Pérégrinos Protée

Pérégrinos Protée (grec moderne : Περεγρῖνος Πρωτεύς; c. 95 – 165) est un philosophe grec cynique, de Parion en Mysie. Après avoir quitté sa maison à un jeune âge, il vécut d'abord avec les chrétiens en Palestine, avant d'être finalement expulsé de cette communauté et d'adopter le style de vie d'un philosophe cynique et finalement de s'installer en Grèce. Il se suicida en faisant sa propre oraison funèbre et en s'incinérant lui-même sur un bûcher funéraire aux Jeux olympiques de 165 ap. J.-C. En 180, une statue de Pérégrinos fut dressée dans sa ville natale, Parion. Cette statue est présumée avoir des pouvoirs d'oracle[1].

Biographie d’après Lucien de Samosate

Le seul récit détaillé de la vie de Pérégrinos fut donné par Lucien de Samosate, dans sa satire La mort de Pérégrinos (latin : De Morte Peregrini)[2].

Pérégrinos est né à Parion, en 95. Jeune, il fut suspecté de parricide, et fut obligé de quitter sa maison natale[3].. Pendant son errance, il atteignit la Palestine, il se rapprocha de la communauté chrétienne, et atteignit rapidement une position d'autorité[4]. Il fut victime d'une peine de prison aux mains des autorités romaines, durant laquelle les Chrétiens l'aidèrent beaucoup[5]. Il aurait attendu d'être martyrisé, mais le Gouverneur de Syrie le relâcha[6]. Il semble être devenu un Cynique à ce moment, parce qu'il retourna chez lui et renonça à son héritage, et fit don de tout son argent au peuple de sa ville[7]. Il reprit sa vie d'errance, en conservant au début de proches relations avec les Chrétiens, mais finalement il les offensa d'une certaine manière et fut expulsé de la communauté chrétienne[8]. Il alla en Égypte pour étudier avec le célèbre Cynique Agathobule, où il apprit le dur ascétisme de la secte[9]. Il fit son chemin à Rome, où il commença une campagne de maltraitance contre les autorités romaines, et particulièrement l'empereur Antonin le Pieux[10]. Il gagna des disciples parmi le peuple, et il se pourrait qu'à ce moment Théagène de Patras soit devenu son chef des disciples. Même s'il fut toléré au début, il fut finalement expulsé par le préfet de Rome[10]. Il alla ensuite à Élis en Grèce, où il continua sa prédication anti-Romain[11]. Aux Jeux olympiques - soit de 153 soit de 157 - Pérégrinos malmena le fortuné Hérode Atticus, à la suite de quoi la foule furieuse aurait attaqué Pérégrinos, qui fut obligé de se réfugier au Temple de Zeus[12] À Athènes, Pérégrinos se consacra à l'étude et à l'enseignement de la philosophie, et obtint un nombre considérable d'élèves, parmi lesquels se trouvait Aulu-Gelle[13]. Aux Jeux olympiques de 161, il annonça qu'il allait publiquement se brûler jusqu'à la mort aux prochains Jeux olympiques[14] :

« Il dit qu'il voulait ajouter un embout d'or sur une vie dorée ; celui qui avait vécu comme Héraclès devait mourir comme Héraclès et se mêler à l'éther. Et je souhaite, dit-il, rendre service à l'humanité en leur montrant la manière avec laquelle chacun devrait ne pas se soucier de la mort ; ce pourquoi tout homme doit être mon Philoctète[15] »

Il tint sa promesse : la dernière nuit des Jeux olympiques de 165, il s'immola sur un bûcher funéraire situé à 20 stades (3,7 km) à l'est d'Olympie[16]. Lucien de Samosate, qui était présent, fut témoin de l'évènement, après avoir entendu Théagénès, le plus fervent disciple de Pérégrinos, louer les intentions de son maître. Il est difficile de reconstituer les propres motivations de Pérégrinos à propos des évènements de sa vie, car Lucien, pour des raisons générales ou personnelles, présente une opinion hostile de Pérégrinos. Selon Lucien de Samosate, Pérégrinos étrangla son père à mort; devint chrétien pour s'enrichir ; fut emprisonné pour gagner en notoriété; fit don de son héritage pour qu'il puisse gagner la faveur du peuple de sa ville natale ; fut disciple d'Agathobule pour devenir plus obscène ; attaqua les Romains pour devenir célèbre; et se tua lui-même pour devenir tristement célèbre.

Récit d'Aulu-Gelle

Aulu-Gelle rapporte une brève, mais différente, opinion de Pérégrinos. Il décrit Pérégrinos comme « un homme de dignité et de courage », et Aulu-Gelle lui rendait régulièrement visite dans son abri en dehors d'Athènes où il écoutait des choses qui étaient « utiles et nobles » :

« Il disait qu'un homme sage ne commettrait pas un péché, même s'il savait que ni les dieux ni les hommes ne pourraient en avoir connaissance; car il pensait que l'on devait s'abstenir du péché, non par crainte d'une punition ou d'un déshonneur, mais par amour de la justice et de l’honnêteté et par sens du devoir »

[13]

Bibliographie

  • Émile Chambry, Émeline Marquis, Alain Billault et Dominique Goust (trad. du grec ancien par Émile Chambry), Lucien de Samosate : Œuvres complètes, Paris, Éditions Robert Laffont, coll. « Bouquins », , 1248 p. (ISBN 978-2-221-10902-1), « Sur la mort de Pérégrinos », pp. 794-806. 

Références

  1. Athénagoras d'Athènes, Presbeia peri Christianon, 26.
  2. Lucien de Samosate, p. 794 (15)
  3. Lucien de Samosate, p. 798 (10)
  4. Lucien de Samosate, p. 798 (11)
  5. Lucien de Samosate, p. 798-799 (12, 13)
  6. Lucien de Samosate, p. 799 (14)
  7. Lucien de Samosate, p. 800 (15)
  8. Lucien de Samosate, p. 800 (16)
  9. Lucien de Samosate, p. 800 (17)
  10. Lucien de Samosate, p. 801 (18)
  11. Lucien de Samosate, p. 801 (19)
  12. Lucien de Samosate, p. 801-802 (19, 20)
  13. Aulu-Gelle, Nuits attiques [détail des éditions] (lire en ligne), Livre XII (11).
  14. Lucien de Samosate, p. 801-802 (20)
  15. Lucien de Samosate, p. 806 (33)
  16. Lucien de Samosate, p. 806-807 (35 et 36)
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