Présidence de Harry S. Truman

La présidence de Harry S. Truman débuta le , date de l'investiture de Harry S. Truman en tant que 33e président des États-Unis consécutivement au décès de son prédécesseur Franklin Delano Roosevelt, et prit fin le . Membre du Parti démocrate, Truman était vice-président des États-Unis depuis seulement 82 jours lorsqu'il accéda à la fonction suprême. Il se présenta par la suite pour un mandat complet de quatre ans à l'élection présidentielle de 1948 et l'emporta. Bien que n'étant pas concerné par le 22e amendement de la Constitution qui venait d'être ratifié et qui empêchait le président d'effectuer plus de deux mandats, il renonça à se représenter à l'élection présidentielle de 1952 et fut remplacé par le républicain Dwight D. Eisenhower.

Présidence de Harry S. Truman

33e président des États-Unis

Portrait de Harry S. Truman par Greta Kempton (en), 1945, Maison-Blanche.
Type
Type Président des États-Unis
Résidence officielle Maison-Blanche, Washington
Élection
Mode de scrutin Suffrage universel indirect
(Élection 1948)
Élection 1948
Début du mandat
(remplacement président décédé)
Fin du mandat
Durée 7 ans 9 mois et 8 jours
Présidence
Nom Harry S. Truman
Date de naissance
Date de décès
Appartenance politique Parti démocrate

Sous la présidence de Truman, les États-Unis menèrent une politique étrangère engagée sur le plan international, renonçant ainsi à l'isolationnisme. Durant la première année de son mandat, Truman approuva les bombardements atomiques d'Hiroshima et de Nagasaki et reçut peu après la capitulation du Japon, ce qui mit fin à la Seconde Guerre mondiale. Après la fin du conflit, il contribua entre autres à la création de l'Organisation des Nations unies. Cependant, les relations avec l'Union soviétique se détériorèrent à partir de 1945, et l'année 1947 vit un accroissement des tensions géopolitiques entre les deux pays qui marqua le début de la guerre froide. La même année, le président américain promulgua la doctrine Truman qui se donnait pour objectif d'empêcher l'expansion du communisme à travers le monde. En 1948, il persuada le Congrès de voter le plan Marshall, une aide matérielle et financière massive à destination des pays d'Europe de l'Ouest ravagés par la guerre. L'année suivante, il présida également à la naissance de l'OTAN qui rassemblait les pays occidentaux hostiles à l'URSS.

Truman mit en œuvre sur le plan intérieur une politique ambitieuse baptisée le Fair Deal, mais la plupart de ses initiatives furent bloquées par une coalition formée de républicains et de démocrates sudistes conservateurs. Les élections législatives de 1946 donnèrent aux républicains la majorité au Congrès après les nombreuses grèves de l'hiver 1945-1946 ; Truman mit son veto à la loi Taft-Hartley mais le Congrès, dominé par la coalition conservatrice, passa outre. En dépit de ces difficultés, Truman perpétua de nombreux programmes hérités du New Deal et imposa un certain nombre de décisions majeures, comme la loi sur le logement de 1949. Il prit fermement position sur la question des droits civiques en favorisant l'intégration des Noirs au sein de l'armée. Sous son mandat, les États-Unis furent secoués par une « peur rouge » engendrée par la crainte de l'espionnage soviétique. Truman dénonça ceux qui accusaient faussement des citoyens de sympathie pour l'URSS mais limogea dans le même temps des fonctionnaires de gauche qui refusaient de désavouer le communisme.

Lorsque la Corée du Nord d'obédience communiste envahit la Corée du Sud en 1950, Truman envoya des troupes américaines sur place afin d'empêcher l'effondrement de ce dernier pays. Après des succès initiaux, la guerre se transforma néanmoins en impasse, une situation qui perdura jusqu'à la fin de la présidence de Truman. Au moment de quitter ses fonctions, celui-ci battait des records d'impopularité et Eisenhower fit campagne en 1952 sur ce qu'il pensait être les principaux échecs de Truman : « Corée, communisme et corruption ». Truman continua cependant d'être tenu en haute estime par les universitaires et sa réputation au sein de l'opinion publique s'améliora largement dans les années 1960. Il est aujourd'hui considéré par les historiens et les politologues comme l'un des dix plus grands présidents de l'histoire américaine.

Succession

Harry S. Truman prêtant le serment présidentiel à la Maison-Blanche, le 12 avril 1945, en présence des membres du cabinet Roosevelt.

Élu sénateur du Missouri en 1934, Harry S. Truman acquit une notoriété nationale durant la Seconde Guerre mondiale en présidant un comité chargé d'enquêter sur les abus de la production en temps de guerre[1],[2]. Alors que le conflit se poursuivait, le président Franklin D. Roosevelt se présenta pour un quatrième mandat lors de l'élection présidentielle de 1944. Le choix du colistier revêtait une importance particulière : Roosevelt hésitait entre Henry Wallace, son vice-président en fonction, et James F. Byrnes, mais le premier était peu apprécié des démocrates conservateurs tandis que le second était en froid avec les progressistes et bon nombre de catholiques. À la demande des chefs du parti, Roosevelt accepta finalement de désigner Truman qui était une personnalité consensuelle. Ce dernier fut officiellement investi comme candidat à la vice-présidence lors de la convention nationale démocrate de 1944[3].

Le scrutin général se solda par une confortable victoire des démocrates, qui conservèrent tout à la fois la présidence et leur majorité dans les deux chambres du Congrès. Truman fut assermenté en tant que vice-président des États-Unis le 20 janvier 1945. Le 12 avril, en début de soirée, il fut convoqué de toute urgence à la Maison-Blanche où la Première dame Eleanor Roosevelt l'informa de la mort du président. La première inquiétude de Truman fut pour Eleanor : il lui demanda s'il pouvait faire quelque chose pour elle, ce à quoi elle répondit : « est-ce que je peux faire quelque chose pour vous ? Vous êtes celui en difficulté maintenant ! »[4] Truman prêta le serment présidentiel peu de temps après cette entrevue[5]. Le lendemain de sa prise de fonction, il déclara à des journalistes : « les gars, si vous priez, priez pour moi. Je ne sais pas si une botte de foin vous est déjà tombée dessus mais lorsqu'ils m'ont dit ce qui est arrivé hier, j'ai eu l'impression que la Lune, les étoiles et toutes les planètes s'étaient écroulées sur moi »[6].

Composition du gouvernement

Lors de sa prise de fonction, Truman demanda à tous les membres de l'administration Roosevelt de rester en place, mais à la fin de l'année 1946, un seul ministre du précédent gouvernement, le secrétaire à la Marine James Forrestal, était toujours en poste[7]. Fred M. Vinson, qui avait succédé à Henry Morgenthau comme secrétaire du Trésor en juillet 1945, fut nommé à la Cour suprême l'année suivante et fut remplacé par John W. Snyder[8]. Truman se débarrassa assez rapidement du secrétaire d'État Edward Stettinius Jr. au profit de James F. Byrnes, qui était surnommé le « président adjoint » du temps de Roosevelt[9] ; Byrnes se discrédita toutefois aux yeux de Truman en raison de son attitude conciliatrice à l'égard de l'URSS dans les derniers mois de l'année 1945[10]. Son successeur, à partir de janvier 1947, fut le général George Marshall, qui s'affirma, aux côtés du sous-secrétaire d'État Dean Acheson et d'un groupe de conseillers baptisés The Wise Men (« les hommes sages »), comme l'un des principaux architectes de la politique étrangère d'après-guerre[11].

Forrestal fut le premier secrétaire à la Défense à la création de ce département en 1947, avec autorité sur toutes les branches des forces armées des États-Unis[12]. Il fut toutefois contraint de démissionner en 1949 pour raisons de santé et fut remplacé successivement par Louis A. Johnson, Marshall et enfin Robert A. Lovett[13]. La même année, Acheson succéda à Marshall au poste de secrétaire d'État et ce jusqu'à la fin de la présidence de Truman. Ce dernier avait pris soin de nommer au sein de son cabinet un certain nombre de ses amis proches, dont les capacités se révélèrent parfois très inférieures à leur tâche ; parmi ces individus figuraient Vinson, Synder et l'aide de camp Harry H. Vaughan[7],[14]. En dehors du cabinet, Clark Clifford et John R. Steelman furent aussi des conseillers particulièrement influents[15].

Truman n'eut pas de vice-président au cours de son premier mandat (3 ans et 253 jours), car aucune disposition dans la loi ne permettait alors de combler une vacance de la vice-présidence. Dans ce contexte, l'individu le plus haut placé dans la ligne de succession présidentielle était le secrétaire d'État. Le protocole fut toutefois modifié avec l'adoption, en juillet 1947, du Presidential Succession Act qui donnait la préséance au speaker de la Chambre des représentants. À différents moments du premier mandat de Truman, les secrétaires d'État Stettinius, Byrnes et Marshall puis les speakers Joseph Martin et Sam Rayburn furent les mieux placés pour succéder à Truman en cas de démission de celui-ci. Lors de l'élection présidentielle de 1948, Truman choisit pour colistier le sénateur du Kentucky Alben W. Barkley. Ce dernier servit en qualité de vice-président pendant toute la durée du second mandat de Truman et fut convié par le président aux réunions du cabinet[16].

Le cabinet Truman en février 1949. De gauche à droite, dans le sens des aiguilles d'une montre : le secrétaire à l'Intérieur Julius Krug, le secrétaire au Commerce Charles W. Sawyer, le vice-président Alben Barkley, le secrétaire au Travail Maurice J. Tobin, le secrétaire à l'Agriculture Charles F. Brannan, le ministre des Postes Jesse M. Donaldson, le secrétaire à la Défense James Forrestal, le secrétaire d'État Dean Acheson, le président Truman, le secrétaire au Trésor John W. Snyder et le procureur général Tom Clark.
Cabinet Truman
FonctionNomDates
PrésidentHarry S. Truman1945-1953
Vice-présidentAucun1945-1949
Alben W. Barkley1949-1953
Secrétaire d'ÉtatEdward R. Stettinius Jr.1945
James F. Byrnes1945-1947
George Marshall1947-1949
Dean Acheson1949-1953
Secrétaire du TrésorHenry Morgenthau1945
Fred M. Vinson1945-1946
John W. Snyder1946-1953
Secrétaire à la GuerreHenry L. Stimson1945
Robert P. Patterson1945-1947
Kenneth Claiborne Royall1947
Secrétaire à la DéfenseJames Forrestal1947-1949
Louis A. Johnson1949-1950
George Marshall1950-1951
Robert A. Lovett1951-1953
Procureur généralFrancis Biddle1945
Tom Clark1945-1949
James Howard McGrath1949-1952
James McGranery1952-1953
Postmaster GeneralFrank C. Walker1945
Robert E. Hannegan1945-1947
Jesse M. Donaldson1947-1953
Secrétaire à la MarineJames Forrestal1945-1947
Secrétaire à l'IntérieurHarold L. Ickes1945-1946
Julius A. Krug1946-1949
Oscar L. Chapman1949-1953
Secrétaire à l'AgricultureClaude R. Wickard1945
Clinton P. Anderson1945-1948
Charles F. Brannan1948-1953
Secrétaire du CommerceHenry Wallace1945-1946
William Averell Harriman1946-1948
Charles W. Sawyer1948-1953
Secrétaire au TravailFrances Perkins1945
Lewis B. Schwellenbach1945-1948
Maurice J. Tobin1948-1953

Nominations judiciaires

Truman nomma quatre juges à la Cour suprême des États-Unis. Après le départ à la retraite d'Owen Roberts en 1945, le président choisit pour le remplacer le sénateur républicain de l'Ohio, Harold Hitz Burton. Roberts était le dernier juge de la Cour à ne pas avoir été nommé par Roosevelt ou à ne pas avoir été choisi par lui pour le poste de juge en chef ; aussi Truman considérait-il important de proposer un républicain pour prendre la suite de Roberts. À la mort du juge en chef Harlan F. Stone en avril 1946, il jeta son dévolu sur le secrétaire du Trésor Fred M. Vinson pour succéder à Stone. Deux nouvelles vacances se produisirent en 1949 avec les morts de William Francis Murphy et de Wiley B. Rutledge : Truman proposa alors les noms du procureur général Tom Clark et du juge d'appel fédéral Sherman Minton qui furent approuvés par le Congrès. Vinson servit pendant sept ans avant de mourir à son tour en 1953 tandis que Minton démissionna en 1956 ; Burton siégea à la Cour jusqu'en 1958 et vota souvent avec le bloc conservateur mené par Felix Frankfurter ; quant à Clark, qui ne quitta ses fonctions qu'en 1967, ses votes tantôt alignés sur les positions des conservateurs tantôt favorables aux idées progressistes jouèrent un rôle important dans les arrêts rendus par la Cour[17]. Truman nomma par ailleurs 27 juges aux cours d'appel fédérales et 101 juges aux cours fédérales de district.

Fin de la Seconde Guerre mondiale

En avril 1945, les puissances alliées, menées par les États-Unis, le Royaume-Uni et l'Union soviétique, étaient sur le point de battre militairement l'Allemagne, mais la situation était loin d'être aussi nette dans le Pacifique où le Japon demeurait un adversaire redoutable[18]. En tant que vice-président, Truman avait été tenu dans l'ignorance de certaines initiatives liées à la guerre comme le projet Manhattan, destiné à produire la première bombe nucléaire[19],[20]. Même s'il avait été rapidement informé dans l'après-midi du 12 avril que les Alliés disposaient d'une nouvelle arme extrêmement puissante, le secrétaire à la Guerre Stimson ne lui exposa les détails que le 25 avril[21]. L'Allemagne capitula le 8 mai 1945 ce qui mit fin à la guerre en Europe. L'attention de Truman se tourna alors vers le Pacifique où il espérait en finir au plus vite avec le Japon[18].

Alors que la fin des hostilités s'approchait à grand pas, Truman se rendit en Europe pour la conférence de Potsdam afin de s'y entretenir avec le dirigeant soviétique Joseph Staline et le Premier ministre britannique Winston Churchill. Plusieurs décisions importantes furent prises à l'issue de cette rencontre, en particulier la division de l'Allemagne en quatre zones d'occupation, le recul de la frontière allemande jusqu'à la ligne Oder-Neisse, la reconnaissance du nouveau gouvernement polonais soutenu par les Soviétiques et la partition du Viêt Nam à hauteur du 16e parallèle[22]. L'URSS accepta en outre de déclencher une offensive contre la province japonaise de Mandchourie[23]. Alors qu'il se trouvait à Potsdam, Truman apprit que l'essai Trinity de la première arme nucléaire le 16 juillet avait été couronné de succès. Il indiqua à Staline que les États-Unis étaient sur le point d'utiliser un nouveau type d'arme contre les Japonais. Même si c'était la première fois que les Soviétiques étaient officiellement informés de l'existence de la bombe atomique, Staline était déjà au courant du projet Manhattan grâce à l'espionnage avant même que Truman ne le soit[24].

Bibliographie

  • (en) Robert Dallek, Harry S. Truman, New York, Times Books, (ISBN 978-0-8050-6938-9).
  • (en) Alonzo L. Hamby, Man of the People: A Life of Harry S. Truman, Oxford University Press, (ISBN 978-0-19-504546-8).
  • (en) George C. Herring, From Colony to Superpower: U.S. Foreign Relations Since 1776, New York (N. Y.), Oxford University Press, , 1035 p. (ISBN 978-0-19-507822-0).
  • (en) Donald R. McCoy, The Presidency of Harry S. Truman, University Press of Kansas, (ISBN 978-0-7006-0252-0).
  • (en) David McCullough, Truman, Simon & Schuster, (ISBN 978-0-671-86920-5).

Notes et références

  1. (en) Michael James Lacey, The Truman Presidency, Cambridge University Press, (ISBN 9780521407731), p. 35-36.
  2. Dallek 2008, p. 12-14.
  3. McCoy 1984, p. 8-9.
  4. McCullough 1992, p. 425.
  5. McCoy 1984, p. 1-2.
  6. McCullough 1992, p. 436.
  7. McCullough 1992, p. 366.
  8. McCoy 1984, p. 63-64.
  9. Herring 2008, p. 599-600.
  10. Herring 2008, p. 602-603.
  11. Herring 2008, p. 612-613.
  12. Herring 2008, p. 613-614.
  13. McCoy 1984, p. 148-149.
  14. Hamby 1995, p. 301-302 ; 472.
  15. McCoy 1984, p. 146.
  16. (en) Polly Ann Davis, « Alben W. Barkley: Vice President », The Register of the Kentucky Historical Society, vol. 76, no 2, , p. 112–132 (JSTOR 23378959).
  17. (en) Henry Julian Abraham, Justices, Presidents, and Senators : A History of the U.S. Supreme Court Appointments from Washington to Bush II, Rowman & Littlefield, , 439 p. (ISBN 978-0-7425-5895-3, lire en ligne), p. 182-187.
  18. McCoy 1984, p. 21-22.
  19. (en) Barton J. Bernstein, « Roosevelt, Truman, and the Atomic Bomb, 1941–1945: A Reinterpretation », Political Science Quarterly, vol. 90, no 1, , p. 23–69.
  20. (en) Philip Padgett, Advocating Overlord: The D-Day Strategy and the Atomic Bomb, University of Nebraska Press, (ISBN 9781640120488), cxv.
  21. Dallek 2008, p. 19-20.
  22. (en) Robert Cecil, « Potsdam and its Legends », International Affairs, vol. 46, no 3, , p. 455–465.
  23. McCoy 1984, p. 23-24.
  24. (en) John Lewis Gaddis, « Intelligence, Espionage, and Cold War Origins », Diplomatic History, vol. 13, no 2, , p. 191–212.
  • Portail de la politique aux États-Unis
  • Portail de l’histoire
  • Portail du monde contemporain
  • Portail des années 1950
Cet article est issu de Wikipedia. Le texte est sous licence Creative Commons - Attribution - Partage dans les Mêmes. Des conditions supplémentaires peuvent s'appliquer aux fichiers multimédias.