Prescription acquisitive

La prescription acquisitive, ou usucapion, est le fait d'acquérir juridiquement un droit réel que l'on exerce sans en posséder de titre, après l'écoulement d'un certain délai, dit de prescription, pendant lequel toute personne peut le contester ou le revendiquer en justice. Ce droit peut être mobilier (par exemple une marque, un objet) ou immobilier (par exemple la propriété d'un immeuble ou d'une servitude continue apparente).

Cette prescription s'oppose à la prescription extinctive qui fait perdre un droit réel ou personnel, du fait de l'inaction prolongée du titulaire du droit (encore appelée prescription libératoire).

Pendant le délai de prescription, la possession doit être à la fois publique, paisible et non équivoque. Sans possession pas d'usucapion, ce qui est exprimé par la locution latine :

« Sine possessione usucapio procedere non potest »

Il est possible d'acquérir par prescription en étant possesseur sans titre, et même de mauvaise foi, mais on ne peut pas prescrire contre son titre quand on en possède un.

La prescription est interrompue par toute action en justice contestant ce droit.

Droit ancien

La prescription acquisitive de trente ans remonte à l'empereur romain Théodose Ier, à la fin du IVe siècle. Elle couvre alors les possessions sans titre ou vicieuses[1].

La Constitution de Clotaire Ier, vers 560, reprend ce principe. Charlemagne le fait appliquer pour protéger des chrétiens qui, ayant fui l'Espagne, avaient défriché des terrains inutilisés. Le droit canonique l'utilise également en précisant que la possession doit avoir été accompagnée de bonne foi pendant toute sa durée ; cette exigence, qui peut fragiliser la possession, n'est toutefois pas appliquée en France[1].

Droit français

En France, il existe deux « types » de prescription acquisitive : la procédure dite normale ou la prescription abrégée. Elle s'acquiert lorsque la possession a atteint trente, ou dix ans selon les cas. De jure, les conditions nécessaires à la prescription trentenaire sont :

  • l'occupant du bien immobilier doit prouver que pendant toute la période il s'est occupé du bien par l'exercice d'actes matériels (le corpus), et qu'il avait l'intention de se comporter en tant que propriétaire (l'animus domini). C'est la possession (pouvoir de fait sur la chose) ;
  • la possession doit être utile, exempte de vices (publique, non équivoque, paisible et continue), et à titre de propriétaire[2].

Alors seulement, après une période de trente années pendant laquelle le propriétaire légal ne s'est pas manifesté (bien que les actes du propriétaire de fait aient été apparents, non clandestins, non équivoques, etc.), l'occupant peut devant le tribunal judiciaire déclarer l'usucapion et ainsi devenir propriétaire du bien.

La prescription abrégée quant à elle s'acquiert après dix ou, anciennement, vingt ans[3] selon la domiciliation du propriétaire légal, et ce uniquement pour les possesseurs a non domino (qui ont acquis le bien d'une personne autre que le propriétaire, souvent un détenteur précaire) de bonne foi (ils ont cru traiter avec le véritable propriétaire).

Droit québécois

En droit québécois, l'article 2910 du Code civil du Québec définit la prescription acquisitive : « La prescription acquisitive est un moyen d'acquérir le droit de propriété ou l'un de ses démembrements, par l'effet de la possession[4]. » Elle requiert une possession, en vertu de l'art, 921 C.c.Q. : « La possession est l'exercice de fait, par soi-même ou par l'intermédiaire d'une autre personne qui détient le bien, d'un droit réel dont on se veut titulaire. » L'article 2917 du Code civil dispose : « Le délai de la prescription acquisitive est de 10 ans, s'il n'est autrement fixé par la loi. »

Notes et références

  1. Raymond Théodore Troplong, Commentaire sur la prescription, Meline, Cans et Compagnie, (lire en ligne).
  2. Art. 2261 du Code civil.
  3. Art. 2265 du Code civil.
  4. « Acquérir et se libérer par l'écoulement du temps – la prescription », sur avocat.qc.ca (consulté le ).

Voir aussi

Articles connexes

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