone.0208162) (licence CC)
  8. (en) Mehmet Kandemir, « Predictors of Academic Procrastination: Coping with Stress, Internet Addiction and Academic Motivation », World Applied Sciences Journal, vol. 32, no 5, , p. 930-938 (ISSN 1818-4952)
  9. Kimberly S. Yong et Robert C. Rogers, « The Relationship Between Depression and Internet Addiction », CyberPsychology & Behavior, vol. 1, no 1, (DOI 10.1089/cpb.1998.1.25)
  10. (es) Silvia Castro Bolaños et Karime Mahamud Rodríguez, « Investigaciones Procrastinación académica y adicción a internet en estudiantes universitarios de Lima Metropolitana », Avances en Psicología: Revista de la Facultad de Psicología y Humanidades, vol. 25, no 2, (lire en ligne) (licence CC)
  11. « Journée mondiale de la procrastination : « Ce n'est pas un problème, c'est une solution » », sur 20minutes.fr, .
  12. Nicolas Basse, « Sept astuces pour éviter de tout remettre au lendemain », (consulté le ).
  13. Henri-Frédéric Amiel, Journal intime, t. III, édition L'âge d'homme, 1980, p. 618.
  14. Marcel Proust, Albertine disparue, Gallimard, 1988, p. 93.

Annexes

Bibliographie

Ouvrages

  • Jane B. Burka et Lenora M. Yuen, Pourquoi remettre à plus tard ?, trad. par Brigitte Fréger, Montréal, Le Jour, 1987 (ISBN 2-89044-372-8).
  • Rita Emmett, Ces gens qui remettent tout à demain, trad. par Normand Paiement, Montréal, Éd. de l’Homme, 2001 (ISBN 2-7619-1589-5).
  • Stéphanie Hahusseau, Comment ne pas se gâcher la vie, Paris, Odile Jacob, 2003 (ISBN 2-7381-1276-5).
  • Bruno Koeltz, Comment ne pas tout remettre au lendemain, Paris, Odile Jacob, 2006 (ISBN 2-7381-1710-4).
  • (en) Neil A. Fiore, The now habit : a strategic program for overcoming procrastination and enjoying guilt-free play, éd. revue, New York, Penguin, 2007 (ISBN 978-1-58542-552-5) [la 1re éd. date de 1989].
  • Kathrin Passig et Sascha Lobo, Demain, c'est bien aussi : apprendre à gérer sa vie sans aucune discipline personnelle, trad. par Amélie de Maupeou, Paris, Anabet Éd., 2010 (ISBN 978-2-35266-064-4).
  • Piers Steel, Procrastination : pourquoi remet-on à demain ce qu'on peut faire aujourd'hui ?, trad. par Pascal Loubet, Paris, Éd. Privé, 2010 (ISBN 978-2-35076-102-2).
  • John Perry (trad. de l'anglais par Myriam Dennehy), La Procrastination : l'art de reporter au lendemain, Paris, Autrement, , 136 p. (ISBN 978-2-7467-3341-1).
  • Monique Richter, Aujourd'hui (et non demain), j'arrête de procrastiner ! : plan de bataille pour se réaliser, Paris, Éd. First, 2015 (ISBN 978-2-7540-7254-0).
  • Ludwig Petr, En finir avec la procrastination, Paris, Maxima, 2016 (ISBN 978-2-84001-865-0).
  • Diane Ballonad Rolland, J'arrête de procrastiner ! : 21 jours pour arrêter de tout remettre au lendemain, Paris, Eyrolles, 2016 (ISBN 978-2-212-56279-8).

Articles

Filmographie

  • On verra demain : excursion en Procrasti-Nation (2019), série de films de la chaîne Arte portant sur la procrastination, faisant intervenir une pluralité d’invités dont l’historien Pascal Ory. (Voir en ligne)

Articles connexes

Liens externes

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