Patrimoine naturel

La notion de patrimoine naturel associe principalement deux notions :

  1. la notion de « patrimonialité » qui évoque une notion de valeur intrinsèque et un besoin de conservation[3], puits de carbone, etc.) ;
  2. la notion de « nature » en tant qu'élément du paysage, également marqué par l'homme et donc aussi élément du patrimoine historique et culturel.

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L’entrée dans l’arche de Noé, enluminure de Jacquemart de Hesdin du XVe siècle : une première allégorie de la conservation d’un « patrimoine naturel » ? L'enlumineur représente les animaux vertébrés supérieurs (avec le lion en roi des animaux) mais les invertébrés sont complètement absents de cette iconographie et ne sont donc pas considérés comme des espèces patrimoniales[1]. Cette échelle des êtres, marquée par sa dimension téléologique et anthropocentrique, n'a pas totalement disparu aujourd'hui. Beaucoup d'espèces porte-drapeau sont des mammifères qui génèrent plus de sympathie que les invertébrés[2].

Dans l'acception générale, le patrimoine naturel, est comme le patrimoine culturel et architectural, un bien commun, mais encore relativement épargné par l'empreinte de l'Homme, à gérer en conséquence et à léguer aux générations futures. Mais au lieu d'avoir été construit par l'Homme il résulte de l'évolution et parfois des interactions entre l'homme et la nature. Ce patrimoine est aussi une somme de ressources naturelles (avec l'idée que le tout est plus que la somme des parties) pour des "titulaires" qui sont l'ensemble des espèces vivantes, dont l'humanité fait partie, et pour les générations futures. À la différence du patrimoine géologique, historique, architectural, etc., mais comme une partie du patrimoine culturel, il comprend aussi ce qui auto-entretien ces ressources, la biodiversité et ses capacités intrinsèques d'auto-entretien et d'évolution adaptative en l'occurrence).

Une composante du patrimoine naturel (l'information portée par le génome par exemple, ou les services écosystémiques qu'il génère peut être considéré comme patrimoine immatériel. Elle est souvent intégrée dans le bien commun, mais fait aussi l'objet d'appropriation et privatisation (Voir : Marchandisation du vivant).

Histoire et évolution de la notion de patrimoine naturel

« Nous n’héritons pas de la terre de nos parents, nous l’empruntons à nos enfants »

 Lieu commun de la doxa écologiste, cette phrase est tantôt attribuée tantôt au chef amérindien Seattle, tantôt à Saint-Exupéry[4].

Elle s'est notamment formalisée autour d'une volonté de conserver les grands paysages et espaces nord américains et leur caractère sauvage (« wilderness ») au XIXe puis au XXe siècle, mais la notion s'est étendue, incluant par exemple un patrimoine écopaysager, informationnel et adaptatif contenu dans le patrimoine génétique. Certains le considèrent même comme un capital à valoriser, dont les intérêts pourraient être exploités dans le futur.

Le patrimoine naturel est un des éléments de plus en plus pris en compte pour le classement sur la liste du patrimoine mondial de l'Unesco. On cherche à produire des indices synthétiques et universels[5] permettant l'évaluation environnementale et la comparaison, en tenant compte du contexte biogéographique et de l'écopotentialité du milieu évalué.

En Amérique du Nord

C'est dans cette région du monde, autour du concept de naturalité (wilderness), que les grands parcs nationaux et d'autres types d'aires protégées se sont développés, dès le XIXe siècle. De nombreux organismes, Agences, ONGE et publications, dont le George Wright FORUM (journal de l'association George Wright Society, dont les publications, depuis 1981, sont exclusivement dédiées aux questions touchant les parcs, aires protégées et sites patrimoniaux culturels) existent. Il existe en Amérique du Nord une abondante littérature scientifique et non scientifique relative au patrimoine naturel.

En France

Définition de patrimoine naturel

Le patrimoine naturel est pour le système français de comptabilité « l’ensemble des biens dont l’existence, la production et la reproduction sont le résultat de l’activité de la nature, même si les objets qui le composent subissent des modifications du fait de l’Homme[6] » (INSEE, 1986).
Il est maintenant approché dans les Comptes de la nation et exploré, cartographié et évalué via l'INPN (Inventaire national du patrimoine naturel) sous l'égide du Muséum national d'histoire naturelle (MNHN). Des parcs naturels (Parc du Mercantour (France) et Parc delle Alpi Marittime en Italie) ont officiellement démarré l’Inventaire biologique généralisé sous l'égide de l' European Distributed Institute of Taxonomy (EDIT).

Sauf exception, les composantes environnementales externes à la nature, telles que l’environnement urbain (bruit, urbanisme), ou industriel (déchets, pollution de l’air) ne sont donc pas intégrées dans le patrimoine naturel, même s'ils le modifient fortement et ont parfois aussi une composante patrimoniale (friches industrielles par exemple). Face à la régression d'une part importante de la biodiversité extraordinaire et ordinaire, mais aussi au problème des espèces invasives, les notions de nature banale et de biodiversité ordinaire tendent néanmoins à prendre de l'importance, dans les zones urbaines notamment.

La notion de patrimoine naturel apparaît en France dans la loi du vouée à la protection des « sites et monuments naturels de caractère artistique ». Elle concerne les ensembles naturels (cascades, grottes, rochers, etc.) qui ont été désignés comme pittoresques par la peinture, les guides touristiques et la photographie. La loi du 2 mai 1930 relative « aux monuments naturels et aux sites de caractère artistique, historique, scientifique, légendaire ou pittoresque » remplace celle de 1906 en enrichissant la liste des caractères justifiant la protection d'un site[7].

Depuis peu (avec les lois Grenelle I et Grenelle II dans le droit de l'environnement national, la question de l'environnement nocturne, dégradé par la pollution et diverses nuisances associées est aussi prise en compte.

Notion d'intérêt patrimonial

Des habitats naturels et des espèces dits d'intérêt patrimonial sont listées par pays et par régions ou par sites (Parcs, réserves, etc.) dans le cadre des inventaires naturalistes, certaines pouvant aussi être des espèces-clé, plus ou moins menacées. Ces données sont en France notamment utilisées pour établir ou mettre à jour les inventaires ZNIEFF, ZICO, la Stratégie de création d'aires protégées (SCAP) ou encore pour cartographier et mettre en œuvre la trame verte et bleue nationale.

Patrimoine géologique

Un sous-ensemble particulier du patrimoine naturel est le patrimoine géologique, qui inclut la richesse en fossiles d'un site, et peut justifier dans de nombreux pays (dont en France) la création d'une réserve naturelle.

Inventaire du patrimoine naturel

La loi du [8] relative à la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages institue un inventaire du patrimoine naturel ; elle précise le champ concerné par l'inventaire.

Art. L. 411-1 A.-I. L'inventaire du patrimoine naturel est institué pour l'ensemble du territoire national terrestre, fluvial et marin. On entend par inventaire du patrimoine naturel, l'inventaire des richesses écologiques, faunistiques, floristiques, géologiques, pédologiques, minéralogiques et paléontologiques.

L'État assure la conception, l'animation et l'évaluation de l'inventaire. Il est réalisé sous la responsabilité scientifique du Muséum national d'histoire naturelle qui en assure la validation et participe à la diffusion.

À l'échelon régional il est créé un "conseil scientifique régional du patrimoine naturel". Il est composé de spécialistes désignés pour leur compétence scientifique (universitaires, chercheurs, sociétés savantes, muséums régionaux.. Il couvre toutes les disciplines des sciences de la vie et de la terre pour les milieux terrestres, fluviaux et marins.

Notes et références

  1. Laurent Godet, « L’évaluation des besoins de conservation d’un patrimoine naturel littoral marin. L’exemple des estrans meubles de l’archipel de Chausey », MNHN PARIS, 2008, p. 20
  2. Laurent Godet, op. cit., p. 21
  3. voire le.do;jsessionid=C64B440DEE7B58245CBF3E73B01CC7F5.tpdjo14v_3?idArticle=LEGIARTI000022495736&cidTexte=LEGITEXT000006074220&dateTexte=20140327 Article L411-5] (modifié par la loi no 2010-788 du 12 juillet 2010 - art. 124)
  4. Jean-Michel Le Bot, « Contribution à l’histoire d’un lieu commun : l’attribution à Chateaubriand de la phrase "les forêts précèdent les peuples, les déserts les suivent" : Un exemple d’utilisation du logiciel Google Books Ngram Viewer », 2011, p. 1/11
  5. Chevalier, R. (2009). Essai de mise au point d’indices synthétiques et universels de valeur patrimoniale et de banalisation de la flore. Exemples d'application dans le département du Loiret (2009) Nogent sur Vernisson, CEMAGREF.
  6. Sylvie Guichard-Anguis et Stéphane Heritier, Le patrimoine naturel : Entre culture et ressource, L’Harmattan, coll. « Géographie et cultures » (no 66), , 149 p. (ISBN 978-2-296-08066-9, ISSN 1165-0354, lire en ligne), p. 15
  7. Patrimoine et paysages culturels, Éditions Confluences, , p. 74.
  8. « 2gifrance, loi du 8 août 2016 »

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

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